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Au cours des deux dernières décennies, la hausse des cours pétroliers et les
angoisses environnementales ont poussé la plupart des Etats du globe à
s’intéresser aux formes alternatives d’énergie. Motivé par ces facteurs, et par
d’autres enjeux comme la fourniture et l’accès à l’énergie et le développement
d’autres filières énergétiques alternatives, le gouvernement du Cameroun
inscrivait en 2001, le redressement du secteur énergétique dans son agenda.
Le développement des filières de biocarburants comme substitut aux
carburants fossiles comptait parmi les enjeux traités.
Malgré ces bravades, la production totale du Cameroun reste encore à un
niveau insignifiant. La stratégie énonce que, le gouvernement camerounais
privilégiera la production de biocarburants à partir de sources agricoles
notamment dans le cadre du projet « palmier à huile
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» plutôt qu’à partir de
sources cellulosiques.
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Aujourd’hui, dans le cadre de la production des biocarburants, les besoins en huile de palme de
l’Europe se sont élevés d’autant plus que celle-ci est déjà utilisée pour l’alimentation et les produits
cosmétiques. Ainsi, depuis un certain nombre d’années, les forêts primaires tropicales sont remplacées
par des palmeraies. Souvent brûlées, les forêts subissent un rythme de déforestation élevé alourdissant
ainsi la facture climatique.
Sur le plan écologique, l’écosystème se dégrade (symbole de ce drame, la menace sur plusieurs espèces
de singes, les orang-outants, les gibbons, qui voient leurs territoires disparaître). Ce sont aussi des
milieux vivants uniques, riches et irremplaçables qui disparaissent. Sur le plan économique et social,
l’exploitation très rentable des palmiers à huile attire les agro-investisseurs qui par spoliation des terres
des paysans locaux, s’approprient les territoires et remplacent la forêt primaire nourricière par des
monocultures de palmiers à huile. Par spoliation, cela traduit en fait que les habitants traditionnels n’ont
souvent pas de titre de propriété, ils ont toujours vécu là et, se font chasser de leur lieu de vie, sans que
leur Etat ne les défende d’aucune façon. De graves conflits fonciers opposent exploitants et populations
locales, auxquelles des terres sont confisquées sans compensation. Les pays concernés par cette
déforestation massive sont nombreux : Honduras, Colombie, Malaisie, Nigéria, Indonésie, Cameroun,
République Démocratique du Congo.
Cette conversion se poursuit, avec l’assentiment d’acteurs influents. Le Cameroun a lancé depuis 2001,
un projet de palmiers à huile avec l’aide active de la France, du FMI et de la Banque Mondiale (1% de
forêt est perdu chaque année). En Colombie, les déplacements de populations ont généré des problèmes
similaires. L’Indonésie a déjà perdu 72% de ses forêts. En république Démocratique du Congo, pays qui
contient 63% des forêts d’Afrique Centrale, la société chinoise de télécommunication ZTE international
développe un projet de production et d’exploitation de l’huile de palme (30% des forêts de ce pays soit 15
millions d’hectares sont légalement sous contrat avec des compagnies forestières. Au Cameroun, les
palmeraies du groupe français Bolloré s’étendent pour combler le déficit d’huile de palme, mais aussi
pour produire des biocarburants. Localement, le développement des plantations à huile de palme suscite
aussi des oppositions. A MBAMBOU, les riverains ont protesté, il y a quelques mois, contre l’occupation
de 7.500 hectares de terres que l’Etat a rétrocédées à la SOCAPALM pour étendre ses palmeraies. Ils
estiment que ces terres leur appartiennent et qu’ils ont donc le droit de les cultiver.
Mais, faute de disposer de titres fonciers en bonne et due forme, leurs revendications n’aboutissent pas.
Les autorités administratives de la localité leur ont signifié qu’ils n’avaient aucun droit à faire valoir sur ces
terres, mais que la société leur réservera des espaces pour les cultures vivrières.