Mathématiques et Enigma pendant la Seconde Guerre mondiale

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Grand oral Mathématiques : En quoi les mathématiques ont-elles été au cœur des enjeux de la
seconde guerre mondiale ?
INTRODUCTION :
La Seconde Guerre Mondiale a été le conflit le plus couteux en vies humaines avec près de 65 millions de morts.
Elle s’est notamment démarquée des autres guerres par une utilisation toute nouvelle des mathématiques. Celles-ci ont
joué un rôle contradictoire en allongeant la guerre à cause de machines de communication indéchiffrables et en l’écourtant
grâce à des prouesses mathématiques. Un des principaux enjeux dans la guerre est la communication entre des militaires
dispersés sur les territoires qui doivent pouvoir échanger pour pouvoir agir stratégiquement. Tout cela doit cependant se
faire sans que l’ennemi ne soit capable de comprendre les transmissions. Les mathématiques sont alors intervenues dans
la sphère militaire en permettant de coder des messages uniquement déchiffrables par des personnes connaissant le code
de déchiffrement. C’est ainsi que la machine Enigma fut inventée afin de coder et de décoder des messages grâce à un
système extrêmement complexe.
Nous allons ainsi nous poser la question suivante : En quoi les mathématiques ont-elles été au cœur des enjeux de
la seconde guerre mondiale ? Nous étudierons tout d’abord l’invention et le développement d’Enigma, puis nous
comprendrons comment une machine a réalisé l’exploit de déchiffrer ce système.
I) L’invention et le développement d’Enigma
a) Enigma : une machine née pour coder l’invincible
C’est en 1918, que deux ingénieurs allemands, Arthur Scherbius et Richard Ritter ont inventé une machine
électromagnétique de chiffrement appelée Enigma. Principalement utilisée par les forces armées allemandes durant la
Seconde Guerre Mondiale, elle avait pour objectif de chiffrer des messages codés par la machine puis décodés par cette
dernière selon un code bien précis. La stratégie allemande du Blitzkrieg permit le déploiement d’environ 200 000 modèles
dans l’ensemble de l’arméé, créant ainsi un immense réseau de communication incompréhensible par l’ennemi. Ce réseau
d’échanges donnait donc un immense avantage aux allemands qui étaient alors capables de se coordonner dans cette
guerre.
La machine Enigma se présentait donc concrètement sous la forme d’une caisse en bois d’une douzaine de kilos,
composée d’un clavier alphabétique, d’un tableau de connexions (câbles reliant des lettres), de 3 rotors à 26 positions (des
roulettes) et de 26 ampoules correspondantes aux 26 lettres de l’alphabet. Son fonctionnement reposait sur un principe de
substitution polyalphabétique, qui est la capacité de chiffrer une me lettre en plusieurs lettres différentes à chaque
cryptage.
Lors du chiffrement ou du décodage, lorsqu’une lettre était pressée sur le clavier, un circuit électrique se
déclenchait et permettait l’apparition d’une autre lettre. Au sein de ce circuit électrique, 3 rotors se mettaient en marche.
Par exemple, si la lettre A était enfoncée, elle ressortait en R après le passage dans le premier rotor, en U après le deuxième
et en K après le troisième selon la configuration. C’est donc la lettre K qui aboutissait. Cependant, il serait bien trop facile
pour que cet ordre soit le même. Les rotors avaient donc 26 positions possibles pour les 26 lettres de l’alphabet et à chaque
fois que le A était enfoncé, le rotor le plus à droite tournait d’un cran, changeant à chaque fois la configuration électrique du
circuit. Et à chaque tour complet du rotor de droite, le rotor du milieu va tourner dun cran. De même par la suite pour rotor
de gauche, une fois que celui du milieu a fait un tour. Donc si l’on tape 25 fois une même lettre, on obtiendra 25 lettres
différentes.
En plus de ces rotors, le tableau de connexions permettait un chiffrement monoalphabétique. Une lettre du tableau
était donc reliée à une autre par un câble qui interchangeait ces lettres, si on tape A, la machine considérera que on a tapé
T à la place et si on tape T, elle considérera qu’on a tapé A. Ce simple ajout décuplait le nombre de combinaisons possibles,
ce qui rendait le décryptage extrêmement difficile.
b) Une complexité mathématique hors normes
Ce chiffrement, aussi impressionnant que mystérieux, peut en réalité être quantifié mathématiquement, ce qui permet de
mieux comprendre sa complexité.
1) D’abord, le choix des rotors :
Enigma était livrée avec 5 rotors, mais seulement 3 étaient utilisés à la fois. Puisque l’ordre des rotors a une
importance, on parle d’un arrangement de 3 éléments parmi 5. Il y a donc 60 choix possibles pour les rotors.
𝐴5
3 = 5 x 4 x 3 = 60
2) Ensuite, une fois les 3 rotors choisis et placés, il fallait encore régler leur position initiale.
Chacun des 3 rotors pouvait être placé sur l’une des 26 positions de l’alphabet, ce qui donne :
26 × 26 × 26 = 263 = 17 576 positions de départ possibles, ce qui rendait le déchiffrement encore plus complexe.
3) Puis pour le tableau de connexions, 10 câbles relient 20 lettres en couple parmi les 26 lettres de l’alphabet, ainsi
20 lettres sont permutées et 6 d'entre elles restent inchangées. Le nombre de combinaisons s'écrit donc
Dans le détail, les combinaisons totales de connexions donnent des
possibilités de 26!, auquel on retranche : 6 lettres non-connectés soit 6! + l'ordre des paires qui est interchangeable
donc 10! et le fait que les paires de lettres marchent dans les deux sens soit 210
De plus, chaque jour les Allemands établissaient un nouveau "réglage" d’Enigma, comprenant : le choix et l’ordre des rotors,
leur position de départ, et la configuration des connexions. Ces trois éléments ensemble forment le code de déchiffrement,
que seuls les opérateurs autorisés connaissaient grâce à une feuille de réglages distribuée chaque matin.
4) Le nombre total de combinaisons, soit le produit des combinaisons des choix des rotors, de leurs positions de
départ et du tableau de connexion, est donc
Vu que, chaque jour à 00h les Allemands modifiaient la machine, les alliés navaient que 24h pour décoder un message
selon une configuration. Cette machine était alors considérée comme inviolable, cependant un homme en particulier a
réussi à dépasser les chiffres et a réalisé l’exploit de déchiffrer la machine inviolable.
II) comment une machine a réalisé l’exploit de déchiffrer ce système inviolable
a) Turing et les failles d’Enigma
Les alliés conscients de la puissance de cryptage de la machine Enigma ont alors décidé de monter une équipe
composée des plus grands cerveaux de l’époque. En tête du groupe, le mathématicien Alan Turing a mené cette mission à
bien et deux erreurs majeures lui ont notamment facilité la tâche.
Tout d’abord, la conception de la machine empêchait le cryptage d’une lettre par elle-même (un A ne devient jamais un
A) et ensuite une simple négligence des protocoles allemands a permis ce décryptage. En effet, chaque jour à 6h du matin,
un rapport téo était transmis à tout l’armée allemande et il possédait à chaque fois le même format avec les mots
« wetterbericht », signifiant « bulletin téo » et « heil hitler ». Ces simples mots sont alors appelés cribs possédant une
forte suspicion de réapparaître dans chaque bulletin. C’est donc ici que l’erreur de conception précédente prend toute sa
valeur car en interceptant chaque matin le bulletin météo, et en le comparant aux cribs, les ingénieurs ont pu rapidement
éliminer un grand nombre de possibilités dans les messages codés. Une lettre ne pouvant être cryptée par elle-même, il
suffisait de déplacer le mot jusqu’à ce quaucune lettre ne corresponde pour pouvoir trouver la transcription. Et en
déchiffrant tous les matin le bulletin, les messages pouvaient être alors tous décryptés. Par exemple si l’on suppose que le
message contient le mot « wetterbericht », ils testeent les configurations d’Enigma qui pourraient produire ce mot, sans
qu’aucune lettre ne corresponde à elle-même, ce qui permet d’éliminer rapidement de nombreuses hypothèses.
b) La Bombe : mathématiques, machine et miracle
Avant même que la seconde guerre mondiale débute, Alan Turing publie dans un article une machine théorique appelée
« machine de Turing » qui va poser les bases de lalgorithmie et de l’informatique. Elle permettra par la suite au
mathématicien de décrypter Enigma.
C’est donc à Bletchley Park qu’Alan Turing et son équipe développèrent une des premières machines de calcul
électronique dénommé « la bombe ». Il est important de souligner que la "Bombe" n'était pas une machine unique et
statique. Les premières versions s'inspiraient des travaux des cryptanalystes polonais. Au fur et à mesure que les Allemands
complexifiaient Enigma, notamment en ajoutant des rotors ou en modifiant les procédures de chiffrement, l'équipe de
Turing devait adapter et améliorer la "Bombe". Cela a conduit au développement de différentes "Bombes", chacune conçue
pour contrer des variations spécifiques d'Enigma. Le travail à Bletchley Park était donc un processus continu d'innovation.
En exploitant les failles, la Bombe comparait rapidement le mot et le code crypté et établissait des probabilités sur la
correspondance du code et de sa transcription. En une vingtaine de minutes toutes les fausses correspondances étaient
éliminées et les plus plausibles étaient testées, jusqu’à trouver la bonne configuration. Je vais vous présenter les principales
théories mathématiques dont Alan Turing a u.
1. Pour déchiffrer Enigma, Alan Turing a utilisé les tests systématiques des permutations. Il a compris que le
chiffrement d'Enigma, qui mélange les lettres, pouvait être décomposé en cycles, un peu comme des mini-circuits
fermés où les lettres se remplacent l'une l'autre jusqu'à revenir à leur point de départ. Par exemple si A devient B,
B devient C, et C devient A, on obtient le cycle (A B C). En traitant chaque cycle séparément, Turing a pu
énormément réduire le nombre de combinaisons à tester, rendant le problème du déchiffrage beaucoup plus
gérable et rapide.
2. Alan Turing a aussi appliqué la théorie des automates. Cette théorie nous permet de comprendre comment des
machines abstraites, comme sa célèbre Machine de Turing, peuvent effectuer des calculs. La Bombe, la machine
qu'il a conçue pour casser Enigma, peut être vue comme un automate géant : elle testait automatiquement et à
grande vitesse des millions de combinaisons possibles, vérifiant à chaque fois si le message déchiffré semblait
plausible. Cette automatisation a rendu possible une tâche bien trop complexe pour un humain, accélérant
considérablement le décryptage des messages ennemis.
3. Enfin, l'utilisation des statistiques a été cruciale pour le décryptage d'Enigma. Alan Turing a tiré parti du fait que
chaque langue a une fréquence d'apparition de ses lettres et de certaines paires de lettres (comme le 'E' ou le 'TH'
en anglais). Après chaque essai de décryptage, elle analysait si le texte obtenu présentait des fréquences de lettres
qui correspondaient statistiquement à la langue cible, l'allemand. Si c'était le cas, la configuration était jugée plus
plausible. Cette approche statistique a permis de filtrer rapidement les milliards de combinaisons impossibles,
concentrant les efforts de la Bombe sur les pistes les plus probables et accélérant énormément la découverte du
bon réglage quotidien.
Ainsi, Turing a usé de multiples moyens mathématiques pour déchiffrer cette machine et réaliser cet exploit.
CONCLUSION :
Pour conclure, les mathématiques ont été au cœur d’un enjeu décisif de la Seconde Guerre mondiale : le chiffrement et le
déchiffrement des communications militaires. Grâce à Enigma, les Allemands ont pu créer un système presque inviolable,
fondé sur des principes de permutation, de combinatoire et de cryptographie. Mais c’est aussi par les mathématiques que
ce système a été vaincu. Alan Turing a utilisé des cycles de permutations, la théorie des automates, et des analyses de
probabilités pour guider les recherches vers les solutions les plus plausibles.
Toutefois, sans les failles humaines comme l’envoi quotidien de messages prévisibles contenant des mots récurrents, la
Bombe n’aurait jamais été aussi efficace. Cela nous rappelle que même les systèmes les plus sophistiqués peuvent être
vulnérables face à l’erreur humaine. Aujourd’hui encore, cette leçon résonne dans le domaine de l’intelligence artificielle :
malgré la puissance des algorithmes, ils reposent toujours sur les données qu’on leur fournit et sur les failles de ceux qui
les utilisent ou les conçoivent. Ainsi, ce conflit a montré que les mathématiques peuvent être à la fois un outil de destruction
et de libération, selon l’usage que l’on en fait. Merci de m’avoir écouté.
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