Creation myths

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CHAPITRE I-LA GENÈSE DU MONDE SELON LES BAMILÉKÉ
1. Premier récit (Léon Kamga, Laakam ou Guide Initiatique du savoir-faire et savoir-être
bamiléké)
Au commencement était la terre et la terre était Dieu (dans la plus part de dialectes de l'Ouest
Cameroun, le même mot "Si" désigne Dieu et la surface terrestre). Dieu résidait dans la terre et en
constituait l'élément mâle et le principe actif. Dieu le père trouva que la surface de la terre manquait
d'animation et décida de la peupler de créatures inférieures.
Comme un potier, l'Être suprême modela le premier homme avec de la terre. Il se servit de la
couleur de la même terre et d'une pierre de finition pour diversifier à l'infini la plastique de ses modèles.
Il eut des grands, des petits, des clairs des bruns des noirs des blancs etc. A la fin de l'ouvrage Dieu
propulsa l'homme de l'atelier souterrain vers la surface de la terre "ka"" (le haut) et chargea la terre de
le porter et de le nourrir. En contrepartie du rôle maternel de la déesse terre, Dieu fit à l'homme quatre
prescriptions majeures
- L'institution d'une période sabbatique pendant laquelle les travaux agricoles seront suspendus
pour permettre à la terre de se reposer et de se régénérer.
- L'interdiction de souiller la terre sacrée, lieu de repos éternel des âmes bienveillantes, par les
corps des suicidés et ceux des personnes dont la mort n'a pas respecté le code d'honneur en
vigueur.
- L'organisation d'une cérémonie de pénitence populaire destinée à apaiser la colère de la terre
quand il lui arrive de châtier, par des catastrophes naturelles, les dérives humaines.
- L'obligation d'enterrer un moignon du cordon ombilical de chaque nouveau-afin que l'être
humain reste connecté à sa terre, aux siens et à son Dieu.
Pour éviter une trop grande promiscuité avec des êtres imparfaits, Dieu confia leur encadrement
à des entités locales; des anges gardiens disséminés sur la terre. C'est à ces dieux locaux que les
hommes érigeront des autels et sacrifieront en cas de besoin. L'ancêtre ayant mérité l'amour de sa
famille et le respect de son entourage sera admis, après sa vie terrestre, à la dignité des notables de
l'empire divin. A ce titre il pourra, si la demande lui est exprimée, intercéder auprès du Créateur en
faveur des proches qui lui ont survécus. Des indices particuliers permettront de repérer ceux qui, au
nom de Dieu, auront la lourde responsabilité de gérer quotidiennement les hommes et les biens dans
la cité. Fidèle à sa discrétion, Dieu fera de la femme le dépositaire exclusif de l'art sacré de la création.
Ainsi, les jeunes mamans porteront le titre prestigieux de "meve" (la mère de l'art ou l'artiste). Le papa
ne sera pas "ta'a ve" (le père de l'art) mais seulement " ta’a meve"(le père de la mère de l’art). La
femme mariée qui rendra l’âme sans jamais avoir conçu sera enterée avec une pierre dans la paume
main.
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Les humains la chargeront ainsi de remettre à Dieu l'outil de création dont elle qui elle n'a pas
su faire usage sur terre. De même, la jeune fille qui s'assiéra sur un rocher, manquant ainsi du respect
à la pierre de modelage de l'espèce humaine s'exposera au risque de ne pas procréer plus tard. La
femme enceinte sera considérée comme un temple sacré dont l'accès est fermé aux créations
imparfaites. Son partenaire évitera par conséquent toute relation charnelle avec elle jusqu'à la date du
sevrage du bébé. Toute contravention à cette interdiction équivaudra à la pro nation d'un lieu sacré.
Cette sacralité de la femme dans sa fonction créatrice fondera la polygamie. Selon une formule
consacrée, c'est pour éviter que le mâle, dans sa fougue naturelle, ne tire des coups de feu sur l'autel
sacré qu'il lui a été autorisé de prendre plusieurs femmes pour épouses. Il reviendra prioritairement à
la femme le droit de mettre en valeur la terre avec laquelle elle partage les mêmes attributs de fertilité.
Sur le calendrier divin la durée du transit terrestre sera comparée à la durée d'une journée ; c'est ainsi
qu'on dira de ceux qui mourront vieux que la nuit les a surpris sur terre.
Le bon Dieu, dans sa miséricorde infinie, aurait refusé de créer l'enfer". Toutes les âmes
rentreront au sein de la terre à la fin de leur séjour en surface "ka"" non plus pour subir un quelconque
châtiment mais pour partager la quiétude, la stabilité et la plénitude de leur créateur. C'est encore dans
la terre qu'ils retrouveront les ancêtres qui les y ont précédés. Tous les manquements seront par
conséquent corrigés en surface; et si au moment de "rentrer", le mort n'est pas pur de tout reproche, il
lèguera son fardeau à sa descendance ou à ses proches sous forme de malédiction. Une fois la vie en
surface organisée, Dieu se referma dans la terre' où il accueille dans sa félicité ceux de ses poussins
qui ont achevé leur mission dans le poulailler terrestre.
Remarque
- Il nous est revenu que les enfants nés sous la pleine lune ou avec certains signes distinctifs sur le
cordon ombilical partent favoris pour la course à la succession.
- Il n'existe en bamiléké aucun mot pour désigner l'enfer. La notion de « grand feu » connue de nos
chrétiens est une pure invention des premiers missionnaires. Le feu, comme nous le verrons plus
loin dans l'exégèse des éléments liturgiques de la religion bamiléké, est plutôt associé à la notion
de bravoure et à la flamme de la vie. C'est plutôt la cendre qui symbolise la destruction et
l'anéantissement. De même, il existe des mauvais esprits et même de mauvaises divinités (si
tchouepung) qui peuvent s'en prendre aux vivants mais jamais aux morts. Nous sommes par
conséquent bien loin du personnage de Satan de….
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Deuxième récit (Bernard Maillard, Pouvoir et Religion : Les structures socioreligieuses de la
chefferie de Bandjoun(Cameroun)
LA CREATION PAR "SI"
"Au réveil, l'homme vit que tout était déjà là: la terre et la cuvette de pluie, deux immenses
feuilles larges, les herbes, les arbres, les animaux, le soleil, la lune et les étoiles. Tout était réellement
fait. L'homme vivait bien. Il n'avait ni faim ni soif, ni froid ni chaud. II était heureux. La chasse aux
bêtes sauvages constituait sa distraction préférée. Le chien était son fidèle compagnon. Dans son
étonne- ment, l'homme interroge son Père qui lui répondit: "C'est moi qui a fait toutes ces choses ainsi
que toutes les autres".
Lorsque le roi "Si" entreprit un long voyage à pied pour visiter la terre, son atelier, pour revoir
et admirer ses grandes œuvres, pour nourrir et enrichir les créatures, les vallées et les montagnes se
formèrent, les cours d'eau coulèrent, les courants d'air soufflèrent les hommes et les animaux de toutes
sortes accoururent, les oiseaux du firmament chantèrent à l'unisson, les arbres agitèrent leurs feuilles
vertes, les hautes herbes se courbèrent gracieusement. Alors le Dieu "SI", l'Au-dessus des hommes,
rendit toutes ces choses belles et riches.
Pendant que "si", L’Au-dessus des hommes, prenait du repos, à l'ombre du vieil arbre "yam"
qui était entouré de "pfunkan verdoyants, les vagissements des jumeaux se firent entendre tandis que
les oiseaux du firmament égaillaient la nature. Prenant les nouveaux- nés dans ses bras, "Si", l'Au-
dessus des hommes, sourit tendre- ment, les nomma "pomnye pa" et leur dit "Grandissez vite, vous
irez vous aussi travailler dans mon champ fertile. Prospérez, prospérez, toujours". "Si", l'Au-dessus
des hommes, remit ensuite de belles tiges de "pfuekan" entre les mains de "tanye" et de "manye",
parents des jumeaux. Vous reviendrez souvent avec votre descendance me visiter en ce lieu sacré,
précisément au pied de cet arbre sacré "yam", place sainte où j'ai fait tant de grandes choses.
Le temps passa vite. "Tanye" et "manye" oublièrent de rendre visite à leur bon Père "Si". Il se
fâcha contre eux. Pris de colère, le Père "Si" envoya le caméléon et le crapaud leur porter ce message
divin "Puisqu'il en est ainsi, vous verrez, vous mourrez" et depuis lors, la vie subit un changement dans
son cours. Tout n'est plus que lutte. La terre, la cuvette de pluie, les herbes, les arbres et les animaux,
le soleil et la lune et les étoiles sont sans cesse en lutte. Seuls les plus forts en sortent vainqueurs. Déjà
les hommes nais- sent, travaillent et meurent. Le chien ne retrouve plus l'usage de la parole. Toutefois
les jumeaux inspirés et bénis par le Dieu "Si ne meurent pas mais disparaissent. Les Bamiléké se
gardent bien de tuer inutilement le caméléon et le crapaud, tous deux porteurs du message divin. Les
mères de jumeaux font grand usage de "pfuen kan". Les hommes prient et offrent des sacrifices au
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pied de l'arbre sacré "yam", lieu réservé à Dieu, lieu saint tout homme peut tout garder, confier,
sans crainte du vol, de la lutte, du mensonge, ni d'autre chose du même genre. C'est que l'homme
compte retrouver le bonheur perdu".
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