millièmes de seconde. Ces changements pouvaient être provoqués par des oiseaux
isolés ou par de petits groupes localisés n'importe où dans la nuée, et se propager
sous la forme d'une onde quasi-simultanée dans toute la nuée. Potts testa plus tard
les bécasseaux en laboratoire pour voir à quelle vitesse ils répondraient à un
stimulus. Il trouva qu'en moyenne, il fallait 38 millièmes de seconde à un oiseau pour
déclencher une réaction de sursaut face à un éclair de lumière. Cela signifie qu'ils ne
pouvaient pas se baser sur des indications visuelles de la part de leurs voisins pour
changer d’orientation en vol beaucoup plus rapidement que le temps de réaction
prouvé expérimentalement. Potts conclut néanmoins que les oiseaux individuels
réagissaient bien visuellement, non pas à leurs voisins, mais à ce qu'il qualifia d’onde
directrice traversant toute la nuée. Pour Potts, "ces vitesses de propagation semblent
se produire à peu près de la même manière que dans une chorégraphie humaine :
les individus observent l'onde directrice qui s'approche et synchronisent leur propre
exécution pour coïncider avec son arrivée". C’est peu probable, d’après Sheldrake.
Les participants à une chorégraphie voient ce qui se passe devant ou à côté d'eux,
mais pas ce qui se passe derrière eux. Pour que le modèle de la chorégraphie
fonctionne au sein d'une nuée, il faudrait que les oiseaux fassent preuve d'une
attention visuelle quasiment constante, à 360 degrés, ce qui n'est pas le cas.
Comment pourraient-ils réagir quasiment instantanément aux vagues qui
s'approchent d'eux par l'arrière ? Il leur faudrait des yeux à l'arrière de la tête. Or
aucun oiseau, dit Sheldrake, ne possède une vision à 360 degrés, qu'ils aient leurs
yeux à l'avant de la tête, comme les hiboux, ou sur le côté, comme les oies, les
canards, les bécasseaux variables et les étourneaux.
Que pourrait-il se passer d'autre ? "Depuis des décennies, des naturalistes spéculent
sur le fait que les changements de direction dans les nuées d'oiseaux se produisent
si rapidement qu'ils semblent dépendre d'une pensée collective ou de la télépathie",
explique Sheldrake. "Ma propre hypothèse, c’est que les nuées d'oiseaux sont
effectivement organisées de manière télépathique via des champs, les champs
morphiques".
Sheldrake examine la nature des champs morphiques dans ses livres
novateurs,
Une nouvelle science de la vie, La mémoire de l'univers
et
Le septième
sens.
Selon son hypothèse, les champs morphiques constituent de vastes champs
d'influence qui modèlent le comportement et la pensée. Ils opèrent de manière non
locale, indépendamment de l'espace ou du temps. Ils se sont formés au cours de la
longue évolution et de la sélection naturelle. Les champs morphiques n'excluent pas
l'importance de la vision ou de tout autre sens physique dans les nuées d'oiseaux ou
dans le comportement de groupe de toute autre créature ; c'est simplement que la
vision seule, ou que tout autre sens physique, ne peut pas expliquer la coordination
des mouvements du groupe.
On a aussi développé des modèles informatiques bidimensionnels qui ressemblent à
des
boids
pour expliquer les mouvements coordonnés des bancs de poissons qui, de
loin, ressemblent à un seul et même organisme. Leur comportement le plus