LMAT2460 : Math´ematiques discr`etes – Structures combinatoires
R´esum´e du premier chapitre du cours 2016–2017
1. Corps finis
1.1. Construction. On a deux proc´ed´es de construction de corps finis.
1.1.1. ´
Etant donn´e un entier n > 0, on d´efinit une relation d’´equivalence sur l’en-
semble Zdes entiers relatifs en posant pour a,bZ
abmod nsi ndivise ab.
La classe d’´equivalence d’un entier aZest
{bZ|abmod n}={a+kn |kZ}.
On la note a+nZ, et on d´esigne par Z/nZl’ensemble des classes d’´equivalence
mod n:
Z/nZ={a+nZ|aZ}.
On d´efinit une somme et un produit sur Z/nZen posant pour a,bZ
(a+nZ)+(b+nZ)=(a+b) + nZet (a+nZ)·(b+nZ) = ab +nZ.
Th´eor`eme 1. Avec les op´erations ci-dessus, Z/nZest un anneau commutatif qui
contient n´el´ements :
Z/nZ={0 + nZ,1 + nZ, . . . , (n1) + nZ}.
Si nest un nombre premier, alors Z/nZest un corps.
D´emonstration. Pour tout aZ, on peut trouver q,rZtels que a=nq +ret
r∈ {0, . . . , n 1}. Alors a+nZ=r+nZ; donc
Z/nZ={0 + nZ,1 + nZ, . . . , (n1) + nZ}.
De plus, les ´el´ements de l’ensemble de droite sont tous distincts, car si a+nZ=b+nZ
avec a,b∈ {0, . . . , n 1}, alors ndivise abet n<ab<n, donc ab= 0.
On en conclut que Z/nZa bien n´el´ements. En se ramenant aux propri´et´es de Z, il
est facile de v´erifier que Z/nZest un anneau commutatif. Il ne reste donc plus qu’`a
v´erifier que si nest premier alors tout ´el´ement non nul de Z/nZest inversible.
Soit a+nZ6= 0. On consid`ere l’application de multiplication par a+nZ,
ϕ:Z/nZZ/nZ, b +nZ7→ ab +nZ.
Lorsque nest un nombre premier, cette application est injective, car si ϕ(b+nZ) =
ϕ(c+nZ), alors ab +nZ=ac +nZ, donc ndivise a(bc). Comme nne divise pas
a, cela entraˆıne que ndivise bc, donc b+nZ=c+nZ. Or, puisque Z/nZest un
ensemble fini, toute application injective Z/nZZ/nZest aussi surjective, donc
on peut trouver a0+nZtel que ϕ(a0+nZ) = 1 + nZ. Alors aa0+nZ= 1 + nZ, ce
qui montre que a0+nZest l’inverse de a+nZ.
Remarque. Si nn’est pas premier, alors on peut trouver k,∈ {2, . . . , n 1}tels
que k=n, ce qui entraˆıne (k+nZ)·(+nZ) = 0. Ainsi, Z/nZn’est pas un corps
si nn’est pas un nombre premier.
1
2
On note Fn=Z/nZpour npremier. On v´erifie directement que F2et F3sont les
seuls corps `a 2 et `a 3 ´el´ements.
1.1.2. ´
Etant donn´e un corps quelconque k0et un polynˆome non constant πk0[x],
on d´efinit une relation d’´equivalence sur l’ensemble k0[x] des polynˆomes `a coefficients
dans k0en l’ind´etermin´ee xen posant pour f,gk0[x]
fgmod πsi πdivise fg.
La classe d’´equivalence d’un polynˆome fk0[x] est
{gk0[x]|fgmod π}={f+|hk0[x]}.
On la note f+πk0[x], et on d´esigne par k0[x]k0[x] l’ensemble des classes d’´equivalence
mod π:
k0[x]k0[x] = {f+πk0[x]|fk0[x]}.
On d´efinit une somme et un produit sur k0[x]k0[x] en posant pour f,gk0[x]
(f+πk0[x])+(g+πk0[x]) = (f+g)+πk0[x] et (f+πk0[x])·(g+πk0[x]) = fg+πk0[x].
Th´eor`eme 2. Soit n= deg π1. Avec les op´erations ci-dessus, k0[x]k0[x]est
un anneau commutatif qui est un espace vectoriel de dimension nsur k0:
k0[x]k0[x] = {α0+α1x+· · · +αn1xn1+πk0[x]|α0, . . . , αn1k0}.
Si πest un polynˆome irr´eductible, alors k0[x]k0[x]est un corps.
D´emonstration. Pour tout fk0[x], on peut trouver q,rk0[x] tels que f=πq +r
et deg r < deg π. Alors f+πk0[x] = r+πk0[x] ; donc
k0[x]k0[x] = {α0+α1x+· · · +αn1xn1+πk0[x]|α0, . . . , αn1k0}.
De plus, les ´el´ements de l’ensemble de droite sont tous distincts, car si
α0+α1x+· · · +αn1xn1+πk0[x] = β0+β1x+· · · +βn1xn1+πk0[x]
alors πdivise (α0β0)+(α1β1)x+· · ·+(αn1βn1)xn1, ce qui n’est possible que
si αi=βipour tout i, puisque deg π=n. On en conclut que 1 + πk0[x], x+πk0[x],
. . . , xn1+πk0[x] est une base de k0[x]k0[x] sur k0, donc dimk0(k0[x]k0[x]) = n.
En se ramenant aux propri´et´es de k0[x], il est facile de v´erifier que k0[x]k0[x] est
un anneau commutatif. Il ne reste donc plus qu’`a v´erifier que si πest irr´eductible
alors tout ´el´ement non nul de k0[x]k0[x] est inversible.
Soit f+πk0[x]6= 0. On consid`ere l’application de multiplication par f+πk0[x],
ϕ:k0[x]k0[x]k0[x]k0[x], g +πk0[x]7→ f g +πk0[x].
Lorsque πest un polynˆome irr´eductible, cette application est injective, car si
ϕ(g+πk0[x]) = ϕ(h+πk0[x]),
alors fg +πk0[x] = fh +πk0[x], donc πdivise f(gh). Comme πne divise pas f,
cela entraˆıne que πdivise gh, donc
g+πk0[x] = h+πk0[x].
3
Puisque k0[x]k0[x] est un espace vectoriel de dimension finie sur k0, toute appli-
cation k0-lin´eaire injective k0[x]k0[x]k0[x]k0[x] est aussi surjective, donc on
peut trouver f0+πk0[x] tel que ϕ(f0+πk0[x]) = 1 + πk0[x]. Alors ff0+πk0[x] =
1 + πk0[x], ce qui montre que f0+πk0[x] est l’inverse de f+πk0[x].
Remarque. Si πn’est pas irr´eductible, alors on peut trouver f,gk0[x] tels que
deg f, deg g < n et π=fg, ce qui entraˆıne (f+πk0[x]) ·(g+πk0[x]) = 0. Ainsi,
k0[x]k0[x] n’est pas un corps si πn’est pas un polynˆome irr´eductible.
Un examen des diff´erents cas possibles montre que le seul corps `a 4 ´el´ements est
F2[x]/(x2x1)F2[x].
1.2. Structure.
1.2.1. Caract´eristique. Soit kun corps fini. Le plus petit entier n > 0 tel que
1 + · · · + 1
| {z }
n
= 0 dans kest appel´e caract´eristique de k. C’est un nombre premier,
car si n=kalors de la relation n·1 = 0 doit r´esulter k·1 = 0 ou ·1 = 0.
Th´eor`eme 3. Le nombre d’´el´ements de kest une puissance de la caract´eristique.
D´emonstration. Si la caract´eristique de kest p, alors les ´el´ements 0, 1, 1 + 1, . . . ,
1 + · · · + 1 kforment un sous-corps que l’on peut identifier `a Fp. Les op´erations
de kfont de kun espace vectoriel sur Fp, qui est n´ecessairement de dimension finie.
Si cette dimension est d, alors toute base de kd´efinit un isomorphisme d’espaces
vectoriels entre ket Fd
p, donc |k|=pd.
1.2.2. Ordre (multiplicatif) d’un ´el´ement. Soit kun corps fini. On note k×le groupe
multiplicatif des ´el´ements non nuls de k. Pour ak×, il existe un plus petit entier
n > 0 tel que an= 1. Cet entier est appel´e ordre (multiplicatif ) de aet est not´e
o(a).
Proposition 4. Soit ak×.
(1) Les ´el´ements 1,a,a2, . . . , ao(a)1sont deux `a deux distincts, donc o(a)≤ |k×|.
(2) Si nZest tel que an= 1, alors o(a)divise n.
D´emonstration. (1) Si ai=ajavec i < j, alors aji= 1, donc jio(a). La
relation ai=ajest donc impossible si iet jsont dans {0,1, . . . , o(a)1}.
(2) Soit n=o(a)q+ravec q,rZet 0 r < o(a). De an= 1 et ao(a)= 1, on
d´eduit ar= 1, donc r= 0 vu la minimalit´e de o(a).
Lemme 5. Soit kun corps fini et m= max{o(a)|ak×}. Pour tout ak×,
l’ordre o(a)divise m.
D´emonstration. Soit gk×tel que o(g) = met soit aun autre ´el´ement non nul de
k. Soit encore dle pgcd de met de o(a) ; on peut donc ´ecrire
o(a) = dr
pour un certain entier r1 premier `a m. On va prouver que r= 1, donc o(a) divise
m.
4
Pour cela, formons le produit adget calculons son ordre multiplicatif. On a
(adg)mr = (adr)m(gm)r= 1,
donc o(adg) divise mr. Par ailleurs comme (adg)o(adg)=gm= 1 on a
1=(adg)o(adg)m=ad o(adg)m,
donc dr divise d o(adg)m. Comme rest premier `a m, cela entraˆıne que rdivise
o(adg). De mˆeme,
1=(adg)o(adg)r=go(adg)r,
donc mdivise o(adg)ret comme mest premier `a ron voit que mdivise o(adg).
Puisque o(adg) est divisible par ret par m, qui sont premiers entre eux, o(adg) est
aussi divisible par mr. Mais on a d´ej`a vu que o(adg) divise mr, donc o(adg) = mr.
Vu la maximalit´e de m, on doit avoir mr m, donc r= 1.
Th´eor`eme 6. Soit kun corps fini `a q´el´ements.
(1) Il existe un ´el´ement gktel que k={0,1, g, g2, . . . , gq2}, c’est-`a-dire que g
engendre k×.
(2) Tout ´el´ement de kest racine de XqX= 0.
D´emonstration. (1) Soit, comme dans le lemme, m= max{o(a)|ak×}. Comme
o(a)≤ |k×|pour tout ak×, on a forc´ement mq1. Par ailleurs, vu le lemme,
tout ´el´ement de k×est racine de Xm= 1. Mais le nombre de racines d’un polynˆome
dans un corps ne peut pas d´epasser le degr´e du polynˆome, donc q1m. On doit
donc avoir m=q1, ce qui entraˆıne l’existence dans k×d’un ´el´ement gtel que
o(g) = q1, c’est-`a-dire d’un g´en´erateur de k×.
(2) Vu que m=q1, le lemme entraˆıne que o(a) divise q1 pour tout ak×,
donc tout ´el´ement non nul de kest racine de Xq11. Alors tout ´el´ement de kest
racine de XqX.
1.2.3. Polynˆome minimal d’un ´el´ement. Soit kun corps fini `a q´el´ements. On a vu
que qest une puissance d’un nombre premier p, et que kest un espace vectoriel
(forc´ement de dimension finie) sur le corps Fp. Pour ak, on peut trouver un plus
petit exposant d > 0 tel que adsoit une combinaison lin´eaire de 1, a, . . . , ad1.
Alors 1, a, . . . , ad1sont lin´eairement ind´ependants, donc adadmet une expression
unique de la forme
ad=α0+α1a+· · · +αd1ad1avec α0, . . . , αd1Fp.
Cela signifie que aest racine du polynˆome Xdαd1Xd1· · ·α1Xα0Fp[X].
Ce polynˆome est appel´e polynˆome minimal de a(sur Fp). C’est en effet le polynˆome
unitaire de plus bas degr´e `a coefficients dans Fpdont asoit racine.
Proposition 7. Le polynˆome minimal de aest irr´eductible dans Fp[X]et divise
tout autre polynˆome de Fp[X]dont aest racine.
5
D´emonstration. Soit πFp[X] le polynˆome minimal de aet d= deg π. Supposons
π=fg avec deg f, deg g < d. Comme π(a) = 0, on doit avoir f(a) = 0 ou g(a) = 0.
C’est impossible vu la minimalit´e de d, donc πest irr´eductible.
Si fFp[X] est un polynˆome qui s’annule en a, la division euclidienne (avec
reste) de fpar πdonne
f=πQ +Ravec Q,RFp[X] et deg R < d.
En ´evaluant les deux membres en a, on trouve R(a) = 0. Vu la minimalit´e de d, cela
entraˆıne R= 0, donc πdivise f.
L’´evaluation en aefinit un homomorphisme d’anneaux
εa:Fp[X]k, f 7→ f(a).
La proposition pr´ec´edente montre que le noyau ker εaest l’ensemble des multiples
du polynˆome minimal πde a. On note Fp[a] l’image de εa:
Fp[a] = {f(a)|fFp[X]}.
L’homomorphisme εainduit donc un isomorphisme d’anneaux
εa:Fp[X]Fp[X]
Fp[a].
Comme πest irr´eductible, il en d´ecoule que Fp[a] est un corps.
Th´eor`eme 8.
(i) Tout corps fini de caract´eristique pest de la forme Fp[X]Fp[X], avec πun
polynˆome irr´eductible unitaire de Fp[X].
(ii) Deux corps finis sont isomorphes s’ils ont le mˆeme nombre d’´el´ements.
D´emonstration. (i) Soit kun corps fini de caract´eristique p. Soit qle nombre d’´el´ements
de k. D’apr`es le Th´eor`eme 6, on peut trouver gktel que
k={gi|i= 0, . . . , q 2}∪{0}.
Alors k=Fp[g], et si πest le polynˆome minimal de gon a un isomorphisme
εg:FpFp[X]
k.
(ii) Soient ket k0deux corps `a q´el´ements, o`u qest une puissance d’un nombre
premier p. D’apr`es (i) on a k=Fp[g] pour un certain gk, donc en notant πle po-
lynˆome minimal de gon a un isomorphisme εg:Fp[X]Fp[X]
k. Le Th´eor`eme 6
montre que gest racine de XqX, donc πdivise XqX. Il montre aussi que tout
´el´ement de k0est racine de XqX, donc
XqX=Y
ak0
(Xa).
Comme πdivise le membre de gauche, il doit admettre dans k0[X] une factorisation
de la forme
π= (Xa1)· · · (Xad) pour certains a1, . . . , adk0.
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