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Marie dit alors : « Quelle joie fut la mienne lorsque j’appris de l’Ange Gabriel que
le Seigneur t’avait visitée de ses bénédictions ! » Élisabeth lui répondit avec
exubérance : « Nulle n’est bénie comme toi parmi les femmes, et plus encore
est béni celui que tu portes ! Sais-tu qu’à ton approche l’enfant que je porte a
tressailli d’allégresse en moi ? Loué soit le Seigneur d’avoir permis que tu
viennes jusqu’à moi ! Heureuse es-tu d’avoir cru sans réserve que l’œuvre
annoncée de la part du Seigneur s’accomplissait réellement en toi ! » Marie leva
les yeux au ciel et s’abandonna à la louange : « Tout mon être exulte de joie et
glorifie le Seigneur ! Il n’a pas dédaigné sa petite servante, réalisant en elle des
merveilles que l’on chantera à travers les âges ! Saint est ton Nom, Seigneur, toi
dont la Miséricorde se répand sur tous les croyants de siècles en siècles. La force
de ton bras a raison des orgueilleux, les puissants ne tiennent pas devant toi, tu
les abaisses au profit des humbles tout étonnés de se voir élevés, les riches s’en
vont démunis et le ventre vide alors que les affamés sont enfin comblés. Dans sa
fidélité, ton amour relève ton serviteur Israël, et tu n’oublies pas la promesse
qui te lie à la descendance d’Abraham à travers les siècles ! » Les deux femmes
s’embrassèrent à nouveau avec chaleur.
Dans la resserre, le vieux Zacharie eut tout à coup l’intuition qu’il se passait
quelque chose d’important. Il lâcha son occupation, sortit en hâte de la maison,
et se pencha par-dessus le parapet de la terrasse. Il aperçut les deux femmes
enlacées. Prenant conscience de l’importance de l’événement, il se mit à
applaudir à cette rencontre. L’usage de la parole lui faisait défaut, mais pas la
capacité de tressaillir dans la joie de l’Esprit-Saint, ni celle de rendre Grâce. Il
entonna en lui cette parole de Jérémie : « Avant même ton éclosion dans le sein
maternel, je te connaissais ; avant que tes yeux aient vu le jour, je t'ai consacré ;
par mon désir le plus profond, je t’ai institué prophète pour les peuples. »
Dans quelques temps, le cordon ombilical allait se rompre sous une lame
acérée, faisant accéder les deux nouveau-nés à la vie ; et puis un jour, une autre
lame acérée couperait le cordon de leur vie et les enverrait vers la mort, Jean, la
gorge tranchée, et Jésus, cloué sur une croix. Ils passeront alors une seconde
fois par un ventre ténébreux qui les fera accéder à une vie nouvelle, définitive
cette fois. Mais entre-temps, le Royaume de Dieu aura été instauré, et le monde
sera restauré par la grâce du Salut offert à lui gratuitement.