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Génie enzymatique 23-24

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GENIE ENZYMATIQUE
Biotechnologies
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Génie enzymatique 1
INTRODUCTION
Vu les propriétés des enzymes (catalyseurs spécifiques), il n’est pas surprenant que les
industriels se trouvent parmi les premiers à reconnaitre et exploiter l’énorme potentiel des
enzymes.
En effet, ils ont vite compris que s’il était possible d’accélérer les réactions, les procédés de
production pourraient être réalisés en beaucoup moins de temps, à des températures et des
pressions plus basses ou avec des matières premières moins chères.
Dans d’autres situations, les enzymes ont rendu certaines réactions commercialement viables
pour la première fois.
Aujourd’hui le marché mondial des enzymes industrielles se développe rapidement.
Les principaux secteurs sont les détergents, le traitement de l’amidon et la production
d’aliments pour animaux.
Les enzymes sont désormais utilisées dans de nombreuses applications très diverses, allant du
« blanchiment biologique » du papier jusqu’aux techniques plus efficaces pour l’extraction du
pétrole et du gaz.
En général, l’utilisation des enzymes est très rentable, sans danger et reconnue comme une
technologie « verte » ou écologique.
Les enzymes font déjà partie de notre vie courante depuis très longtemps. Il suffit de citer
quelques exemples :
- la poudre à lessiver contenant les enzymes gloutons
- la présure pour faire cailler le lait
- les mélanges d’enzymes protéolytiques dans les fosses septiques ou les bacs à huiles
-…
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Les secteurs utilisant le plus les enzymes industrielles sont l’industrie des détergents
(protéases, lipases, amylases et cellulases pour produire des lessives « biologiques » car ces
enzymes décomposent rapidement ou libèrent les souillures et ce, à basse température et sans
usage de détergents chimiques) et les industries agro-alimentaires.
La plus grande partie des utilisations industrielles concernent des réactions d’hydrolyse ou
d’isomérisation.
La société belge, REALCO, basée à Louvain-la-Neuve, emploie 55 personnes et est devenue
en 2019, le leader mondial des solutions d’hygiène à base d’enzymes.
L’entreprise avait, jusqu’ici développé des produits à usage industriel (BIOREM).
Ils sont notamment utilisés dans l’industrie agro-alimentaire , ainsi que la restauration
collective et commerciale.
En 2018, Realco a lancé une nouvelle gamme de produits à destination des particuliers
(Eezym).
A la différence des produits d’entretien classiques, les solutions à base d’enzymes permettent
de transformer des matières organiques en résidus solubles dans l’eau.
La société exporte en France, en Allemagne et cible le marché chinois.
Les enzymes peuvent avoir plusieurs origines :
– végétale :
papaïne (Carica papaya : hydrolyse, brasserie, viande) ;
broméline (ananas) ;
ficine (figue).
– animale :
pepsine (muqueuse gastrique du porc : hydrolyse, soft drinks, brasserie).
– microbienne : la production industrielle s’est orientée vers les processus fermentaires plutôt
que vers les processus d’extraction. Ainsi, la production est indépendante des saisons,
de la géographie ; on peut utiliser des matières premières peu coûteuses et on peut
obtenir un rendement élevé si l’on fait un bon choix quant à la souche productrice et
au type de process.
De plus, il est possible d’avoir des propriétés et des spécificités diverses.
Ces avantages l’ont emporté sur les inconvénients liés aux industries de fermentation
(investissement élevé, énergie, risque de contamination) et un bon nombre de
fermentations productrices d’enzymes se sont développées depuis longtemps.
Les principales productions sont : protéase (bacillus), glucoamylase, amylase
(bacillus), glucose isomérase, amylase fongique, pectinase, protéases fongiques,
présure microbienne.
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PRODUCTION DES ENZYMES
Il y a différentes étapes.
1. Définition de l’enzyme recherchée
La production d’une enzyme industrielle répondant, en principe, à une exigence potentielle
des utilisateurs, il est nécessaire de déterminer les propriétés que cette enzyme devra
posséder :
– spécificité : l’effet global recherché implique l’utilisation d’un type d’enzyme précis. Si une
enzyme a plusieurs activités, la proportion de ces autres activités doit être précise en fonction
du produit à traiter.
– optimum de pH : variable.
– optimum de température : il est souvent élevé (s’il y a un traitement thermique ultérieur).
2. Sélection d’une souche microbienne.
Les micro-organismes qui sont capables de produire des enzymes de dégradation de certains
composés sont souvent localisés où ces substances sont abondantes : les micro-organismes
sécrétant des cellulases se trouvent dans le sol des forêts.
Initialement, les souches ont été isolées du sol ou d’éléments naturels (méthode d’isolement=
culture d’enrichissement puis subculture sur milieu sélectif).
La souche isolée, pour être définitivement retenue, doit présenter un certain nombre de
caractéristiques :
- se développer sur milieu simple, bon marché,
- produire le moins de métabolites secondaires (antibiotique),
- excréter l’enzyme afin de faciliter la séparation et la purification,
- ne pas conduire à différents polluants,
- ne pas être pathogène ou produire des composés toxiques,
- avoir un caractère d’alimentarité permettant un contact avec une denrée alimentaire.
Une fois que le choix s’est fixé sur une souche de micro-organisme, les microbiologistes vont
chercher à l’améliorer (mutations, génie génétique).
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3. L’apport du génie génétique
À l’échelle industrielle, il existe des impératifs de rentabilité. Or, les méthodes de purification
qui permettraient un rendement de 90 à 95 % sont onéreuses ce qui a des répercussions sur le
prix de revient.
Le monde industriel préfère tenter de modifier les êtres vivants eux-mêmes afin d’augmenter
la production de base du métabolite d’intérêt économique (optimisation du potentiel génétique
des souches) et d’enlever des caractéristiques gênantes.
Chez tous les êtres vivants, la synthèse d’une protéine, donc d’une enzyme, est sous le
contrôle d’une séquence d’acides nucléiques précis.
Mais 2 types d’événements s’opposent à l’accumulation gratuite d’une enzyme dans la
cellule.
- dégradation enzymatique,
- régulation métabolique : les bactéries sont capables d’adapter l’activité de leurs gènes de
structure aux nécessités de leur environnement, grâce à l’existence de gènes de régulation.
Toute enzyme étant le produit direct de l’activité d’un gène, l’augmentation des capacités
productrices d’une souche microbienne passe nécessairement par la mise en œuvre de
techniques permettant d’obtenir une activité constante du gène ; il faut donc, autant que
possible, supprimer les éléments de régulation.
Pour cela, il faut posséder une connaissance maximale des voies régulatrices que l’on veut
modifier.
Pistes possibles :
- obtenir un fonctionnement génétique optimum dans la voie métabolique désirée (lever les
inhibitions ou répressions ou bloquer des voies de dégradation qui réduisent les
rendements de production).
- améliorer le potentiel génétique des souches par l’augmentation du nombre de gènes codant
pour les fonctions intéressant l’industriel ou l’introduction de gènes nouveaux afin
d’augmenter la productivité.
- améliorer la perméabilité des enveloppes cellulaires facilitant ainsi la récupération des
métabolites.
- améliorer la stabilité du produit, de la souche.
Il faut donc induire des mutations à l’aide d’agents mutagènes physiques ou chimiques.
Afin d’arriver plus rapidement au but recherché, on utilise le plus souvent des techniques plus
précises : fusion de protoplastes, clonage de gènes,…
2010, ouverture de l’ère de la biologie synthétique : fabrication sur mesure, par synthèse
chimique, de génomes entiers (n’existant pas dans la nature) et leur implantation dans des
cellules vidées de leur propre génome.
C’est ainsi que l’on a obtenu la première bactérie « synthétique », M mycoides JCVI-syn1.0,
appelée aussi le premier organisme génétiquement fabriqué.
Enfin, il faut trouver, parmi une population, le mutant intéressant (screening).
Attention, il ne faut pas oublier que l’amélioration génétique des souches microbiennes doit
être couplée au maintien d’une certaine robustesse (il y a parfois des mutations secondaires
affaiblissant la souche mutante).
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4. Les préparations industrielles d’enzymes
Les enzymes industrielles sont obtenues par extraction à partir de cellules animales, végétales
et microbiennes.
Ce sont surtout les enzymes microbiennes produites par fermentation qui ont connu une
expansion significative (50 % de ces enzymes proviennent de Bacillus amyloliquefaciens et
licheniformis, 30 % d’Aspergillus).
Traditionnellement, les enzymes microbiennes étaient produites par culture en surface, en
couche mince de milieu liquide ou semi-liquide. Mais les contrôles (température, humidité,
oxygène) sont difficiles ; c’est pourquoi les cultures submergées sont maintenant préférées
aux cultures de surface (méthode mieux adaptée aux contrôles et plus adaptée pour le passage
du fermenteur pilote de labo au fermenteur industriel).
Préliminaires : choix et amélioration des souches (voir avant).
Le milieu de culture
Il doit contenir des sources de carbone, d’azote, des facteurs de croissance de la souche et
souvent, des inducteurs.
Les matières premières comptent pour 60 à 80 % du prix de revient d’une production, c’est
pourquoi il est important de faire un choix judicieux.
Les matières premières sont donc choisies en fonction des critères :
- de compatibilité avec les réglementations,
- d’approvisionnement stable en qualité et en quantité en fonction du temps,
- du coût aussi peu élevé que possible,
- tenir compte des différentes étapes de la phase d’extraction.
Exemples : lactosérum, mélasses…
Le milieu doit évidemment être stérilisé.
Cela représente généralement des volumes d’environ 100 m3.
La stérilisation est souvent réalisée dans des échangeurs à plaques ou par injection de vapeur.
Conduite de la fermentation
Le protocole est semblable à celui de la production des antibiotiques.
A. Inoculum
On prépare l’inoculum par propagation de cellules.
Il faut éviter un trop grand nombre de cultures successives afin de conserver la stabilité de la
souche et limiter les risques de contamination.
La quantité d’inoculum varie entre 0.1 et 10 %.
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Ampoule lyophilisée
ß
Régénération sur milieu gélosé
ß
Premier stade de multiplication : milieu liquide agité (15 à 36 h)
ß
Multiplication en fermenteur agité, aéré (24 à 36 h)
ß
Production en fermenteur principal (10 à 80 h)
B. Paramètres physiques
– Température : nécessité de refroidissement par double enveloppe, car les quantités de
chaleur libérées peuvent atteindre 2 106 Kcal/h.
– pH : il est régulé en continu par des électrodes.
– Mousse : comme le milieu contient beaucoup de protéines, l’agitation et l’aération
provoquent l’apparition de mousse ; il faut donc prévoir l’ajout d’anti-mousse (à base
d’huiles).
– Oxygène : le contrôle est délicat.
– Induction ou répression : il dépend du système choisi.
C Fermenteur et équipement
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D Extraction des enzymes et purification
1. Généralités
Dès que la fermentation est terminée, le refroidissement de la culture (3 à 5°C) permet
d’éviter des évolutions dommageables (contamination…).
La fraction contenant les enzymes est récupérée par centrifugation ou filtration (souvent en
présence d’additifs).
Dans le cas d’enzymes endocellulaires, on récupère les cellules.
Dans le cas d’enzymes exocellulaires, on récupère la phase aqueuse.
Pour ce qui est de l’extraction, des enzymes endocellulaires, on doit d’abord rendre la paroi
perméable et libérer l’enzyme de son site de fixation (lyse chimique et/ou enzymatique,
congélation-décongélation, désintégration par hautes pressions, sonication, agitation avec
abrasifs, dessiccation, extraction par solvant…).
L’ultrafiltration élimine ensuite les molécules de petite taille (sels minéraux).
Après concentration (évaporation, ultrafiltration), les solutions sont mises au titre et
conditionnées.
Par atomisation ou lyophilisation, on prépare de la poudre ayant une durée de conservation
plus longue que la forme liquide.
Les solutions sont stabilisées par des conservateurs ( NaCl, glycérol, sorbitol…) afin de
diminuer l’Aw.
2. Purification des enzymes
Comme la matière première est très hétérogène, il faut très souvent plusieurs étapes (de plus
en plus sélectives
a. Méthodes de fractionnement
Elles sont basées sur la différence de solubilité : l’ajout d’un additif ou un changement de
conditions modifie la solubilité de la protéine qui devient insoluble et précipite.
– Précipitations fractionnées par les sels : relargage (très utilisé)
Pour chaque protéine, on détermine une zone de concentration en sel pour laquelle il y a
précipitation totale (cette zone dépend du sel et de la protéine). On pourra fractionner, du
moins en partie, les constituants d’un mélange.
On utilise souvent le sulfate d’ammonium.
Aucune des fractions ne pourra cependant être pure en raison des chevauchements des
différentes zones de relargage ; cette technique permet donc d’obtenir une fraction enrichie à
partir d’un grand volume.
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– Précipitation isoélectrique
Comme les protéines, les enzymes ont un minimum de solubilité à pH=pi.
La difficulté de la technique réside dans le risque de dénaturation.
– Effet de la température
La solubilité des protéines globulaires augmente avec la température, mais, passé un seuil,
une limite (40-50°C), ces protéines deviennent instables et sont dénaturées. Il peut y avoir
ainsi, élimination des enzymes contaminantes.
Cette technique est peu coûteuse, mais nécessite des précautions afin de ne pas perdre
l’activité enzymatique recherchée.
– Précipitation par solvants organiques
L’addition de solvants organiques neutres diminue la constante diélectrique et donc la
solubilité.
Cette technique présente de grands risques de dénaturation, c’est pourquoi elle doit être
réalisée à basse température.
– Précipitation par ajout de polymères de haut poids moléculaire
Ces polymères (PEG par exemple) déshydratent les macromolécules, changeant dès lors la
constante diélectrique et donc la solubilité.
– Précipitation par les ions métalliques
L’association métal-protéine provoque une diminution de la solubilité de la protéine.
Certains sels métalliques (Mn++) agissent sur les acides nucléiques aidant ultérieurement
l’isolement des enzymes intracellulaires.
b. Méthodes de séparation liquide-liquide ou liquide-solide
– Séparation liquide-liquide
Principe : 2 polymères peuvent présenter des phénomènes de solubilité et d’incompatibilité
avec l’eau, ce qui conduit à la formation de phases liquides non miscibles ; les enzymes, les
cellules et leurs constituants se séparent inégalement entre ces 2 phases ainsi constituées.
– Séparation liquide-solide
Cette opération peut intervenir entre plusieurs étapes d’une purification : elle a pour but
d’obtenir une phase liquide claire qui sera ensuite traitable.
– Utilisation des membranes
Elles servent à séparer les petites molécules des grosses.
Si la membrane est imperméable au soluté, on parle d’osmose.
Si on applique en plus un champ électrique, on parle d’électrodialyse (s’il y a passage du
soluté) ou d’électro-osmose (s’il y a passage du solvant).
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c. Chromatographies
Après extraction (obtention de l’enzyme sous forme soluble), précipitation, centrifugation, on
obtient une solution enzymatique concentrée, mais encore largement contaminée.
Des méthodes plus sélectives vont être utilisées jouant essentiellement sur la migration
différentielle des enzymes.
– Chromatographie de filtration sur gel
Cette méthode permet la séparation des protéines par leur poids et leur taille.
Le gel est souvent un polymère de dextrane (milieu réticulé non ionisé Séphadex) ou de
l’agarose ou des billes de verre.
Principe : les molécules de dimension supérieure aux plus gros pores du gel gonflé ne peuvent
pénétrer dans les billes et sont exclues.
Les solutés de petite masse moléculaire diffusent dans le gel et sont d’autant plus retardés que
leur masse est plus faible.
On élue donc les solutés dans l’ordre des masses moléculaires décroissantes.
– Chromatographie d’échange d’ions
Cette méthode utilise le comportement acido-basique des protéines : l’état d’ionisation de ces
amphotères varie en fonction du milieu ambiant.
Si le gel porte une charge opposée à celle de la protéine, il retiendra la protéine.
Si le gel porte la même charge que la protéine, il retiendra les protéines contaminantes.
Exemples de matériaux : résines et cellulose, Amberlite, Dowex, DEAE
– Chromatographie d’adsorption non spécifique
Les molécules sont séparées suivant leur affinité de surface pour l’absorbant.
Elles seront d’autant mieux retenues que leur surface (donc leur masse) est grande.
L’absorbant le plus utilisé est l’hydroxyapatite.
– Chromatographie d’affinité
Un ligand est attaché sur un support insoluble placé dans une colonne et fixe de façon
réversible et spécifique l’enzyme, les autres protéines étant éluées.
Le ligand est souvent un analogue du substrat.
– Immuno-adsorbants
L’enzyme se fixe sur l’anticorps et le reste passe.
On récupère l’enzyme par ajout de chlorure de Césium ou par gradient de pH.
Cette technique est valable pour les enzymes à haute valeur ajoutée.
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3. Pureté
La pureté enzymatique sera vérifiée par la mesure de l’activité spécifique de l’enzyme
(activité enzymatique/poids de l’enzyme).
4. Stabilité
L’étude de la stabilité est primordiale, car plus l’enzyme est pure, plus les risques de
dénaturation sont importants.
Il est important d’éliminer toute contamination bactérienne vu la présence des protéases.
LES ENZYMES IMMOBILISEES
L’addition d’enzyme en faible quantité dans les milieux réactionnels et leur grande instabilité
en solution ne permettent généralement pas leur récupération dans des conditions
économiques acceptables.
C’est pourquoi on a pensé à l’immobilisation (c’est-à-dire la fixation de l’enzyme sur un
support insoluble) qui s’accompagne souvent d’une augmentation de la stabilité de l’enzyme,
afin de remédier à cet inconvénient.
Elle facilite en outre la mise en œuvre de réacteurs continus, fonctionnant sur de longues
périodes, avec des pertes limitées de l’activité catalytique.
L’économie ainsi réalisée au niveau du procédé permet d’utiliser des enzymes plus pures, de
plus grande spécificité, qui améliorent les rendements et la qualité des produits obtenus.
Pour les enzymologistes, la fixation sur support réalise un système modèle proche des
conditions de la cellule vivante où les enzymes se trouvent fréquemment liées à la membrane
ou à des organites intracellulaires.
Les méthodes d’immobilisation
L’activité des enzymes est liée au maintien de l’intégrité de leur conformation tertiaire ; il faut
donc des méthodes d’immobilisation douces et contrôlées.
Les liaisons créées doivent exclure les acides aminés impliqués directement dans les réactions
catalytiques.
Enzymes immobilisées
ß
ß
Inclusion
Liaison
ß
ß
ß
ß
Matrice
Capsule
Adsorption Liaison covalente
À ces différentes techniques, il faut encore ajouter la fixation par réticulation.
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A. Immobilisation par inclusion
Les molécules d’enzymes sont retenues dans le réseau tridimensionnel d’un polymère
insoluble dans l’eau ou emprisonnées à l’intérieur de microcapsules délimitées par une
membrane semi-perméable dont les pores permettent les passages de substrats et produits.
L’enzyme n’est donc pas liée au support et conserve son intégrité.
1. Inclusion dans une matrice
On réalise une dispersion de l’enzyme dans une solution de monomère.
La polymérisation conduit à l’obtention d’un réseau à l’intérieur duquel est emprisonnée
l’enzyme.
On peut :
- découper le gel en membranes qui seraient déposées sur un support solide,
- déshydrater le gel obtenu afin d’obtenir une poudre pouvant être régénérée avec de l’eau,
- fabriquer des billes en faisant polymériser une phase aqueuse dans une phase organique
(exemple : les billes d’alginate),
- obtenir des fibres par extrusion puis coagulation.
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2. Inclusion à l’aide d’une matrice
– Microencapsulation
Une solution aqueuse contenant l’enzyme et un monomère hydrophile est émulsionnée dans
un solvant organique non miscible à l’eau. Par addition d’un deuxième monomère
hydrophobe, on provoque une réaction de polymérisation entraînant la formation d’une
membrane autour de microgouttelettes aqueuses. Les microcapsules sont recueillies par
centrifugation (diamètre de 1 à 100 µ).
– Méthode des liposomes ou membranes liquides
On soumet à l’action d’ultrasons des agrégats de phospholipides dispersés dans une phase
aqueuse contenant l’enzyme.
On obtient une double couche de phospholipides emprisonnant la phase enzymatique.
Ici, les produits et substrats passent en fonction de leur liposolubilité.
– Rétention sur membranes semi-perméables
Les membranes retiennent les enzymes dans un volume déterminé.
Avantages et inconvénients des méthodes par inclusion
Avantages
– Les réactions de gélification et de polymérisation sont bien connues.
– L’immobilisation est totale et immédiate.
– Il n’y a pas de lien entre l’enzyme et le polymère, ce qui limite le risque de dénaturation.
– C’est applicable à n’importe quelle enzyme, il n’y a pas de spécificité.
– La technique est valable pour les complexes multienzymatiques.
Inconvénients
– Il peut y avoir des fuites d’enzymes par diffusion.
– Il y a des problèmes d’encombrement stérique freinant les transferts de substrats, d’enzymes
et de produits.
– Les mauvaises propriétés mécaniques des gels ne permettent pas une utilisation en lit fixe.
– Certaines réactions de polymérisation étant exothermiques, il y a des risques de
dénaturation.
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B. Immobilisation par adsorption
Ces méthodes consistent à assurer la rétention de la molécule d’enzyme sur la surface d’un
support insoluble par l’établissement de liaisons de faible énergie (H, ioniques, hydrophobes,
Van der Waals) entre les groupements fonctionnels de l’enzyme et le support.
Si le support est non poreux, le biocatalyseur se fixe en surface ; s’il est poreux, il pénètre
dans les pores.
La préparation est simple : une mise en contact du support et de l’enzyme puis lavage afin
d’éliminer les enzymes non fixées.
Facteurs influençant l’adsorption :
– la concentration en enzyme : en considérant une quantité constante de support, la masse
d’enzyme adsorbée augmente avec la concentration en enzyme jusqu’à un palier de saturation
de l’adsorbant.
– pH : concerne surtout des interactions ioniques ; la charge de protéines varie : à pH inférieur
à pi, elle est positive et à pH supérieur à pi, elle est négative.
– temps de contact : le phénomène est souvent rapide : après quelques minutes de contact, la
majorité des enzymes est fixée.
– la température : elle augmente la diffusion et donc la vitesse d’adsorption ; en plus, une
augmentation de température se traduit souvent par une amélioration de l’adsorption qui
résulte du déploiement de la structure tridimensionnelle de la molécule. La limite est liée au
risque de dénaturation.
– la taille des particules, la nature du support : la masse d’enzyme adsorbée augmente avec
l’aire spécifique donc, avec la finesse des particules.
Les principaux types de supports :
supports minéraux :
- argiles (bentonite : structure lamellaire permettant une adsorption interlamellaire des
enzymes, la montmorillonite).
- verre poreux ou silice poreux : bonne rétention, bonnes propriétés mécaniques, bonne
surface spécifique : on peut régler le diamètre des pores de 7 à 5000 nm (la
valeur optimale est 2 fois la longueur du plus grand axe de la molécule
d’enzyme.
supports organiques :
- résines échangeuses d’ions DEAE, Dowex, amberlite…, le choix du support dépend
du pH de la réaction et du pi de l’enzyme.
- collagène : protéine fibrillaire peu coûteuse, car c’est un sous-produit des abattoirs
(tissus conjonctif, peau, tendons, ligaments,…)
- sels métalliques de titane.
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Avantages et inconvénients des méthodes d’adsorption
Avantages
– La mise en œuvre est simple : mise en contact.
– Il n’y a pas de réaction chimique.
– Il y a une possibilité de régénération (variation de pH).
Inconvénients
– Il y a des risques de décrochage, car le phénomène est réversible.
– La stabilisation est faible, car les liaisons sont faibles.
– L’accessibilité du site actif est plus ou moins facile suivant l’orientation de l’enzyme sur le
support.
– Il y a des pertes de charges et des risques de colmatage.
C. Immobilisation par liaison covalente directe
Cette méthode met en jeu une réaction chimique créant une liaison irréversible entre la
molécule enzymatique et les groupes réactifs du support.
Il existe en plus des phénomènes d’adsorption électrostatique qui consolident la fixation.
1. Immobilisation par liaison covalente sur support
Les groupements susceptibles de réagir sont situés sur les chaînes latérales des acides aminés.
La réaction chimique de formation de la liaison covalente devant être aussi peu dénaturante
que possible pour l’enzyme, il est nécessaire de procéder à une activation préalable des
groupements susceptibles d’entrer en réaction.
Principales méthodes d’activation des supports :
Groupes fonctionnels
Enzyme
Supports
-NH2
-NH2
-NH2
-NH2
-COOH
-OH
-SH
-SH
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Méthode
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Glutaraldéhyde
Azoture carbodiimides
Bromure de cyanogène
triazine
Pont disulfure,
photoactivation
Principaux supports :
De très nombreux supports peuvent être utilisés.
Il s’est même développé une chimie du greffage de groupes de support.
Les supports organiques ont de mauvaises propriétés mécaniques, mais possèdent une grande
densité de sites réactionnels ; les supports minéraux ont les caractéristiques opposées.
Supports
Groupe fonctionnel
SUPPORTS ORGANIQUES
Polyosides
Dextrane
Agarose
Cellulose
CMC
Aminoéthyl cellulose
Protéines
Collagène
Synthétiques
Polyacrylamide
Polyacrylates
Polystyrènes
Polyamide
- OH
- OH
- OH
- COOH
- NH2
- COOH
- NH2
- CO NH2
- divers
SUPPORTS MINÉRAUX
Silice et verre poreux
Oxydes métalliques
Graphite, carbone vitreux
Céramique, briques
Avantages et inconvénients de la méthode
Avantages
– La solidité de la liaison enzyme-support donne la possibilité de laver, de résister à des
variations de pH.
– Il existe une grande variété de supports et de méthodes d’activation.
– La structure tridimensionnelle devient rigide, ce qui augmente la résistance à la
dénaturation.
Inconvénients
– Réactions complexes et coûteuses.
– La quantité d’enzymes immobilisées est plus faible.
– Les supports organiques ont de mauvaises propriétés mécaniques et une sensibilité aux
micro-organismes.
– Possibilité de réactions entre groupements fonctionnels.
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2. Immobilisation par réticulation
Il y a des possibilités de réaliser des ponts chimiques entre les molécules de protéines
enzymatiques, ce qui donne un réseau tridimensionnel avec de bonnes propriétés mécaniques.
Dans ce cas, il n’y a donc pas de support.
On obtient des structures de très haute masse moléculaire qui deviennent insolubles.
Il n’y a pas de dilution due au support.
Cette méthode permet d’éviter la purification, car les impuretés servent à réaliser le support.
De plus, il est possible de coupler des enzymes d’origines différentes.
Mais, on relève parfois des baisses d’activité si une partie des groupements fonctionnels de
l’enzyme sont occupés.
Il est aussi possible de réticuler des cellules entières qui contiennent souvent une enzyme
intéressante, ce qui évite l’extraction et la purification de l’enzyme endocellulaire.
De nombreux réactifs peuvent être employés ; c’est la glutaraldéhyde qui est la plus utilisée.
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Le problème des co-facteurs
La plupart des enzymes industrielles sont actuellement utilisées dans des réactions de
dégradation ou d’isomérisation.
Pour faire progresser le génie enzymatique, il faudra traiter des enzymes effectuant des
réactions de synthèse, d’oxydo-réduction.
Ce sont des enzymes plus élaborées fonctionnant avec un cofacteur qui constitue justement un
facteur limitant par sa présence obligatoire.
Parmi ces cofacteurs, on peut citer les couples redox physiologiques comme
NAD(P)/NAD(P)H, H2O2/H2O
La plupart de cofacteurs ont une structure moléculaire commune :
Nom
FAD
Co A
NAD+
NADP+
ATP
ADP
AMP
R1
H
H
H
O-P
H
H
H
R2
H
P
H
H
H
H
H
R3
Idem
H
Ces cofacteurs étant très coûteux, les utilisations industrielles sont donc limitées.
Parades envisagées :
- trouver des enzymes dont le cofacteur fait partie intégrante de la protéine enzymatique ;
- trouver des cofacteurs de substitution ;
- régénérer ces cofacteurs par des méthodes chimiques, enzymatiques, électrochimiques
(électrodes), microbiologiques (très coûteux) ; les réactions s’auto-entretiendraient.
- fixer les cofacteurs.
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Génie enzymatique 20
Dans son principe, la régénération électrochimique est le système le plus séduisant pour
assurer le recyclage d’un co-substrat redox.
Son principal avantage est d’éviter l’introduction de substrat et enzyme additionnels ou de
réactif chimique (pour la régénération) et de simplifier ainsi les problèmes de séparation dans
un procédé continu.
On peut donc définir l’électrocatalyse enzymatique comme une méthode d’intégration au
niveau moléculaire d’une catalyse enzymatique assurant la bioconversion cherchée et d’une
réaction électrochimique assurant la régénération du co-substrat.
L’enzyme est immobilisée directement sur la surface de l’électrode, ce qui permet d’obtenir
par construction une distance faible entre site enzymatique et site électrochimique.
Cette disposition particulière, correspondant à la fixation d’une mono-couche d’enzyme,
confère une efficacité maximale au co-substrat qui effectue la navette entre les 2 sites.
Un autre avantage de cette épaisseur très faible du catalyseur est la suppression des transferts
de masse internes qui limitent la productivité des réacteurs à enzymes immobilisées.
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Le problème de la cinétique des enzymes immobilisées
Lors de l’étude du comportement cinétique d’une enzyme libre, on se place dans le cas de
systèmes homogènes et isotropes (mêmes propriétés dans toutes les directions).
En effet, d’une manière générale :
- toutes les molécules d’enzymes sont identiques et sont également accessibles au substrat
(même configuration).
- il y a unicité de concentration dans l’espace (homogène).
- tous les paramètres influençant le comportement de l’enzyme (concentration en substrat, pH,
température) ont une valeur identique en tout point de la solution.
Si on considère une réaction catalysée par une enzyme immobilisée, le système est hétérogène
et anisotrope.
En effet :
- toutes les molécules d’enzymes ne sont plus identiques : leur structure tertiaire peut subir
des distorsions à cause des liaisons,
- l’accessibilité au site catalytique dépendra de l’orientation de la molécule d’enzyme à la
surface du support,
- comme c’est un système à 2 phases, une solide portant l’enzyme et l’autre liquide contenant
le substrat, il est hétérogène. Par ailleurs, la densité de greffage de l’enzyme est variable.
- il s’établit des gradients de concentration, de pH, de température résultant de phénomènes de
partage ou de diffusion (amélioration possible par agitation).
On ne peut lors de l’étude de la cinétique en milieu hétérogène que définir des paramètres
statistiques caractérisant une population hétérogène de molécules d’enzymes.
Les conditions optimales des enzymes immobilisées diffèrent très souvent de celles des
enzymes en solution.
L’activité résiduelle des enzymes industrielles est souvent plus faible que celle des enzymes
natives, mais leur stabilité est souvent améliorée.
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Réacteurs à enzymes immobilisées
Beaucoup d’enzymes peuvent être immobilisées sur un support.
Le choix du support est délicat ; il faut tenir compte :
- du prix de revient de l’immobilisation et de l’investissement,
- de l’activité résiduelle de l’enzyme fixée,
- des risques de pertes et de dénaturation de l’enzyme,
- de la masse moléculaire et de la viscosité du substrat à traiter.
Les avantages des enzymes immobilisées sont cependant importants :
- augmentation de la stabilité,
- pas de contamination du milieu,
- modulation du micro-environnement,
- possibilité de travailler en continu.
Mais le problème complexe est l’impossibilité que l’on observe parfois de transposer les
essais semi-industriels à l’échelle industrielle.
Types de réacteurs
1. Batch
On place le complexe enzyme-support insoluble dans le réacteur et on attend en agitant.
Cette configuration est sous optimale car le système est discontinu et, car il y a des pertes
d’activités au cours des différents cycles.
Cependant, la technique est simple, peu coûteuse, facilitant les contrôles et applicable à de
nombreuses fermentations.
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2. Réacteur continu agité
On diminue le coût par automatisation : on place alors à la sortie, un filtre qui confine
l’enzyme dans le réacteur.
Il est donc possible de travailler en présence de gaz, avec des particules en suspension et dans
un environnement chimique assez stable.
Malheureusement, on ne peut assurer à la fois une bonne convection et utiliser
convenablement l’enzyme.
3. Réacteur à lit fixe
L’enzyme immobilisée est disposée dans une colonne et est percolée par le substrat à
transformer.
Le flux peut être ascendant ou descendant ou avec recyclage.
Les inconvénients sont :
- le compactage des particules en suspension, la création de cheminements préférentiels, une
variation de débit ;
- des pertes de charges importantes (en fonction de la viscosité, du débit, de la taille des
particules) ;
- l’impossibilité d’utiliser des gaz, car des poches se formeraient et casseraient les colonnes.
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4. Réacteur à lit fluidisé
L’enzyme est suspendue dans le réacteur (sans le quitter) par circulation montante de la
substance à traiter ou par injection d’un gaz.
Il y a fluidisation lorsque la force du mouvement liquide égal la masse des particules.
Les avantages sont :
- l’introduction de gaz possible (oxygène, par exemple),
- le système nécessite moins d’enzymes, car il y a une augmentation de la surface réactive,
- une amélioration des échanges thermiques et de matières,
- moins de colmatages ; on peut donc travailler avec des substances visqueuses.
Les inconvénients sont :
- les pertes de charges importantes provenant de la friction entre les particules solides et le
liquide ascensionnel.
5. Réacteur agité avec ultrafiltration
On utilise des membranes de filtration pour récupérer l’enzyme.
Les produits de petite taille sont récupérés.
L’inconvénient majeur est le risque de colmatage.
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6. Réacteur à fibres creuses
Le choix d’un réacteur industriel est un cas particulier qui résultera d’un compromis entre la
rentabilité économique du processus et les impératifs liés au type de produit fabriqué.
Conclusion
Les enzymes immobilisées permettent une diminution du prix de revient de la transformation
d’un substrat en produit.
Pour que la fixation soit rentable, il faut un bon rendement de fixation et une activité
enzymatique importante.
Malgré les nombreux travaux de recherche, l’immobilisation enzymatique relève plus d’un art
que d’une science.
Il est, en effet, impossible de prévoir à priori pour une enzyme donnée quels seront le support
et la méthode de fixation qui conduira au dérivé présentant l’activité enzymatique et la
stabilité les plus importantes (empirisme), mais il y a des essais de modélisation.
La possibilité de retenir les enzymes dans une phase insoluble a permis de les utiliser dans des
bioréacteurs : l’enzyme devient un outil technologique qui permet de modifier le milieu à
traiter sans aucune addition de produit exogène, ce qui est particulièrement important en IAA
car, au niveau législatif, les enzymes sont considérés comme des additifs alimentaires.
Les enzymes immobilisées n’ont pas connu l’essor escompté, car cela nécessitait des
modifications d’équipement et donc des investissements énormes.
On observera cependant que toutes les nouvelles applications technologiques se font au
moyen d’enzymes immobilisées.
Certains réacteurs à enzymes immobilisées peuvent fonctionner plusieurs fois si l’activité est
maintenue et si l’état sanitaire du réacteur est excellent.
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L’IMMOBILISATION DES CELLULES
La cellule n’est qu’un outil de fabrication, car elle est capable de réaliser une bioconversion
plus ou moins complexe.
Par exemple, lors de la production d’éthanol, les cellules de levures fabriquent celui-ci à partir
de glucose ; le brasseur ou le distillateur récupère et recycle les cellules.
L’idée de faire croître des micro-organismes sur des supports insolubles n’est pas nouvelle :
en épuration de l’eau, on utilise depuis longtemps des lits bactériens ; on utilise aussi des
microorganismes pour la lixiviation des minerais.
Les premières immobilisations de cellules à des fins industrielles remontent à 1975 environ.
Dans la conduite des réacteurs à cellules immobilisées, on distingue 2 types
d’immobilisation :
- la fixation de cellules vivantes qui peuvent se multiplier (le micro-organisme est un
bioréacteur),
- l’utilisation de l’enveloppe cellulaire comme matière pour emprisonner certaines enzymes
cellulaires (les cellules sont tuées par la chaleur ou à l’aide de réactifs chimiques, ce sont des
sacs à enzymes).
L’immobilisation des cellules permet de supprimer les étapes longues et coûteuses
d’extraction et de purification.
Elle limite aussi les pertes d’activité des systèmes enzymatiques.
L’immobilisation des cellules présente l’avantage de permettre la réalisation de réactions
multi-enzymatiques assurant la production de métabolites élaborés, mais aussi la régénération
de cofacteurs (les enzymes restent dans leur environnement naturel).
Toutefois, un certain nombre de conditions doivent être satisfaites :
- le substrat et le produit doivent pouvoir transiter aisément à travers la paroi cellulaire,
- le micro-organisme ne doit pas contenir d’enzymes responsables de réactions parasites
indésirables ou celles-ci doivent pouvoir être facilement inhibées dans les conditions retenues,
- si les produits sont destinés à être absorbés par l’homme ou les animaux, les microorganismes sélectionnés ne doivent sécréter aucune toxine.
Les techniques d’immobilisation des cellules dérivent de celles mises au point pour les
enzymes :
- adsorption sur support (pas de liaisons covalentes, car trop dénaturantes) : il importe de
sélectionner le support en fonction du type de microorganisme et de la composition du milieu
de culture de telle façon à favoriser l’adhésion primaire qui doit être très rapide et abondante,
rendant ainsi la colonisation ultérieure la plus rapide possible ; les cellules sont nichées dans
des infractuosités du support ce qui permet d’augmenter considérablement la concentration en
biocatalyseur pour un volume de support donné ; ces derniers se présentent généralement sous
forme de granules d’origine minérale (alumine, brique, verre, métaux) ou organique
(collagène, cellulose, résines échangeuses d’ions) ;
- inclusion : c’est sans doute la méthode d’immobilisation la plus couramment utilisée, tant
pour les cellules viables que non viables. Il s’agit d’emprisonner les cellules dans un réseau
rigide qui leur interdit d’envahir le milieu liquide tout en permettant la diffusion des substrats
et des produits les cellules se divisent à l’intérieur des billes du gel et occupent le volume vide
disponible).
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D’une manière générale, la durée de demi-vie est relativement longue et les rendements
d’activité sont élevés, ce qui conduit à une amélioration très nette des productivités.
En effet, outre l’intérêt de réaliser des procédés continus, les systèmes utilisant les cellules
viables ont l’avantage de permettre le maintien d’importantes concentrations cellulaires
Toutefois, les cellules immobilisées sont sensibles aux variations des conditions du milieu
intervenant au cours des réactions (pH, CO2…) qui peuvent conduire à leur empoisonnement.
Par ailleurs, une prolifération cellulaire trop importante peut conduire à la rupture du gel ou à
des modifications de ses propriétés.
Mise en œuvre des cellules immobilisées
La réalisation de particules contenant des microorganismes immobilisés permet leur
utilisation en réacteur ouvert : lit fixe ou lit fluidisé.
Il s’agit alors de déterminer quelle est la stabilité opérationnelle du système ; pour cela, on
déterminera la « demi-vie » du réacteur qui correspond au temps d’utilisation au bout duquel
50% de l’activité enzymatique initiale a disparu (exemple 611 jours pour une activité
aspartase portée par E Coli).
Il faut optimaliser les conditions d’immobilisation afin d’obtenir un rendement correct, un
temps de demi-vie élevé, de bonnes propriétés mécaniques du support.
Il convient aussi d’analyser les caractéristiques du réacteur (débit, ..).
Généralement, la modélisation de ces systèmes est empirique. L’ensemble des paramètres ne
pouvant être quantifié, on a recours à des approximations.
Exemples de dispositifs
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Quelques applications industrielles des cellules immobilisées
- Chez Moët et Chandon à Reims, un nouveau procédé d’élimination des dépôts de levure
dans le champagne en fin d’élaboration a été mis au point.
Celui-ci consiste à inclure les cellules de levure destinées à réaliser la prise de mousse dans
des billes d’alginate : les cellules conservent leurs propriétés métaboliques. Les billes étant
légèrement plus lourdes que le vin, elles se concentrent en quelques minutes dans le col de la
bouteille retournée au lieu de 2 mois dans la méthode champenoise classique (avec
retournement et inclinaison progressifs).
- Production de sirops à haute teneur en fructose à partir d’amidon et de polyols.
- Production de lait à faible teneur en lactose envisagée en utilisant des cellules de
Lactobacillus bulgaricus incluses dans des billes d’Agar.
- Procédé de brassage continu en réacteur à lit fixe avec des cellules adsorbées.
- Production de glycérol par une algue, Dunaliella, immobilisée dans l’alginate de calcium ;
une productivité 2 à 3 fois plus élevée qu’avec des cellules libres a été obtenue pour
une concentration en glycérol de 40g/l.
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On peut optimiser les processus biotechnologiques selon le schéma suivant :
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UTILISATION INDUSTRIELLE DES ENZYMES
Producteurs d’enzymes : NOVO, Gist-Brocades, ICI, Solvay…
A. Industries agro-alimentaires
Ce sont des méthodes traditionnelles, mais les applications portent plutôt sur des
modifications de goût, de texture, de présentation générale des aliments.
Exemples :
- amélioration de la texture : biscuiterie, panification,
- diminution de l’amertume des jus de fruits,
- amélioration de la filtrabilité (pectinase pour colloïdes),
- amélioration de la digestibilité (protéase).
On remarque une tendance à utiliser des enzymes d’origine microbienne plutôt que d’origine
animale et végétale vu leur thermostabilité supérieure.
1. Amidonnerie
Une société peut, en moyenne, fabriquer à partir d’amidon 300 produits différents (Amylum).
Cependant, l’inconvénient de l’amidon est que pour l’utiliser, il faut l’hydrolyser.
Il faut donc des enzymes : amylases, amyloglucosidase, pullulanase (débranchement), glucose
isomérase (glucose®fructose).
2. Sucrerie
Traditionnellement, la sucrerie n’utilise pas d’enzymes.
Mais, il existe quelques cas où les enzymes peuvent être utilisées pour faciliter les opérations
d’extraction et de raffinage :
- amylase bactérienne pour diminuer la viscosité provenant de la présence de contaminants
amylacés qui, en plus, nuisent à la cristallisation ;
- dextranase fongique pour diminuer la viscosité des sirops contaminés par Leuconostoc qui
produit des dextrane ;
- mélibiase qui hydrolyse le raffinose en glucose ;
- invertase qui transforme le saccharose en glucose + fructose ou sucre inverti, liquide.
3. Biscuiterie, panification
Le but est surtout de tenter de corriger des déficiences enzymatiques :
- amylases pour l’hydrolyse de l’amidon (blés hypoamylasiques) pour améliorer les qualités
fermentaires de la pâte dont dépendent le volume de la mie de la coloration de la
croûte ;
- protéases pour modifier la texture, l’élasticité du gluten et donc ainsi diminuer le temps de
pétrissage (30%) ;
- lipoxygénase pour rendre la mie plus blanche.
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4. Brasserie
C’est le secteur où l’utilisation des enzymes est la plus répandue :
- enzymes amylolytiques pour liquéfier l’amidon contenu dans la fraction des grains crus ;
- amyloglucosidase pour une transformation plus poussée de l’amidon en glucose
permettant ainsi d’augmenter le pourcentage de sucres fermentescibles, de diminuer
les sucres résiduels afin de diminuer la teneur en calories (diététique) ;
- b glucanase pour hydrolyser les b glucane et ainsi diminuer la viscosité du moût et
augmenter la filtrabilité ;
- enzymes protéolytiques (papaïne, ficine, bromélaïne, pepsine) pour limiter le trouble au
froid lié à la présence de protéines insolubles à basse température.
5. Vinification
Le problème principal de cette industrie est la présence de pectine provenant de la pellicule et
des parties solides du raisin.
Cette pectine est responsable de la difficulté d’extraction du jus, de la turbidité et de la
mauvaise filtrabilité. C’est pourquoi, afin de l’éliminer, on utilise des pectinases.
6. Industrie de boissons fruitées non alcoolisées, gazeuses ou non
Le problème vient aussi des pectines (donc usage de pectinases) et des défauts d’amertume.
On utilise des naringinases afin de désamériser les jus de pamplemousses, d’orange (présence
de naringine).
7. Laiterie
La transformation du lait en caillé se fait grâce à de la présure (animale, mais remplacée de
plus en plus par une présure d’origine fermentaire : fongique ou bactérienne).
À côté du beurre, on retrouve le petit lait qu’on peut utiliser en alimentation humaine suite à
l’action de la lactase (= b galactosidase). À noter aussi, la décomposition du lactose par la
lactase.
8. Textile
Pour augmenter la résistance à la traction des fils de coton pour le tissage, on les encolle avec
des préparations de polymères. Ensuite, il faut les éliminer sans abîmer les fibres ; on recourt
alors aux amylases ou aux protéases.
9. Papier
On liquéfie l’amidon pour préparer les sauces de couchage ; il faut, pour cela, utiliser des
amylases.
10. Conserverie
La cellulase permet de diminuer les résidus insolubles des poudres de légumes lyophilisés.
La glucose-oxydase permet d’éviter le brunissement des œufs séchés et l’oxydation de
certains produits lors de la conservation.
Remarque : le lysozyme est extrait des blancs d’œuf de poule et est utilisé pour la
conservation du lait maternel, du caviar et pour l’inhibition de Clostridium butyricum dans les
fromages à pâtes molles.
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B. Chimie industrielle
1. Production d’acides organiques
Classiquement, la plupart des acides organiques utilisés dans l’industrie alimentaire sont
obtenus par extraction ou fermentation.
Au cours des dernières années, plusieurs procédés enzymatiques ont été mis au point.
L’acide L malique (acidulant alimentaire de choix) est produit par l’action de la fumarase de
Brevibactérium ammoniagenes sur l’acide fumarique.
2. Production d’acides aminés
C’est au Japon (1950) que le premier procédé de fermentation permettant de passer du
glucose à l’acide glutamique fut réalisé.
Depuis, la L lysine et d’autres acides aminés ont été produits à bas prix.
L’intérêt économique est évident vu la consommation élevée des acides aminés tant en
pharmacie que dans l’industrie des viandes (goût).
L’industrie des aminoacides fait l’objet de recherches continuelles.
Les fabricants d’aliments pour animaux y sont aussi vivement intéressés.
3. Production et modification d’antibiotiques
Exemples : thyrotricine, pénicilline…
4. Production de mononucléotides
Exemples : adénosine, guanosine, uridine, cytidine,…qui, avec l’acide phosphorique, forment
des nucléotides.
5. Production de cyclodextrines
Elles sont obtenues par action, sur un amidon faiblement liquéfié, de la
cyclodextrinetransglycosidase.
….
C. Secteur de la santé
1. Enzymes digestives
Elles sont utilisées pour combler une insuffisance causée par une maladie (mucoviscidose,
pancréatite).
2. Anti-inflammatoires
3. Troubles de la coagulation
Elles sont utilisées en cas d’hypocoagulabilité ou pour faire disparaître un caillot (embolie)
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D Utilisations analytiques des enzymes
Les enzymes répondent avantageusement aux différents impératifs des méthodes analytiques :
- sélectivité,
- sensibilité,
- fiabilité,
- faible quantité de réactifs,
- temps réduits,
- possibilité d’automatisation
Les modes de détection sont multiples :
- détection optique : un substrat, un co-enzyme ou un produit de la réaction peut être détecté
par la variation de densité optique à une longueur d’onde donnée dans le spectre UV ou
visible lors de sa transformation ou de son apparition.
- détection électro-chimique, conductimétrie : de nombreuses réactions enzymatiques
conduisent à la libération de protons, ce qui entraîne, en milieu non tamponné, une
modification du pH.
L’évolution d’autres espèces d’ions peut être suivie au moyen d’électrodes spécifiques.
- détection thermique : ce type de détection a été principalement développé avec les enzymes
immobilisées.
On mesurera le dégagement de chaleur associé à la réaction enzymatique (thermocouple).
La bio-analyse aujourd’hui repose sur l’utilisation de kits d’essais enzymatiques.
Un kit d’essai contient tous les réactifs sous une forme facile à utiliser et dans la quantité
nécessaire pour effectuer un certain nombre d’analyses, dans des conditions optimales pour
les enzymes en questions. Leur stockage s’effectue à 4°C et leur duré de vie varie d’un
fabricant à l’autre.
Ils sont en expansion continue pour le diagnostic médical mais également pour l’analyse des
aliments et boissons.
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1. Dosage enzymatique des métabolites
a. Méthode du point final
Il s’agit de mesurer la transformation totale du substrat S en produit P : S ® P qui
présente une absorption à une longueur d’onde donnée.
Le substrat à doser est le seul facteur limitant. Tous les autres réactifs sont en large
excès par rapport à la substance à doser.
On mesure la différence d’absorbance du milieu réactionnel entre le début et la fin de
la réaction.
On doit réaliser un blanc réactif qui permet de faire le zéro du spectrophotomètre et
d’éliminer ainsi toutes les absorbances parasites ; il correspondra au temps 0 de la
réaction et contiendra tous les réactifs sauf le substrat.
Si la transformation du substrat en produit est complète, l’absorbance va augmenter au
cours de la réaction et se stabiliser à une valeur donnée lorsque tout le substrat aura été
consommé.
Alors, DA (A essai – A blanc réactif) est proportionnel à la concentration en substrat
dans le milieu réactionnel.
Connaissant le coefficient d’absorption molaire du produit (pour une longueur d’onde
choisie), on peut déduire, par calcul, la concentration initiale du substrat dans
l’échantillon.
Si ce coefficient n’est pas connu, on réalise une droite d’étalonnage, réalisée dans des
conditions identiques.
Ne pas oublier de tenir compte du facteur de dilution si une dilution préalable a été
nécessaire.
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b. Méthode cinétique
Ces méthodes consistent à mesurer la vitesse initiale d’une réaction enzymatique :
détermination de la tangente à l’origine de la courbe.
En effet, l’équation de Michaelis-Menten montre que, pour des faibles concentrations
en S, la réaction est de pseudo ordre 1 : la branche d’hyperbole se confond presque
avec la tangente.
Ces méthodes sont applicables lorsque la concentration en substrat à mesurer se trouve
dans une zone de concentration inférieure à 0,1 KM.
On mesure la vi de la réaction principale, par une méthode cinétique en continu (car la
durée des conditions initiales est très courte à faible concentration en S), sur un essai
et un étalon, traités dans les mêmes conditions. Il est inutile de faire un blanc puisque
c‘est uniquement DA par unité de temps qui sera mesurée.
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c. Mesures à l’aide de réactions couplées
Si aucun des composés intervenant dans la réaction ne peut être déterminé facilement,
on a recours à une réaction enzymatique indicatrice qui peut avoir lieu dans le même
essai.
Il faut évidemment qu’une relation stoechiométrique existe entre le substrat à doser et
le produit de la réaction indicatrice.
Les réactions indicatrices les plus courantes utilisent le NADP (voir laboratoire).
Exemple : le dosage du glucose
2. Détermination d’activités enzymatiques
Dans le cas classique, la détection de l’activité enzymatique se fait par
spectrophotométrie.
Cette activité peut être détectée et mesurée en déterminant la vitesse de réaction en
présence de concentration saturante du ou des substrat(s).
Si la concentration en substrat est supérieure à KM alors la vitesse atteindra la vitesse
maximale.
Détermination directe
À un volume donné de mélange réactionnel contenant le ou les substrat(s) et cofacteur
de l’enzyme en milieu tamponné et thermostatisé, on ajoute une aliquote de
l’échantillon à doser.
Dans ce cas le plus simple, la variation de concentration en fonction du temps d’un
réactif est directement calculée à partir de la variation d’absorbance due à ce réactif.
La variation de concentration du composé en fonction du temps dépend de l’activité
enzymatique présente dans l’échantillon, donc la mesure est possible.
Exemple : application clinique : un certain nombre de lésions cellulaires entraîne la
libération d’enzymes qui pourraient être détectées par l’augmentation des activités
plasmatiques correspondantes.
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Catégorie
Oxydase
Transférase
Hydrolase
Activité enzymatique
Glutamate déshydrogénase
Créatine kinase
Glutamate pyruvate
transaminase
Lipase
Cholinestérase
Phosphatase acide
Organes concernés
Foie
Muscles, cœur
Foie, cœur, muscles
Muscles
Foie
Tumeurs
Les enzymes utilisées comme marqueurs d’autres molécules
Il peut s’avérer nécessaire de mettre en évidence certaines molécules ne présentant pas
d’activité catalytique.
On va marquer, avec une enzyme, un des composés intervenant dans la réaction et par dosage
de cette activité, on pourra déterminer la concentration de cette substance intéressante.
Exemple : les Enzyme Linked Immuno Sorbent Assay (sandwich, compétition)
3. Les électrodes à enzymes
Le principe consiste à transformer, grâce à une enzyme, un produit à doser, non directement
mesurable, en un composé que l’on peut doser par une méthode électrochimique.
Une électrode à enzyme est une association intime d’une réaction enzymatique spécifique et
d’un détecteur (potentiomètre, ampèremètre) détectant spécifiquement une espèce (ionique,
gazeuse, non ionique) et le traduisant sous forme de signal électrique.
L’enzyme se trouve sous forme soluble ou immobilisée :
- soluble : la solution enzymatique est maintenue au contact du récepteur par une membrane à
dialyse ;
- immobilisée : on pratique l’inclusion physique de l’enzyme dans les mailles de gels de
gélatine, de polyacrylamide, près des systèmes de détection. La technique consiste donc à
réaliser une sorte de filet autour de la molécule d’enzyme pour la maintenir en contact étroit
avec le détecteur
On peut aussi fixer l’enzyme sur un support préalablement activé ou en utilisant la
glutaraldéhyde comme intermédiaire entre le support et l’enzyme (pont).
Principales applications : électrode à glucose, à saccharose, électrode à acides aminés
(phénylalanine, lysine…), électrode à urée, à éthanol…
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Exemple : l’électrode à glucose
Principe de la méthode :
Glucose + H2O + O2
Glucose oxydase
®
acide gluconique + H2O2
On pourra déterminer :
- la consommation d’oxygène au moyen d’une électrode de Clark (p O2),
- la formation de peroxyde d’hydrogène au moyen d’une électrode de Pt,
- la formation d’acide gluconique au moyen d’une électrode pH.
La fixation de la glucose-oxydase peut donc se faire sur une de ces électrodes.
Schéma
Ce système est placé dans une cellule de mesure où l’échantillon (100µl) est introduit.
Remarque : le rinçage de l’électrode, entre 2 mesures, est une opération très importante : il
faut en effet revenir à 0. Or, il y a 50 fois plus d’oxygène dans la membrane que dans le
liquide.
De nombreux rinçages sont donc nécessaires ainsi qu’une insufflation d’air (cycle de rinçages
automatique).
Une même électrode peut effectuer 3000 mesures au rythme d’une par minute.
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Utilisations potentielles des biocapteurs
- Secteur biomédical : les laboratoires médicaux sont intéressés par cette technique car :
- elle ne nécessite pas de traitement préalable (ou un traitement réduit) de
l’échantillon,
- le volume d’échantillon nécessaire est très faible (quelques microlitres),
- le temps de réponse est court (la minute),
- la mise en œuvre de l’appareillage est facile (automatique)
- Secteur industriel : cette technique peut se retrouver :
- pour le contrôle des procédés de production,
- pour le contrôle des produits finis.
Les raisons sont les mêmes que pour le secteur médical.
Exemples d’application
– Mesure de la teneur en glucose dans un fermenteur en temps réel.
– Pancréas artificiel : on détermine la concentration en glucose en temps réel et un microprocesseur permet l’injection de glucose ou d’insuline ; c’est en quelque sorte, une prothèse
biochimique.
Remarque : il existe des électrodes à bactéries ; elles permettent d’utiliser les enzymes dans
leur milieu naturel, la cellule, qui laisse une meilleure activité et des processus
d’immobilisation plus simples.
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