Chapitre 8 États de mal épileptiques Introduction Les états de mal épileptiques (EME) sont une urgence thérapeutique et constituent un véritable enjeu de santé publique par leurs conséquences en termes de morbidité et mortalité. Leur incidence est difficile à établir de façon fiable : mélange dans les études d’états de mal véritables et d’états postanoxiques, d’états de mal convulsifs et non convulsifs, durées variables retenues pour la définition même des états de mal. Néanmoins, on peut retenir un chiffre d’incidence de 6 à 40 nouveaux patients pour 100 000 individus par an [1]. Deux faits semblent avérés : l’incidence des EME est plus élevée aux âges extrêmes de la vie (nourrisson/sujet âgé), il s’agit dans environ 50 % des cas d’EME de novo inauguraux. Définition Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) [2], l’état de mal épileptique est défini comme un « état caractérisé par une crise épileptique qui persiste suffisamment longtemps ou qui se répète à des intervalles suffisamment brefs pour créer une condition épileptique fixe et durable ; les états de mal pouvant revêtir autant d’aspects sémiologiques qu’il existe de variété de crises d’épilepsie. » Très rapidement, la Ligue internationale contre l’épilepsie a fixé une durée de 30 minutes pour définir l’EME [3], le définissant ainsi comme une crise épileptique se prolongeant au-delà de 30 minutes ou se répétant sur 30 minutes à des intervalles brefs sans reprise de conscience entre les crises. Une définition opérationnelle réduisant le délai à cinq minutes a ensuite été proposée pour l’état de mal épileptique généralisé tonicoclonique [4-6]. Epilepsies de l'enfant, de l'adolescent et de l'adulte © 2020 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Enfin, en 2015, la Ligue internationale contre l’épilepsie [7] a proposé une nouvelle définition des états de mal en s’axant sur deux dimensions de temps : • la dimension T1 ou durée de la crise à partir de laquelle on définit l’état de mal épileptique et initie le traitement ; • la dimension T2 à partir de laquelle on peut redouter des séquelles à long terme sur la base de modèles animaux et d’études de recherche clinique. Pour les EME généralisés tonicocloniques (primitifs ou secondairement généralisés), T1 reste fixé à 5 minutes (définition opérationnelle) et T2 est établi à 30 minutes, pour les EME focaux avec rupture de conscience, T1 est fixé à 10 minutes et T2 est établi à plus de 60 minutes, pour les EME absence : T1 oscille entre 10 et 15 minutes et il n’est pas établi de dimension T2. Pour tous les autres EME, on peut supposer que par défaut T1 reste à 30 minutes et que T2 reste à définir. ●● À noter Les crises sérielles sont définies comme des crises se répétant avec récupération de la conscience antérieure entre les crises. Les crises sérielles peuvent évoluer vers un état de mal mais ne rentrent pas dans la définition de celui-ci. Classification De très nombreuses classifications des EME existent [7], basées sur : • le type de crise : – EME généralisé : EME tonicoclonique, absence, myoclonique, tonique, atonique, clonique – EME focal : sans rupture de contact, avec rupture de contact 120 Epilepsies de l'enfant, de l'adolescent et de l'adulte Cette classification a pour avantage sa simplicité et sa facilité d’emploi, mais ne comporte aucune donnée pronostique et aucune gradation dans la sévérité des états de mal. • le syndrome épileptique : EME myoclonique juvénile, absence de l’enfant, etc. trop complexe pour les médecins non habitués à utiliser la classification syndromique et là encore ne prend pas en compte la gradation de la sévérité des états de mal • l’étiologie : – connue (symptomatique) : – aiguë (AVC, intoxication, malaria, encéphalite, etc.), – ancienne (post-traumatique, postencéphalitique, post-AVC, etc.), – progressive (tumeur cérébrale, maladie de Lafora et autres épilepsies myocloniques progressives, démence) ; – inconnue (cryptogénique ou de cause inconnue) ; • l’âge Sur un plan clinique et pragmatique, on peut distinguer deux grandes formes cliniques d’états de mal : • les états de mal dont le diagnostic repose sur la clinique : les états de mal convulsifs ou avec symptômes moteurs prédominants ; • les états de mal dont le diagnostic repose essentiellement sur l’EEG : les états de mal non convulsifs ou sans symptômes moteurs prédominants. Le tableau 8.1 reprend les dernières recommandations de classification issues de la conférence Française d’experts sur la « Prise en charge des états de mal épileptiques en préhospitalier, en structure d’urgence et en réanimation dans les 48 premières heures » [8]. Diagnostic étiologique Le bilan étiologique doit distinguer deux grands cas de figure : • les EME inauguraux survenant de novo ; • les EME survenant chez des patients épileptiques connus. Dans tous les cas, ce bilan comprendra un bilan sanguin de base : glycémie, natrémie, calcémie ionisée et/ou totale, numération formule sanguine avec compte des plaquettes, TP, TCA, urée, créatinine, bilan hépatique et selon le contexte d’autres dosages (antiépileptiques, toxiques, etc.) (fig. 8.1). Les autres examens complémentaires (imagerie, PL, etc.) seront guidés par le caractère inaugural ou non de l’EME, le contexte, l’anamnèse de l’entourage et l’examen clinique. EME inauguraux Face à un EME de novo, il convient d’éliminer en urgence une pathologie cérébrale aiguë, ce d’autant qu’il existe un contexte évocateur ou d’autres signes Tableau 8.1. Classification simplifiée des états de mal d’après [8]. Diagnostic Difficulté diagnostique Gravité EME avec symptômes moteurs prédominants Tonicoclonique généralisé d’emblée Clinique +/– +++ Tonicoclonique secondairement généralisé Clinique +/– +++ Focal moteur : état de mal partiel somato-moteur épilepsie partielle continue Clinique – – Myoclonique (avec ou sans coma) Clinique +/– – Tonique Clinique +/– + Avec coma (EME larvé ou aspect sur l’EEG d’EME chez un sujet comateux) EEG +++ +++ EME absence EEG ++ – EME focal sans confusion EEG +++ – EME focal à expression confusionnelle EEG +++ ++ EME sans symptômes moteurs prédominants Chapitre 8. États de mal épileptiques 121 Figure 8.1. Bilan étiologique d’un EME. tels que des signes neurologiques focaux, ou un syndrome méningé. Les pathologies les plus fréquemment en cause sont les accidents vasculaires cérébraux (ischémiques ou hémorragiques, y compris les hémorragies sous-arachnoïdiennes, et les thrombophlébites cérébrales), les traumatismes crâniens, les infections du SNC (méningites bactériennes, encéphalite, abcès cérébraux) et les tumeurs cérébrales avec ou sans évolution récente (fig. 8.2) [8]. ●● À noter On préconisera le recours systématique à l’imagerie cérébrale dans le bilan étiologique initial d’un EME inaugural. Attention, les anomalies détectées sur l’IRM cérébrale peuvent être la conséquence et non la cause de l’EME : hyper-signaux corticaux unilatéraux (notamment de l’hippocampe), de la substance blanche adjacente, des ganglions de la base, du thalamus (pulvinar), du corps calleux et du cervelet [9]. Ces anomalies fonctionnelles sont alors normalement réversibles une fois l’EME contrôlé. ●● À noter Devant un EME non convulsif inaugural du sujet jeune ou adulte, on procédera très rapidement, hors cause évidente, à une PL pour écarter une encéphalite auto-immune ; 10 % des EMNC réfractaires de novo ont une cause auto-immune [10]. Attention, des modifications cytologiques (pléïocytose) et biologiques (augmentation de la concentration du lactate et du rapport albumine LCR/sérum) Figure 8.2. Principales étiologies d’état de mal épileptique inaugural (adapté de [8]). 122 Epilepsies de l'enfant, de l'adolescent et de l'adulte Figure 8.3. Principales étiologies d’état de mal épileptique chez un patient épileptique connu (adapté de [8]). du LCR sont parfois décrites en phase postcritique en l’absence de toute pathologie infectieuse ou vasculaire. Cependant, dans ce cas, la pléïocytose est modérée (< 25 éléments.µL-1) et précoce (< 24 heures) [11]. L’EEG ne doit pas retarder la prise en charge thérapeutique mais reste indiqué en urgence en l’absence de réveil après arrêt des convulsions. Diagnostic différentiel Chez un patient épileptique connu, on éliminera en priorité (fig. 8.3) : • un sevrage du traitement anti-épileptique ; • un traitement de fond inadapté ; • un trouble métabolique aigu ; • une infection systémique ; • un sevrage/intoxication en alcool ou en psychotropes ; • une intoxication aiguë accidentelle ou volontaire ; • une évolution de l’éventuelle pathologie sousjacente (tumeur cérébrale). Pour les diagnostics différentiels, on évoquera en premier lieu : • un pseudo-EME (surtout si terrain connu de CNEP [12]) : à évoquer cliniquement, devant : – une suggestibilité, – des manifestations motrices violentes, amples, désorganisées, sans systématisation neurologique, – une fermeture des yeux, avec résistance à l’ouverture des yeux [13], – une absence de réelle perte de conscience, pendant et au décours immédiat de l’épisode, – une absence de désaturation pendant l’épisode ; • d’autres mouvements anormaux (notamment des myoclonies) Diagnostic positif et différentiel EME non convulsifs ou sans symptômes moteurs prédominants EME survenant chez des patients épileptiques connus EME convulsifs ou avec symptômes moteurs prédominants Diagnostic positif Pour les EME ou avec symptômes moteurs prédominants, le diagnostic positif est clinique. Diagnostic positif Devant un tableau de confusion ou de déficit neurologique focal sans cause évidente retrouvée, le diagnostic reposera sur l’EEG. À cette fin, des critères diagnostiques EEG ont été proposés puis validés : les critères EEG dits « de Salzbourg » [8, 14-16] : Focus Critères EEG de Salzbourg [8] Patient sans encéphalopathie épileptique connue • Patterns EEG avec une évolution spatio-temporelle ou anomalies épileptiformes (pointes, pointes ondes, poly-pointes, poly-pointes-ondes, ondes aiguës) dont la fréquence est supérieure à 2,5 Hz. • Anomalies épileptiformes périodiques (latéralisées ou généralisées) de fréquence inférieure à 2,5 Hz ou activités rythmiques de fréquence supérieure à 0,5 Hz associées à un des critères suivants : – amélioration EEG et clinique après administration de molécules antiépileptiques ; – présence de manifestations cliniques discrètes possiblement critiques ; – dynamique d’évolution spatio-temporelle. Patient avec encéphalopathie épileptique connue • Augmentation d’amplitude ou de fréquence de l’activité paroxystique en comparaison avec l’activité de fond avec modification significative de l’état clinique. • Amélioration EEG et clinique après administration IV de molécules antiépileptiques. Figure 8.4. Aspect EEG d’encéphalopathie médicamenteuse. Chapitre 8. États de mal épileptiques 123 ●● À noter Un test d’injection IV de benzodiazépine est dit positif et en faveur d’un diagnostic d’EME, si l’amélioration du tracé EEG s’accompagne d’une normalisation de l’état clinique. Diagnostic différentiel EME non convulsifs à expression confusionnelle Différents diagnostics différentiels doivent être évoqués selon le contexte : • les encéphalopathies médicamenteuses/métaboliques avec comme éventuels facteurs de confusion diagnostique la présence fréquente de myoclonies (non épileptiques) et l’atténuation possible des anomalies EEG après injection d’une benzodiazépine (BZD) (mais sans amélioration de l’état clinique). Néanmoins, l’aspect classique d’ondes lentes triphasiques orientera le diagnostic (fig. 8.4) ; • les encéphalopathies postanoxiques (fig. 8.5) ; 124 Epilepsies de l'enfant, de l'adolescent et de l'adulte Figure 8.5. Aspect EEG d’encéphalopathie postanoxique. ●● À noter L’encéphalopathie postanoxique est due à une souffrance cérébrale diffuse (corticale et souscorticale) [8, 17]. On constate alors une absence de réveil à l’arrêt de la sédation avec un coma peu ou non réactif. Des myoclonies peuvent être présentes, d’origine corticale ou sous-corticale [18], volontiers déclenchées par de faibles stimulations, notamment auditives. Elles intéressent principalement l’extrémité céphalique mais peuvent être diffuses et d’assez grande amplitude. Si elles persistent après le réveil du patient : on parle de syndrome de Lance et Adams, des troubles cognitifs sont alors généralement associés. • la confusion postcritique prolongée : on recherchera alors la notion d’une crise précessive, notamment tonicoclonique généralisée ou des signes indirects (morsure du bord latéral de langue, perte d’urine, etc.) ; • des tableaux confusionnels avec aspect EEG trompeur : PLEDs (voir chapitre 7), Creutzfeld Jacob. Focus EME non convulsifs du sujet âgé L’état de mal non convulsif (EMNC) est fréquent chez le sujet âgé [19]. Son incidence oscille selon les études épidémiologiques de 5,6 à 18,3 pour 100 000 mais semble largement sous-évaluée [20]. L’EMNC correspond le plus souvent à des crises focales prolongées avec altération de conscience. Certaines manifestations cliniques doivent alerter et faire suspecter un diagnostic d’EMNC [21] : des signes discrets tels que des tremblements, des clignements de paupières ou un nystagmus chez un patient stuporeux, un état stuporeux ou confusionnel sans cause avérée, un tableau d’AVC « plus » : un patient âgé ayant fait un AVC avéré mais qui s’aggrave ou récupère moins vite qu’attendu. Une forme d’état de mal absence de novo, beaucoup plus rare, peut également se rencontrer. Elle se voit chez des patients âgés ayant abruptement arrêté leur traitement anxiolytique ou sédatif [22] et se présente cliniquement comme un tableau de confusion et/ou d’altération de la lucidité avec décharges de pointes-ondes généralisées sur l’EEG. Les facteurs de risque identifiés de survenue d’EMNC sont une précession par une crise généralisée tonicoclonique, un antécédent connu d’épilepsie, le sexe féminin et une lésion cérébrale connue (surtout une séquelle d’AVC) [23]. La présence d’un de ces facteurs de risque alliée à un tableau confusionnel d’origine inconnue doit amener à penser au diagnostic d’EMNC. La clinique étant souvent peu évocatrice (stupeur, confusion, voire coma), le diagnostic, à condition d’avoir été évoqué, reposera de ce fait sur l’EEG avec des critères désormais admis (dits de Salzbourg) [15] (cf. supra). Le traitement repose en première ligne sur l’injection de benzodiazépines et en seconde ligne sur l’administration intraveineuse ou per os ou par sonde gastrique de molécules antiépileptiques. Il n’est pas préconisé de recours à une intubation-ventilation (sauf nécessité hors traitement de l’état de mal : détresse respiratoire, défaillance multiviscérale, par exemple). Le pronostic est globalement mauvais avec environ 30 % de mortalité. EME non convulsifs sans expression confusionnelle : EME focaux sans confusion Rentrent dans cette catégorie les EME états de mal focaux à symptomatologie élémentaire déficitaire ou positive persistante sans altération de la conscience : états de mal aphasiques, hallucinatoires, sensitifs purs ou somato-sensitifs, vertigineux, etc. Les principaux diagnostics différentiels à évoquer sont [24] : • un AVC ou un AIT ; • une aura migraineuse prolongée ; • un vertige périphérique ; • des troubles psychiatriques. EME non convulsifs avec coma L’état de mal larvé est l’évolution ultime de tout état de mal tonicoclonique ou tonique non traité ou insuffisamment traité ou réfractaire marqué par un état d’obnubilation avec troubles neurovégétatifs marqués [25, 26]. La symptomatologie critique clinique apparaît alors extrêmement frustre, pouvant se réduire à une simple contraction tonique axiale ou à une révulsion oculaire. Par ailleurs, un aspect EEG d’EME peut se rencontrer chez un sujet comateux. Chapitre 8. États de mal épileptiques 125 Dans les deux cas (EME larvé, aspect EEG d’EME chez un patient dans le coma), le diagnostic différentiel sera celui du champ des comas. Stratégies thérapeutiques Prise en charge non spécifique La prise en charge non spécifique a pour but de limiter les facteurs systémiques de souffrance neuronale, et de supporter les fonctions vitales. Elle comporte en parallèle : • un monitoring des fonctions vitales : glycémie, pouls, TA, température, fréquence respiratoire, SaO2, ECG ; • un contrôle des paramètres vitaux : – respiratoires : libération des voies aériennes (canule de guédel, aspiration positionnement de la tête) et oxygénation ; – hydro-électrolytiques : perfusion de sérum salé NaCl 0,9 % avec contrôle de la natrémie, de la calcémie, et du pH sanguin ; – glycémique avec une fourchette de glycémie à maintenir entre 1,4 à 1,8 g/l sur la base des recommandations de la dernière conférence de consensus Française de prise en charge des EME [8] ; – détection et traitement d’une hyperthermie avec là encore sur la base des recommandations de la dernière conférence de consensus française de prise en charge des EME [8], la préconisation d’un contrôle de la température entre 36,5 et 38 °C ; – vitaminiques : administration de 100 à 500 mg de thiamine en cas de doute sur une carence en vitamine B1 (éthylisme, dénutrition, femme enceinte, etc.) ou de perfusion de sérum glucosé hypertonique. Prise en charge étiologique Une prise en charge de l’étiologie, si identifiée, à l’origine de l’EME est requise : • correction de facteurs hydro-électrolytiques ; • antibiothérapie ou antiviraux si méningo-encéphalite ; 126 Epilepsies de l'enfant, de l'adolescent et de l'adulte • immunoglobulines IV ou échanges plasmatiques ± corticothérapie si encéphalite autoimmune ; • évacuation neurochirurgicale d’un hématome extradural ou d’un hématome sous-dural. Prise en charge spécifique : EME tonicoclonique généralisé On préconisera [8] : • l’administration de benzodiazépines en première ligne : – clonazépam IV (0,015 mg/kg soit 1 mg pour 70 kg ; maximum 1,5 mg), – en l’absence de voie d’abord veineuse rapidement disponible : midazolam IM (0,15 mg/ kg soit 10 mg IM pour un adulte de 70 kg), ●● À noter On préconisera des doses moindres chez le sujet très âgé. – chez l’enfant, en l’absence de voie d’abord veineuse rapidement disponible : – diazépam par voie intrarectale : 0,5 mg/kg – midazolam par voie intrabuccale : 0,3 mg/ kg, max : 10 mg, • administration de benzodiazépines à répéter au bout de cinq minutes en l’absence de réponse thérapeutique ; • la mise en place d’un traitement IV de seconde ligne en l’absence de réponse thérapeutique à la deuxième injection de benzodiazépines [27] : – fosphénytoïne à la dose de 20 mg/kg en dose équivalent phénytoïne, à un débit maximum de 100 à 150 mg/min, avec une surveillance par scope cardiaque, ●● À noter La fosphénytoïne est contre-indiquée en cas de troubles du rythme et de la conduction. La fosphénytoïne peut être remplacée par de la phénytoïne à la dose de 20 mg/kg à un débit maximum de 50 mg/min, il faut alors obligatoirement une perfusion de sérum physiologique et rincer la veine si du soluté glucosé a été utilisé auparavant (risque sinon de précipitation de la phénytoïne). La phénytoïne IV est également contre-indiquée en cas de troubles du rythme et de la conduction. – valproate de sodium : 40 mg/kg en 15 minutes, sans dépasser 3 g, déconseillé chez la femme en âge de procréer, – lévétiracétam : 30 à 60 mg/kg en 10 minutes, sans dépasser 4 g, – phénobarbital : 15 mg/kg, débit de à 50 à 100 mg/min, attention à la sédation induite pouvant parfois conduire à une intubation ; ●● À noter Les répercussions systémiques de l’EME évoluent en deux temps [28] : • une première hyperadrénergique (0-30 minutes) qui maintient une hyperperfusion cérébrale et permet de faire face à la demande métabolique cérébrale accrue. Cette phase s’accompagne d’HTA, de tachycardie, d’arythmie, d’hyperventilation, d’hyperthermie et d’hyperglycémie ; • une seconde phase de défaillance de l’homéostasie avec hypotension voire défaillance hémodynamique avec collapsus et hypoxémie. Dès la première phase, on note une souffrance neuronale, par relargage massif de glutamate par les neurones qui déchargent (excitotoxicité), qui s’aggrave lors de la deuxième phase avec des phénomènes additifs d’ischémie neuronale et donc de risque de mort neuronale. ●● À noter Certaines étiologies comme un trauma crânien grave ou une HIC sévère peuvent nécessiter une intubation d’emblée. • la mise en place d’un traitement de troisième ligne en l’absence de réponse thérapeutique (situation d’EME réfractaire) [29] : – coma thérapeutique au moyen d’un agent anesthésique IV (midazolam/propofol/thiopental au choix après intubation trachéale sous anesthésie en séquence rapide), – différer le recours au coma thérapeutique en administrant par voie IV une autre molécule de deuxième ligne, et ce, uniquement en cas d’EME évoluant depuis moins de 60 minutes, chez un patient épileptique connu dont l’état hémodynamique est stable ou en cas de limitation des soins préalable (non-indication à une intubation) ; ●● À noter L’échec de la seconde ligne de traitement antiépileptique définit le caractère réfractaire de l’EME. ●● À noter Un monitoring EEG continu par scope est recommandé en réanimation. • la mise en place d’un traitement de quatrième ligne en cas de persistance ou récurrence d’un EME au-delà de 24 heures après l’instauration d’une première anesthésie générale (situation d’EME super-réfractaire) (fig. 8.6) [30] : – switch pour une des molécules non encore employée pour l’anesthésie générale, notamment le thiopental, – kétamine. Chapitre 8. États de mal épileptiques 127 ●● À noter L’échec à trois lignes différentes et bien conduites des médicaments antiépileptiques recommandés (posologies optimales et délais d’action, incluant le recours au coma thérapeutique) définit le caractère super-réfractaire de l’EME. Prise en charge spécifique : autres EME On préconisera [8] : • l’administration de benzodiazépines en première ligne : – clonazépam IV (0,015 mg/kg soit 1 mg pour 70 kg ; maximum 1,5 mg), Figure 8.6. Prise en charge thérapeutique d’un EME tonicoclonique généralisé (modifié d’après [8]). 128 Epilepsies de l'enfant, de l'adolescent et de l'adulte – en l’absence de voie d’abord veineuse rapidement disponible : midazolam intrabuccal : 10 mg, – chez l’enfant, en l’absence de voie d’abord veineuse rapidement disponible : – diazépam par voie intrarectale : 0,5 mg/kg, – midazolam par voie intrabuccale : 0,3 mg/ kg, max : 10 mg ; • administration de benzodiazépines à répéter au bout de 5 minutes en l’absence de réponse thérapeutique ; • la mise en place d’un traitement de seconde ligne en l’absence de réponse thérapeutique à la deuxième injection de benzodiazépines : – par voie IV : (fos)phénytoïne, valproate de sodium (déconseillé chez la femme en âge de procréer), lévétiracétam, phénobarbital (attention à la sédation induite pouvant parfois conduire à une intubation) ou lacosamide (200 à 400 mg en 15 à 30 minutes avec ECG préalable), – par voie orale : dose de charge per os en l’absence d’altération de conscience ou par sonde gastrique : carbamazépine (sauf si le patient est d’origine asiatique, du fait d’un risque accru d’allergie cutanée), phénytoïne, perampanel, zonisamide, topiramate, prégabaline, phénobarbital ; • la mise en place d’un traitement de troisième ligne en l’absence de réponse thérapeutique : switch pour molécule de deuxième ligne non encore employée. ●● À noter On rappelle que l’injection intraveineuse de benzodiazépines est prohibée dans le cas très spécifique et rare des états de mal toniques. ●● À noter En dehors de l’EME tonicoclonique généralisé et sauf situation clinique l’imposant (détresse respiratoire, par exemple), le recours à l’anesthésie générale et au coma thérapeutique n’est pas indiqué. ●● À noter Il n’existe aucun argument scientifique pour instaurer systématiquement un relais per os du MAE d’action prolongée prescrit par voie intraveineuse (IV) en première intention. Le phénobarbital et la phénytoïne per os sont de fait des MAE d’ancienne génération avec de multiples effets secondaires en cas de prescription au long cours. Liens avec les items ECN UE4. Item 103. Épilepsie de l’enfant et de l’adulte. UE11.Item 337. Malaise, perte de connaissance, crise comitiale chez l’adulte. UE11.Item 338. État confusionnel et trouble de conscience chez l’adulte et chez l’enfant. UE11.Item 341. Convulsions chez le nourrisson et chez l’enfant. Références [1] Betjemann JP, Lowenstein DH. Status epilepticus in adults. Lancet Neurol 2015;14:615–24. [2] Gastaut H. Dictionnaire de l’épilepsie, partie1 : définitions. Genève ; 1973. [3] Commission on classification and terminology of the International League Against Epilepsy. Proposal for revised clinical and electroencephalographic classification of epileptic seizures. Epilepsia 1981;22: 489–501. [4] Lowenstein D, Bleck T, Macdonald R. It’s time to revise the definition of status epilepticus. Epilepsia 1999;40:120–2. 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