CHAPITRE 7
DUALIT´
E
Sommaire
7.1. Dualit´e et syst`emes inverses ......................172
7.1.1. Dualit´e et eries formelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172
7.1.2. Dualit´e et erivation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174
7.1.3. Changementde base . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 174
7.1.4. L’orthogonal d’un id´eal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 175
7.1.5. Division d’id´eaux .............................177
7.1.6. ´
Elimination de variables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177
7.1.7. ´
Equations di´erentielles et syst`eme inverse . . . 178
7.1.8. Passage du syst`eme inverse au quotient . . . . . . . 179
7.2. Syst`eme inverse d’un pointisol´e ..................183
7.2.1. Points isol´es ..................................183
7.2.2. La composante mζ-primaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183
7.2.3. L’anneau local par int´egration . . . . . . . . . . . . . . . . 185
7.2.4. L’algorithme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 188
7.2.5. Analyse de la complexit´e .....................189
7.3. Interpolation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 191
7.3.1. Les polynˆomes de Lagrange en une variable . . 191
7.3.2. Le cas de plusieurs variables . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193
7.3.3. Une base d’interpolation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 194
7.3.4. L’interpolation en des points simples . . . . . . . . . 196
7.3.5. Relations entre coecients et racines . . . . . . . . . 198
7.3.6. La m´ethode de Weierstrass . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 199
7.4. Exercices ............................................203
M. Elkadi &B. Mourrain R´esolution des syst`emes polynomiaux
Dans ce chapitre, nous allons ´etudier les formes lin´eaires sur l’anneau des
polynˆomes, c’est-`a-dire les ´el´ements du dual de K[x]. Un th`eme de recherche
connaissantdepuis quelques temps des d´eveloppements int´eressants consiste
`a repr´esenter les polynˆomes comme des «algorithmes »calculantune valeur
en un point. On consid`ere alors l’´evaluation des polynˆomes en un point. Cette
´evaluation est une forme lin´eaire particuli`ere. Nous voulons ´etendre donc ici ce
pointde vue en nous int´eressantsyst´ematiquementaux propri´et´es des formes
lin´eaires sur les polyomes.
7.1. Dualit´e et syst`emes inverses
Dans cette section, nous allons ecrire le dual de l’ensemble R=K[x]des
polynˆomes en x,vu comme espace vectoriel sur K.
7.1.1. Dualit´e et s´eries formelles. Nous noterons !
Rl’espace vectoriel
dual de R.Une forme lin´eaire «simple »de !
Rest l’´evaluation en un point
ζKn,
1ζ:RK
p#→ 1ζ(p) = p(ζ).
Pour tout multi-indice α= (α1, . . . , αn)Nn,on peut aussi consid´erer la
forme lin´eaire
δα
ζ:RK
p#→ δα
ζ(p) = α1
x1···αn
xn(p)(ζ),
o`u xiesigne la d´erivation par rapport `a la variable xi.Nous notons, δi,ζ=α
ζ,
avec αi= 1 et αj= 0, j ̸=i.Avec ces notations, δα
ζ=δα1
1,ζ···δαn
n,ζ.
Exemple 7.1.Pour ζ=(1,1) R2et p=x2+2 x y3y2+xy+1 R[x, y],
1ζ(p) = 1,δ(0,2)
ζ(p) = 6.
Pour tout fK[x1, . . . , xn], notons (dα
ζ(f))αNnles coecients de fdans
la base ((xζ)α)αNn.On aalors
f(x) = "
αNn
dα
ζ(f)(xζ)α,
o`u (xζ)α=#n
i=1(xiζi)αi.Notons que si la caract´eristique de Kest nulle,
dα
ζ=dα1
1,ζ···dαn
n,ζ=1
Qn
i=1 αi!δα
ζ=1
α!δα
ζ. Pour toute forme lin´eaire Λsur R,on
adonc
Λ(f) = "
αNn
Λ((xζ)α)dα
ζ(f).
172
M. Elkadi &B. Mourrain R´esolution des syst`emes polynomiaux
Par cons´equent,
Λ="
αNn
Λ((xζ)α)dα
ζ.
Ce qui nous permet d’identifier Λavec la erie formelle $αNnΛ((xζ)α)dα
ζ
K[[d1,ζ, . . . dn,ζ]]. Si la caract´eristique de Kest 0, cette identification est r´ealis´ee
par le d´eveloppementde Taylor en ζ.
Λ="
αNn
Λ((xζ)α)1
α!δα
ζK[[δ1,ζ, . . . δn,ζ]].
Lorsque ζ= 0,dα
ζsera not´e dα. Par la suite, nous noterons ´egalementdα
ζ(p) =
dα, pζ.
Exemple 7.2.Consid´erons l’application lin´eaire Λ:pR[x]#→ %2
0p(x)dx.
Comme %2
0xidx =2i+1
i+1 (iN),nous pouvons ecrire Λen erie formelle sous
la forme :
Λ="
i0
2i+1
i+ 1di="
i1
2i
idi1,
o`u di:p#→ 1
i!i(p)(0) est la forme lin´eaire qui donne le coecient de xid’un
polynˆome p.
Via ce formalisme, l’alg`ebreK[[δ1,ζ,...,δn,ζ]] des eries formelles (ou op´era-
teurs di´erentiels «en ζ»`a coecients dans K)ou K[[d1,ζ, . . . dn,ζ]] s’iden-
tifie `a !
R.Cette identification est r´ealis´ee par le d´eveloppementde Taylor en
ζ.
On v´erifie facilementque
dα,(xζ)βζ=&1si α=β,
0sinon.
La base (dα
ζ)αNnde !
Rest donc la base duale de la base monomiale ((x
ζ)α)αNnde R. Voir [Ems78] pour plus de d´etail.
Remarquons que l’on peut aussi choisir comme base de !
R, (1ζ)ζPo`u Pest
un ensemble infini de points convenablement choisis.
Apartir de maintenant, nous allons identifier !
Ravec K[[d1,ζ,...,dn,ζ]]
(resp. =K[[δ1,ζ, . . . , δn,ζ]] si car(K) = 0). Les formes lin´eaires serontdonc
vues comme
des s´eries formelles en d1,ζ,...,dn,ζ,
ou mˆeme comme des op´erateurs di´erentiels au point ζ,qui sontdes s´eries
formelles en δ1,ζ, . . . , δn,ζ.
On notera aussi leur espace K[[dζ]] (resp. K[[δζ]] si car(K) = 0). Lorsque
ζ= 0,K[[dζ]] sera not´e K[[d1, . . . , dn]] (resp. K[[δ1,...,δn]]) ou K[[d]] (resp.
K[[δ]] si car(K) = 0).
173
M. Elkadi &B. Mourrain R´esolution des syst`emes polynomiaux
7.1.2. Dualit´e et d´erivation. L’espace vectoriel !
Rest muni d’une struc-
ture de R-module de la fa¸con suivante :pR,Λ!
R,on d´efinit p·Λ
par
p·Λ:RK
q#→ Λ(p q).
Montrons que cette op´eration correspond dans K[[δζ]] `a des d´erivations. En
eet, on apar r´ecurrence sur aN,
a
xi((xiζi)p) = aa1
xi(p) + (xiζi)a
xi(p).
Ce qui implique que
(xiζi)·δα
ζ(p) = δα
ζ((xiζi)p)
=αiδα1
1,ζ···δαi1
i1,ζδαi1
i,ζδαi+1
i+1,ζ···δαn
n,ζ(p)
=δi,ζ(δα
ζ)(p).
Donc la multiplication par xiζidans !
Ragit sur les ´el´ements de K[[δζ]] comme
une d´erivation par rapport `a la variable δi,ζ.
Nous v´erifions ´egalementque la multiplication par xiζidans !
Ragit sur
les ´el´ements de K[[dζ]] comme la multiplication par «l’inverse de la variable
δi,ζ». En eet, comme dα
ζ=1
α!δα
ζ,on a
(xiζi)·dα
ζ=dα1
1,ζ···dαi1
i1,ζdαi1
i,ζdαi+1
i+1,ζ···dαn
n,ζ
et xiζiest «´equivalent»`a d1
i,ζ.Ce qui explique l’appellation de syst`eme
inverse [Mac16].
Exemple 7.3.Dans K[x1, x2],x1·d2
1d2:pK[x1, x2]#→ le coecient de
x2
1x2dans x1p, c’est donc le coecient d1d2(p)de x1x2dans p.On a bien
x1·d2
1d2=d1
1d2
1d2=d1d2.
7.1.3. Changement de base. — D´ecrivons ici, commenton peut passer des
op´erateurs di´erentiels en ζaux op´erateurs di´erentiels en un autre point.
Pour simplifier la pr´esentation, nous supposons que car(K) = 0.
D´efinition 7.4.Notons
(ζ,δ) = "
αNn
1
α!ζαδα.
Nous allons efinir l’isomorphisme entre K[[δζ]] et K[[δ]]. Tout autre chan-
gementde points induit le mˆeme typed’isomorphisme (`atranslation pr`es).
174
M. Elkadi &B. Mourrain R´esolution des syst`emes polynomiaux
Th´eor`eme 7.5.L’isomorphisme de passage de K[[δζ]] `a K[[δ]] induit par
l’isomorphisme entre!
Ret K[[δζ]] et celui entre!
Ret K[[δ]] est donn´e par
K[[δζ]] K[[δ]]
δα
ζ#→ δα(ζ,δ).
emonstration. Pour tout p=$αNnpαxαRet tout β= (β1, . . . , βn)
Nn,notons p(β)=β1
x1···βn
xn(p) = $αNnp(β)
αxα.On adonc
δβ
ζ(p) = β(p)(ζ) = "
αNn
p(β)
αζα= ( "
αNn
1
α!ζαδα)( "
αNn
p(β)
αxα)
= ( "
αNn
1
α!ζαα)β(p)(ζ) = 'δβ(ζ,δ)((p).
Ce qui montre que δβ
ζ=δβ(ζ,δ)dans K[[δ]].
Notons que
(δ,ζ) = "
αNn
ζαdα
mais, comme dαdβ=)α+β
α*dα+β,on adα
ζ̸=dα$αNnζαdα,au sens habituel
du produit des eries. De ce pointde vue, l’utilisation des eries en δest donc
plus naturelle, et `a relier avec les transform´ees de Fourier.
7.1.4. L’orthogonal d’un id´eal. —
D´efinition 7.6.Pour tout id´eal Ide R,on d´efinit le sous-espacevectoriel de
!
Rsuivant :
I={Λ!
R;pI, Λ(p) = 0}.
Pour tout sous-espacevectoriel Dde !
R,on d´efinit le sous-espacevectoriel de
Rsuivant :
D={pR;ΛD,Λ(p) = 0}.
L’espace vectoriel Iest appel´e dans la litt´erature le syst`eme inverse de I
(voir [Mac16]).
Remarque 7.7.L’orthogonal d’un id´eal Ide Rn’est pas un id´eal de K[[d]].
Exemple 7.8.Dans K[x1, x2],D:= 1,δ1,δ2,δ1δ2est l’orthogonal de l’id´eal
I= (x2
1, x2
2).
Les ´el´ements de Ipeuventse voir comme des formes lin´eaires sur A=R/I.
La projection π:RAinduit une application
π:!
AI
Λ#→ Λπ.
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