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4-74-Etats-de-choc

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ÉTATS DE CHOC
PHYSIOPATHOLOGIE
ET MÉCANISMES GÉNÉRAUX
A. Lanceleur, A. Cariou, J.-F. Dhainaut
L’état de choc est la conséquence d’une insuffisance circulatoire
aiguë, qui altère de façon durable l’oxygénation et le métabolisme
des différents tissus et organes. Il se traduit cliniquement par une
tachycardie, une tachypnée, une hypotension, une oligurie, une
altération de la conscience, et, parmi les anomalies biologiques, la
classique acidose lactique est souvent le témoin de l’hypoxie tissulaire qui en résulte [1].
Les états de choc sont habituellement classés en fonction du
mécanisme hémodynamique initial : diminution du remplissage
ventriculaire pour les chocs hypovolémique et anaphylactique,
diminution de la performance cardiaque pour le choc cardiogénique, altération de la distribution du volume ventriculaire éjecté
pour le choc septique, etc. En fait, ces mécanismes qui aboutissent
du point de vue hémodynamique à une hypoperfusion tissulaire,
sont presque constamment associés entre eux.
Une seconde approche de la physiopathologie des états de choc
est la réponse inflammatoire qui l’accompagne, voire l’initie [2].
L’hypoperfusion et le syndrome d’ischémie-reperfusion lors de la
réanimation sont à l’origine d’une réponse inflammatoire systémique. En fonction de la cause initiale et de la gravité de l’état de
choc, de la réponse génétiquement programmée de l’hôte et de la
rapidité de la mise en route de la réanimation, la réponse inflammatoire varie aussi bien en intensité qu’en composants intervenant
dans cette cascade. Par exemple, la correction hémodynamique
rapide d’un choc hypovolémique ou cardiogénique est suivie d’une
réponse inflammatoire habituellement limitée; en revanche, un
traumatisme majeur ou une hypoperfusion prolongée, quelle qu’en
soit la cause, provoque une réponse systémique inflammatoire
importante. N’oublions pas enfin qu’une réponse inflammatoire
systémique majeure peut à elle seule être à l’origine d’un état de
choc (poussée aiguë des collagénoses, administration de cytokines,
etc.). Ainsi, la réponse inflammatoire qui accompagne les états de
choc peut être partiellement tenue pour responsable des anomalies
du métabolisme et du fonctionnement des organes, au même titre
que les anomalies hémodynamiques qui conduisent à l’hypoperfusion.
APPROCHE HÉMODYNAMIQUE
CLASSIFICATION HISTORIQUE
On reconnaît classiquement quatre grandes causes à l’origine de
la constitution de l’état de choc [1].
Le choc hypovolémique est la forme la plus fréquente de choc,
correspondant à une insuffisance circulatoire aiguë conduisant à
l’hypoxie tissulaire par stagnation. La présentation hémodynamique
habituelle est celle d’un débit cardiaque abaissé malgré la tachycardie, associé à des pressions de remplissage effondrées (réduction
du volume sanguin circulant) et des résistances vasculaires systémiques élevées (traduites cliniquement par une vasoconstriction
cutanée). Les étiologies les plus fréquentes sont représentées par des
pertes sanguines dans le cadre d’un traumatisme, d’hémorragie
digestive, d’hémorragies postopératoires, d’anévrysme rompu de
l’aorte, etc. Le choc hypovolémique peut être le résultat également
de pertes non hémorragiques en cas de déshydratation sévère :
brûlures étendues, diarrhées profuses, vomissements incoercibles,
coma prolongé, etc.
Le choc cardiogénique, du fait d’une altération de la contraction myocardique, conduit aussi à une hypoxie tissulaire par
stagnation. Sa présentation hémodynamique classique correspond à
un débit cardiaque effondré avec une élévation des pressions de
remplissage (œdème pulmonaire) et des résistances vasculaires systémiques (vasoconstriction cutanée). Il est le plus souvent secondaire à
un infarctus myocardique étendu, mais peut être dû aussi soit à une
cardiomyopathie d’autre origine, soit à une sidération myocardique
transitoire (période postopératoire d’une chirurgie cardiaque,
myocardite, hémorragie méningée, arrêt cardiaque récupéré, etc.),
ou à une arythmie sévère empêchant une contraction myocardique
organisée.
Le choc obstructif est dû à la constitution rapide d’un obstacle
sur le système cardiovasculaire. Le tableau hémodynamique
comporte un tableau voisin du choc cardiogénique avec un débit
cardiaque diminué associé à des pressions de remplissage et des résistances vasculaires systémiques augmentées. Les causes les plus
fréquentes sont l’embolie pulmonaire massive et la tamponnade.
Notons que dans l’embolie pulmonaire, seules les pressions de
remplissage ventriculaire droites sont élevées avec une hypertension
artérielle pulmonaire précapillaire, alors que dans la tamponnade,
les pressions de remplissage sont élevées au niveau des deux cavités
ventriculaires.
Le choc distributif est bien différent des autres types sus-décrits,
du fait de la libération précoce de médiateurs de l’inflammation. Le
choc septique en représente l’exemple type. Le tableau hémodynamique le plus fréquemment rencontré est celui d’un débit cardiaque
normal ou élevé après correction de l’hypovolémie, avec des pressions de remplissage ventriculaire et des résistances vasculaires
systémiques fortement diminuées. Cette diminution des résistances
à l’éjection ventriculaire gauche permet de maintenir un volume
d’éjection systolique voisin de la normale en dépit d’une atteinte
fréquente de la contraction cardiaque. De plus, et à la différence des
autres types de choc, la consommation d’oxygène est augmentée et
l’extraction en oxygène limitée du fait de troubles de la microcirculation, expliquant qu’un débit cardiaque même augmenté dans ce
type de choc n’est pas forcément adapté à la situation métabolique.
UNE RÉALITÉ PLUS COMPLEXE
Cependant, si cette classification hémodynamique est un bon
outil pédagogique, la réalité est bien plus complexe, car les états de
choc associent au cours de leur évolution plusieurs mécanismes
physiopathologiques. Ainsi, les états anaphylactiques, les traumatismes sévères, les brûlures étendues et les pancréatites extensives
associent les aspects de chocs distributif et hypovolémique. De
même, le choc septique combine des aspects de chocs distributif,
hypovolémique et cardiogénique [1].
En fait, quelle qu’en soit l’étiologie, il existe des conséquences
communes à tous les états de choc. En effet, la phase initiale se
caractérise par une hypoperfusion tissulaire, induisant une série de
mécanismes cellulaires compensatoires visant à maintenir un équilibre entre la production d’ATP et les besoins métaboliques. Dans un
premier temps, l’augmentation de l’extraction en oxygène (EO2)
jusqu’à un certain seuil permet de maintenir une consommation
tissulaire en oxygène (VO2) constante [3]. Au-delà de ce seuil
critique, la cellule utilise le métabolisme anaérobie pour assurer une
production minimale d’ATP, se traduisant par la formation de lactate
et de protons. En dépit de ces phénomènes adaptatifs, l’association
d’une diminution brutale des apports en oxygène, en glucose et
d’une acidose locale expose à des lésions cellulaires. Ultérieurement,
la réanimation du choc, en permettant la revascularisation des tissus
hypoperfusés, s’accompagne de phénomènes d’ischémie-reperfusion
qui peuvent accélérer et exacerber les lésions initiales. Ainsi, tout
type de choc, surtout s’il est sévère et prolongé, va induire une réaction inflammatoire systémique qui ajoutera ses propres conséquences au tableau hémodynamique initial : troubles de
perméabilité capillaire à l’origine de l’œdème interstitiel, aggravant
l’hypovolémie et altérant la diffusion de l’oxygène, activation de la
coagulation à l’origine de microthromboses vasculaires, modifications médiateurs-dépendantes des propriétés systoliques et diastoliques ventriculaires entravant l’adaptation cardiaque à la situation
hémodynamique, et altérations de la microcirculation changeant la
répartition du débit cardiaque non seulement entre les différentes
circulations, mais aussi à l’intérieur même des tissus et organes. Lors
de l’évolution, les lésions de reperfusion sont elles-mêmes sources
d’une nouvelle exacerbation de la réaction inflammatoire, réalisant
un véritable cercle vicieux dont l’exemple le plus classique est celui
de l’ischémie mésentérique [1, 2].
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État de choc
La circulation splanchnique participe à la régulation du volume
sanguin circulant et à la pression sanguine systémique. Ainsi, de
façon très précoce au cours du choc, la circulation splanchnique, du
fait de la richesse en récepteurs alpha-adrénergiques est « sacrifiée »
au bénéfice de la vascularisation des territoires vitaux comme le
cœur et le cerveau [4]. La baisse de débit local observée entraîne une
hypoxie cellulaire, encore aggravée au cours du choc septique du fait
de la dysrégulation des phénomènes adaptatifs [5]. Les lésions cellulaires exacerbées par la reperfusion favorisent l’atteinte de la
muqueuse intestinale responsable d’une augmentation de sa
perméabilité. Ces modifications permettent la translocation de
bactéries et d’endotoxines de la flore intestinale à travers la barrière
digestive vers le système lymphatique mésentérique et la circulation
portale et systémique. Cependant, si la translocation bactérienne est
un phénomène bien décrit chez l’animal ainsi que ses conséquences
sur différents organes, son incidence et son importance clinique
demeurent discutées [6]. Il semble que le tube digestif au cours du
choc agisse plus comme un formidable générateur de réaction
inflammatoire que comme une véritable porte d’entrée d’agents
pathogènes [7, 8]. L’hypothèse plus récente n’écarte pas la translocation bactérienne, mais privilégie le mécanisme d’une activation du
tissu lymphoïde digestif (gut associated lymphoid tissue [GALT]) par
l’endotoxine ou les produits bactériens, entraînant une production
intrasplanchnique de médiateurs pro-inflammatoires [9], susceptible
de favoriser, voire d’initier la survenue d’un syndrome de défaillance
multiviscérale (SDMV).
RÉACTION INFLAMMATOIRE
INITIALISATION
L’inflammation est une réponse physiologique normale, immédiate et transitoire à toute agression compromettant l’intégrité de
l’organisme. Si le résultat final de la plupart des chocs est une réponse
inflammatoire apparemment excessive, participant à son tour à
l’entretien des troubles microcirculatoires (vasodilatation, œdème,
obstructions capillaires) et à la dysoxie cellulaire, les facteurs déclenchants sont nombreux et divers. Au cours du sepsis, la reconnaissance
des pathogènes par les phagocytes génère un signal transmembranaire par l’intermédiaire de différents récepteurs, dont les récepteurs
de type Toll (Toll-like receptors [TLRs]) [10]. Schématiquement, l’activation des TLRs induit l’activation du facteur transcriptionnel NF-κB qui
permet l’amplification de la réponse pro-inflammatoire et le développement de la réponse immunitaire acquise [11, 12]. Le choc septique
est la conséquence de l’activation massive et/ou inadéquate de cette
réponse inflammatoire. Lors du choc hypovolémique, s’il est suffisamment sévère et/ou prolongé, l’importance des phénomènes
d’ischémie-reperfusion entraîne une production explosive de radicaux libres de l’oxygène [13]. Le stress oxydatif ainsi généré induit des
lésions cellulaires directes, participe à l’attraction et à l’activation des
neutrophiles, et active l’expression des gènes codant pour les molécules d’adhésion et les cytokines par l’intermédiaire de NF-κB [14].
Ainsi, l’intensité de la réponse inflammatoire modifie le profil hémodynamique initial du choc hypovolémique réanimé, favorisant la
survenue d’une défaillance multiviscérale. La chirurgie cardiaque sous
circulation extracorporelle ou encore l’arrêt cardiaque ressuscité
représentent également des modèles d’ischémie-reperfusion pour
lesquels la défaillance hémodynamique observée est liée à une
réponse inflammatoire particulièrement intense [15, 16]. Le choc
anaphylactique est la conséquence de l’action sur l’organisme de
substances libérées par deux types de cellules : les mastocytes, situés
dans le tissu conjonctif et les basophiles dans le sang. Ces deux types
de cellules contiennent de nombreux médiateurs inflammatoires :
histamine, facteurs chimiotactiques des éosinophiles et neutrophiles,
facteur d’activation plaquettaire (platelet-activiting factor [PAF]), leucotriènes, kinines et prostaglandine. Enfin, si le choc cardiogénique a
été longtemps opposé au choc infectieux, il a été montré récemment
que même dans les états de défaillances hémodynamiques exclusivement d’origine cardiaque, une élévation des médiateurs de
l’inflammation pouvait être rencontrée, contribuant à la physiopathologie de ce processus [17, 18].
ÉTAPES
Les étapes ont été schématisées par Bone [19]. La réponse de
l’organisme à toute agression s’effectue en cinq étapes d’intensité
progressive qui vont se succéder.
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Au cours de la première étape, les médiateurs pro-inflammatoires, libérés de façon précoce suite à l’agression, exercent leurs
effets bénéfiques localement, en augmentant la perméabilité vasculaire, l’adhésion, la migration et l’action des polynucléaires et en
favorisant la reconstruction tissulaire. Pour contrôler leur action,
l’organisme réagit en initiant une réaction anti-inflammatoire.
La deuxième étape intervient lorsque l’agression initiale est
suffisamment sévère ou prolongée. Les défenses locales sont insuffisantes, les médiateurs apparaissent alors dans la circulation
systémique et ont pour but de solliciter de nouvelles défenses.
La troisième étape correspond à une réaction inflammatoire
systémique massive et les premiers signes du syndrome de réaction
inflammatoire systémique (SIRS) apparaissent (tachycardie,
tachypnée, fièvre ou hypothermie, etc.) [20]. Le résultat sera l’état de
choc, avec apparition d’une ou plusieurs défaillances d’organe,
entraînant souvent le décès. À ce niveau :
– soit la quantité de médiateurs pro-inflammatoires libérés est trop
importante, et la réponse anti-inflammatoire est dépassée;
– soit la quantité de médiateurs pro-inflammatoires n’est pas excessive, mais la réponse anti-inflammatoire est insuffisante;
– soit une deuxième agression intervient, ne permettant pas la
maîtrise de la balance pro- et anti-inflammatoire.
La quatrième étape est définie par une réaction anti-inflammatoire trop intense, la balance pro- et anti-inflammatoire étant
perturbée, ou la production de médiateurs anti-inflammatoires étant
excessive. Cette phase d’immunosuppression (Compensatory antiinflammatory response syndrome [CARS]) augmente la fréquence des
infections secondaires.
La cinquième phase, étape finale, correspond au développement du SDMV. Il peut être secondaire, soit à l’existence d’une
inflammation non contrôlée et persistante (SIRS prédominant), soit
à la persistance de l’immunosuppression (CARS prédominant), soit à
des périodes d’inflammation sévère et d’immunosuppression,
pouvant aboutir à la guérison si un équilibre de la balance pro et
anti-inflammatoire peut être restauré.
ACTIVATION CELLULAIRE
Les défenses de l’homme comprennent :
– les cellules endothéliales et les molécules qu’elles expriment (adhésion) ou qu’elles sécrètent (chémokines, cytokines, médiateurs
lipidiques, NO, etc.);
– les macrophages et les produits qu’ils sécrètent (TNF, IL-1, IL-6, IL8);
– les neutrophiles et les produits résultant de leur dégranulation;
– les plaquettes et leur fonction de coagulation;
– les lymphocytes T et B et de nombreuses autres substances.
Tous ces médiateurs interagissent entre eux de manière
complexe pouvant amener, dans des cas favorables, à la guérison et
dans d’autres cas au SDM et au décès.
CELLULES ENDOTHÉLIALES
Les cellules endothéliales, en réponse à un stimulus, expriment
à leur surface des molécules d’adhésion [21] permettant l’ancrage
puis le passage des neutrophiles, attirés par différents médiateurs
(chémokines [22], lipides, cytokines [23], oxyde nitrique (NO) [24]),
au niveau du site inflammatoire. Ces cellules produisent également
du platelet-activating factor, qui attire les plaquettes et active les
neutrophiles, des facteurs de dégranulation des neutrophiles, et des
facteurs liant ou hydrolysant le LPS, réduisant ainsi la concentration
locale en LPS. Ainsi, l’endothélium est un participant très actif de la
réponse inflammatoire, mais aussi de la régulation du flux sanguin.
Le NO, vasodilatateur libéré à partir de l’endothélium vasculaire,
permet le maintien du flux sanguin organique à des valeurs physiologiques, mais dans des conditions pathologiques de choc, une
forme inductible de NO (iNOS), stimulée par le TNF ou l’IL-1, peut
produire une grande quantité de NO responsable des dysfonctions
cellulaires [25-27], pouvant conduire à un SDMV. En effet, le NO est
également un médiateur intervenant aussi bien au niveau de l’adhésion que de l’activation des neutrophiles.
NEUTROPHILES
Si le rôle bénéfique des neutrophiles est mis en évidence lors
d’une infection par le fait qu’ils participent à l’éviction de l’agent
microbien, lors des autres types de choc ils paraissent avoir surtout
un rôle délétère. En revanche, l’importance des neutrophiles,
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Affections et leurs traitements
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premières cellules à être recrutées au niveau du site inflammatoire,
est démontrée depuis l’initiation de la lésion jusqu’à l’instauration
de l’inflammation systémique [28]. Le neutrophile adhère d’abord à
la paroi endothéliale, puis migre par chimiotactisme au niveau de la
lésion où il pourra exercer son activité de phagocytose et libérer des
facteurs tant bactéricides que cytotoxiques.
RECRUTEMENT DES NEUTROPHILES
Cette étape met en jeu les molécules d’adhésion exprimées à la
surface des cellules endothéliales et des neutrophiles (intégrines, Lsélectines) [29], dont l’expression augmente sous l’action de
produits libérés par les macrophages ou par des fractions du
complément [30]. Il en résulte une leucoséquestration dans différents organes, tels le poumon, le myocarde ou le foie [31, 32]
pouvant entraîner la formation d’un œdème et une dysfonction
d’organe [33, 34]. La neutrophilie est souvent précédée par une
période de neutropénie, les neutrophiles circulants étant immédiatement attirés au site de l’inflammation et/ou de l’infection ; il
existe un certain temps de latence avant que d’autres neutrophiles
soient libérés à partir des réserves médullaires sous l’influence de
l’endotoxine, des cytokines et des hormones de croissance (G-CSF,
GM-CSF) ou par des composants de la cascade du complément
[35]. Une diminution de la déformabilité des neutrophiles,
observée au cours du choc septique [36] et associée à la leuco-agrégation, peut augmenter la résistance vasculaire et diminuer la
perfusion tissulaire ce qui, ajouté à l’activation plaquettaire et à la
formation de thrombus, aboutit à l’occlusion de certains vaisseaux
au niveau microvasculaire [37].
ACTIVATION DES NEUTROPHILES
La migration et l’activation des neutrophiles sont deux phénomènes indépendants [38]. Le degré d’activation des neutrophiles
durant la migration est mineur et les lésions observées résultent de la
combinaison des produits bactériens avec les produits d’activation
des neutrophiles et/ou des cellules endothéliales [39]. Les neutrophiles, activés par de très nombreux médiateurs (produits de la
cascade du complément, endotoxine, cytokines, induction du
système
coagulation-fibrinolyse)
libèrent
de
nombreuses
substances : les radicaux libres de l’oxygène et les enzymes protéolytiques (élastase, cathepsine), de part leur propriété bactéricide,
confère aux neutrophiles un rôle essentiel au niveau de la réponse
primaire de l’organisme; la libération de cytokines (IL-1, IL-8)
permet l’amplification de la réponse inflammatoire. D’autres médiateurs pro-inflammatoires sont également libérés comme les dérivés
de la peroxidation lipidique et de substances vaso-actives (leucotriènes, platelet activating factor, NO). Lorsque cette libération n’est
pas contrôlée, elle aggrave les lésions cellulaires existantes, pouvant
entraîner les lésions d’organes qui précèdent le SDMV.
MONOCYTES-MACROPHAGES
Si le rôle des monocytes-macrophages est essentiel dans la
défense normale de l’hôte, leur activation anarchique et/ou excessive contribue au développement d’une réaction inflammatoire
généralisée et aux lésions cellulaires et tissulaires locales. Les macrophages s’activent après liaison de motifs moléculaires issus d’agents
pathogènes à leurs ligands spécifiques, principalement les récepteurs
de type Toll (TLRs). Les macrophages répondent également à la
liaison du TNF- α ou de l’IL – 1 à leurs récepteurs, qui sont fortement
exprimés à leur surface. La liaison ligand-récepteur est responsable
du passage de facteurs de transcription tel NF–κB du cytoplasme vers
le noyau, de leur liaison à l’ADN, et de l’activation d’une batterie de
gènes inflammatoires [40]. Une fois activés, les macrophages sécrètent de nombreux médiateurs de l’inflammation : cytokines,
médiateurs lipidiques, NO, etc. qui agissent sur d’autres cellules en
amplifiant et/ou en étendant la réaction inflammatoire [41]. Ces
cellules sécrètent également des peptides actifs intervenant dans le
chimiotactisme des polynucléaires [41]. Conjointement, les microorganismes présents au site de l’infection sont phagocytés. Il en
résulte une consommation accrue d’oxygène par les macrophages et
une augmentation de leur production de radicaux libres, de
protéases et d’hydrolases [41]. Ensuite, il semble que leurs fonctions
soient paralysées pendant plusieurs jours, temps nécessaire à de
nouveaux monocytes-macrophages pour devenir matures.
CYTOKINES
CYTOKINES PRO-INFLAMMATOIRES
Quelle que soit son origine, le choc est le facteur principal
permettant la production et la libération de cytokines marqueurs de
sa sévérité et médiateurs majeurs participant à sa pathogenèse. Si, à
faibles concentrations, la présence de cytokines peut être bénéfique,
comme lors du choc septique où elle favorise l’éviction de l’agent
microbien, leur excès de production peut être responsable d’effets
délétères. Parmi les cytokines pro-inflammatoires, certaines
semblent particulièrement impliquées dans les manifestations systémiques de l’état de choc. Le TNF-α, en plus de réguler la
prolifération et l’apoptose cellulaire, recrute et active les cellules de
l’inflammation, et stimule la sécrétion d’autres cytokines ou
protéines par ces mêmes cellules. L’IL-1 a des effets similaires et
synergiques à ceux du TNF-α. L’IL-6, dont la sécrétion reste largement dépendante TNF-α et de l’IL-1, induit la production hépatique
des protéines de la phase aiguë [42]. D’autres cytokines comme l’IL-8
et le GM-CSF jouent également un rôle pro-inflammatoire. L’intensité de la libération de cytokines, leur cinétique d’apparition et
d’évolution, dépend de la nature du choc. En effet, les taux de TNFα, d’IL-1 et d’IL-6 retrouvés lors du choc septique sont supérieurs à
ceux trouvés en cas de choc hémorragique ou traumatique [43].
CYTOKINES ANTI-INFLAMMATOIRES
Parallèlement, l’IL-2, 4, 10, le TGF- β et certains médiateurs
comme la PGE2 régulent la production des cytokines pro-inflammatoires. L’IL-10, retrouvé en forte concentration lors du sepsis [44],
diminue la production macrophagique de TNF-α, d’IL-1, d’IL-6 et de
radicaux libres, tandis que son administration prévient la mortalité
dans des modèles septiques animaux [45].
De plus, des récepteurs solubles au TNF-α et à l’IL-1, dont le
taux sérique augmente au cours des états inflammatoires aigus, inhibent leur action [46, 47]. L’IL-1 possède par ailleurs un inhibiteur
spécifique, l’IL-1 receptor antagonist (IL-1ra), produit par les macrophages en réponse à une agression [48], qui entre en compétition
avec l’IL-1 vis-à-vis de ses récepteurs membranaires, mais dont la
liaison n’entraîne aucune activité agoniste. La capacité de l’IL-1ra à
bloquer également la synthèse de l’IL-8 est considérée comme l’un
des composants primordiaux de son activité anti-inflammatoire.
RÉGULATION DE LA TRANSCRIPTION DES CYTOKINES
Le facteur de transcription NF-κB est directement impliqué dans
le contrôle des états inflammatoires aigus. Dans la cellule au repos,
NF-κB est retenu dans le cytoplasme par liaison non covalente avec
des inhibiteurs spécifiques appelés IκB. Le décrochage des IκB du
complexe NF-κB démasque une séquence de localisation nucléaire,
autorisant le passage de NF-κB dans le noyau de la cellule, sa fixation
à l’ADN et l’activation de ses gènes cibles.
L’activation et la translocation nucléaire de NF-κB dépendent de
l’interaction de produits bactériens ou de cytokines avec leurs récepteurs, comme le LPS avec TLR4 ou le TNF-α avec TNF-R1 [49, 50]. La
liaison ligand-récepteur entraîne une phosphorylation des IκB,
permettant leur décrochage de NF-κB et son passage vers le noyau.
Le stress oxydatif, notamment observé lors des phénomènes
d’ischémie-reperfusion, est également responsable d’une puissante
activation de NF-κB. Des sites de fixation pour le NF-κB sont présents
sur les promoteurs de nombreuses cytokines comme le TNF-α, IL-1,
IL-6, IL-8 et celui des molécules d’adhérence (ELAM-1, ICAM-1,
VCAM-1) [51-54]. Certaines de ces molécules, comme IL-1 ou TNFα,
sont à l’origine d’une boucle de rétroamplification.
VARIATIONS INDIVIDUELLES
Certains patients semblent plus susceptibles que d’autres de
développer une réponse inflammatoire systémique. Plusieurs
facteurs ont été décrits.
INTENSITÉ ET NATURE DE L’AGRESSION INITIALE
L’intensité et la nature de l’agression initiale sont des facteurs
importants, car si elle est très sévère, elle entraîne rapidement un
SIRS et un SDMV [11, 43, 55].
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État de choc
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ÉTAT INITIAL DU PATIENT
RÉFÉRENCES
Des études épidémiologiques mettent en évidence l’importance
des maladies préexistantes lors de la survenue d’un SIRS, comme les
désordres métaboliques ou immunologiques [56]. La plupart de ces
maladies, telle la cirrhose, sont associées à une augmentation du
taux basal des médiateurs de l’inflammation. Or, il est démontré que
la capacité des cellules à synthétiser des médiateurs pro- ou antiinflammatoires est influencée par l’état d’activation préliminaire du
système inflammatoire systémique, ainsi que par l’environnement
hormonal. Il est ainsi raisonnable de faire l’hypothèse que les
patients ayant ces conditions préexistantes d’inflammation systémique auront plus de probabilité de développer un SIRS ou une
défaillance d’organe. À l’inverse, une étude démontre que l’hypertension essentielle offre une meilleure protection à l’infection
qu’une tension normale, les marqueurs de l’inflammation revenant
à la normale plus rapidement chez les hypertendus [57].
[1]
[2]
[3]
[4]
[5]
[6]
[7]
[8]
[9]
[10]
INFLUENCE GÉNÉTIQUE
La réponse de l’organisme à l’agression passe par une réaction
inflammatoire extrêmement complexe, constituée de cascades
d’activation et d’inhibition interagissant entre elles, dont les effets
bénéfiques ou délétères dépendent des quantités de médiateurs
sécrétées. Les modèles cellulaires et animaux ont clairement
démontré que l’absence ou l’insuffisance d’un seul des éléments de
cette réaction suffit à la rendre inefficace ou incontrôlée. De
nombreux polymorphismes génétiques modifiant chacune des
étapes de la réponse à l’agression (reconnaissance du pathogène,
réaction inflammatoire, activation de la coagulation) ont été décrits.
Certains polymorphismes sont particulièrement associés à la susceptibilité ou au devenir des infections sévères. Ainsi, un
polymorphisme récemment décrit dans la partie codante de TLR4
[58], responsable d’un phénotype de non-réponse au LPS, semble
spécifiquement associé à des chocs à Gram négatif [59-60], tandis
qu’un polymorphisme au niveau du promoteur du gène du TNF- α
[61], responsable d’un niveau de transcription excessif, est plus
fréquent chez les patients développant un choc septique et est lié à
une mortalité plus élevée [62-63]. Ceci a été démontré pour d’autres
cytokines [64-66].
ÉVALUATION DU NIVEAU D’ACTIVATION
DE LA RÉPONSE INFLAMMATOIRE
Les taux circulants d’un certain nombre de médiateurs inflammatoires (IL-6 [67], procalcitonine [68], protéine C [55]) renseignent
sur l’intensité de la réponse de l’hôte. En revanche, si la quantification du nombre de neutrophiles circulants ne donne qu’une petite
information sur l’évolution de la réponse inflammatoire, la définition de leur état fonctionnel semble plus pertinente. En effet, il a été
démontré que les leucocytes circulants de patients en choc présentent rapidement une diminution de leur capacité à produire des
cytokines par rapport à ceux des patients témoins [69]. L’étude de la
mort cellulaire programmée (apoptose) renseigne aussi sur l’état
d’activité des cellules [70]. L’apoptose, mécanisme de régulation
cellulaire, permet la dégradation de la cellule sans engendrer de réaction inflammatoire. Si l’apoptose est accélérée quand le neutrophile
a phagocyté une bactérie, elle peut être retardée lors des états inflammatoires pathologiques. Le facteur de transcription NF-κB semble
être un élément majeur de la régulation de ce phénomène [71].
L’activation de cette voie par de nombreux médiateurs fait barrage à
l’apoptose et les stimuli apoptotiques doivent contourner cette
barrière pour induire efficacement la mort cellulaire. Ainsi, la diminution des mécanismes d’apoptose est associée à un état d’activation
cellulaire augmentée, contribuant à pérenniser les phénomènes de
toxicité tissulaire aboutissant au SDMV.
[11]
[12]
[13]
[14]
[15]
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[17]
[18]
[19]
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CONCLUSION
Si la physiopathologie des états de choc a longtemps reposé sur
les seuls événements hémodynamiques, une réaction inflammatoire,
quasi constante quel que soit le type d’état de choc, est responsable
lorsqu’elle est incontrôlée, de la plupart des lésions tissulaires aboutissant au SDMV.
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CHOC HÉMORRAGIQUE
ET HYPOVOLÉMIQUE
A. Harrois, J. Duranteau
INTRODUCTION
L’état de choc hypovolémique fait suite à une baisse de volume
intravasculaire suffisante pour compromettre la stabilité hémodynamique et engendrer une hypotension. La déshydratation liée à des
pertes par vomissements, diarrhées ou pertes insensibles excessives
ainsi que la spoliation sanguine dans le cadre d’une hémorragie
rapide et importante, peuvent mener à un choc hypovolémique. Le
choc hémorragique, que nous aborderons plus spécifiquement, se
caractérise par une baisse du transport en oxygène et une baisse de la
perfusion tissulaire responsables d’une hypoxie tissulaire, voire
d’une ischémie tissulaire, qui peuvent contribuer au développement
de défaillances viscérales.
Les principales causes d’hémorragie entraînant un état de choc
comprennent les hémorragies traumatiques, gastrointestinales,
obstétricales et périopératoires. Si la physiologie du choc hémorragique est commune aux différentes étiologies, la thérapeutique
diffère selon celles-ci. Nous nous axerons principalement sur le traitement du choc hémorragique traumatique.
PHYSIOLOGIE DU CHOC HÉMORRAGIQUE
RÉPARTITION DE LA MASSE SANGUINE
ET ESTIMATION DE LA PERTE SANGUINE
Le volume sanguin circulant se distribue dans les différents
secteurs vasculaires de l’organisme : le réseau veineux, la microcirculation et le réseau artériel; 70 % du volume circulant est contenu
dans le système veineux dont un tiers est situé au niveau de la circulation splanchnique [1]. La masse sanguine absolue dépend du poids
du patient et peut être estimée à 70 mL/kg [2]. L’hémorragie entraîne
une baisse de la masse sanguine sans engendrer d’anémie initialement (le taux d’hémoglobine (Hb) est un mauvais reflet de
l’importance de l’hémorragie à la phase aiguë). La conséquence de
l’hémorragie est une baisse de la volémie qui, lorsqu’elle est
compensée par un remplissage vasculaire, abaisse le taux d’Hb. Si on
néglige les pertes volémiques liées à la diurèse et aux pertes insensibles, le taux d’Hb d’un patient lors de la réanimation du choc
hémorragique dépend du taux d’Hb initial, du volume de remplissage vasculaire administré et de la perte sanguine (fig. 74.1). Une
même quantité de remplissage vasculaire induit une hémodilution
linéairement croissante avec l’augmentation de la perte sanguine.
L’interprétation du taux d’Hb en fonction de la quantité de remplissage vasculaire administrée peut donc renseigner sur l’importance de
la perte sanguine liée à l’hémorragie (fig. 74.1).
RÉPONSE PHYSIOLOGIQUE À L’ÉTAT
DE CHOC HÉMORRAGIQUE
Face à une baisse aiguë de la volémie liée à une perte sanguine,
l’organisme met en place des mécanismes d’adaptation, principalement par le biais d’une activation du système sympathique, dont
l’intensité dépend de l’importance de la perte sanguine.
SUR LE PLAN HÉMODYNAMIQUE
L’hypovolémie entraîne une baisse du retour veineux qui
engendre à terme une hypotension. Les barorécepteurs cardiopulmonaires ainsi que les barorécepteurs aortiques et carotidiens à
haute pression, respectivement sensibles au shear stress des parois
cardiaques et à la déformation des parois vasculaires, modulent
l’activité des neurones afférents vers les centres bulbaires du tractus
solitaire. À l’état basal, les afférences sont activées et maintiennent
sur les noyaux du tractus solitaire une action inhibitrice sympathique et activatrice parasympathique. Ainsi, lors de l’inactivation
de ces afférences baroréflexes liée à une baisse du shear stress intracardiaque ou de la pression intracarotidienne, une levée d’inhibition
sympathique se produit au niveau des noyaux du tractus solitaire
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État de choc
779
Volémie : 5,5 litres
Taux Hb : 14 g/dL
Volume
plasmatique
Spoliation sanguine
de 2 000 mL
Spoliation sanguine
de 1 000 mL
en état de choc hémorragique et impose de titrer les doses de médicaments anesthésiques [4, 5].
Volume globulaire
ADAPTATION MICROCIRCULATOIRE
Volémie: 4,5 litres
Taux Hb : 14 g/dL
Expansion volémique
par 1 000 mL (pour
normovolémie)
Volémie: 5,5 litres
Taux Hb : 11,4 g/dL
Expansion volémique
de 1 000 mL
Volémie: 4,5 litres
Taux Hb : 10,8 g/dL
Volémie: 3,5 litres
Taux Hb : 14 g/dL
Expansion volémique
par 2 000 mL (pour
normovolémie)
Volémie: 5,5 litres
Taux Hb : 8,9 g/dL
Figure 74.1.Effet du remplissage vasculaire sur la valeur du taux
d’hémoglobine (Hb) au cours du choc hémorragique en fonction de la
spoliation sanguine et du volume d’expansion volémique.
L’hématocrite reste stable dans les suites immédiates de l’hémorragie
avant toute réanimation mais la volémie est abaissée. Au cours de la
phase réanimatoire, un remplissage vasculaire identique a des effets
différents selon l’importance de la spoliation sanguine.
avec une augmentation de l’inotropisme cardiaque, une vasoconstriction artériolaire et veineuse, ainsi qu’une activation du système
rénine-angiotensine-aldostérone (RAA). L’inactivation du parasympathique participe à l’augmentation de la fréquence cardiaque (Fc).
Le retour veineux s’effectue à partir des veines périphériques
vers les cavités droites selon le gradient de pression qui règne entre
ces deux compartiments. La pression veineuse périphérique est la
pression systémique moyenne (PSM) qui correspond à la pression
qui règne dans l’ensemble du réseau vasculaire lorsque le débit est
nul. Cette pression motrice dépend de la volémie (contenu veineux)
et de la compliance veineuse dont la composante principale est le
niveau de vasoconstriction veineuse. On sépare le volume intravasculaire en volume non contraint, qui représente le volume contenu
dans les veines qui n’exerce pas de mise en tension des parois, et le
volume contraint, qui est le volume supplémentaire capable d’initier
une tension de paroi et donc de générer une PSM. La vasoconstriction veineuse sympathique augmente la part de volume contraint au
dépend du volume non contraint et augmente par ce biais la PSM.
La majorité du volume non contraint se situe dans le réseau veineux
et lui confère ainsi des propriétés de réserve volémique mobilisable
par veinoconstriction. Finalement, l’augmentation du retour
veineux, la majoration de l’inotropisme et de la Fc permettent de
maintenir le débit cardiaque (QC) lors d’une hypovolémie induite
par une spoliation sanguine. La vasoconstriction artérielle associée
au maintien du QC stabilise la pression artérielle (PA).
La vasoconstriction induite par la stimulation sympathique
s’effectue principalement dans les territoires splanchniques et
musculocutanés puis rénaux alors que les circulations cérébrales et
coronaires, dites nobles, sont épargnées jusqu’à un stade tardif. La
vasoconstriction sympathique est également à l’origine d’un transfert de liquide depuis le secteur interstitiel vers le secteur
intravasculaire. Cet effet est principalement en rapport avec une
baisse de la pression hydrostatique capillaire par vasoconstriction
artériolaire sympathique en amont de la circulation capillaire. Si ce
phénomène est bénéfique sur le plan de la volémie, il est différé sur
le plan chronologique et ne participe donc à l’augmentation du
retour veineux qu’après un certain délai estimé à une heure. Ce
retard de compensation du milieu interstitiel explique l’absence
d’hémodilution à la phase initiale du choc hémorragique non
réanimé.
Ainsi, la place du système nerveux sympathique est centrale
dans l’adaptation cardiovasculaire à l’hypovolémie. L’utilisation
d’agent anesthésique ou sédatif dans le cadre du choc hémorragique
entraîne une sympatholyse dont les conséquences sont une inefficacité des mécanismes cardiocirculatoires adaptatifs [3] qui peut
aboutir à une hypotension sévère. Ainsi, si l’hémodynamique apparaît maintenue grâce à l’activation sympathique chez un malade
conscient en ventilation spontanée, la nécessité de recourir à une
anesthésie pour une intubation ou une procédure chirurgicale doit
faire anticiper une dégradation de l’état hémodynamique du patient
Alors que les effets microcirculatoires de l’anémie au cours de
l’hémodilution normovolémique ont été largement décrits, les
conséquences microcirculatoires du choc hémorragique mériteraient
des études complémentaires.
Lors de l’anémie normovolémique, on note une modification
du comportement de la microcirculation avec une augmentation du
nombre de capillaires perfusé (recrutement capillaire) [6, 7]. De plus,
le flux capillaire est globalement augmenté [8, 9]. Il existe également
une homogénéisation des hématocrites capillaires [10]. En effet,
l’hyperhémie associée à la baisse de la viscosité sanguine homogénéise la répartition des globules rouges au niveau des bifurcations
microcirculatoires et donc nivelle les hématocrites. Finalement,
l’augmentation du débit capillaire, l’homogénéisation des hématocrites et le recrutement capillaire baissent les distances intercapillaires et facilitent ainsi la diffusion de l’oxygène (O2) et son
extraction au niveau des organes.
Au cours du choc hémorragique, l’hypovolémie s’associe à
l’anémie. Toutefois, malgré des niveaux de pression artérielle bas, au
cours de la phase initiale du choc hémorragique, la densité de capillaires perfusés ainsi que la vitesse des globules rouges dans le réseau
microvasculaire apparaissent relativement bien préservées [11].
Cependant, si cette phase initiale n’est pas rapidement contrôlée
une dégradation microcirculatoire sera observée avec ses conséquences en terme d’oxygénation tissulaire.
ADAPTATION DU MÉTABOLISME CELLULAIRE
L’état de choc hémorragique aboutit à une baisse du transport
en oxygène (TO2) synonyme de diminution des apports énergétiques
aux cellules. L’organisme priorise la distribution du flux sanguin vers
les organes nobles que sont le cerveau et le cœur au dépend des
circulations musculo-cutanées et splanchniques. Initialement, grâce
à l’augmentation de l’extraction en oxygène (ERO2) par les tissus, les
organes « sacrifiés » parviennent à maintenir une consommation
d’O2 constante. Toutefois, au-delà d’un seuil critique, l’ERO2 ne peut
être augmentée et la consommation en O2 (VO2) baisse proportionnellement au TO2 et place l’organisme dans un contexte de
dépendance à la délivrance en O2. L’apport en O2 n’autorise plus
alors le maintien du métabolisme aérobie. Les cellules font appel au
métabolisme anaérobie afin de maintenir une production d’adénosine triphosphate (ATP) compatible avec une survie cellulaire. Sans
intervention thérapeutique, la majoration de la spoliation sanguine
se traduira par une chute du stock d’ATP intracellulaire puis par un
dysfonctionnement des pompes Na+/K+, une entrée de Na+ dans la
cellule, une sortie de K+ avec la constitution de lésions cellulaires
irréversibles qui entraînent la mort cellulaire par apoptose ou par
nécrose.
La traduction métabolique de la baisse d’apport en O2 et de
l’anaérobiose est la formation de lactate et de protons. Le taux de
lactate à la prise en charge en milieu hospitalier des patients en état
de choc hémorragique traumatique est d’ailleurs corrélé à la sévérité
du choc et à la mortalité des patients [12]. La production de protons
est en grande partie tamponnée par les bicarbonates de l’organisme,
entraînant ainsi une consommation et une diminution du taux de
bicarbonate sanguin. Le base excess est le reflet de cette consommation en bicarbonate et son importance est également corrélée au
pronostic des patients en état de choc hémorragique [13, 14]. Les
valeurs de ces paramètres lors de la prise en charge sont des indicateurs de l’inadéquation de la perfusion tissulaire par rapport à la VO2
et donc de la dette en O2 induite par le choc hémorragique. Le taux
de lactate et le base excess sont intimement liés dans la mesure où le
premier induit une acidose qui retentit sur le second. L’évolution de
ces marqueurs métaboliques au cours de la réanimation du choc
hémorragique est un bon élément pour juger de l’efficacité de la
prise en charge thérapeutique et de l’évolutivité de l’hémorragie
[13].
CONSÉQUENCES DE L’ÉTAT DE CHOC HÉMORRAGIQUE
PROLONGÉ
La pérennisation de l’état de choc hémorragique peut entraîner
une dysfonction d’organe dont le stade ultime est la défaillance
multiviscérale. En effet, si les mécanismes cardiovasculaires adapta-
44200_Volume4_1 Page 780 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
Affections et leurs traitements
780
tifs sont efficaces à la phase aiguë du choc hémorragique et
maintiennent une perfusion et des apports en O2 adaptés aux
besoins, ces derniers peuvent devenir insuffisants lors de la prolongation du choc avec l’apparition d’une souffrance tissulaire
secondaire à l’inflammation systémique non contrôlée et aux
phénomènes d’ischémie-reperfusion tissulaire. L’hémorragie associée aux lésions tissulaires chez le patient polytraumatisé entraîne
un syndrome de réponse inflammatoire systémique (SIRS) [15] qui se
traduit par une synthèse accrue de protéines proinflammatoires
telles que les cytokines. En effet, précocement au cours de l’état de
choc hémorragique, les taux de Tumor Necrosis Factor alpha (TNF α),
d’Interferon α, d’Interleukine 1 et d’Interleukine 6 augmentent [16,
17] dans le plasma des patients et sont corrélés avec la sévérité de
l’état de choc [16]. Les effets des cytokines sont importants sur le
plan local et systémique avec activation des polynucléaires qui infiltrent les tissus, notamment le foie et les poumons à l’origine de
lésions viscérales [18]. Alors que de nombreuses cytokines proinflammatoires sont produites, l’organisme sécrète également des
protéines anti-inflammatoires dont l’Interleukine 10 et le Transforming Growth Factor bêta (TGF β) [19, 20] qui contrebalancent les
effets pro-inflammatoires susmentionnés. L’équilibre est cependant
instable puisqu’il est décrit des lésions en rapport avec les molécules
pro-inflammatoires [21] ainsi qu’une immunosupression liée à
l’excès de cytokines anti-inflammatoires [22, 23], favorisant ainsi les
infections dans les suites de la réanimation du choc hémorragique.
Cette dépression immunitaire semble plus importante lors du choc
hémorragique traumatique [24]. L’attrition tissulaire et les lésions
osseuses majoreraient les conséquences immunologiques de
l’hémorragie. Le choc hémorragique entraîne une baisse brutale et
parfois profonde du TO2 qui est suivie au cours de la réanimation
d’un rétablissement brutal de la perfusion et de l’apport d’O2. Cette
évolution biphasique peut être décrite comme une véritable
ischémie-reperfusion dont la pathogénicité est démontrée au cours
des deux phases. En effet, lors de l’ischémie, la cellule subit une
privation énergétique puis, lors de la reperfusion, une production
accrue de radicaux libres (RL) survient générant un stress oxydant
cellulaire. Ces RL sont impliqués dans le déclenchement de voies de
signalisation cellulaire potentiellement toxiques pour la cellule [25]
mais peuvent aussi exercer une toxicité directe sur la cellule par des
réactions de peroxydation lipidique membranaire ou en altérant
directement l’ADN et les protéines [25]. Une partie des voies de
signalisation stimulées par les RL contribue au phénotype inflammatoire des cellules, notamment de l’endothélium que nous allons
décrire par la suite.
L’endothélium vasculaire est situé à l’interface entre le sang
circulant et les tissus ce qui en fait une cible directe des phénomènes
d’ischémie-reperfusion. Les fonctions de l’endothélium sont
nombreuses à l’état physiologique puisqu’il est impliqué dans la
régulation du tonus et de la perméabilité vasculaire et participe donc
à la perfusion tissulaire. Il exerce également un rôle dans la coagulation en assurant l’équilibre pro-anticoagulant au contact du sang.
L’activation endothéliale survient précocement au cours de
l’ischémie-reperfusion et entraîne, entre autre, une adhésion leucocytaire sur le revêtement endothélial [26, 27]. Ce phénomène se
produit principalement au niveau veinulaire et participe à l’obstruction capillaire en réduisant le diamètre efficace de la microcirculation. La dysfonction endothéliale générée par l’ischémie-reperfusion
mène également à une fuite capillaire par augmentation de la
perméabilité endothéliale. Cette fuite entraîne la formation
d’œdèmes capillaires qui sont à l’origine de troubles de la diffusion
de l’O2 et majorent l’hypoxie tissulaire.
DIAGNOSTIC ET DÉTERMINATION DE L’ORIGINE
DU CHOC HÉMORRAGIQUE
Le choc hémorragique traduit une perte sanguine suffisante
pour dépasser les mécanismes d’adaptation physiologique du patient
et entraîner une baisse de l’apport en O2 et de la perfusion des
organes. Les signes cliniques d’hypovolémie sont la traduction
clinique des mécanismes d’adaptation physiologique à l’hypotension. Ainsi, les marbrures cutanées, la froideur des extrémités,
l’altération de l’état de conscience et une oligurie sont les témoins
d’une hypoperfusion et d’une vasoconstriction. La tachycardie
témoigne de la stimulation sympathique et l’hypotension du dépassement de ces mécanismes d’adaptation. L’augmentation de la
fréquence respiratoire traduit l’hypoxie tissulaire, voire l’acidose
engendrée par l’état de choc. Différents stades cliniques de gravité au
cours d’une hémorragie ont ainsi été proposés (tableau 74.1). Toutefois, si la présence d’un ou plusieurs de ces symptômes est un
élément de gravité au cours d’une hémorragie, leur absence ne doit
pas rassurer pour autant. Effectivement, une spoliation sanguine de
l’ordre de 30 % de volume intravasculaire peut survenir chez les
patients jeunes, vigiles avec une PA conservée. De plus, lors d’une
réduction du volume intravasculaire supérieure à 50 %, il peut
survenir une bradycardie paradoxale associée à l’hypotension [28].
Cette bradycardie traduit une inhibition centrale sympathique qui
permettrait un meilleur remplissage diastolique et contribuerait, en
association avec la baisse de la postcharge secondaire à la sympathoinhibition, un mécanisme d’adaptation ultime de protection
myocardique. Ainsi, une tachycardie supérieure à 120/min, une
hypotension ou une altération de l’état de conscience doivent rapidement faire débuter des manœuvres de réanimation. À l’extrême,
une bradycardie paradoxale (associée à une hypotension) est une
urgence volémique.
Tableau 14.1. Gravité clinique du choc hémorragique. Adapté de la classification du collège américain de chirurgie, Advanced trauma life support manual 1997
Critères de sévérité de l’hémorragie
Perte sanguine (mL)
Fréquence cardiaque (battement par minute)
Classe I
Classe II
Classe III
Classe IV
< 750
750-1 500
1 500-2 000
> 2 000
< 100
> 100
> 120
> 140
Normale
Normale
Diminuée
Diminuée
Fréquence respiratoire (/min)
14-20
20-30
30-40
> 40
Débit urinaire (mL/h)
> 30
20-30
5-15
<5
Légère anxiété
Anxiété modérée
Anxiété, confusion
Léthargie
Pression artérielle (mmHg)
Système nerveux central
En obstétrique, l’hémorragie du post-partum est définie d’après
la World Health Organisation par la perte de plus de 500 mL de masse
sanguine au cours des 24 premières heures suivant l’accouchement.
L’étiologie d’une hémorragie obstétricale implique plusieurs facteurs
qui peuvent être rassemblés en cinq groupes : les anomalies placentaires, les désordres de la coagulation, les dilacérations et
traumatismes, les rétentions utérines et enfin la cause la plus
fréquente que constitue l’atonie utérine [29]. Les lésions cervicovaginales sont à rechercher soigneusement par un examen sous valve
surtout en cas d’extraction instrumentale puisqu’elles peuvent bénéficier d’une suture simple. L’hémorragie obstétricale doit ensuite
faire rechercher une délivrance incomplète par l’examen de la cavité
utérine sous anesthésie générale ou péridurale. Lorsque le saignement persiste malgré la révision utérine, l’administration de
médicaments utérotoniques (ocytociques, prostaglandines), afin de
renforcer la contraction utérine, devient nécessaire dans l’hypothèse
d’une atonie utérine. Les diagnostics différentiels plus rares restent à
ce stade importants à considérer : ainsi, les ruptures et inversions
utérines doivent être évoquées et diagnostiquées du fait de leur traitement chirurgical. Enfin, en cas de persistance du saignement
obstétrical, après avoir éliminé les causes mentionnées précédemment, l’étiologie la plus fréquente reste l’atonie utérine. Si cette
dernière ne répond pas à l’administration de médicaments utérotoniques, une hémostase radicale chirurgicale par hystérectomie ou
ligature vasculaire ou une thérapeutique radiologique interventionnelle par artérioembolisation doivent être envisagés [30].
Dans le cas des hémorragies digestives, le diagnostic est souvent
facile du fait de leur extériorisation fréquente en cas de choc
hémorragique; cependant, la localisation exacte du saignement peut
s’avérer difficile. En effet, si l’hématémèse implique spécifiquement
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État de choc
un saignement digestif haut souvent identifiable en fibroscopie
œsogastroduodénale (FOGD), les rectorragies ou méléna peuvent
résulter d’une lésion située n’importe où sur le tube digestif. Effectivement, l’origine d’une rectorragie n’est pas forcément colique et
une hémorragie digestive haute peut s’extérioriser exclusivement par
voie basse avec un aspect de sang rouge réalisant alors une hématochézie. Si la pose d’une sonde gastrique dans un contexte de
rectorragies peut authentifier un saignement du tractus digestif haut,
l’absence de sang dans le lavage gastrique n’exclut pas l’origine
duodénale de l’hémorragie. L’examen de première intention à
réaliser en cas d’état de choc hémorragique sur rectorragie est donc
une FOGD à la recherche d’un saignement œsogastroduodénal dont
le traitement perendoscopique est souvent possible ou oriente rapidement vers une chirurgie d’hémostase. Dans un deuxième temps,
on réalisera une exploration basse par coloscopie, souvent délicate
dans ce contexte puisqu’aucune préparation n’est possible. Si la
coloscopie ne permet pas le repérage de la lésion hémorragique, il est
alors possible de réaliser un scanner avec injection d’iode afin de
détecter le saignement actif et d’orienter ainsi le chirurgien dans la
zone potentielle à réséquer [31]. Les saignements d’origine colique
sont le plus souvent dus à une angiodysplasie ou à un diverticule
sigmoïdien. Les lésions carcinologiques digestives sont exceptionnellement massivement hémorragiques.
Si les hémorragies digestives et obstétricales ne concernent en
général qu’une lésion unique, les hémorragies dans le contexte de la
traumatologie peuvent être multifocales du fait de l’association
potentielle de plusieurs lésions hémorragiques. Des explorations
complémentaires sont donc indispensables afin d’obtenir un bilan
lésionnel complet permettant de hiérarchiser les interventions
thérapeutiques. Lors de l’accueil du patient polytraumatisé en milieu
hospitalier, le bilan et les investigations initiales doivent être effectués en un minimum de temps et comprennent systématiquement
des radiographies de thorax et de bassin au lit du patient afin de
juger respectivement de la nécessité d’un drainage pleural et de
l’atteinte du bassin source d’hémorragie interne importante. L’échographie a pris une place majeure dans la prise en charge des
polytraumatisés puisqu’elle permet d’explorer en quelques minutes :
les plèvres, le péricarde, l’abdomen et les flux intracrâniens au
niveau des artères cérébrales moyennes donnant ainsi une évaluation de la perfusion cérébrale. Cette phase initiale permet d’orienter
le patient immédiatement vers un traitement radiologique interventionnel ou chirurgical s’il est très instable ou vers des explorations
radiologiques complémentaires s’il est stable. Dans ce dernier cas, un
scanner cérébral et thoraco-abdomino-pelvien avec injection
permettra de compléter le bilan lésionnel. Il n’est réalisé que dans un
deuxième temps si l’instabilité du patient est telle qu’un geste
d’hémostase (chirurgical ou artériographique) s’avère nécessaire. Il
convient également de ne pas tomber dans quelques pièges
fréquents qui en traumatologie peuvent simuler à tort un état de
choc hémorragique. Ainsi, une tachycardie associée à un collapsus
cardiovasculaire doit amener à rechercher un pneumothorax
compressif qui nécessiterait alors un drainage rapide. Certaines
lésions hémorragiques de surface, dont le saignement est facilement
sous évalué, peuvent être source de déglobulisation importante et ne
doivent pas être négligées. Les plaies de scalp font partie de ces
lésions et doivent être systématiquement recherchées et suturées, car
elles peuvent passer inaperçues lorsqu’elles sont situées sur la face
dorsale du patient. Les saignements faciaux et notamment les épistaxis doivent également être contrôlés par le biais de sondes à
ballonnet si nécessaire avant de discuter une artérioembolisation
s’ils persistent. Enfin, une atteinte médullaire peut être à l’origine
d’un bloc sympathique qui diminue alors considérablement les
capacités d’adaptation du patient à l’hypovolémie.
RÉANIMATION DU CHOC HÉMORRAGIQUE
OBJECTIFS DE PA AU COURS DE LA RÉANIMATION
DU CHOC HÉMORRAGIQUE
Le niveau de PA qu’on cherche à maintenir au cours de la réanimation du choc hémorragique est sujet à débat. En effet, les lésions
occasionnées par le traumatisme comprennent des lésions artérielles
et artériolaires dont le débit de saignement dépend du niveau de
pression qui règne à l’intérieur des vaisseaux. Tant que le saignement
n’est pas contrôlé, le fait de restaurer la PA peut favoriser et entretenir le saignement. Donc, initialement l’objectif est de contrôler au
plus vite le saignement et de maintenir une PA suffisante pour
781
limiter les hypoperfusions tissulaires sans essayer de la normaliser. Il
n’existe pas actuellement de consensus sur le niveau optimal de PA à
atteindre. Expérimentalement sur des modèles de choc hémorragique par perforation de l’aorte, un resaignement apparaît pour une
PA moyenne (PAM) située entre 60 et 65 mm Hg [32]. Il conviendrait
donc de maintenir la PAM au-dessus de cette limite inférieure
d’autorégulation. Ainsi, tant que l’hémostase n’est pas réalisée, il
paraît raisonnable de proposer un but de PAM compris entre 60 et
70 mmHg ou une PA systolique (PAS) comprise entre 80 et 90
mmHg. Chez les traumatisés crâniens, l’hypotension est un facteur
de risque d’aggravation secondaire des lésions. Il importe donc chez
ces patients de rechercher une pression de perfusion cérébrale au
moins supérieure à 70 mmHg avec un but de PAM ≥ 90 mmHg. Les
hémorragies obstétricales ou digestives sont des hémorragies monolésionnelles pour lesquelles le maintien d’une PAM de 60 à 70
mmHg est un objectif raisonnable. Finalement, si un débat animé
existe quant au niveau de PA à maintenir au cours du choc hémorragique, l’urgence reste la réalisation de l’hémostase et la prévention
de l’hypoperfusion d’organes.
REMPLISSAGE VASCULAIRE AU COURS
DU CHOC HÉMORRAGIQUE
Le remplissage vasculaire corrige l’hypovolémie induite par la
spoliation sanguine et permet de rétablir ainsi une efficacité circulatoire et une perfusion d’organes. Cependant, le remplissage
vasculaire est à l’origine d’une hémodilution qui peut avoir des
conséquences néfastes sur l’hémostase. Il faudra éviter une expansion volémique excessive. Bickell et al. [33] préconisent une stratégie
d’expansion volémique retardée dans les traumatismes pénétrants
tant que l’hémostase chirurgicale n’est pas réalisée. Cependant,
aucune donnée dans la littérature ne permet actuellement de recommander une telle stratégie dans les traumatismes fermés et dans tout
autre choc hémorragique. Le type de soluté est également important
dans la mesure où chacun diffère par son pouvoir d’expansion volémique et par ses effets secondaires, en particulier sur l’hémostase.
Enfin, certaines modalités de réanimation influant la volémie, telles
que le pantalon antichoc, peuvent être utilisées afin de limiter le
remplissage vasculaire dans l’attente d’une hémostase chirurgicale
ou artériographique. Quel que soit le soluté de remplissage utilisé,
les modalités d’administration restent communes. Les voies d’administrations doivent privilégier les cathlons courts et de gros calibre
(14 à 16 gauges). La voie fémorale constitue une voie veineuse relativement simple à obtenir, avec peu de complications. Ainsi, dans les
situations les plus menaçantes, des désilets de gros calibre compatibles avec de hauts débits de perfusion peuvent être utilisés. Les
solutés de remplissage utilisés sont principalement les cristalloïdes et
les colloïdes. Les recommandations conjointes de la Société de réanimation de langue française et de la Société française d’anesthésieréanimation sur le remplissage vasculaire au cours des hypovolémies
préconisent « l’utilisation des cristalloïdes lorsque la perte sanguine
est estimée à moins de 20 % de la masse sanguine et pour un choc
hémorragique patent, avec perte estimée supérieure à 20 % de la
masse sanguine ou si la PAS est d’emblée inférieure à 80 mmHg,
l’utilisation de colloïdes en première intention ».
Le sérum salé hypertonique (SSH) peut être une option thérapeutique. L’attrait du SSH réside en partie dans ses propriétés
pharmacologiques et la faible quantité à perfuser. Le SSH mobilise le
liquide intracellulaire vers le secteur vasculaire par le biais de
l’hypertonicité plasmatique qu’il entraîne. Cet effet remplissage
vasculaire est obtenu avec de faibles quantités de liquide salé hypertonique de l’ordre de 4 mL/kg de solution de NaCl 7,5 %. Le SSH
favorise ainsi la perfusion des organes en réduisant la formation de
l’œdème périvasculaire. Son effet est transitoire mais l’association
avec un colloïde de synthèse de type hydroxyéthylamidon en
prolonge significativement les effets. Cependant, son utilisation
reste discutée au cours du choc hémorragique et nécessite des études
complémentaires afin de définir son impact sur la mortalité et sa
place dans l’arsenal thérapeutique. Le pantalon antichoc par son
action sur la volémie apparaît également potentiellement utile pour
limiter le remplissage vasculaire. C’est un dispositif efficace dans la
réanimation du choc hémorragique d’origine sous-diaphragmatique
(traumatismes abdominaux ou pelviens). Il permet de stabiliser dans
un certain nombre de cas l’état hémodynamique du patient par un
effet vasoconstricteur mixte sous-diaphragmatique : restriction du
secteur vasculaire capacitif à l’origine d’une augmentation du retour
veineux et vasoconstriction artérielle à l’origine d’une augmentation
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de la postcharge cardiaque. Sa mise en place peut entraîner une
douleur importante et il est souvent nécessaire en pratique de
sédater le patient et d’avoir recours à la ventilation mécanique.
L’aggravation de l’hémorragie que le pantalon antichoc entraîne
dans les traumatismes thoraciques contre-indique son utilisation
dans ce contexte. Son utilisation n’a pas démontré de bénéfice en
termes de morbidité et de mortalité [34] au cours de l’état de choc
hémorragique, toutefois, il peut participer à la stabilisation hémodynamique des patients le temps que l’hémostase chirurgicale ou
endovasculaire soit réalisée.
UTILISATION DE CATÉCHOLAMINES AU COURS
DU CHOC HÉMORRAGIQUE
Les amines vasopressives peuvent trouver leur place à différents
moments du choc hémorragique. À la phase initiale, l’administration de catécholamines vasoconstrictrices se justifie afin de
maintenir une pression de perfusion si le remplissage vasculaire ne
permet pas à lui seul de restaurer la PA. De plus, l’administration
précoce des vasopresseurs limite les effets délétères d’une expansion
volémique excessive associée à une dilution des facteurs d’hémostase. L’introduction de vasopresseurs peut s’avérer nécessaire lors de
l’induction anesthésique, l’activité du système nerveux sympathique
étant alors brutalement inhibée [3]. Enfin, l’utilisation de catécholamines prend tout son sens lors du choc hémorragique prolongé. En
effet, si l’état de choc hypovolémique perdure, une vasoplégie
s’installe dont le traitement symptomatique, une fois le remplissage
vasculaire optimisé, est la mise sous amine α-pressive. Alors que le
tonus vasoconstricteur prédomine lors de la phase initiale de l’hypovolémie en rapport avec une stimulation sympathique, il s’installe
au cours du choc prolongée une vasoplégie qui persiste malgré une
restauration ad integrum de la volémie [35]. La priorité thérapeutique
au cours d’un état de choc étant de restaurer la PA, il peut être
proposé d’introduire un vasopresseur si une expansion volémique de
1 000 à 1 500 mL s’avère inefficace. La norépinéphrine, du fait de
son action α-adrénergique prédominante peut être recommandée.
L’introduction d’un vasopresseur ne doit pas faire oublier que le
remplissage vasculaire reste le traitement du choc hémorragique. Le
vasopresseur n’est là que pour aider le réanimateur à corriger rapidement l’hypotension et permettre de réaliser une expansion efficace
et raisonnable.
TRANSFUSION AU COURS DE L’ÉTAT
DE CHOC HÉMORRAGIQUE
L’objectif de la transfusion de produits sanguins labiles est
double : la restauration d’une hémostase favorable à la coagulation
biologique et la restitution d’un TO2 adéquat. En effet, la vocation de
la transfusion de culots globulaires est l’apport d’Hb, pierre angulaire
du TO2, afin de prévenir l’hypoperfusion d’organe. De nombreuses
recommandations ont récemment été proposées quant aux seuils
d’Hb à atteindre chez les patients de réanimation [36]. La majorité
des études s’est intéressée aux patients de réanimation stables dans
un contexte euvolémique, et il peut être discuté d’appliquer les
mêmes recommandations aux situations aiguës hémorragiques pour
plusieurs raisons : 1) la période qui précède la réalisation de l’hémostase est souvent contemporaine d’une hypovolémie au cours de
laquelle l’anémie est moins bien tolérée qu’en contexte stable
euvolémique; 2) le caractère évolutif d’un saignement incontrôlé fait
préférer des seuils de transfusion plus hauts dans la mesure où une
marge de sécurité est souhaitable, afin de se situer au-dessus du seuil
de dépendance au TO2 ; 3) dans un contexte traumatique, la
survenue d’un trauma crânien fait préférer des taux d’Hb plus élevés.
Le tissu cérébral peut difficilement augmenter son extraction en O2
en réponse à une baisse du transport et reste dépendant de ce dernier
[37]; 4) enfin, les globules rouges ont un rôle hémostatique particulièrement important à prendre en compte lors de troubles de la
coagulation associés (spoliation en facteurs de la coagulation,
thrombopénie). Les érythrocytes sont en effet capables d’activer les
fonctions plaquettaires [38]. En pratique, il est fortement recommandé de procéder à une transfusion lorsque le taux d’Hb devient
inférieur à 7 g/dL. Pour les raisons énoncées ci-dessus, la réanimation initiale d’un patient en état de choc hémorragique doit
rechercher à obtenir des objectifs de transfusion supérieurs de l’ordre
de 7 à 9g/dL. Il n’est pas recommandé de transfuser au-delà de 10 g/
dL. Dans le cas du traumatisé crânien, il est recommandé de maintenir un taux d’Hb de 10 g/dL.
Affections et leurs traitements
Les modalités de la transfusion au cours du choc hémorragique
dépendent du taux d’Hb à l’arrivée en milieu hospitalier, de la
vitesse de saignement et de la tolérance hémodynamique du patient.
En cas d’urgence vitale immédiate, le patient peut et doit être transfusé en sang O négatif sans la connaissance préalable de son groupe
ni la recherche d’agglutinines irrégulières (RAI) – les prélèvements
sanguins à destinée transfusionnelle seront effectués immédiatement avant l’administration des culots globulaires. En cas d’une
urgence différée (inférieure à 30 minutes), alors que le groupe est
connu, la transfusion doit être effectuée avec un groupe
« compatible » même si les RAI n’ont pu être effectuées. Bien sûr, la
détermination ultérieure des RAI permettra d’affiner la transfusion
au cours de la réanimation.
Une attention particulière doit être portée à l’hémostase biologique au cours du remplissage vasculaire. L’hypothermie doit ainsi
être limitée puisqu’elle entraîne une altération des fonctions
plaquettaires et des facteurs de la coagulation. Attention, les tests de
coagulation sont effectués au laboratoire à 37 °C et peuvent être
faussement rassurants si le patient est hypotherme. L’apparition de
troubles de l’hémostase doit être prévenue. Ainsi, l’apport de plasma
frais congelés (PFC) est recommandé afin de maintenir un taux de
prothrombine (TP) supérieur à 40 % [39]. Le seuil doit être élevé à
50 % en cas de traumatisme crânien du fait des conséquences
néfastes de l’aggravation d’une lésion hémorragique intracérébrale
sur le pronostic cérébral. La transfusion de plaquettes est nécessaire
lorsque le taux est inférieur à 50 000/mm3. Ce seuil est porté à
100 000/mm3 en cas de traumatisme crânien. Le taux de fibrinogène
doit être maintenu au-dessus de 1g/L et peut justifier l’administration de solution de fibrinogène dans la mesure où les PFC sont
parfois insuffisants.
ANTIFIBRINOLYTIQUES ET CONCENTRÉS
EN FACTEUR DE LA COAGULATION
Malgré la transfusion de facteurs de la coagulation contenus
dans le PFC et malgré l’administration de plaquettes et de globules
rouges, la coagulopathie peut rester difficile à corriger et le saignement persiste parfois alors que l’hémorragie n’est plus du ressort de
la chirurgie ou de l’embolisation. Plusieurs agents hémostatiques
sont utilisés dans la prévention et le traitement des hémorragies
majeures. Parmi eux figurent les antifibrinolytiques telles que l’acide
tranexamique (analogue de la lysine) ou l’aprotinine, (inhibiteur
direct de l’activité fibrinolytique de la plasmine). Plus récemment, le
facteur VII activé a montré une efficacité dans les situations hémorragiques sévères. L’acide tranexamique et l’acide aminocaproïque
sont des analogues de la lysine avec une action compétitive inhibitrice de la plasmine et du plasminogène dont l’utilisation préventive
a déjà démontré un gain en terme d’économie transfusionnelle au
cours de la chirurgie cardiaque [40]. L’aprotinine a également
démontré son efficacité en terme d’économie transfusionnelle dans
le même cadre [41]. Cependant, l’administration d’antifibrinolytiques est réalisée de manière prophylactique au cours de la chirurgie
et leur utilisation en traumatologie est une extension des résultats
obtenus en chirurgie réglée dans la mesure où aucune étude n’a été
réalisée dans ce cadre. Un essai important incluant 20 000 patients
polytraumatisés (étude CRASH II) est en cours afin d’évaluer l’impact
de l’utilisation de l’acide tranexamique sur la mortalité et les besoins
transfusionnels au cours du choc hémorragique traumatique. Ainsi,
il n’existe aucune donnée dans le choc hémorragique traumatique
pour recommander l’utilisation de l’acide tranexamique ou aminocaproïque. Des études complémentaires semblent nécessaires dans le
cas de l’aprotinine dans la mesure où cette dernière a été associée
récemment à une majoration des complications thromboemboliques et une majoration de l’insuffisance rénale en chirurgie
cardiaque [42].
Le facteur VII activé a un mode d’action original puisqu’il
renforce théoriquement la coagulation uniquement au site de
saignement. En effet, il se lie au facteur tissulaire exposé par le vaisseau lésé et favorise la formation de thrombine qui entraîne
localement l’activation de plaquettes [43]. Plusieurs études, soit
prospectives (hémorragie digestive et prévention de l’hémorragie
peropératoire au cours de la chirurgie prostatique [44, 45]), soit
rétrospectives (hémorragies postopératoires en chirurgie cardiaque
[46]) ont montré des résultats positifs en terme d’économie transfusionnelle. Toutefois, de nombreuses études randomisées ont montré
l’absence d’économie transfusionnelle lors de l’administration du
facteur VII activé au cours de la chirurgie hépatique [47] et du pelvis
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État de choc
783
Hémorragie massive
Hémorragie stoppée
Contrôle des lésions hémorragiques
Chirurgie/Embolisation/Produits
sanguins labiles
Persistance de
l’hémorragie massive
Envisager le facteur VII
activé recombinant
Corriger l’hypothermie et
l’acidose
Administrer le facteur VII
activé recombinant
Hémorragie stoppée
Contrôle des lésions hémorragiques
Chirurgie/Embolisation/Produits
sanguins labiles
Persistance de
l’hémorragie massive
Réadministrer le facteur
VII activé recombinant
Figure 74.2. Proposition d’arbre décisionnel dans la prise en charge de l’état de choc hémorragique d’origine traumatique.
Hb = hémoglobine; TP = Taux de prothrombine; PAM = Pression artérielle moyenne.
[48] qui sont pourtant à fort risque hémorragique. Par conséquent, il
n’est pas recommandé par la Société européenne de réanimation
dans une indication préventive au cours des chirurgies à risque
hémorragique [49]. Son efficacité a récemment été démontrée dans
une étude randomisée au cours de l’hémorragie traumatique en
terme d’économie transfusionnelle [50]. Cette étude conduisait deux
essais en parallèle puisque les traumatismes pénétrants et les traumatismes non pénétrants étaient distingués a priori. L’efficacité en
terme transfusionnel était relevée dans le groupe traumatisme non
pénétrant uniquement avec une économie de 2,6 culots globulaires
par patient. L’indication du facteur VII activé est donc considérée
dans le choc hémorragique traumatique non pénétrant si des signes
de saignement actif persistent alors que l’hémostase chirurgicale et
artériographique ont été réalisées (fig. 74.2) [49]. Par contre, il n’est
pas recommandé au cours du choc hémorragique lié à un traumatisme pénétrant. Ses conditions d’administration lors d’une
hémorragie incontrôlée modulent son efficacité puisqu’une étude
expérimentale suggère une inactivation à 90 % à pH 7,0 in vitro [51].
De plus, son activité pharmacologique est liée dans un premier
temps à l’activité plaquettaire puis dans un second temps à la stabilité du clou plaquettaire qui ne peut être obtenue qu’en présence de
fibrinogène. Ces résultats suggèrent finalement que l’efficacité du
facteur VII activé semble être optimale avant l’apparition d’une
coagulopathie grave et d’une acidose sévère. Les recommandations
européennes suggèrent d’ailleurs de l’administrer alors que le pH est
supérieur à 7,20, que les plaquettes sont supérieures à 50 000/mm3,
que le taux de fibrinogène est supérieur à 1 g/L et que l’hématocrite
est supérieur à 24 % [49]. La dose recommandée dans le cadre d’un
traumatisme est de 200 μ/kg lors de la première injection suivi d’une
injection de 100 μ/kg une heure et trois heures après la première
injection. Cette dose s’est révélée efficace dans l’étude de Boffard et
al. [50] mais la question de la dose optimale persiste dans la mesure
où le facteur VII activé est potentiellement à risque thrombogène et
que des doses inférieures permettraient peut être d’obtenir des résultats similaires avec une diminution de ce risque. L’administration de
facteur VII activé au cours des hémorragies du post-partum n’a fait
l’objet d’aucune étude randomisée. Les recommandations européennes dans cette indication sont donc de faible grade, mais son
utilisation peut être considérée lors des hémorragies « graves avec
risque vital » [49]. La dose à administrer est difficile à définir dans la
mesure où des doses allant de 17 μ/kg à 120 μ/kg [52] ont été utilisées avec succès. Si l’utilisation du facteur VII activé peut être
envisagée dans l’hémorragie du post-partum, elle ne doit pas retarder
ou se substituer à un geste hémostatique artériographique ou chirurgical. En ce qui concerne les hémorragies digestives, l’administration
de facteur VII activé a récemment été évaluée au cours des hémorragies digestives hautes chez les patients cirrhotiques [45]. Malgré les
fortes doses utilisées (huit doses de 100 μ/kg), il n’existait pas
d’amélioration en termes de fréquence de récidive ni d’échec de
contrôle de l’hémorragie. En conséquence, l’utilisation du facteur
VII activé dans les hémorragies digestives n’est pas recommandée
actuellement.
TRAITEMENT DE LA LÉSION HÉMORRAGIQUE
Le traitement des lésions hémorragiques liées au traumatisme
est pluridisciplinaire et fait appel à des interventions thérapeutiques
(fig. 74.3) orchestrées entre chirurgiens, radiologues, anesthésistes,
réanimateurs et urgentistes. Si le remplissage vasculaire, la correction
des troubles de l’hémostase ou la correction d’une anémie contribuent à la stabilisation du patient, ils ne doivent pas retarder une
chirurgie d’hémostase ou une artérioembolisation qui sont seules
aptes à arrêter un saignement actif. Ainsi, le bilan initial a pour vocation de cibler et de hiérarchiser les interventions thérapeutiques. Le
scanner cérébral et thoraco-abdomino pelvien n’est réalisé à la phase
aiguë que si le patient est stabilisé sur le plan hémodynamique.
L’appréciation de l’instabilité hémodynamique est réalisée sur l’aire
d’accueil où le réanimateur guide sa recherche du site hémorragique
en s’aidant d’une radiographie de thorax, du bassin et par l’échographie abdominale et pulmonaire. Une instabilité initiale majeure doit
faire réaliser une intervention hémostatique avant la réalisation d’un
scanner [39]. Un hémopéritoine associé à une instabilité hémodynamique doit diriger le patient vers une laparotomie en urgence. Un
hémothorax actif, un hémopéricarde doivent diriger vers une thoracotomie urgente. Un saignement rétropéritonéal lié à une fracture de
bassin devra faire préférer l’artérioembolisation à la chirurgie afin
d’éviter l’ouverture du rétropéritoine qui expose à une hémostase
difficile à contrôler car le saignement est diffus [53, 54]. Toutefois, la
complexité de la stratégie de la prise en charge du traumatisé vient le
plus souvent d’un saignement dû à plusieurs sites hémorragiques.
Les associations lésionnelles peuvent poser des problèmes décisionnels mais il faut toujours appliquer les règles qui ont fait leurs
preuves : 1) l’objectif reste l’hémostase et le contrôle de
l’hémorragie; 2) le contrôle de l’hémorragie fait appel à des stratégies
de type damage control [55-57] au cours desquelles les foyers hémorragiques sont stoppés si cela peut être réalisé facilement
(splénectomie par exemple) ou comprimés simplement avec la possibilité de revenir ultérieurement retirer le dispositif compressif
(packing); le traitement chirurgical sera affiné hors de l’urgence
quand l’hémostase, la température et l’acidose métabolique seront
corrigées; 3) les lésions hémorragiques, à l’origine d’une instabilité
hémodynamique, sont toujours prioritaires sur un saignement
intracrânien; 4) enfin, bien que pouvant être à l’origine de pertes
sanguines importantes, les lésions osseuses nécessitant une chirurgie
peuvent être prises en charge secondairement en cas d’association
lésionnelle en minimisant au mieux les délais lorsqu’il s’agit de fractures ouvertes à fort risque infectieux ou de fractures des os longs à
risque d’embolie graisseuse; 5) l’artérioembolisation est le traitement
de première intention lors de lésions hémorragiques du pelvis avec
hématome rétropéritonéal.
44200_Volume4_1 Page 784 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
Affections et leurs traitements
784
Choc hémorragique : PAM < 60 mmHg
ou PAS < 90 mmHg
RÉANIMATION HEMODYNAMIQUE (avant disponibilité
transfusionnelle)
Traumatisme crânien
OUI
NON
Remplissage vasculaire:
500 mL de colloïde
PAM > 90 mmHg
PAS > 120 mmHg
PAM > 60 mmHg,
PAS > 90 mmHg
NON
OUI
OUI
Remplissage vasculaire:
500 mL de colloïde
PAM > 60 mmHg,
PAS > 90 mmHg
PAM > 90 mmHg
PAS > 120 mmHg
NON
OUI
OUI
Noradrénaline à débuter
à 0,1 γ/kg/min.
Si Hb < 10 g/dL ⇒ 10 g/dL
Si Hb < 7g/dL ⇒ 7-9 g/dL
Transfusions de produits
sanguins labiles
Si TP < 50%
Si Plaquettes < 100
Si plaquettes < 50 000/mm3
Patient stabilisé sur le plan
hémodynamique par la réanimation
initiale
Monitorage multimodal
OUI
Taux de
lactate
sanguin et
valeur de base
excess
Si TP < 40%
000/mm3
NON
Appréciation
de la
précharge et
du débit
cardiaque
Radiographie de thorax et
échographie pleurale
Pneumothorax
Hémothorax
Thoracotomie si drainage
initial > 1 000 mL ou débit
hémorragique > 200 mL/h
Pneumothorax
Hémothorax
Ajustement volémique et
poursuite de la correction de
l’hémostase
Drainage
pleural
Radiographie de
bassin
Drainage
pleural
Échographie
abdominale
Fractures
pelviennes
déplacées
Hémopéritoine
Artériographie
avec
embolisation
pelvienne
Laparotomie et
hémostase
chirurgicale
Scanner cérébral et
thoracoabdominopelvien avec
injection de produit de contraste iodé
Bilan complet : évaluation d’une chirurgie
ou d'une artérioembolisation
complémentaire
Figure 74.3. Algorithme décisionnel d’utilisation du facteur VII activé recombinant dans le choc hémorragique d’origine traumatique. D’après [49].
PAM : Pression artérielle moyenne; PAS : Pression artérielle systolique; hb : hémoglobine; TP : taux de prothrombine.
44200_Volume4_1 Page 785 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
État de choc
THÉRAPEUTIQUES D’AVENIR
DANS LE CHOC HÉMORRAGIQUE
L’Hb est le transporteur d’O2 principal au sein de l’organisme.
La perte d’Hb diminue le transport en O2 par une baisse de la
volémie associée à une baisse quantitative du transporteur. Si le
remplissage vasculaire restaure le débit de perfusion, seul l’apport de
culots globulaires ou d’Hb de synthèse peut améliorer le transport en
O2. La disponibilité des produits transfusionnels n’est pas ubiquitaire
particulièrement lors de la prise en charge en milieu extrahospitalier
et la transfusion à l’hôpital comporte des contraintes de temps liées
à la mise à disposition des produits sanguins et à la vérification
indispensable de leur compatibilité antigénique. De plus, la transfusion massive participe aux complications rencontrées au cours du
choc hémorragique tels que le syndrome de détresse respiratoire
aiguë et la défaillance multiviscérale. Les contraintes et complications associées à la transfusion font rechercher des voies de
substitutions telles que les Hb de synthèse. En effet, un produit substitutif compatible, disponible par son mode de conservation facile et
prolongé se substituant à l’Hb en tant que transporteur est la thérapeutique la plus adaptée dans l’attente du geste d’hémostase. Ainsi,
plusieurs composés de synthèse ont été mis au point et évalués dans
le cadre de l’hémorragie massive. Ces composés sont issus de
globules rouges dont la membrane a été retirée. L’utilisation récente
dans un essai randomisé sur une population de patients en choc
hémorragique traumatique a mis en évidence des effets associés
majeurs à l’utilisation des Hb de synthèse [58]. En effet, l’administration d’Hb (fixée par des dérivés de l’aspirine) a montré une
surmortalité par rapport au groupe contrôle. Ce composé de l’Hb a
montré expérimentalement un effet vasconstricteur propre lié à la
captation du NO. Cet effet peut être à l’origine d’une majoration de
l’hypoperfusion tissulaire et d’une augmentation de la PA, à l’origine
d’une augmentation du saignement. D’autres composés dont les
propriétés vasoconstrictrices sont plus modérées [59] ont montré
leur innocuité, voire un bénéfice sur la dysfonction endothéliale et
l’activation leucocytaire [60]. La caractérisation approfondie des
propriétés des Hb de synthèse tend vers une amélioration de leur
rôle de transporteur en O2 et vers une diminution de leurs effets
pharmacologiques associés [61].
Lors du choc hémorragique, l’organisme priorise la distribution
du flux sanguin vers les organes nobles aux dépends des circulations
musculo-cutanées et splanchniques. Cette hiérarchie en terme de
distribution d’O2 se rencontre également à l’échelon cellulaire où les
réactions consommatrices d’énergie non indispensables (synthèse de
certaines protéines) sont en partie arrêtées, plaçant la cellule dans un
état qualifié « d’hibernation » adaptative dans un contexte d’hypoxie
[62]. Il s’associe à cet état d’économie énergétique la transcription de
gènes puis la synthèse de protéines dont les actions contribuent à
l’adaptation cellulaire à l’hypoxie. Ainsi, la synthèse d’érythropoiétine (EPO), de transporteurs membranaires du glucose et de
protéines glycolytiques impliquées dans le métabolisme anaérobie
est stimulée lors de l’hypoxie. L’expression de ces protéines semble
se situer en aval de l’expression d’un facteur d’adaptation à
l’hypoxie ubiquitaire [63] chez les organismes eukaryotes : Hypoxia
inducible factor 1 (HIF 1). Ce facteur est rapidement stabilisé lors de la
survenue d’une hypoxie, il migre alors dans le noyau cellulaire et
stimule la transcription de gènes d’adaptation à l’hypoxie. Le choc
hémorragique est une situation dans laquelle la disponibilité en O2
baisse brutalement mettant en défaut les mécanismes d’adaptation
cellulaire. Dans ce contexte, l’administration précoce d’EPO a
montré un gain en terme de défaillance d’organe (cardiaque et
rénale) dans un modèle expérimental de choc hémorragique [64].
L’EPO semble avoir des propriétés de protection cellulaire au cours
de la réoxygénation et prévient ainsi les lésions tissulaires. Aider au
mieux l’adaptation cellulaire par l’administration d’hormones
comme l’EPO ou par la stimulation des facteurs de transcription
situés en amont tels que HIF-1 est conceptuellement intéressant
mais nécessite la réalisation d’études randomisées d’une part, et la
compréhension plus approfondie des mécanismes cellulaires d’adaptation et de sensing de l’O2, d’autre part.
Les voies d’avenir proposées par la biochimie de synthèse pour
l’Hb artificielle ou suggérées par la biologie cellulaire pour l’adaptation à l’hypoxie participeront certainement à l’élaboration de
stratégies de réanimation plus précoces basées sur la prévention de la
survenue d’une souffrance d’organes et donc d’une défaillance
multiviscérale.
785
CONCLUSION
Alors que de nombreuses avancées ont été réalisées ces
dernières décennies dans la compréhension de la physiopathologie
du choc hémorragique, sa mortalité reste élevée, notamment en
traumatologie [65]. Si des progrès incontestables ont été effectués
dans les méthodes d’exploration lésionnelle (notamment échographie et tomodensitométrie), dans les modalités de remplissage
vasculaire ainsi que dans l’utilisation des catécholamines, il reste de
nombreuses questions ouvertes concernant les objectifs de PA (selon
les lésions et les antécédents du patient), la place de la chirurgie
précoce et de l’artérioembolisation et enfin les indications d’agents
hémostatiques (antifibrinolytiques et facteur VII activé). L’objectif
initial de la thérapeutique reste une réanimation précoce visant à
rétablir une pression de perfusion et un apport en O2 adapté aux
besoins tissulaires. Ceci passe par un remplissage vasculaire dans un
premier temps, par l’introduction précoce de vasopresseurs et par la
restauration de la masse sanguine et de l’hémostase biologique. Ces
mesures ont pour but d’assurer un débit sanguin régional satisfaisant, de limiter le risque de dysoxie tissulaire, de freiner le
saignement par une correction de l’hémostase dans l’attente d’un
traitement étiologique chirurgical, radiologique ou endoscopique
des lésions hémorragiques. D’importants espoirs reposent sur la mise
au point d’Hb de synthèse qui serait une réponse thérapeutique
adaptée à la physiologie du choc hémorragique.
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CHOC CARDIOGÉNIQUE
C. Richard, X. Monnet
L’état de choc cardiogénique est un syndrome qui regroupe les
manifestations d’une détérioration aiguë et durable de l’oxygénation
tissulaire en rapport avec une défaillance prépondérante ou le plus
souvent exclusive de la pompe cardiaque. Cette défaillance de la
pompe cardiaque, dont la survenue brutale a interdit la mise en jeu
efficace des mécanismes compensateurs d’adaptation cardiaque et
périphérique, est responsable d’un effondrement du débit cardiaque
qui compromet l’activité métabolique des tissus et donc le fonctionnement de tous les organes.
La cause la plus fréquente du choc cardiogénique est représentée par l’infarctus du myocarde et son incidence a peu varié
durant ces 25 dernières années. Par contre, la revascularisation coronaire précoce a permis une réduction significative de la mortalité qui
reste cependant en moyenne supérieure à 50 % à un mois [1].
La prise en charge thérapeutique comporte dans le cas de
l’infarctus du myocarde une décision précoce de revascularisation
coronaire, associée le plus souvent à des techniques d’assistance
circulatoire comme la contrepulsion diastolique par ballon intraaortique. Elle doit cependant être entreprise au terme d’une
réflexion prenant en compte son caractère potentiellement futile
face à un malade au-dessus des ressources thérapeutiques disponibles, mais aussi ce qui est éthiquement acceptable par le patient et sa
famille [2].
INCIDENCE ET PRONOSTIC
INCIDENCE
En dépit des difficultés épidémiologiques importantes concernant le choc cardiogénique tenant tant à des problèmes de
définition qu’à des différences majeures en termes d’accès au soin
selon les continents, l’incidence de survenue du choc cardiogénique
à la phase aiguë de l’infarctus du myocarde est restée stable sur la
période 1975-1997 se situant aux environs de 7,5 % avec des
extrêmes compris entre 6 et 20 % selon les études [3]. Ainsi, à titre
d’exemple, l’incidence du choc cardiogénique au cours de la phase
aiguë de l’infarctus du myocarde était de 7,1 % sur une période de
vingt-trois ans, soit 644 patients des 8 432 admis pour infarctus du
myocarde dans une série américaine [4]. Pour les 5 000 premiers
patients de cette série dont les résultats avaient été publiés en 1991
[3], l’incidence rapportée alors de choc cardiogénique était de 7,5 %.
Par ailleurs, au cours de l’étude GUSTO 1 (Global utilisation of streptokinase and tissue activator for occluded coronary artery), 7,2 % des
41 000 patients souffrant d’infarctus du myocarde inclus avaient
présenté un choc cardiogénique. Une analyse rétrospective effectuée
à partir des données de GUSTO 1 suggère en outre que l’incidence de
survenue du choc cardiogénique était moindre dans le groupe des
patients thrombolysés [5]. L’analyse plus récente d’un registre d’une
cohorte de 44 372 patients souffrant d’insuffisance coronarienne
aiguë (GRACE, Global registry of acute coronary events) indique de
1999 à 2005 une réduction de 7,1 à 4,7 % de l’incidence de survenue
d’un choc cardiogénique [6]. Il est généralement admis que, sur
l’ensemble des patients souffrant de choc cardiogénique, seuls 10 %
en sont atteints dès l’admission, les 90 % restant le développant
dans les jours suivants [7].
Les facteurs de risque reconnus de survenue d’un choc cardiogénique au cours de l’infarctus du myocarde sont un âge élevé, une
topographie antérieure de la nécrose, un antécédent de diabète,
d’infarctus et souvent une histoire clinique d’angor et d’insuffisance
cardiaque congestive [8]. En échocardiographie, l’absence d’hyperkinésie compensatrice de la paroi ventriculaire opposée au territoire de
l’infarctus est un facteur de risque reconnu de décès secondaire au
choc cardiogénique [8].
PRONOSTIC
Le choc cardiogénique constitue la première cause de décès des
patients hospitalisés pour infarctus du myocarde. La mortalité hospitalière, même si elle semble diminuer depuis les années 90 en raison
d’un recours de plus en plus fréquent à une revascularisation coro-
44200_Volume4_1 Page 787 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
État de choc
naire précoce par angioplastie, se situe aux alentours de 60 % [9].
Ainsi aux États-Unis la mortalité hospitalière rapportée jusqu’au
début des années 90 était de l’ordre de 72 % avec un infléchissement
aux alentours de 60 % depuis 1995 [3]. Confirmant les données
rétrospectives issues de l’étude GUSTO 1 [10], l’étude SHOCK (Should
we emergently revascularize occluded coronaries for cardiogenic shock) a
confirmé de manière prospective sur un groupe de 302 patients
randomisés (revascularisation précoce versus traitement médical)
une réduction de la mortalité globale à un mois qui se situait alors à
51,3 % [1]. En dehors de la situation clinique de l’infarctus du
myocarde à la phase aiguë, il n’existe pas de données épidémiologiques fiables rapportées dans la littérature.
CAUSES ET PHYSIOPATHOLOGIE
DU CHOC CARDIOGÉNIQUE
CAUSES DU CHOC CARDIOGÉNIQUE
Les différentes causes du choc cardiogénique apparaissent sur le
tableau 74.2.
Tableau 74.2. Causes du choc cardiogénique
(tamponnade cardiaque et embolie pulmonaire massive
sont traitées par ailleurs dans cet ouvrage)
Infarctus
– Infarctus du ventricule gauche :
du myocarde
– choc primaire en rapport avec la taille de la nécrose
– choc secondaire : complications mécaniques : dysfonction
ou rupture d’un pilier de la valve mitrale, communication
interventriculaire, rupture de la paroi libre
– Infarctus du ventricule droit
Autres causes – Cardiopathie au stade terminal
– Contusion myocardique
– Trouble du rythme ou de la conduction
– Myocardite (infectieuse, toxique)
– Valvulopathie aiguë
– Complications des prothèses valvulaires
– Postopératoire de chirurgie cardiaque (circulation
extracorporelle)
– Cardiopathie liée au sepsis
– Cardiopathie de stress
En ce qui concerne l’infarctus du myocarde, la survenue d’un
choc cardiogénique est classiquement associée à la destruction d’au
moins 40 % du myocarde ventriculaire gauche (que cette destruction soit d’emblée constituée ou que plusieurs épisodes successifs y
aient contribué) [11]. La prédominance droite de la nécrose myocardique peut également être à l’origine d’un choc cardiogénique dont
le tableau clinique et hémodynamique doit être connu en raison de
ses implications thérapeutiques spécifiques [12]. À côté de cette
atteinte primaire de la paroi ventriculaire, le choc cardiogénique au
cours de l’infarctus du myocarde peut survenir à l’occasion d’une
complication mécanique qui ajoutera sa pathologie propre à la
simple étendue de la nécrose (insuffisance mitrale, rupture septale,
voire de la paroi libre du ventricule gauche, par exemple). Au cours
de l’infarctus du myocarde, enfin, l’état de choc cardiogénique ne
sera pas confondu avec le syndrome classique d’hypertonie vagale
ou la survenue d’un choc hypovolémique favorisé par les thérapeutiques utilisées dans cette situation (cf. infra, diagnostic clinique et
hémodynamique).
Un choc cardiogénique peut également compliquer un sepsis
[13] même en l’absence de cardiopathie sous-jacente, une arythmie
complète par fibrillation auriculaire, une myocardite aiguë, une
valvulopathie aiguë, en particulier l’insuffisance aortique aiguë, et
surtout constituer le terme souvent ultime d’une cardiopathie préalable [14] (tableau 74.1). Plus récemment décrites, les cardiopathies
dites « de stress » à support physiopathologique très probablement
catécholaminergique [15] peuvent s’accompagner de la survenue
d’un choc cardiogénique de survenue brutale [16]. Leur présentation
clinique, souvent très évocatrice d’un infarctus du myocarde exigera
la pratique d’une coronarographie qui sera normale et celle d’une
échocardiographie qui l’authentifiera en montrant un aspect dit de
« Tako-Tsubo » (akinésie ventriculaire gauche apicale avec hyperkinésie basale) [16].
787
PHYSIOPATHOLOGIE DU CHOC CARDIOGÉNIQUE
En l’absence de traitement efficace du choc cardiogénique et ce
quelle qu’en soit la cause, un cercle vicieux neuro-hormonal et respiratoire va s’installer par le biais de l’hypoperfusion périphérique. Sa
conséquence principale, secondaire à une augmentation de la
demande en oxygène globale mais aussi myocardique, sera l’aggravation de l’ischémie myocardique au cours de l’infarctus du myocarde
ou sa survenue lorsque le choc cardiogénique relèvera d’un autre
mécanisme [17].
La chute du débit cardiaque associée à celle de la pression artérielle systémique est à l’origine d’une stimulation sympathique et du
système rénine angiotensine qui augmentent la demande myocardique en oxygène par le biais de la tachycardie et de la
vasoconstriction artérielle périphérique. Cette augmentation de la
demande myocardique en oxygène sera d’autant plus préoccupante
que la diminution de l’apport myocardique en oxygène sera entretenue par l’effondrement de la pression de perfusion coronaire
(favorisée par l’élévation de la pression diastolique ventriculaire
gauche) et par la sévérité de l’hypoxémie induite par l’effet shunt
associé à la survenue de l’œdème pulmonaire aigu (OAP) cardiogénique. Ce dernier, à l’origine d’une insuffisance respiratoire aiguë,
est en plus susceptible d’augmenter la demande myocardique en
oxygène en augmentant le travail respiratoire par le biais d’une
importante négativation de la pression intrathoracique rendue
nécessaire pour tenter de maintenir des échanges gazeux efficaces
[18].
À côté de cette présentation classique de la physiopathologie du
choc cardiogénique, l’évaluation hémodynamique des patients en
choc cardiogénique révèle souvent une baisse des résistances artérielles périphériques, un débit cardiaque normal ou parfois élevé et
une altération limitée de la fraction d’éjection ventriculaire gauche,
suggérant l’existence concomitante d’un syndrome de réponse
inflammatoire systémique comparable à celui qui est observé au
cours du sepsis [19, 20]. Cette réponse inflammatoire systémique
met ainsi en jeu, sans doute pour contrebalancer les effets néfastes
de l’intense vasoconstriction sympathique, la sécrétion de cytokines
pro-inflammatoires et l’expression de la NO synthase inductible,
majorant la dysfonction ventriculaire et produisant une intense
vasodilatation [19]. Cette hypothèse physiopathologique pourrait à
terme avoir un impact sur la prise en charge thérapeutique pharmacologique associée à la revascularisation coronaire précoce [21].
ÉVALUATION CLINIQUE ET HÉMODYNAMIQUE
DU CHOC CARDIOGÉNIQUE
INFARCTUS DU MYOCARDE
INFARCTUS DU VENTRICULE GAUCHE
CHOC PRIMAIRE
Le tableau clinique habituel est celui d’une insuffisance ventriculaire gauche associant insuffisance circulatoire aiguë par bas débit
cardiaque et signes de congestion pulmonaire. Le diagnostic clinique
de l’état de choc repose sur des signes qui témoignent tant de la
diminution de la perfusion de certains territoires que de réactions de
défense de l’organisme [22]. L’hypotension artérielle (pression artérielle systolique inférieure à 90 mmHg, et/ou pression artérielle
moyenne inférieure à 60 mmHg, mais aussi toute chute de la pression artérielle systolique d’au moins 40 mmHg) est associée à une
tachycardie sinusale qui témoigne de l’intensité de l’adaptation
sympathique. Cette intense adaptation sympathique est à l’origine
de phénomènes vasoconstricteurs puissants responsables des
marbrures associées à une cyanose intense et à une froideur des
extrémités et des lobes de l’oreille. Par ailleurs, l’état de choc cardiogénique s’accompagne d’une tachypnée secondaire d’une part à
l’effondrement du transport artériel en oxygène et d’autre part à une
fréquente hypoxémie associée en relation avec un OAP cardiogénique. L’oligurie est constante dans cette situation. Les troubles
neuropsychiques sont souvent présents en raison de l’hypoperfusion
cérébrale et peuvent consister en une altération de la conscience qui
peut aller de la simple somnolence, à la confusion mentale, voire au
coma. Au niveau pulmonaire, les signes congestifs peuvent être
absents ou relativement discrets sous forme d’une orthopnée,
ailleurs massifs conduisant à un OAP sévère et à un rapide épuisement respiratoire du patient.
44200_Volume4_1 Page 788 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
Affections et leurs traitements
788
Il existe à côté de ce tableau typique clinique évocateur de choc
cardiogénique tout un registre de présentations, comportant par
exemple le maintien prolongé d’une pression artérielle voisine de la
normale en raison de l’installation progressive de l’insuffisance
circulatoire aiguë et de l’intensité des mécanismes compensateurs ou
l’absence patente d’éléments en faveur d’un OAP cardiogénique. La
tachycardie peut être absente lorsque l’infarctus du myocarde
s’accompagne de bloc auriculo-ventriculaire ou lorsque le patient
était préalablement traité par des traitements bradycardisants (bêtabloquants, inhibiteurs calciques). Une tachyarythmie par fibrillation
auriculaire, voire des troubles du rythme ventriculaire, peuvent
participer à la survenue du choc cardiogénique chez les patients
souffrant d’infarctus du myocarde récent.
Il est parfois difficile devant ce tableau d’insuffisance circulatoire aiguë en rapport avec un effondrement de l’index cardiaque
d’éliminer formellement la présence d’une hypovolémie qu’elle soit
vraie (administration intempestive de diurétiques de l’anse, hémorragie secondaire à l’administration d’un traitement fibrinolytique)
ou relative par effet de stockage veineux lié, soit à la sévérité de
l’insuffisance circulatoire, soit à l’administration de dérivés nitrés,
soit à un syndrome de réponse inflammatoire systémique surajouté
compliqué ou non de sepsis. La ventilation mécanique peut majorer
cette symptomatologie en augmentant la pression intrathoracique et
donc en diminuant le retour veineux [18].
Dès lors que le diagnostic de choc cardiogénique est suspecté,
l’échocardiographie doit être réalisée sans délai. Elle permet de
confirmer l’origine cardiogénique du choc dans les formes les moins
typiques du syndrome. Surtout, elle permet de déterminer le mécanisme qui conduit à l’altération de la fonction pompe cardiaque. En
cas de choc cardiogénique primaire sur infarctus du ventricule
gauche, l’échocardiographie permet d’apprécier l’étendue de la
nécrose myocardique, la cinétique de la paroi ventriculaire saine qui
constitue un élément pronostique très important et enfin la présence
de critères suggérant la présence d’une éventuelle hypovolémie associée [23]. Elle permet aussi de détecter les complications mécaniques
responsables de choc secondaire, si celles-ci n’ont pas été diagnostiquées par l’examen clinique. Le cathétérisme cardiaque droit n’est
plus guère pratiqué lors du choc cardiogénique sur infarctus en
Europe. Le profil hémodynamique correspondant à ce tableau
clinique très évocateur comporterait un effondrement de l’index
cardiaque (moins de 2,2 L.min–1.m–2), une augmentation de la pression artérielle pulmonaire d’occlusion (plus de 18 mmHg) et une
augmentation de la différence artério-veineuse en oxygène (plus de
5,5 mL.dL–1) associée à une saturation du sang veineux mêlé en
oxygène (SvO2, inférieure à 60 %) [24].
CHOC SECONDAIRE
À côté du choc cardiogénique primaire en rapport avec la diminution majeure de la contractilité myocardique due à la nécrose, les
complications mécaniques de l’infarctus du myocarde peuvent
conduire à un choc cardiogénique secondaire. Sous le vocable de
ruptures du cœur sont rassemblées les ruptures de la paroi libre du
ventricule gauche, du septum interventriculaire ou de l’un des piliers
de la valve mitrale. La revascularisation coronaire précoce par angioplastie ou thrombolyse ainsi que l’administration précoce à la phase
initiale de l’infarctus du myocarde non compliqué de bêtabloquants
en ont considérablement réduit l’incidence. Les tableaux cliniques et
hémodynamiques de choc cardiogénique associé aux différentes
formes de rupture du cœur présentent un certain nombre de particularités [25].
La rupture de la paroi libre du ventricule gauche s’accompagne d’un
tableau clinique d’hémopéricarde rapidement confirmé par l’échocardiographie et conduisant au décès, en dehors d’exceptionnels
succès d’une réparation chirurgicale en urgence [26].
La rupture d’un pilier de la valve mitrale est à l’origine d’un choc
cardiogénique au cours duquel prédomine la constatation d’un
important OAP cardiogénique associé à un souffle systolique très
intense de régurgitation mitrale. Les données échocardiographiques
précisent le mécanisme de l’insuffisance mitrale, son volume ainsi
que l’étendue de la nécrose, ce dernier élément constituant un des
éléments majeurs du pronostic postopératoire [26]. S’il était
pratiqué, le cathétérisme artériel pulmonaire montrerait un aspect
de grande onde V « mitrale » sur la courbe de pression artérielle
pulmonaire d’occlusion [26].
La rupture septale réalise une communication interventriculaire
de survenue brutale responsable d’un shunt gauche-droit et d’un
souffle systolique intense aux caractéristiques bien connues. L’écho-
cardiographie en précise la topographie [26] et le cathétérisme
artériel pulmonaire montrerait l’élévation des pressions régnant
dans les cavités droites et un enrichissement du sang en oxygène
entre l’oreillette droite et l’artère pulmonaire [25].
INFARCTUS DU VENTRICULE DROIT
Un profil clinique et hémodynamique différent est observé lors
d’un choc cardiogénique survenant au cours d’un infarctus du
myocarde touchant le ventricule droit [27]. Son pronostic est
souvent très sévère [28]. La présentation clinique associe alors à
l’hypotension artérielle, une distension des veines jugulaires et une
absence d’œdème pulmonaire cardiogénique. Le sus-décalage du
segment ST est observé dans les dérivations précordiales droites, en
particulier en V4R [27]. L’échocardiographie permet de confirmer le
diagnostic et d’éliminer les autres causes d’insuffisance cardiaque
droite aiguë. Elle révèle un ventricule droit dilaté et akinétique. Elle
permet de préciser l’extension de l’infarctus au ventricule gauche et
notamment l’atteinte septale. Le cathétérisme artériel pulmonaire
montrerait un tableau hémodynamique typique avec une élévation
des pressions de remplissage ventriculaires droites, une égalisation
des pressions diastoliques de l’oreillette droite aux veines pulmonaires et souvent un aspect morphologique ventriculaire droit
évocateur d’insuffisance cardiaque de type restrictif, lié au trouble de
distensibilité induit par l’ischémie du ventricule droit. Une pression
auriculaire droite supérieure à 10 mmHg et un rapport pression auriculaire droite sur pression artérielle pulmonaire d’occlusion
supérieure à 0,8 sont très évocateurs du diagnostic d’infarctus du
ventricule droit [27].
AUTRES CAUSES
Trois situations étiologiques méritent d’être évoquées : les
valvulopathies aiguës, le choc cardiogénique sur cardiopathie
préexistante et les myocardites aiguës.
VALVULOPATHIES AIGUËS
Il peut surtout s’agir d’une insuffisance aortique aiguë ou d’une
insuffisance mitrale aiguë. L’insuffisance aortique aiguë peut être la
conséquence d’une endocardite aiguë infectieuse, d’une dissection
de l’aorte ascendante ou d’une rupture traumatique. Le ventricule
gauche apparaît incapable de s’adapter à une surcharge volumétrique brutale et le tableau clinique du choc cardiogénique comporte
un OAP sévère associé aux signes habituels de l’insuffisance aortique
dont la sémiologie peut être masquée par l’existence d’un bas débit
cardiaque [14]. L’insuffisance mitrale aiguë s’accompagne avec une
moindre fréquence, en dehors de la rupture du pilier de la mitrale à
l’occasion d’un infarctus du myocarde, d’un tableau de choc cardiogénique et ce quelle qu’en soit la cause : endocardite aiguë, rupture
de cordage sur prolapsus valvulaire ou valvulopathie dégénérative
ou ischémie de pilier. Enfin, les dysfonctions de prothèse valvulaire
survenant à l’occasion d’une endocardite ou d’une thrombose ont
souvent un retentissement hémodynamique dramatique.
La constatation d’un souffle cardiaque et le contexte permettent
souvent de suspecter l’existence d’une valvulopathie aiguë. Néanmoins, c’est l’examen échocardiographique qui permet d’établir le
diagnostic avec certitude et de déterminer la cause de la valvulopathie, son importance et son retentissement. C’est souligner une fois
encore l’importance fondamentale de cet examen, qui prime sur
tous les autres dès lors que le diagnostic de choc cardiogénique est
suspecté.
CARDIOPATHIE PRÉEXISTANTE
En dépit de la qualité des thérapeutiques disponibles pour le
traitement de l’insuffisance cardiaque chronique, la survenue
d’épisodes d’insuffisance cardiaque aiguë plutôt que d’un véritable
choc cardiogénique complique très souvent l’évolution de ces
patients. Dans ce contexte, l’insuffisance circulatoire apparaît
souvent à la faveur d’un facteur favorisant, tels la survenue
d’ischémie myocardique, un trouble du rythme ou l’administration
de thérapeutiques dont le rapport risque- bénéfice a été insuffisamment évalué pour un patient donné [29].
MYOCARDITES AIGUËS
La survenue d’une myocardite aiguë peut être la conséquence
d’une agression toxique, infectieuse, médicamenteuse, d’un trouble
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État de choc
789
du rythme ou d’un stress [29]. En ce qui concerne les étiologies
infectieuses, la responsabilité virale (souvent difficile à établir) est de
loin la plus fréquente à l’origine d’un tableau brutal et sévère de
choc cardiogénique touchant les deux ventricules, dont le caractère
dramatique initial n’est pas toujours synonyme d’un pronostic défavorable si la prise en charge symptomatique, comportant souvent
une assistance circulatoire permet de passer le cap aigu [30]. Les
myocardites rencontrées au cours des maladies de système ou dans le
péri-partum sont beaucoup plus rarement associées à la survenue
d’un choc cardiogénique [14]. La distinction avec un infarctus du
myocarde est souvent difficile et nécessite parfois le recours à la
coronarographie.
Tableau 74.3. Approche thérapeutique du choc cardiogénique
de l’infarctus du myocarde
Mesures générales
symptomatiques
– Oxygénothérapie
– Le plus souvent ventilation mécanique
conventionnelle plus que non invasive
– Soulagement de la douleur
– Correction d’un trouble du rythme
– Médicaments inotropes positifs ± vasoresseurs
– Appréciation de la volémie
– Discussion précoce de la contre pulsion diastolique
par ballon intra-aortique
– Surveillance hémodynamique (clinique,
échocardiographique) et respiratoire
– Discussion sur le recours au monitoring
hémodynamique invasif
Mesures spécifiques
– Reperfusion coronaire
+ angioplastie coronaire
+ thrombolyse (±)
+ pontage aorto-coronaire
– Prise en charge chirurgicale des complications
mécaniques
TRAITEMENT DU CHOC CARDIOGÉNIQUE
(tableaux 74.3 et 74.4)
Le traitement du choc cardiogénique comporte des mesures
générales dont l’objectif est symptomatique et qui concernent
l’ensemble des patients et des mesures spécifiques destinées à traiter
la cause de la dysfonction. Pour ces dernières, c’est l’infarctus du
myocarde à la phase aiguë qui nécessite les développements les plus
importants à propos des techniques de reperfusion et/ou de revascularisation coronaire. Parmi les mesures générales, doit être discutée
la place des techniques d’assistance circulatoire temporaire qui ne
peut s’envisager qu’avec l’espoir raisonnable d’une réversibilité de
l’état de choc cardiogénique [31].
Tableau 74.4. Comparaison de l’approche diagnostique et thérapeutique du choc cardiogénique compliquant un infarctus du ventricule gauche et un infarctus du ventricule droit
Ventricule gauche
Ventricule droit
Signes cliniques
– Œdème pulmonaire cardiogénique
– Souffle d’insuffisance mitrale?
– Poumons clairs
– Turgescence jugulaire
– Souffle d’insuffisance tricuspidienne?
Signes ECG
– Sus-décalage ST dérivations standards
– Nécrose antérieure fréquente
– Sus-décalage de ST en V3R, V4R
– Nécrose inférieure fréquente
– Possibilité de BAV
Signes
échocardiographiques
Hémodynamique
– Akinésie segmentaire
– Evaluation de la FEVG
– Recherche des complications mécaniques
– Débit cardiaque bas
– Augmentation de PAPO
– Dilatation et akinésie du VD
– Recherche d’une atteinte bi ventriculaire
– Recherche d’une interdépendance VD/VG
– PAPO normale
– POD ≥ 10 mmHg
– POD/PAPO ≥ 0,8
Traitement
– Restriction liquidienne
– Réduction pré et postcharge
– Héparine, aspirine, anti agrégants plaquettaires, oxygène
– Reperfusion coronaire
– Inotropes, médicaments vaso- actifs si nécessaire
– Expansion volémique
– Proscrire toute baisse de précharge
– Héparine, aspirine, anti agrégants plaquettaires oxygène
– Reperfusion coronaire
– Inotropes, médicaments vaso- actifs si nécessaire
PAPO : pression artérielle pulmonaire d’occlusion; POD : pression oreillette droite; BAV : bloc auriculo- ventriculaire; VD : ventricule droit; VG : ventricule gauche; FEVG : fraction d’éjection du VG.
MESURES GÉNÉRALES SYMPTOMATIQUES
OXYGÉNOTHÉRAPIE ET VENTILATION MÉCANIQUE
Chez le malade en ventilation spontanée, l’oxygénothérapie
nasale à fort débit est indispensable (4 à 6 L.min–1). Le recours à la
ventilation mécanique s’avère souvent nécessaire dans cette situation avec le quadruple objectif [18] :
– de corriger l’hypoxémie secondaire à l’effet shunt conséquence de
l’OAP cardiogénique;
– de mettre au repos les muscles respiratoires en s’aidant le plus
souvent d’une sédation associée à une analgésie ce qui permet une
réduction de la consommation d’oxygène globale et myocardique;
– de réduire l’importance de la dépression inspiratoire intrathoracique observée en ventilation spontanée et donc de réduire la gêne à
l’éjection ventriculaire qu’elle induit;
– de diminuer le retour veineux systémique et les pressions de
remplissage ventriculaire.
Même si l’intérêt de la ventilation non invasive pour traiter les
OAP cardiogéniques est clairement démontré [32], il faut insister sur
le fait que les études cliniques supportant cette démonstration
excluaient les patients en état de choc. En effet, dans ce cas, la
gravité de l’insuffisance circulatoire incite à atteindre le quadruple
objectif détaillé ci-dessus au moyen de la ventilation mécanique en
volume assisté contrôlé après intubation trachéale plutôt que de la
ventilation non invasive. De plus, dans le cas particulier de
l’infarctus du myocarde à la phase aiguë, l’utilisation de la ventilation non invasive (aide inspiratoire et pression expiratoire positive)
reste controversée en raison d’une majoration discutée du risque
d’ischémie myocardique (correction rapide de l’hypercapnie à
l’origine de vasoconstriction coronaire, asynchronie patient- ventilateur) [18, 32].
TRAITEMENT SYMPTOMATIQUE DU CHOC CARDIOGÉNIQUE
MONITORING HÉMODYNAMIQUE
Comme en présence de tout état de choc hospitalisé en réanimation la mise en place d’un cathéter artériel radial ou fémoral est
indispensable pour mesurer la pression artérielle et constitue l’outil
de monitoring minimal. Il a aussi l’avantage de permettre la réalisation des prélèvements biologiques chez un patient le plus souvent à
haut risque hémorragique (anticoagulants, antiagrégants et parfois
thrombolytiques). Néanmoins, la mise en œuvre de moyens de
monitoring plus perfectionnés semble raisonnable dans cette situation hémodynamique grave et complexe.
L’échocardiographie doit être réalisée dès le diagnostic de choc
cardiogénique posé mais par la suite, le monitoring hémodynamique par cette technique peut être gêné par le fait qu’elle ne
permet pas de surveillance continue et qu’elle nécessite la compétence d’un opérateur expérimenté. Contrairement aux recommandations anglo-saxonnes [33], la mise en place systématique d’un
cathéter artériel pulmonaire n’est pas indiquée compte tenu de son
44200_Volume4_1 Page 790 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
Affections et leurs traitements
790
caractère invasif et de l’absence d’impact démontré sur le pronostic.
Plusieurs autres techniques (thermodilution transpulmonaire,
Doppler œsophagien, impédancemétrie…) permettent désormais un
monitorage continu de l’index cardiaque qui représente le paramètre
hémodynamique le plus simple à surveiller. La contractilité ventriculaire gauche est au mieux mesurée par l’échocardiographie au lit du
patient, mais cette technique n’en permet pas le monitorage
continu. Par la technique de thermodilution transpulmonaire, le
système PiCCO fournit un indice de contractilité qui est plus facile à
obtenir. Si un OAP cardiogénique est associé, le monitorage de l’eau
pulmonaire extra-vasculaire mesurée par thermodilution transpulmonaire peut avoir un intérêt. Le monitorage de la saturation
veineuse en oxygène au niveau jugulaire peut être utile dans le
contexte du choc cardiogénique.
APPRÉCIATION DE LA VOLÉMIE, PRÉDICTION DE LA RÉPONSE
AU REMPLISSAGE VASCULAIRE
Même si le tableau hémodynamique accompagnant le choc
cardiogénique est le plus souvent caricatural, la constatation d’une
hypotension artérielle peut, au-delà de la seule dysfonction contractile du ventricule gauche, témoigner d’un certain degré
d’hypovolémie, notamment favorisée par un traitement diurétique
préalable ou des troubles digestifs associés. Une vasoplégie peut
également être déterminante dans l’hypotension artérielle, favorisée
par un traitement vasodilatateur ou survenant parce que la prolongation du choc cardiogénique se solde par l’apparition d’un tableau
semblable à celui du sepsis.
Dans ces cas, le cœur fonctionne en état de précharge dépendance et l’expansion volémique peut permettre d’améliorer le débit
cardiaque. Ceci ne peut être le cas si il existe un OAP cardiogénique,
qui représente une évidente contre-indication au remplissage vasculaire. Dans les cas contraires, la réponse à l’expansion volémique peut
être prédite par l’étude de la variabilité respiratoire du volume d’éjection systolique qui conserve sa pertinence en cas d’insuffisance
cardiaque [34]. Chez les patients qui ne sont pas parfaitement adaptés
à la ventilation mécanique ou qui sont en arythmie, ces indices
fondés sur la variabilité respiratoire des signaux hémodynamiques ne
sont plus utilisables et seul un test de lever de jambes passif peut être
utilisé pour prédire la réponse à l’expansion volémique [35].
AGENTS VASOACTIFS ET INOTROPES POSITIFS
En l’absence d’argument qui prédise une réponse positive au
remplissage vasculaire, l’hypotension artérielle lors du choc cardiogénique nécessite en premier lieu l’administration d’agents
vasopresseurs pour obtenir une pression artérielle systolique au
moins égale à 90 mmHg et/ou une pression artérielle moyenne au
moins égale à 65 mmHg. L’objectif à atteindre en terme de pression
artérielle prendra en compte la valeur de référence habituelle de
pression artérielle du patient et l’évolution de la diurèse. Il n’existe
aucune démonstration de l’intérêt potentiel du choix d’un objectif
supra normal et potentiellement délétère de pression artérielle [36].
Dans le but de restaurer la pression artérielle, l’utilisation de la
dopamine (amine inotrope et vasoconstrictrice pour les doses
comprises entre 5 et 15 µg.kg–1.min–1) est classiquement recommandée [37]. Cependant, l’effet vasoconstricteur plus puissant de la
noradrénaline associé à son pouvoir inotrope positif et à son absence
d’effet chronotrope ou arythmogène en font désormais le traitement
de référence pour de nombreux auteurs [38]. L’utilisation de médicaments puissamment vasoconstricteurs comme les inhibiteurs de la
NO synthase n’est pas recommandée [39]. Il existe des arguments
expérimentaux qui suggèrent en effet que les inhibiteurs de la NO
synthase pourraient exercer un effet inotrope négatif [40].
Si malgré la correction de l’hypotension artérielle persistent des
signes cliniques, biologiques (en particulier une hyperlactatémie),
hémodynamiques (débit cardiaque effondré, SvO2 basse), l’administration conjointe de dobutamine (amine inotrope et vasodilatatrice)
est recommandée (5 à 15 µg.kg–1.min–1) en prenant en compte régulièrement le rapport bénéfice-risque sur la balance en oxygène liée
en particulier à un effet inotrope qui privilégie souvent la fréquence
(avec le risque d’arythmie) à la force (augmentation modérée de
l’index systolique) [38].
L’adrénaline possède l’avantage d’associer des effets inotrope et
vasoconstricteur puissants. Cependant, en comparaison à l’association de la dobutamine à un vasopresseur, l’adrénaline altère
substantiellement la circulation régionale notamment du territoire
splanchnique et son association ne peut être raisonnablement
conseillée. Plus récemment le levosimendan, inotrope qui agit en
augmentant la sensibilité au calcium de la myofibrille myocardique
sans effet sur le récepteur bêta, a été proposé comme alternative à la
dobutamine dans le traitement de l’insuffisance cardiaque sévère
[41] mais son effet vasodilatateur contre-indique son utilisation dans
le cas de l’état de choc [38].
Quelles que soient les substances utilisées, il faut garder à
l’esprit que la restauration de la pression artérielle et/ou de la fonction inotrope qu’elles permettent se fait au prix d’un risque de
survenue d’arythmie et d’une augmentation substantielle de la
consommation myocardique en oxygène. Ainsi, il faut toujours
peser le bénéfice par rapport au risque de leur administration. En
particulier, il convient de monitorer les paramètres permettant de
juger de l’efficacité des traitements, tels l’index systolique, la fonction rénale, la lactatémie, voire la saturation veineuse en oxygène. Si
les objectifs thérapeutiques sont atteints, par exemple avec la prescription de noradrénaline seulement, il ne faut pas adjoindre d’autre
substance qui ne pourrait avoir que des effets délétères.
CONTREPULSION DIASTOLIQUE PAR BALLON INTRA-AORTIQUE/
ASSISTANCE CIRCULATOIRE
Au cours du choc cardiogénique secondaire à l’infarctus du
myocarde le recours à la contrepulsion diastolique par ballon intraaortique est recommandée dès lors que le traitement symptomatique
s’avère insuffisant pour assurer le maintien d’une pression artérielle
systolique correcte [42]. Cette technique permet la pratique de la coronarographie et des gestes de revascularisation coronaire précoce dans
les meilleures conditions de sécurité. Facile d’utilisation, disposée par
voie percutanée, elle tire son bénéfice d’un double effet
hémodynamique : maintien du sang dans l’aorte ascendante en raison
de l’inflation du ballon en diastole (après positionnement au niveau de
l’aorte thoracique, en aval de la sous-clavière gauche) et rapide réduction de la postcharge ventriculaire gauche en systole en raison de l’effet
d’aspiration créé par la déflation rapide du ballon durant cette période.
Une augmentation de la pression artérielle diastolique, une réduction
de la pression artérielle systolique et de la pression artérielle pulmonaire d’occlusion associée à une augmentation du débit cardiaque avec
comme conséquence, une augmentation de la perfusion myocardique
sont observés après sa mise en place. L’effet de cette technique sur la
mortalité hospitalière est difficile à démontrer à la phase aiguë de
l’infarctus du myocarde compliqué de choc cardiogénique, mais s’avère
très dépendante de la réussite du geste de revascularisation coronaire
[1, 43]. Les complications mécaniques de l’infarctus du myocarde
(rupture septale, rupture du pilier de la mitrale) constituent également
des indications reconnues dans l’attente d’une réparation chirurgicale
au pronostic très incertain. Des complications dont l’incidence est
variable selon les études (ischémie de membre inférieur, lacération artérielle au point de ponction, hémorragie au point de ponction, embolie
de cholestérol, accident vasculaire cérébral en cas de déplacement et
infection) ont été rapportées [44].
Au cours de l’infarctus du myocarde, lorsque la reperfusion
coronaire ne s’accompagne pas rapidement d’une amélioration
hémodynamique suffisante pour permettre l’arrêt de la contrepulsion diastolique par ballon intra-aortique, la question de l’utilisation
d’une assistance circulatoire temporaire par pompe centrifuge
couplée à un oxygénateur à membrane (extracorporeal membrane
oxygenator, ECMO) peut se poser [45]. Cette assistance circulatoire
pourra parfois servir de pont dans l’attente d’une transplantation
cardiaque. L’assistance circulatoire temporaire est également
proposée à titre exceptionnel dans certains cas de myocardites ou
d’ingestion de toxiques cardiotropes à l’origine de choc cardiogénique réversible [46].
MESURES SPÉCIFIQUES ÉTIOLOGIQUES
CHOC CARDIOGÉNIQUE PRIMAIRE DE L’INFARCTUS DU MYOCARDE
Les données de la littérature permettent de recommander le
recours rapide aux techniques d’angioplastie coronaire lorsqu’elles
sont facilement accessibles plutôt qu’à la thrombolyse, dont l’efficacité est souvent mise en défaut au cours du choc cardiogénique en
raison de l’hypoperfusion coronaire [1, 42, 46].
ANGIOPLASTIE CORONAIRE
Ainsi la priorité thérapeutique est à la revascularisation. L’étude
SHOCK indique la survie de près de 2/3 des patients hospitalisés en
44200_Volume4_1 Page 791 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
État de choc
791
succès (lésions tritronculaires sévères). Cependant à ce jour l’indication du pontage aorto-coronaire reste recommandée au cours du
choc cardiogénique de l’infarctus du myocarde lorsque la coronarographie visualise ce type de lésions coronaires [42].
cas de revascularisation précoce au moyen des techniques d’angioplastie coronaire associées à la mise en place de stents intracoronaires. Dans l’étude SHOCK, 152 patients ont été soumis à une
stratégie de revascularisation précoce et 150 à une stratégie de stabilisation médicale initiale [1]. A J30 la mortalité était de 46,7 % dans
le groupe revascularisation précoce et 56,0 % dans le groupe traitement médical initial [1]. Cette différence non statistiquement significative à J30 le devenait à 6 et 12 mois : 53,3 % versus 66,4 % à 12
mois) [47]. Cette efficacité thérapeutique est apparue particulièrement importante dans le groupe des patients âgés de moins de 75
ans. L’angioplastie coronaire était dans cette étude associée à la mise
en place d’une contrepulsion par ballon intra aortique chez 80 % des
patients et 63 % des patients qui ont reçu un traitement médical
initial ont été thrombolysés. Des résultats comparables ont été
récemment rapportés dans l’étude (S) MASH (Suisse multicenter trial
of angioplasty for shock) [48]. Ces résultats confortent la plus grande
série rapportée qui concerne 2 200 patients souffrant de choc cardiogénique à la phase aiguë de l’infarctus dans l’étude GUSTO I [49]. La
mortalité à 30 jours était de 36 % chez les 406 patients soumis à une
angioplastie contre 62 % pour les 1 794 patients chez lesquels une
telle procédure n’était pas réalisée. En analyse multivariée, cette stratégie agressive apparaît comme un facteur indépendant d’amélioration du pronostic lorsqu’elle est pratiquée après mise en place
préalable d’un ballon de contre pulsion diastolique aortique [49].
La reperfusion coronaire par angioplastie doit être effectuée le
plus rapidement possible, en pratique dans les 36 heures suivant le
début de l’infarctus du myocarde et dans les 18 heures suivant la
survenue du choc cardiogénique [1, 43, 49].
Il apparaît donc impératif que tout hôpital qui ne dispose pas
d’un plateau technique d’exploration cardiovasculaire soit en
mesure 24 heures sur 24 d’assurer le transfert rapide et sécurisé vers
un centre référent de tous les patients âgés de moins de 75 ans. Pour
les patients plus âgés la tendance actuelle est de procéder de la même
manière au cas par cas. Les données de la littérature ne permettant
pas de trancher formellement, les avis du patient et de sa famille
seront là tout particulièrement recueillis et analysés [2].
THROMBOLYSE
Les données de la littérature concernant la thrombolyse au
cours du choc cardiogénique sont décevantes. Ainsi, l’étude GISSI I
comparant streptokinase et placebo a mis en évidence une mortalité
équivalente à J30 de l’ordre de 70 % [50]. Dans l’étude TIMI 2, sur
une population de 193 patients en choc cardiogénique, la mortalité
après administration d’activateur tissulaire du plasminogène associé
à l’héparine et à l’aspirine était de l’ordre de 51 % [51]. Il en était de
même dans l’étude GUSTO I à propos d’une série de 2 500 patients
en choc cardiogénique pour laquelle la mortalité restait élevée aux
alentours de 55 % [49]. La comparaison entre deux fibrinolytiques
(rétéplase par rapport à altéplase) a fait aussi état d’une mortalité
élevée à J30, de l’ordre de 65 % [52].
Dans ces conditions le traitement fibrinolytique n’est indiqué,
dans le respect des contre-indications, que pour les patients en état
de choc cardiogénique dans les 3 à 6 heures suivant la survenue de
l’infarctus du myocarde, éligibles pour l’angioplastie dans un
contexte d’inaccessibilité à un plateau technique permettant la réalisation de la coronarographie [42].
STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE DU CHOC CARDIOGÉNIQUE
PRIMAIRE DE L’INFARCTUS DU MYOCARDE
Le schéma de prise en charge apparaît sur la figure 74.5.
CHOC CARDIOGÉNIQUE SECONDAIRE DE L’INFARCTUS DU MYOCARDE
Les complications mécaniques de l’infarctus du myocarde
comportent un pronostic spontané catastrophique et relèvent de la
réparation chirurgicale en tenant compte tant de l’âge du patient
que de la taille et de la topographie de la nécrose (les nécroses inférieures comportant dans cette situation un pronostic particulièrement désastreux). La rupture de la paroi libre du ventricule gauche
dans le péricarde laisse peu d’espoir de survie, tandis que la rupture
du pilier mitral ou la communication interventriculaire nécessitent
un geste chirurgical d’urgence précédé de la mise en place d’un
ballon de contrepulsion diastolique [53].
PONTAGE AORTOCORONAIRE
L’indication en urgence d’un pontage aorto-coronaire à la phase
initiale de l’infarctus du myocarde devrait devenir exceptionnelle en
raison de l’amélioration des techniques d’angioplastie qui autorise la
réalisation de gestes auparavant considérés comme à haut risque
(lésion du tronc commun de la coronaire gauche) ou à faible taux de
Infarctus du myocarde avec sus-décalage du segment ST et choc cardiogénique
Traitement symptomatique
oxygénothérapie, ventilation mécanique
monitoring cardio-vasculaire
remplissage vasculaire
vasopresseur
inotrope
âge < 75 ans
âge > 75 ans
attitude
invasive
Fibrinolyse si:
- délai pour la coronarographie > 90 min
- sans contre-indication
traitement
médical
Coronarographie
stabilisation hémodynamique par le
traitement médical
oui
attitude
non invasive
non
contre-pulsion
par ballon intra-aortique
évaluation des lésions coronaires
angioplastie ou pontage aorto-coronaire
Figure 74.5. Stratégie thérapeutique du choc cardiogénique (cc) primaire de l’infarctus.
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CHOC CARDIOGÉNIQUE AU COURS DE L’INFARCTUS DU VENTRICULE DROIT
(tableau 74.4)
Dans cette situation, l’objectif principal, à côté de la reperfusion
myocardique, est d’assurer une précharge ventriculaire droite suffisante pour permettre le maintien de l’éjection ventriculaire droite.
L’administration d’une expansion volémique est systématique tout
en surveillant l’absence de survenue d’un OAP cardiogénique qui
pourrait être la conséquence d’un phénomène d’interdépendance
ventricule droit/ventricule gauche à l’origine d’un trouble de la
compliance du ventricule gauche. Tout traitement vasodilatateur ou
diurétique doit être formellement contre-indiqué. Le recours à la
dobutamine pour augmenter le débit cardiaque et réduire les résistances vasculaires pulmonaires peut parfois être proposé. Des
troubles de la conduction auriculoventriculaire rendent souvent
impératif l’entraînement électrosystolique. L’intérêt de la reperfusion coronaire par angioplastie coronaire est également prouvé dans
cette indication en association avec la mise en place d’un ballon de
contrepulsion aortique [12, 28].
AUTRES CAUSES DE CHOC CARDIOGÉNIQUE
Les autres causes de choc cardiogénique relèvent de thérapeutiques dont les développements sortent du cadre de ce chapitre :
traitement antibiotique d’une endocardite associé au geste de
remplacement valvulaire d’une insuffisance aortique aiguë, prise en
charge globale d’une insuffisance cardiaque chronique pour le choc
cardiogénique survenant sur une cardiopathie préexistante (troubles
du rythme et de la conduction, prévention de l’ischémie myocardique, arrêt des thérapeutiques inotropes négatives mal tolérées,
exceptionnelle assistance circulatoire dans l’attente d’une transplantation cardiaque) [7, 14].
CONCLUSION
Le choc cardiogénique, quelle qu’en soit la cause, mais plus
particulièrement celui dont la survenue est associée à l’infarctus du
myocarde, conserve un pronostic péjoratif à court terme malgré
l’utilisation précoce des techniques de reperfusion myocardique.
Les décisions thérapeutiques souvent lourdes et parfois associées à une amélioration clinique spectaculaire doivent être
réfléchies en fonction des probabilités connues de succès rapportés
dans la littérature ainsi qu’en fonction des attentes du patient et de
ses proches [2].
Malgré ces réserves, il apparaît impératif que tout service ne
disposant pas de la possibilité locale de mettre en route une telle
stratégie de prise en charge, ait la capacité en urgence de proposer un
transfert dans un service spécialisé à même d’offrir au patient les
meilleures chances de survie.
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CHOC SEPTIQUE
P. Charbonneau, M. Ramakers, C. Daubin, C. Bruel,
D. du Cheyron
DÉFINITION
Admise communément dans la littérature, la définition du choc
septique fait référence à celle qui a été donnée par la conférence de
consensus sur le sepsis et le choc septique [1, 2].
On appelle sepsis, la réponse de l’organisme à l’infection se
manifestant par deux ou plusieurs des signes suivants :
– température supérieure à 38 °C ou inférieure à 36 °C;
– fréquence cardiaque supérieure à 90 batt/min;
– rythme respiratoire supérieur à 20/min ou PaCO2 inférieure à 32
mmHg;
– polynucléose neutrophile supérieure à 12 000/mm3 ou inférieure à
4 000/mm3 ou comprenant plus de 10 % de formes immatures
(métamyélocytes).
On appelle syndrome infectieux sévère ou sepsis sévère un
syndrome infectieux associé à une dysfonction d’organe, une hypoperfusion ou une hypotension. L’hypoperfusion et les anomalies de
circulations régionales peuvent inclure (mais ne sont pas limitées à)
l’acidose lactique, l’oligurie, ou des troubles aigus des fonctions
supérieures.
On appelle choc septique, une hypotension artérielle
prolongée, contemporaine d’un sepsis sévère nécessitant le recours à
des vasopresseurs et/ou des inotropes afin de maintenir la pression
artérielle et ce, malgré un remplissage vasculaire adéquat.
Sont associés à ces signes hémodynamiques, la présence
d’anomalies de la perfusion reflétées par une acidose lactique, une
oligurie et des troubles de la conscience.
C’est cette définition qui a été retenue au cours des dernières
années comme critère d’entrée dans les études thérapeutiques, ou
lors de la conférence de consensus organisée par la Société de réanimation de langue française (SRLF) en juin 1996 sur l’utilisation des
catécholamines au cours du choc septique [3]. Depuis cette date, les
publications relatives à la prise en charge thérapeutique du choc
septique et/ou du sepsis sévère ont repris ces définitions à quelques
nuances près [4-6].
La distinction qui est faite entre sepsis, sepsis sévère et choc
infectieux a pour but de définir des groupes homogènes de malades
au moyen d’éléments cliniques ou biologiques simples. Il existe en
fait une continuité physiopathologique évidente entre ces états.
ÉPIDÉMIOLOGIE ET MORTALITÉ
Le choc septique est la cause d’environ 3 à 4 % des admissions
en réanimation chez l’adulte. Aux États-Unis, on a recensé que, sur
4 500 patients appartenant à la définition du choc septique rappelée
ci-dessus, la mortalité moyenne est, selon les séries, de 45 %. Cette
mortalité reste élevée [4] malgré les progrès thérapeutiques effectués
au cours des dernières années (détermination plus précoce du foyer
infectieux, antibiothérapie empirique large administrée dans la
première heure [6, 7] puis adaptée aux germes selon leur résistance,
optimisation du remplissage vasculaire [8], de l’utilisation des catécholamines (noradrénaline, adrénaline, dobutamine). La mortalité
est plus élevée chez des patients débilités, âgés, diabétiques ou
immunodéprimés [3, 4, 7, 8].
PRÉDISPOSITION GÉNÉTIQUE
La prédisposition individuelle génétique à être victime d’un
choc septique sévère, suspectée depuis très longtemps sur des
cohortes de malades, est aujourd’hui prouvée. Des travaux récents
[9] mettent en évidence que le polymorphisme du gène codant pour
le TNF expose de façon aléatoire le sujet à une mortalité plus ou
moins élevée ou à une expression clinique plus ou moins sévère lors
du choc septique. Cette prédisposition à une expression clinique
sévère des états infectieux chez certains sujets a été retrouvée dans
d’autres situations : neuropaludisme, méningite cérébrospinale,
syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) [10-13].
Les mécanismes connus à l’origine d’états gravissimes lors
d’infections habituelles sont : les déficits de l’adhésion et de la
migration des leucocytes, les déficits partiels du système du complément [14] et les déficits en récepteurs aux immunoglobulines G. Le
polymorphisme du gène codant pour le TNF est une nouvelle
acquisition; elle est et sera sans doute suivie de la découverte de
connaissances, dans le même domaine, de particularités génétiques
concernant l’ensemble de la réaction inflammatoire (cytokines pro
et anti-inflammatoires, expression individuelle et variable de
certains systèmes enzymatiques de la coagulation, des toll-récepteurs
et de l’ensemble des molécules impliquées dans la réponse de l’hôte
à l’agent infectieux [immunité native], etc.).
Ces notions sont « fondamentales » car elles permettront de
déterminer les groupes de patients susceptibles de bénéficier d’essais
thérapeutiques mieux ciblés et stratifiés que ceux qui ont été menés
au cours des dernières années, en particulier dans l’utilisation des
antiendotoxines ou des anticytokines [15-16]. Ce domaine, celui de
la pharmacogénétique, va transformer à court terme notre prise en
charge thérapeutique du choc septique [16-17].
PHYSIOPATHOLOGIE
Le choc septique doit être considéré comme une succession
biologique d’événements survenant extrêmement rapidement après
l’introduction anormale dans l’organisme d’un composant étranger
d’origine infectieuse (endotoxine, exotoxine, protéine virale,
élément constitutif d’un champignon ou d’un parasite).
Cette succession d’événements met en cause le système immunitaire de défense de l’organisme, les médiateurs cellulaires de ce
système et les conséquences de l’action de ces médiateurs sur les
différents organes, en particulier, le cœur et le système vasculaire, les
poumons, le foie, les reins, le cerveau et le système digestif.
Pour des raisons de clarté, seront successivement envisagés :
– la présentation de l’antigène au système immunitaire et la cascade
inflammatoire;
– l’action des médiateurs cellulaires (principalement les cytokines)
sur la perfusion tissulaire;
– la dépression myocardique responsable en partie, de «l’insuffisance
circulatoire »;
– les conséquences viscérales du choc septique.
PRÉSENTATION DE L’ANTIGÈNE AU SYSTÈME
IMMUNITAIRE : LA CASCADE INFLAMMATOIRE
Les mécanismes de cette étape commencent à être bien connus.
Ils ont particulièrement bien été décrits en ce qui concerne l’endotoxine, constituant lipopolysaccharidique de la membrane externe
des bactéries à Gram négatif. En fait, les antigènes microbiens au
sens large du terme, regroupés sous l’acronyme anglais de PAMS,
constituent des éléments susceptibles d’activer le système immunitaire après avoir été reconnus au moyen des récepteurs situés sur les
cellules de l’immunité innée, appelés PRR’s. Il s’agit de l’acide lipoteichoïque pour les bactéries à Gram positif, le LPS ou endotoxines
pour les bactéries à Gram négatif, les glycolipides et les acides mycosiques pour les mycobactéries ou bien certaines lipoprotéines ou
enveloppes externes pour les spirochètes. Les protéines des champignons et certains constituants protéiques viraux, sont également
susceptibles d’activer le système immunitaire [18].
Cette activation touche, soit des lymphocytes, notamment
natural killer (NK) susceptibles alors de sécréter de l’interféron gamma
et d’activer les polynucléaires neutrophiles, soit le système macrophagique responsable de la sécrétion de cytokines (fig. 74.6). Certains
antigènes sont également susceptibles d’activer directement les neutrophiles. L’activation des macrophages a une double conséquence :
44200_Volume4_1 Page 794 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
Affections et leurs traitements
794
Histamine
IL-8,
LTB4,
ECF
Protéine C-réactive
Protéine de liaison
du mannane
Complément
Polyanions
Lipoprotéines
Acide lipotéchoïque
Lipoarabino-mannane
Lipopolysaccharide
Peptides formyles
Muramyl
Dipeptides
Peptidoglycane
Chimiotactisme
C3a, C5a
NK
Perméabilité
vasculaire
accrue
IFNγ
IL-12
TNF
Activation
des phagocytes
Adhésion
des phagocytes
Cytokines
Activation
de l’endothélium
Bactéries
Figure 74.6. Déterminants cliniques de l’activation du système immunitaire [19].
Ligands osidiques exprimés sur :
plaquettes, endothélium,
neutrophiles
leucocytes
endothélium
éléments contribuent largement à l’activation des phagocytes, au
chimiotactisme des polynucléaires neutrophiles et à l’activation des
mastocytes. Ces cellules sont susceptibles de sécréter des médiateurs
(IL8, LTB4, ECF) responsables eux-mêmes de l’activation des polynucléaires, de l’histamine ou des bradykinines modifiant considérablement la perméabilité vasculaire. À l’échelon de l’organisme entier,
cette activation généralisée du système immunitaire et du contingent cellulaire endothélial va être responsable d’une réaction inflammatoire généralisée dénommée SIRS.
ACTION DES MÉDIATEURS CELLULAIRES SUR
LA PERFUSION TISSULAIRE; MODIFICATIONS VASCULAIRES
Domaine
de type
lectine
De façon très rapide et continue, les altérations cellulaires et
microcirculatoires décrites ci-dessus, vont s’étendre à l’ensemble du
système vasculaire et vont être responsables schématiquement de
quatre phénomènes :
Sélectine P
plaquette, endothélium
Sélectine E
endothélium
Sélectine L
leucocytes
Figure 74.7. Représentation schématique des protéines de liaisons
cellulaires de la famille des sélectines [19].
– par le biais du TNF et de l’IL-12, d’activer les lymphocytes NK;
– par le biais d’autres cytokines, de permettre l’adhésion des phagocytes aux cellules endothéliales et d’activer l’endothélium lui-même,
qui exprime alors à sa surface des protéines d’adhésion susceptibles
de capter les phagocytes (rôle majeur des adhésines, des intégrines,
et des sélectines) (fig. 74.7).
De façon plus détaillée, la présentation de l’endotoxine au
système immunitaire et plus particulièrement aux macrophages,
comporte la séquence suivante : l’endotoxine libérée dans l’organisme à partir d’un foyer infectieux est immédiatement captée par
des protéines plasmatiques, les LBP ou LPS Binding Protein. Le
complexe ainsi formé se fixe sur le récepteur CD14 du macrophage
via le système des toll-récepteurs et conduit à l’activation de celui-ci.
L’activation macrophagique va induire alors la libération de
nombreux médiateurs chimiques, en particulier des cytokines proinflammatoires (TNF, IL-1, IL-6, IL-8). Ces réactions interviennent
dans la circulation et dans les différents territoires où l’endotoxine a
pu « rencontrer » des macrophages ou des monocytes. Des cytokines
anti-inflammatoires (IL-4, IL-10) sont aussi libérées simultanément,
ou presque, autorisant une régulation locorégionale et systémique
de la cascade inflammatoire [19].
De façon simultanée à l’activation cellulaire par les protéines
bactériennes, les protéines de liaison du manane ou la C Reactive
Proteine sont susceptibles d’activer le complément et d’exprimer
ainsi, dans la circulation, la fraction C3a et C5a du complément. Ces
– l’augmentation de la perméabilité capillaire, habituellement
appelée syndrome de fuite capillaire ou capillary leak syndrome;
– une modification de la régulation de la perfusion de chaque organe
à l’origine d’une mal distribution « des flux sanguins » au niveau des
tissus;
– des modifications du tonus artériolaire et veineux responsables en
grande partie de l’état hyperdynamique décrit habituellement dans
le choc septique;
– une activation de la coagulation responsable d’une coagulation
intravasculaire disséminée (CIVD).
SYNDROME DE FUITE CAPILLAIRE
L’activation des cellules endothéliales au sein des différents
tissus par les médiateurs circulants et plus particulièrement les cytokines, l’histamine et la bradykinine entraînent une modification de
la jonction serrée des cellules endothéliales et la possibilité pour les
petites et moyennes molécules, de passer du secteur vasculaire dans
le secteur interstitiel. La traduction clinique de l’augmentation de la
perméabilité capillaire est, de ce fait, une augmentation du volume
interstitiel. Au niveau pulmonaire, cet œdème lésionnel est responsable de la dyspnée, témoin clinique très précoce d’un effet shunt
existant dès le début du sepsis dont l’évolution se fait vers un
syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA). La diminution de la
diurèse, indépendamment des conditions de perfusion rénale est en
partie liée à un œdème interstitiel rénal; l’augmentation parfois
observable, des masses musculaires est liée à un œdème des muscles
squelettiques. À l’échelon cutané, il est rare d’observer un œdème
sous-cutané. Enfin, des données histologiques ont mis en évidence
une augmentation des espaces interstitiels entre les cardiomyocytes.
L’existence d’un œdème cérébral a aussi été décrite [20-27].
Cette séquestration liquidienne au sein de « l’espace physiologique interstitiel » est responsable de l’hypovolémie bien documentée à la phase initiale du choc septique.
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État de choc
Filtration transendothéliale
795
L’hypovolémie observée au cours du choc septique n’est pas
uniquement liée à l’œdème généré par l’augmentation de la perméabilité capillaire. Dans certaines situations, une augmentation du
troisième secteur (par exemple, une ascite), des pertes insensibles
liées à l’état infectieux (fièvre, polypnée) et des pertes « extérieures »
(diarrhée, vomissements) peuvent également intervenir. Ces
éléments constituent une diminution nette quantitative du volume
circulant total. À cette perte absolue du volume circulant, s’ajoute
une augmentation de la « capacitance » des vaisseaux liée à la perte
de régulation des perfusions régionales (cf. infra). Ces éléments sont
responsables de l’hypovolémie « efficace », mauvais terme, qui
traduit bien la nécessité d’une expansion volémique dans le traitement initial du choc septique [28, 29].
Perméabilité
augmentée
Perméabilité
normale
MODIFICATIONS DE LA PERFUSION TISSULAIRE;
MALDISTRIBUTION DES FLUX SANGUINS LOCORÉGIONAUX
Pression capillaire
Figure 74.8. Relation entre la filtration transendothéliale pulmonaire et le
niveau de pression capillaire pulmonaire en cas de perméabilité capillaire
normale ou augmentée (d’après J.-L. Vincent, communication
personnelle).
À l’échelon pulmonaire, l’augmentation de la perméabilité
capillaire associée à la dysfonction ventriculaire gauche (cf. infra)
favorise la constitution d’un œdème pulmonaire (fig. 74.8). À niveau
équivalent de pression capillaire, la fuite liquidienne est plus importante en cas d’œdème pulmonaire non hémodynamique sur un
poumon dont la perméabilité est augmentée que dans un poumon
sain soumis uniquement à une surcharge barométrique de nature
hémodynamique.
Les conséquences viscérales de l’augmentation de la perméabilité capillaire et de la formation d’œdème, sont une hypoxie
tissulaire, une hypoperfusion et la constitution des trombi vasculaires (cf. infra). L’hypo-oxygénation tissulaire caractéristique du
choc septique est en partie due à cet œdème qui augmente la
distance à parcourir pour la molécule d’oxygène entre le vaisseau et
la cellule cible [20].
Plusieurs éléments sont à prendre en compte, la vasoplégie,
l’hyporéactivité vasculaire aux agents vasoconstricteurs et les
anomalies de distribution locorégionale du débit sanguin.
Le choc septique se caractérise par la « résistance aux agents
naturels » sécrétés lors d’une agression infectieuse (adrénaline et
noradrénaline sécrétées par le système sympathique, angiotensine et
dérivés sécrétés par le système rénine-angiotensine). Cette hyporéactivité semble liée à la sécrétion, par l’endothélium vasculaire, de
puissants vasodilatateurs, au premier rang desquels figure le
monoxyde d’azote (NO) (fig. 74.9). La fabrication du monoxyde
d’azote dépend d’un processus enzymatique, la NO synthase inductible. Cette enzyme est activée sous l’effet de certaines cytokines
proinflammatoires (TNF, IL1, IL8). Elle a pour conséquence une activité bactéricide intraphagocytaire et une relaxation vasculaire très
importante par son action sur la musculature lisse de la paroi atériolaire [30-33]. D’autres médiateurs sont susceptibles de favoriser cette
vasoplégie et cette hyporéactivité vasculaire aux catécholamines :
certaines prostaglandines, l’histamine et les bradykinines. Ces molécules sont libérées par le système mastocytaire.
L’hyporéactivité aux catécholamines et la vasoplégie sont très
variables d’un territoire à l’autre; ainsi dans l’intestin, il a pu être
montré des phénomènes de vasoconstriction artériolaire diffuse,
alors que dans les territoires musculaires squelettiques prédomine
LPS
IL–1
+
TNF
Amplification
par le PAF
Adhérence
aux cellules
endothéliales
Molécule
d’adhérence
cellulaire
Agrégation
Chimiotactisme,
des plaquettes production O2,
dépôt de fibrine dégranulation
Thromboplastine
IL–1
NO
Relaxation
du muscle
lisse
Figure 74.9. Représentation schématique des événements cellulaires à l’échelon d’un vaisseau en cas d’activation de la cascade inflammatoire lors du choc septique [1, 19].
44200_Volume4_1 Page 796 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
Affections et leurs traitements
796
habituellement une vasodilatation [34]. De plus, certaines substances vasoconstrictives puissantes telles que l’endothéline ou le
tromboxane sont libérées en réaction à la vasodilatation induite par
le monoxyde d’azote sur la musculature lisse; il en résulte une
grande hétérogénéité de l’état de relaxation ou de constriction des
vaisseaux d’un organe à l’autre.
La réactivité vasculaire dans cette situation physiopathologique est
dépendante en partie des gluco-corticoïdes naturels [35-36], voire de la
fonction surrénalienne qui peut être diminuée [37]. Le calcul « des résistances artérielles» par la technique du cathéter de Swan-Ganz (calcul
dérivé de la mesure du débit cardiaque et de la pression artérielle
moyenne du système artériel) est donc une approche très imparfaite et
relativement peu physiologique de l’état du système artériel au cours du
choc septique. C’est pourtant sur ces données que s’appuie l’utilisation
des drogues vaso-actives, et en particulier vasoconstrictrices.
Les anomalies de distribution et de perfusion locorégionales ont
fait l’objet de très nombreux travaux [38]. Elles ont pour conséquence une altération des capacités pour les tissus d’extraire et/ou
d’utiliser l’oxygène délivré. La relation consommation/délivrance en
O2 (VO2/DO2) longtemps considérée comme élément déterminant
du diagnostic et du suivi thérapeutique du choc septique, est
aujourd’hui plus controversée dans son interprétation ou son utilisation. Sans évoquer les erreurs d’interprétation liées à un biais
mathématique, la mesure de la DO2 et de la VO2, telle qu’elle est
habituellement effectuée au lit du malade, est loin de refléter la
réalité des anomalies d’extraction et de consommation en oxygène
des différents tissus [39-40].
Plusieurs mécanismes sont évoqués pour expliquer les anomalies de l’extraction de l’oxygène par les tissus : l’hypoperfusion de
l’organe, l’existence d’un œdème interstitiel empêchant une bonne
diffusion de l’oxygène depuis le vaisseau jusqu’à la cellule, les
anomalies de la régulation vasculaire citées ci-dessus, et enfin un
possible (mais non formellement démontré) dysfonctionnement du
système énergétique cellulaire mitochondrial.
Ainsi, si pendant de très nombreuses années, le calcul de la DO2
et de la VO2 (et la notion de « dépendance anormale » lors du sepsis) a
fait l’objet de nombreux travaux de recherche, son utilisation potentielle au lit du malade semble aujourd’hui réduite. La mesure itérative
de la concentration plasmatique de l’acide lactique (résultante de
l’équilibre entre la consommation et la production du lactate en mode
anaérobie) est une méthode simple et efficace pour évaluer la sévérité
de la situation clinique et la réponse au traitement [41-44].
PROFIL HÉMODYNAMIQUE
Les conséquences macrocirculatoires de ces anomalies microcirculatoires sont :
– une hypovolémie, un état hyperkinétique ou hyperdynamique
caractérisé par une augmentation du débit cardiaque, une diminution de la pression artérielle moyenne avec pour conséquence une
diminution de ce qu’il est convenu d’appeler « les résistances artérielles périphériques ». En fait, sur le plan physiologique, il
conviendrait vraisemblablement de s’attacher beaucoup plus à
l’étude des variations du spectre d’impédance artérielle, ce qui est en
pratique courante irréalisable. Toutefois, il est possible de mesurer
chez certains patients un débit cardiaque normal ou diminué à la
phase initiale du choc [45];
– de façon générale, dès que l’hypovolémie est corrigée par le
remplissage vasculaire (cf. traitement), l’état hyperkinétique est
attesté par une élévation parfois considérable du débit (ou de
l’index) cardiaque (10 à 12 l.min–1.m–2);
– à un stade tardif, la dépression myocardique (cf. infra) est telle que
l’index cardiaque diminue, le choc, dit alors hypokinétique, atteint
un stade « réfractaire » à toute thérapeutique et l’acidose métabolique, attestée par une lactatémie élevée (supérieure à 10 ou
12 mmol/l) représente alors un critère pronostique péjoratif simple
et valide [42, 46]. Même cette vision « classique » du choc à sa phase
terminale mérite d’être nuancée [47].
COAGULATION INTRAVASCULAIRE DISSÉMINÉE (CIVD)
L’activation des cellules endothéliales par des médiateurs proinflammatoires produits in situ ou circulants, tels que les cytokines,
provoque une activation de la coagulation locale pour réaliser un
tableau de CIVD. La cinétique des événements est aujourd’hui
parfaitement décrite [48-51] : elle met en jeu l’activation du système
procoagulant, le « dépassement » du système fibrinolytique et l’agrégation des plaquettes associée à un dépôt de fibrine, élément initial
de la CIVD. Son expression biologique, précoce, est plus spécifique-
ment représentée par la présence de complexes solubles, de produits
de dégradation de la fibrine et d’une diminution de la concentration
plasmatique en ATIII. Les organes concernés par ce phénomène sont
les poumons, les muscles squelettiques, les reins, le cerveau, etc.
L’initiation de la CIVD est de deux ordres :
– d’ordre microcirculatoire, ralentissement microcirculatoire,
anomalies de la distribution du flux sanguin locorégional (ouverture
des shunts artérioveineux), augmentation de la viscosité sanguine
favorisée par la fuite liquidienne interstitielle et diminution de la
déformabilité des globules rouges, pooling capillaire;
– d’ordre « biochimique », activation des facteurs de la coagulation
sous l’effet des médiateurs proinflammatoires.
L’obstruction microvasculaire observée en post mortem chez
certains sujets décédés de choc septique permet d’expliquer que
cette CIVD contribue largement à l’hypoxie de tous les organes. Ceci
est particulièrement vrai au sein des poumons et du cerveau ou
visible au niveau des extrémités dans la situation particulière de la
méningococcémie fulminante.
DÉPRESSION MYOCARDIQUE
La diminution de la fonction ventriculaire gauche et droite au
cours du choc septique, attestée par de nombreux travaux [52-54]
contribue à expliquer l’insuffisance circulatoire.
Au lit du malade, les moyens d’évaluation de la dysfonction
ventriculaire gauche et droite sont le cathétérisme droit (méthode de
swan-ganz) et l’échographie cardiaque transœsophagienne, méthode
moins invasive permettant de mesurer la fraction d’éjection du
ventricule gauche et du ventricule droit, les volumes télédiastoliques
et télésystoliques, de visualiser la contraction myocardique, de quantifier les anomalies segmentaires et globales de la contraction et
d’apprécier l’état et la continence valvulaire.
La dépression systolique du ventricule gauche est souvent
cachée par l’augmentation de la fréquence cardiaque et la diminution de la postcharge. La diminution de la contractilité du myocarde
est au mieux explorée par la relation index de travail systolique
ventriculaire gauche (ISWVG) sur pression artérielle pulmonaire
d’occlusion (PAPO) en lieu et place de la relation pression télésystolique ventriculaire gauche sur volume télésystolique (PTS/VTS), seule
relation valide pour explorer au mieux la contractilité du myocarde
indépendamment des conditions de charge.
La dilatation ventriculaire est un facteur adaptatif corrélé au
pronostic. Elle favorise la relation de Franck-Starling; elle est limitée
par le péricarde et des troubles de la relaxation diastolique (en partie
dus à l’existence d’un œdème interstitiel myocardique).
La dysfonction ventriculaire gauche est minorée dans son
expression « clinique », par des conditions de charge ventriculaire
diminuées (diminution de la postcharge en raison des phénomènes
microcirculatoires et vasculaires).
Contrairement à des notions encore vivaces, cette dysfonction
ventriculaire gauche est présente dès les toutes premières minutes du
choc septique, et doit être prise en compte dans la thérapeutique.
Les anomalies de la relaxation diastolique, associées aux anomalies
de la perméabilité capillaire pulmonaire, sont responsables d’un
œdème alvéolaire très rapidement observable dans les modèles
expérimentaux.
Les mécanismes cellulaires de la dysfonction myocardique [5558] ont été traités dans un autre chapitre.
CONSÉQUENCES VISCÉRALES DU CHOC SEPTIQUE
Très rapidement (en quelques heures) après le début de la
décharge bactérienne, de la mise en jeu de la cascade inflammatoire
et de l’insuffisance circulatoire qui en résulte, les différents organes
vitaux témoignent d’une souffrance ou de dysfonctions graves
mettant en jeu le pronostic immédiat du patient.
On observe ainsi :
– une atteinte pulmonaire, se manifestant par une dyspnée et une
polypnée, témoins cliniques de l’œdème interstitiel puis alvéolaire
en voie de constitution, responsable d’une diminution du rapport
ventilation/perfusion. Au fil de l’évolution, cette atteinte initiale
peut évoluer vers un syndrome de détresse respiratoire aigu avec ses
lésions propres et ses conséquences physiopathologiques;
– une atteinte rénale sous la forme d’une oligurie et d’une élévation
de la créatininémie, témoins d’une diminution de la perfusion
glomérulaire et d’une atteinte tubulo-interstitielle;
44200_Volume4_1 Page 797 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
État de choc
– une atteinte surrénale très fréquente;
– une atteinte hépatique avec une élévation de la biliburinémie,
reflet de l’agression hépatocytaire;
– une atteinte intestinale et splanchnique souvent muette cliniquement, qui est jugée responsable pour certains de translocations
bactériennes et de l’entretien de l’activation de la cascade inflammatoire (the gut-hypothesis) [59];
– une atteinte cérébrale se manifestant cliniquement par des signes
variés tels qu’anxiété, agitation, confusion, somnolence ou coma.
Ces anomalies des fonctions supérieures sont en rapport avec l’existence d’un œdème cérébral induit par les modifications de la
perméabilité de la barrière hémato-encéphalique et la perte de
l’autorégulation de la circulation cérébrale qui reste pendant longtemps efficace face à une hypoperfusion générale de l’organisme, en
dehors du choc septique [60];
– une atteinte surrénalienne inconstante selon les patients et de
diagnostic difficile, voire controversé dans la littérature [61]. Toutefois cette insuffisance surrénale relative, quand elle existe, doit être
compensée par l’administration d’hydrocortisone et de 9 alpha
fuorocortisone [62-63].
La survenue chronologique de ces dysfonctions d’organe a fait
l’objet de controverses; selon toute vraisemblance, les atteintes
viscérales sont très précoces, intéressent avec plus ou moins d’acuité
tous les organes même si leurs expressions cliniques et/ou biologiques peuvent apparaître décalées dans le temps.
La quantification au jour le jour de ces dysfonctions d’organes
permet d’établir des scores [64-67]. Ces scores ont permis, sur des
cohortes importantes de patients, de calculer des indices pronostiques et de créer des groupes homogènes de malades nécessaires à la
recherche clinique : études physiopathologiques, sensibilité et
valeurs pronostiques de certains marqueurs biologiques et essais
thérapeutiques.
MANIFESTATIONS CLINIQUES ET BIOLOGIQUES
DU CHOC SEPTIQUE
Les principaux signes cliniques sont contenus dans la définition
du choc septique : syndrome infectieux avec hypotension malgré un
remplissage adéquat en présence d’anomalies de perfusions tissulaires qui peuvent inclure, entre autres, une acidose lactique, une
oligurie ou des troubles aigus des fonctions supérieures. L’hypotension nécessite le recours à des amines vasopressives
(catécholamines). On appelle hypotension, une pression artérielle
systolique inférieure à 90 mmHg ou une réduction de cette pression
de plus de 40 mmHg par rapport aux valeurs habituelles, en
l’absence d’autre cause d’hypotension.
Plusieurs éléments sémiologiques méritent de retenir l’attention;
ce sont les signes relativement précoces de l’insuffisance circulatoire
périphérique :
– la pression artérielle, inférieure à 90 mmHg malgré un remplissage
adéquat, nécessite l’utilisation de catécholamines vasoconstrictrices.
Lorsque la pression artérielle moyenne est inférieure à 70 mmHg, le
risque d’hypoperfusion tissulaire est réel surtout pour les circulations
coronaires et cérébrales. Parfois, même dans ce dernier cas, preuve a
été faite que l’autorégulation de la circulation cérébrale pouvait être
rapidement remise en cause au cours du choc septique. Ainsi, les
altérations de la conscience sous forme de confusion, troubles de
l’orientation dans le temps ou dans l’espace, agitation, apathie ou
coma, sont des signes variables, peu sensibles, peu spécifiques, mais
les témoins des conséquences sur les fonctions supérieures des
premières anomalies circulatoires et microvasculaires du sepsis;
– les signes cutanés (marbrures, augmentation du temps de recoloration, diminution de la température cutanée);
– l’oligurie, définie comme une diurèse inférieure à 0,5 ml.kg–1.h–1 en
l’absence de diurétiques.
On note de façon habituelle une tachycardie, liée à la libération
des catécholamines, parfois masquée par la prise de médicaments
(bêtabloquants ou amiodarone).
L’hyperthermie corporelle est la conséquence de la libération de
médiateurs (IL-1, IL-6), et d’une augmentation de la dépense énergétique en réponse à l’infection. Toutefois dans certaines
circonstances, une hypothermie est observée (inférieure à 36 °C).
La polypnée est presque toujours présente. Souvent de l’ordre
de 25 cycles par minute, elle est la traduction, en dehors d’une
atteinte infectieuse spécifiquement pulmonaire à l’origine du choc,
de l’atteinte pulmonaire lésionnelle (responsable d’un shunt intra-
797
pulmonaire et d’anomalies du rapport ventilation/perfusion), et de
l’acidose métabolique. La lactatémie est souvent supérieure à 2
mmol/l. Ce paramètre est un marqueur pronostique, témoin du
métabolisme anaérobie tissulaire; il sert d’indicateur biologique de la
réponse au traitement [42-44].
La mesure du pH intramuqueux gastrique, ou mieux, de la
PCO2 muqueuse gastrique, a pu être considérée comme un moyen
d’évaluation de la circulation splanchnique. En routine, cette technique n’est guère couramment utilisée. Elle représente une méthode
de recherche sur une circulation régionale « accessible », la circulation gastrique [68-69].
L’examen clinique « s’acharnera » à mettre en évidence la porte
d’entrée et la nature microbiologique de l’infection à l’origine du choc.
Un examen clinique bien conduit doit envisager toutes les localisations
cliniques et conduire à un prélèvement systématique de tout élément
susceptible de faire la preuve d’une infection locale ou locorégionale.
En réanimation (malade intubé, porteur de cathéters intravasculaires ou de cathéter de dialyse péritonéale, etc.), chez un patient
immunodéprimé (victime d’une affection hématologique ou carcinologique et/ou sous traitement immunosuppresseur, etc.), la quête des
éléments utiles à l’identification microbiologique est « encore plus»
indispensable. Tout retard dans l’administration d’antibiotiques efficaces sur les germes en cause est un facteur supplémentaire de mortalité.
ÉVOLUTION
Lorsque l’évolution du choc septique est défavorable, on assiste
en moins de 24 heures à la constitution d’un syndrome de défaillance
multiviscérale (SDMV). Ce syndrome constitue l’étape évolutive de
l’atteinte organique initiale, parfois aisément réversible chez des
sujets où l’éradication du foyer infectieux, la modulation de la réaction inflammatoire, le support hémodynamique et la correction de
l’insuffisance circulatoire sont conduits précocement avec succès.
Le SDMV se caractérise par :
– un SDRA de l’adulte;
– une insuffisance rénale oligo-anurique correspondant à une
nécrose tubulo-interstitielle;
– une atteinte hépatique avec une élévation de la bilirubine, l’apparition d’une cholestase puis secondairement d’une cytolyse;
– une dysfonction ventriculaire gauche et droite;
– une coagulopathie intravasculaire disséminée;
- une insuffisance surrénale relative.
Le recueil de la survenue de ces manifestations cliniques permet
d’établir des scores de défaillance d’organe, eux-mêmes reliés et
corrélés selon les auteurs à un pronostic. Ces scores [64-67] sont des
outils objectifs de classification des patients selon la sévérité de
l’atteinte organique. Le LODS [66] ou le SOFA [67] seuls ou combinés
autorisent un regroupement « homogène » des patients en terme de
probabilité de décès, mais non sous l’angle stricto sensu physiopathologique et/ou microbiologique. Ces regroupements de patients sont
indispensables à la conduite des essais thérapeutiques; cette méthodologie connaît toutefois des limites : influence du germe en cause,
et de plus en plus, rôle de la prédisposition génétique individuelle
c’est-à-dire de la relation unique hôte-pathogène.
TRAITEMENT DU CHOC SEPTIQUE
Le traitement du choc septique repose sur les recommandations
internationales parues début 2008 [6]. Le texte proposé ci-dessous
reprend l’essentiel de celles-ci : chacune d’entre elles a fait l’objet
d’un large consensus d’experts internationaux de la question; les
plus fortes sont basées sur des preuves convaincantes (evidence based
medicine). Pour des raisons de clarté, les propositions thérapeutiques
seront regroupées en trois volets :
– la réanimation initiale, le diagnostic de l’infection et son
traitement;
– le traitement hémodynamique et les thérapeutiques supplétives;
– les autres thérapeutiques du sepsis sévère.
RÉANIMATION INITIALE, DIAGNOSTIC
ET TRAITEMENT DE L’INFECTION
RÉANIMATION INITIALE AU COURS DES 6 PREMIÈRES HEURES
Il faut débuter la réanimation immédiatement chez tout patient
ayant une hypotension artérielle ou une élévation de la lactatémie
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Affections et leurs traitements
798
supérieure à 4 mmol/l. Ceci doit être fait le plus tôt possible avant
même l’admission du patient en secteur de réanimation.
Les objectifs à atteindre sont :
– PVC entre 8 et 12 mmHg;
– PAM supérieure ou égale à 65 mmHg;
– diurèse : 0,5 ml/kg/heure;
– SvO2 (mesurée dans l’oreillette droite) supérieure à 70 % ou supérieure à 65 % en veineux mêlé.
Les moyens nécessaires pour obtenir ces paramètres sont traités
en détail ci-dessous (traitement hémodynamique du choc septique).
Si les objectifs de SvO2 ne sont pas atteints, il convient de poursuivre le remplissage, tranfuser des culots globulaires si l’hématocrite
est inférieur ou égal à 30 % et/ou administrer de la dobutamine à la
dose maximum de 20 μg/kg/min.
DIAGNOSTIC DE L’INFECTION
Tous les prélèvements à visée microbiologique doivent être
pratiqués avant de débuter l’antibiothérapie, et ce sans en retarder
l’administration.
Il faut effectuer 2 hémocultures ou plus, dont au moins une par
voie percutanée et au moins une par chacune des voies d’accès
vasculaires veineuses ou artérielles et faire les prélèvements spécifiques selon la clinique; dans la mesure du possible, les examens
d’imagerie jugés nécessaires au diagnostic du foyer infectieux
responsable du choc septique sont réalisés rapidement.
ANTIBIOTHÉRAPIE
L’antibiothérapie est débutée le plutôt possible c’est-à-dire dans
la première heure du diagnostic de sepsis sévère ou de choc septique.
Elle doit comprendre des antibiotiques à large spectre en mono mais
le plus souvent en bi, voire en trithérapie, actifs contre les bactéries
et ou les champignons suspectés être responsables du choc. Le choix
doit aussi tenir compte de la bonne pénétration des agents antiinfectieux au site de la source de l’infection.
Ce traitement initial large synergique bactéricide devra être
réévalué quotidiennement afin de l’adapter aux germes isolés, aux
données éventuelles de pharmacocinétique, d’optimiser son efficacité et limiter sa potentielle toxicité et son coût.
La désescalade thérapeutique doit être entreprise dès que
possible en fonction de la nature et de la sensibilité des germes
isolés.
La durée du traitement est habituellement comprise entre 7 et
10 jours, sauf cas particuliers (foyer infectieux initial requérant une
durée de traitement plus longue, cas des patients immunodéprimés,
etc.).
L’antibiothérapie doit être interrompue si une cause non infectieuse du choc est trouvée.
CONTRÔLE ET IDENTIFICATION DE LA SOURCE DE L’INFECTION
Le foyer infectieux initial et responsable du choc septique doit,
si possible, être toujours identifié (cf. supra). Le drainage d’un abcès
ou le débridement de tissus infectés doivent toujours être effectués.
Toute mesure visant à contrôler la source de l’infection doit être
menée; l’ablation de tout matériel infecté est de règle. Le retrait des
voies d’abord vasculaires devra être fait s’il existe une présomption
d’infection du matériel.
TRAITEMENT HÉMODYNAMIQUE DU CHOC
ET THÉRAPEUTIQUES SUPPLÉTIVES
REMPLISSAGE VASCULAIRE
Le remplissage vasculaire doit être réalisé avec des cristalloïdes
ou des colloïdes. Il doit être poursuivi pour que la PVC soit
≥ 8 mmHg (≥ 12 mnHg si ventilation mécanique). Le remplissage
doit être rapide (fluid challenge); l’administration de 1 000 ml de cristalloïdes ou de 300-500 ml de colloïdes doit être faite sur 30 mn,
voire plus rapidement et de façon plus ample en volume en cas de
signes d’hypoperfusion tissulaire. Il doit être ralenti ou stoppé si les
pressions de remplissage cardiaque s’élèvent sans amélioration
concomitante des paramètres hémodynamiques.
AMINES VASOPRESSIVES
Leur emploi a pour but de maintenir la PAM ≥ 65 mmHg.
La dopamine ou la noradrénaline sont les amines vasopressives
de premier choix.
L’adrénaline, la vasopressine ne doivent pas être administrées
en première intention dans le choc septique. La vasopressine utilisée
à la posologie de 0,03 unités/min peut être secondairement ajoutée à
la noradrénaline avec l’espoir d’un effet supérieur à la noradrénaline
seule.
L’adrénaline est le vasopresseur de choix en cas de faible (ou
non) réponse à la noradrénaline ou à la dopamine lors d’un choc
septique.
L’emploi de la dopamine à visée de « protection rénale » est
inutile.
L’utilisation des agents vasopresseurs dans ces circonstances
requiert la mise en place d’un cathéter artériel.
AGENTS INOTROPES POSITIFS
La dobutamine doit être utilisée lors de l’élévation des pressions
de remplissage cardiaque ou en cas de bas débit cardiaque. L’index
cardiaque doit rester dans dans des valeurs normales (ne pas tenter
d’obtenir des valeurs supranormales).
STÉROÏDES
L’emploi de l’hydrocortisone est conseillé si, lors du traitement
initial du choc septique, la réponse au remplissage vasculaire et aux
amines vasopressives est faible. Le test au synacthène (autrefois
destiné au dépistage d’une insuffisance surrénale relative) n’est plus
nécessaire. L’hémisuccinate d’hydrocortisone est préférable à
l’emploi de la dexaméthasone. Les minéralocorticoïdes peuvent être
utilisés en appoint à l’hydrocortisone ou en cas d’emploi de glucocorticoïdes dénués d’effets minéralocorticoïdes.
La posologie quotidienne de l’hémisuccinate d’hydrocortisone
ne doit pas dépasser 300 mg/jour. Les corticostéroïdes doivent être
diminués puis rapidement stoppés dès que l’utilisation des amines
vasopressives n’est plus utile.
En l’absence de choc, les stéroïdes ne doivent pas être utilisés.
PROTÉINE C RECOMBINANTE HUMAINE ACTIVÉE
L’utilisation de la protéine C activée peut être envisagée pour
des patients ayant une défaillance multiviscérale avec un risque de
décès très élevé (APACHE II ≥ 25) et en l’absence de contre-indications de ce produit (cf. VIDAL, 2008).
Son utilisation sera très discutée en situation postopératoire
(bénéfice non formellement établi). Il est strictement interdit
d’administrer la protéine C activée chez des patients ayant un risque
faible de décès (APACHE II < 20) ou ne présentant qu’une défaillance
viscérale. À l’heure où s’écrit ce chapitre, une deuxième étude internationale multicentrique est en cours pour mieux déterminer le
rapport bénéfice/risque de l’utilisation de cette molécule.
AUTRES THÉRAPEUTIQUES DU SEPSIS SÉVÈRE
ET DU CHOC SEPTIQUE
ADMINISTRATION DE PRODUITS DÉRIVÉS DU SANG
La transfusion de culots globulaires est indiquée lorsque le taux
d’hémoglobine est < 7,0 g/dl. Le taux à atteindre est compris entre 7
et 9 g/dl. Un taux supérieur semble nécessaire dans certaines circonstances cliniques : cardiopathie ischémique, hypoxémie sévère,
hémorragie aiguë grave, acidose lactique, cardiopathie cyanogène.
L’érythropoïétine n’a pas, à ce jour, d’indications reconnues
pour traiter une anémie dans ce contexte aigu.
Le plasma frais congelé ne doit pas être utilisé pour corriger les
anomalies biologiques de la coagulation, sauf en cas de saignement
muqueux ou de procédures invasives.
L’antithrombine ne doit pas être utilisée.
L’administration de concentrés plaquettaires :
– est obligatoire en cas de saignement et d’une numération plaquettaire de moins de 5 000/mm3 ;
– est recommandée si la numération plaquettaire est comprise entre
5 000 et 30 000/mm3 et en cas de risque de saignement;
– est potentiellement justifiée en cas de chirurgie et/ou de procédures invasives même si le taux de plaquettes est de 50 000/mm3
environ.
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État de choc
VENTILATION MÉCANIQUE DU SDRA OU ALI INDUITS
PAR LE SEPSIS
La cible à obtenir est un volume courant de 6 ml/kg de poids
corporel en cas de SDRA et/ou d’ALI (Acute Lung Injury). La pression
de plateau doit être inférieure à 30 cm H2O (en tenant compte de la
compliance thoracique dans cette évaluation).
L’hypercapnie permissive est tolérée dans des limites raisonnables afin de permettre l’obtention d’une pression de plateau et
l’emploi d’un volume courant dans les limites définies ci-dessus.
La pression expiratoire positive (PEP) doit être réglée afin de
limiter le collapsus pulmonaire en fin d’expiration.
L’utilisation de la ventilation en position ventrale est permise
au cas par cas afin d’améliorer l’oxygénation sanguine et en
l’absence de risque majeur au retournement du patient.
Le patient doit être ventilé en position semi-assise (sauf contreindications), c’est-à-dire tête entre 30 et 45°.
L’indication de la VNI (ventilation non invasive) est réservée
aux patients stables hémodynamiquement (en dehors du contexte
de choc septique) et supposés être en voie de guérison.
Le sevrage ventilatoire doit répondre à un protocole décrit en
détail.
Le monitoring d’un patient victime d’ARDS ou d’ALI ne nécessite pas en routine la mise en place d’un cathéter de Swan-Ganz.
L’hydratation quotidienne doit être suffisante pour éviter une
hypoperfusion tissulaire.
SÉDATION, ANALGÉSIE ET UTILISATION DE CURARES
La sédation et l’analgésie doivent répondre à des protocoles
prédéfinis chez les patients ventilés artificiellement. L’évaluation
quotidienne du degré de sédation et d’analgésie doit être réalisée en
utilisant des échelles de sédation.
L’administration des drogues peut se faire par bolus ou par
perfusion continue si l’évaluation quotidienne est réalisée en obtenant des phases de réveil.
L’utilisation des curares doit être si possible évitée. En cas de
curarisation par administration continue, il faut évaluer l’intensité
du blocage neuromusculaire.
799
PROPHYLAXIE DE L’ULCÈRE DE STRESS
La prophylaxie de l’ulcère de stress repose sur la prescription
d’un inhibiteur de la pompe à proton ou d’un anti-H2. Elle doit tenir
compte des risques potentiels de développement des pneumopathies
acquises sous ventilation mécanique.
TRAITEMENTS SPÉCIFIQUES VISANT
À CONTRÔLER LA RÉPONSE INFLAMMATOIRE
Au cours des 15 dernières années, de nombreux essais thérapeutiques chez l’animal et chez l’homme ont eu pour but de contrôler la
cascade inflammatoire du choc septique et du sepsis sévère. L’immunothérapie anti-endotoxine (HA-1A, anticorps anti-endotoxine E5),
anti-cytokines proinflammatoires (anti-TNF, anti-IL1, etc.) a été un
échec total et a représenté une grande désillusion [70-73]. Ces essais
ont toutefois contribué à mieux connaître les aspects physiopathologiques du choc septique et le rôle certain, mais encore peu utilisable
sous l’angle thérapeutique, de la prédisposition génétique individuelle.
CONCLUSION
Malgré l’accroissement considérable des connaissances sur le
choc septique au cours de la dernière décennie et des moyens thérapeutiques mis en œuvre, la mortalité reste élevée, 30 à 40 % selon les
séries. Ce relatif échec trouve son origine dans l’incapacité à étudier
les aspects physiopathologiques du choc en fonction de la particularité individuelle (rôle vraisemblablement prépondérant des
prédispositions génétiques) et d’en déduire des schémas thérapeutiques valides personnalisés. Toutefois, la diffusion des
recommandations internationales contenues dans la Surviving sepsis
campaign 2008, si elles sont strictement appliquées, devrait se
traduire, au sens épidémiologique, par une diminution de la mortalité observée dans cette infection sévère.
RÉFÉRENCES
[1]
CONTRÔLE GLYCÉMIQUE
Le contrôle de la glycémie doit être réalisé dès que le patient est
stable en service de réanimation. Ce contrôle fait appel à l’insulinothérapie administrée selon un protocole qui vise à maintenir la
glycémie < 8,3 mmol/L.
La surveillance de la glycémie doit être effectuée au moins
toutes les 4 heures afin d’éviter toute hypoglycémie. Chez un patient
stable, un apport en glucose sera réalisé.
La glycémie mesurée au lit du patient selon des techniques
rapides peut être surévaluée, il faut donc se méfier de taux trop bas.
[2]
[3]
[4]
[5]
[6]
[7]
ÉPURATION EXTRARÉNALE
[8]
L’hémodialyse intermittente ou les méthodes d’épuration extrarénale continues (hémofiltration et hémodiafiltration veinoveineuses) sont considérées comme équivalentes en terme d’efficacité. Les méthodes d’épuration continue semblent de maniement
plus facile chez des patients encore instables hémodynamiquement.
[9]
[10]
[11]
UTILISATION DES BICARBONATES
[12]
Leur utilisation est formellement contre-indiquée si elle se
donne pour but d’améliorer les paramètres hémodynamiques en cas
d’acidose lactique.
[13
PROPHYLAXIE ANTITHROMBOTIQUE
[15]
[14]
[16;
Elle repose sur l’emploi de l’héparine non fractionnée ou des
héparines de bas poids moléculaires en dehors de leurs contre-indications. L’emploi de bas de contention ou de moyens de
compression-décompression alternatifs est recommandé. L’association d’une anticoagulation et des moyens mécaniques de prévention
est à réserver aux patients à haut risque de thrombophlébite.
[17]
[18]
[19]
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CHOC ANAPHYLACTIQUE
P.-M. Mertes, M.-C. Laxenaire
L’anaphylaxie est la manifestation la plus grave des réactions
d’hypersensibilité immédiate correspondant au type I de la classification de Gell et Coombs [1]. C’est une réaction immunologique
souvent imprévisible, parfois mortelle, conséquence d’un conflit
antigène-anticorps. Il se produit alors une libération brutale de
médiateurs provenant des mastocytes et des polynucléaires basophiles. Ces réactions d’hypersensibilité immédiate IgE-médiées
doivent être distinguées des réactions d’hypersensibilité immédiate
non IgE-médiées, souvent qualifiées d’anaphylactoïdes et qui répondent à d’autres mécanismes.
ALLERGÈNES INCRIMINÉS
Les accidents d’anaphylaxie peuvent être classés en fonction de
l’allergène responsable (tableau 74.5).
Tableau 74.5. Principaux allergènes responsables
de chocs anaphylactiques
Allergènes protéiques
– Venins d’hyménoptères (guêpes, abeilles, frelons) [2], venins de serpents
– Latex (22 % des chocs anaphylactiques peranesthésiques) [3, 4]
– Gélatines (les plus impliquées dans l’anaphylaxie liée aux substituts du
plasma) [5, 6]
– Aliments : arachide, fruits secs, crustacés, poissons, lait, œufs, etc. [7, 8, 9]
– Sérums, vaccins.
– Hormones et enzymes (insuline animale, trypsine, chymopapaïne,
streptokinase, chymotrypsine, etc.)
– Pollens.
Allergènes polysaccharidiques
– Dextrans
Haptènes
– Antibiotiques : bêtalactamines, cyclines, quinolones, vancomycine,
polymyxine, rifamycine, etc. [10, 3]
– Agents anesthésiques (curarisants responsables de 55 % des anaphylaxies
peranesthésiques) [3, 11]
– Antalgiques (anti-inflammatoires non stéroïdiens, glafénine, pyrazolés)
– Produits de contraste iodés [12]
– Vitamines (thiamine, acide folique)
– Oxyde d’éthylène [13]
Autres
– Froid
– Exercice [14, 15]
– Accidents idiopathiques [16]
44200_Volume4_1 Page 801 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
État de choc
PHYSIOPATHOLOGIE
ÉLÉMENTS
Les accidents d’anaphylaxie sont des réactions d’hypersensibilité immédiate, s’effectuant via les IgE (réactions de type I de la
classification de Gell et Coombs) [1]. Plus exceptionnellement, il
s’agit d’anticorps de type IgG (cas des dextrans). Les anticorps sont
synthétisés lors d’un premier contact de l’organisme avec l’allergène,
appelé « contact préparant », asymptomatique sur le plan clinique.
Cette synthèse demande au moins une dizaine de jours. Les immunoglobulines demeurent fixées par leur fragment Fc à des récepteurs
situés sur les membranes des polynucléaires basophiles circulants et
des mastocytes tissulaires. Lors de la réexposition à l’allergène
« contact déclenchant », il se produit un pontage des sites anticorps
de deux molécules d’IgE voisines. Ce pontage entraîne une activation membranaire provoquant, par l’intermédiaire de l’AMP
cyclique cytoplasmique, la libération du contenu des granules
stockés dans les mastocytes et basophiles. Ces granules contiennent
des médiateurs préformés qui sont immédiatement libérés (histamine, facteur chimiotactique pour les éosinophiles et les
neutrophiles, tryptase et enzymes divers, etc.) et des médiateurs
néoformés (leucotriènes, prostaglandines, facteur d’activation
plaquettaire, thromboxane, etc.).
Les accidents d’hypersensibilité immédiate IgE-médiés sont à
différencier des réactions non IgE-médiées (anaphylactoïdes) par
histaminolibération pharmacologique non spécifique, comme avec
la morphine ou la vancomycine par exemple, et des réactions avec
activation directe du complément, comme avec les dextrans, la
protamine ou chez les patients atteints d’œdème angioneurotique
héréditaire. Ces réactions pharmacologiques sont proches, voire
indistinguables cliniquement des réactions anaphylactiques vraies
[17-19]. Néanmoins, il semble que lorsque le mécanisme responsable
de l’histaminolibération est immunologique, les signes sont habituellement au complet et souvent graves [6]. En revanche, lorsque la
cause est pharmacologique, les signes cliniques sont moins intenses
et peuvent céder sans traitement spécifique. Le diagnostic d’histaminolibération pharmacologique est un diagnostic d’élimination. Il est
évoqué quand la symptomatologie mime celle d’un accident
anaphylactique mais que les tests d’anaphylaxie sont négatifs. C’est
le cas des réactions anaphylactoïdes à certains aliments histaminolibérateurs comme le poisson cru, la tomate, les fraises, le vin blanc et
les crustacés. On retrouve souvent un terrain prédisposant à la libération d’histamine telles l’atopie ou l’hyperadrénergie.
CONSÉQUENCES
801
Tableau 74.6. Médiateurs de l’anaphylaxie, effets physiologiques
Histamine [21]
Liaison aux récepteurs H1
– Bronchoconstriction,
– Libération de NO avec vasodilatation –
périphérique [22]
– Vasoconstriction coronaire
– Hyperperméabilité capillaire avec œdème –
interstitiel
Liaison aux récepteurs H2
– Sécrétion d’acide gastrique
– Augmentation du péristaltisme
– Sécrétion de mucus bronchique
– Vasodilatation artérielle pulmonaire et coronaire
– Effets chronotropes et inotropes +
Liaison aux récepteurs H3
– Inhibition de la libération d’histamine
– Inhibition présynaptique de la libération de
neurotransmetteurs
Liaison aux récepteurs H4
– Chimiotactisme des mastocytes et des
leucocytes
– Modulation de l’inflammation (régulation de la
synthèse des IgE lors des pathologies
lymphoprolifératives?)
Enzymes
– Hyaluronidase,
chymase,
– Kininogènase
Altération du tissu conjonctif
Altération de la membrane basale des vaisseaux
Hyperperméabilité capillaire
Facteurs chimiotactiques
Amplification des autres réactions
Leucotriènes
Bronchoconstriction
Sécrétion de mucus bronchique
Vasoconstriction pulmonaire
Vasodilatation systémique
Troubles de perméabilité capillaire
Prostaglandines D2 et F2
Vasodilatation
Augmentation de la perméabilité capillaire
Bronchoconstriction
Thromboxane A2
Bronchoconstriction
Vasoconstriction coronaire et artérielle
pulmonaire
Agrégation plaquettaire
Prostacycline
Effets inverses du Thromboxane A2
Facteur d’activation
plaquettaire
Agrégation plaquettaire et des polynucléaires
neutrophiles
Attraction des polynucléaires éosinophiles
Bronchoconstriction
Production de mucus bronchique
Inotropisme négatif
Vasodilatation avec hyperperméabilité capillaire
Les effets physiologiques des médiateurs chimiques libérés
expliquent la symptomatologie parfois polymorphe [20]
(tableau 74.6).
PRÉSENTATION CLINIQUE [23, 24]
SIGNES CLINIQUES
Selon la susceptibilité du patient, la voie d’introduction de
l’allergène, sa quantité et rapidité d’administration et le type de
médiateur libéré préférentiellement, la symptomatologie clinique est
variable et apparaît en quelques minutes ou en quelques heures [25].
Par exemple, en anesthésie les chocs surviennent quelques minutes
après l’injection intraveineuse des produits de l’induction (hypnotiques, curares). Ils peuvent être décalés par rapport à l’injection des
produits, signant une allergie au latex. En effet, le latex entre dans la
composition des gants chirurgicaux, des sondes urinaires, des
masques de ventilation, etc. Chez un patient porteur d’anticorps au
latex, la réaction immunologique se produira lorsque les protéines
du latex apparaîtront dans la circulation. Les voies de pénétration
étant transcutanée, transmuqueuse ou transpulmonaire, ceci
explique qu’il y ait un délai de 15 à 30 min entre le contact et le
choc.
Le tableau clinique associe à des degrés variables un sentiment
de malaise, d’angoisse, un prurit de localisation palmoplantaire et
des sensations de brûlure, de picotement ou de fourmillements. Les
patients se plaignent de douleurs de la gorge, d’une dysphagie, d’une
dysphonie, d’une raucité de la voix, d’une gêne respiratoire, de
nausées et de douleurs pelviennes en rapport avec des contractions
utérines.
Les signes objectifs comprennent des manifestations cutanéomuqueuses, des troubles respiratoires, circulatoires et gastrointestinaux.
SIGNES CUTANEOMUQUEUX
Les signes cutanéomuqueux sont rarement absents, sauf
lorsqu’il y a d’emblée un état de choc avec collapsus cardiovasculaire. Ce sont souvent les premiers signes d’appel. Ils touchent
initialement les régions les plus riches en mastocytes (face, cou,
région antérieure du thorax) puis se généralisent rapidement. Il
s’agit d’urticaire, d’un érythème « rouge homard » ou maculopapuleux souvent accompagné d’une horripilation. L’œdème de Quincke
atteint la face et le cou, peut s’étendre au larynx et se généraliser,
entraînant une dysphonie et une dyspnée avec risque d’asphyxie.
SIGNES RESPIRATOIRES
Les signes respiratoires sont présents dans moins de 40 % des
cas [26]. Ils atteignent les voies aériennes supérieures et inférieures
avec rhinorrhée, obstruction nasale, toux sèche et obstruction des
voies aériennes supérieures par un œdème lingual, du palais mou, de
l’oropharynx, de l’hypopharynx, de l’épiglotte ou du larynx. Un
44200_Volume4_1 Page 802 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
Affections et leurs traitements
802
stridor ou une cyanose peuvent être présents. La survenue d’un
bronchospasme est quasi systématique chez les patients asthmatiques ou tabagiques en raison d’une hyperréactivité bronchique [27].
Le bronchospasme peut être majeur, la ventilation est alors impossible malgré l’intubation. Un tableau d’œdème aigu du poumon
peut se constituer secondairement, lié à des troubles de la perméabilité capillaire ou plus rarement à une dysfonction myocardique.
Enfin un arrêt respiratoire peut survenir.
SIGNES CARDIOVASCULAIRES
La vasodilatation et l’augmentation de la perméabilité des capillaires vasculaires avec plasmorragie entraînent un état de choc
hypovolémique avec collapsus cardiovasculaire et tachycardie [28].
Le pouls est faiblement perçu, voire imperceptible. Une bradycardie
peut exceptionnellement exister en particulier chez les patients
traités par bêtabloquants ou au décours d’un brutal effondrement
tensionnel. Le collapsus est parfois expliqué par une dysfonction
cardiaque secondaire à des troubles aigus du rythme cardiaque, de la
conduction et de la repolarisation. Si ce dysfonctionnement est
primitif, on parle d’anaphylaxie cardiaque, la dysrythmie et la
dépression myocardique étant induites par les médiateurs libérés
directement in situ [29-32]. Ce dysfonctionnement cardiaque est le
plus souvent secondaire à une hypoxémie avec acidose respiratoire,
à une hypoperfusion coronarienne ou à une insuffisance ventriculaire droite par hypertension artérielle pulmonaire aiguë. La
survenue d’une dysfonction cardiaque est plus fréquente en cas de
cardiopathie antérieure [32]. Un arrêt cardiaque est le possible aboutissement d’un choc prolongé ou d’une anoxie sévère secondaire à
un bronchospasme ou une obstruction œdémateuse des voies
aériennes supérieures.
Le choc anaphylactique est un choc de type distributif qui, à
l’inverse du choc septique, ne s’accompagne pas d’inhibition de la
respiration cellulaire, ce qui explique au moins en partie la rapidité
de l’évolution des formes mortelles [33]. Son évolution hémodynamique se fait classiquement en deux phases. Il existe initialement
une phase hyperkinétique qui dure deux à trois minutes, avec diminution des résistances vasculaires systémiques, hypotension,
tachycardie et augmentation du débit cardiaque. Ensuite se développe une phase hypokinétique avec diminution des résistances
vasculaires systémiques et hypotension, tachycardie, chute des pressions de remplissage secondaire à l’hypovolémie par extravasation
plasmatique (pression veineuse centrale et pression artérielle pulmonaire d’occlusion effondrées) et chute du débit cardiaque [34]. Dans
certains cas, en particulier lors des chocs anaphylactiques à la protamine, il peut exister une hypertension artérielle pulmonaire aiguë,
secondaire à une vasoconstriction artérielle pulmonaire et/ou un
bronchospasme avec insuffisance ventriculaire droite [35, 36]. Dans
ce cas, la pression veineuse centrale est élevée alors que la pression
artérielle pulmonaire d’occlusion est basse.
SIGNES GASTRO-INTESTINAUX
Les signes gastro-intestinaux sont une hypersialorrhée, des
vomissements, une hématèmèse, des douleurs abdominales et des
diarrhées parfois hémorragiques.
AUTRES SIGNES
Des signes de conjonctivite avec hyperémie conjonctivale et
larmoiement et avec œdème palpébral sont parfois présents. Une
hypoperfusion cérébrale dans le cadre du collapsus cardiovasculaire
peut se révéler par des céphalées, un état confusionnel avec désorientation, agitation et angoisse, des vertiges, des acouphènes, des
troubles visuels, une perte de connaissance ou des crises convulsives.
Ces signes sont la conséquence d’une anoxie cérébrale.
FORMES CLINIQUES
Les formes cliniques sont en relation avec le degré de sévérité.
On définit en effet quatre grades de sévérité clinique croissante [37]
(tableau 74.7). Il semblerait que la symptomatologie des réactions
anaphylactiques dues au latex soit moins sévère que celle due aux
curares ou aux antibiotiques (tableau 74.8) [11]. La forme la plus
bénigne et la plus fréquente est représentée par un érythème généralisé avec tachycardie et discrète hypotension. Il existe des formes
monoviscérales [27] où la seule expression clinique peut être un
collapsus ou un bronchospasme isolé. Les formes les plus graves,
potentiellement létales, peuvent comporter une atteinte cérébrale
avec nécrose des noyaux gris centraux et un asthme gravissime avec
obstruction des bronchioles par des moules de mucus, d’épithélium
desquamé et d’éosinophiles. L’arrêt cardiaque initial a été signalé,
probablement précédé de troubles du rythme passés inaperçus, à
rapporter à une anaphylaxie cardiaque.
Tableau 74.7. Grades de sévérité clinique du choc anaphylactique [37]
Grade I :
– Signes cutanéomuqueux isolés
Grade II :
– Signes cutanéomuqueux avec tachycardie et hypotension modérée
– Toux et dyspnée
– Nausées
Grade III :
– Signes cutanéomuqueux avec hypotension sévère, troubles du rythme –
cardiaque, état de choc
– Bronchospasme, cyanose
– Signes gastro-intestinaux (nausées, vomissements, diarrhée, douleurs –
abdominales)
Grade IV :
– Inefficacité cardiocirculatoire
– Arrêt respiratoire
Tableau 74.8. Grades de sévérité clinique de 518 réactions anaphylactiques
peranesthésiques, en fonction de la substance responsable [11]
Substance
Curares (n : 306)
Latex (n : 88)
Antibiotiques (n : 79)
Grades de sévérité clinique (%)
I
II
III
IV
12,8
24
10,9
22,9
35
28,8
58,2
38,6
53,4
3,7
2,4
6,8
Total
100
100
100
ÉVOLUTION
Dans les formes de gravité I ou II, l’évolution peut être spontanément favorable après l’arrêt de l’administration de l’allergène.
Dans les grades III et IV, considérés comme menaçant la vie, un traitement rapide et bien adapté devrait permettre une évolution
favorable. L’érythème, le bronchospasme et le collapsus régressent
rapidement alors que la tachycardie et l’œdème persistent en général
quelques heures. Cependant des épisodes de rechute sont possibles
notamment durant les 24 premières heures qui suivent la symptomatologie initiale. Leur fréquence est d’environ 20 %. Ainsi une
surveillance hémodynamique intensive est indiquée durant cette
période. Des formes prolongées de choc anaphylactique et des
formes résistantes à de fortes doses d’adrénaline sont décrites, essentiellement en raison de facteurs aggravants, mais aussi chez des
patients sans antécédents cardiovasculaires [38]. Les rechutes et les
réactions prolongées sont plus fréquentes lorsque le délai d’installation des signes initiaux est long, lorsque la porte d’entrée de
l’allergène est orale et en cas de choc grave (libération secondaire des
médiateurs néoformés) [39].
Des complications telles qu’un coma végétatif, séquelle d’une
anoxie cérébrale, un syndrome hémorragique, un syndrome de
détresse respiratoire aiguë avec œdème pulmonaire et une insuffisance cardiaque, hépatocellulaire ou rénale surviennent si le choc se
prolonge ou si le bronchospasme ne cède pas. Un retard à l’institution du traitement, une thérapeutique inadaptée ou l’existence
d’une tare antérieure peuvent être à l’origine du décès du patient
[17].
FACTEURS AGGRAVANTS
La sévérité des chocs chez les patients traités par bêtabloquants
est connue. En effet, les mécanismes cardiovasculaires d’adaptation
sont alors bloqués [40, 41]. Le choc est caractérisé par une hypotension sévère avec bradycardie, résistante aux doses habituelles
d’adrénaline. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion en empêchant la réponse hypertensive réactionnelle due à l’angiotensine
constituent eux aussi un facteur aggravant. Il existe une corrélation
inverse entre la gravité du choc et la réduction du taux d’angiotensine [42, 43].
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État de choc
L’existence d’un prolapsus de la valve mitrale majore le risque
de survenue de troubles du rythme et d’un désamorçage cardiaque
au cours d’un choc anaphylactique.
L’insuffisance coronarienne ou cardiaque et l’asthme sont des
facteurs aggravants [32]. Les fréquences de survenue d’un bronchospasme chez les sujets asthmatiques et de troubles du rythme, voire
d’une défaillance cardiaque grave chez les sujets coronariens ou
insuffisants cardiaques, sont majorées [27].
D’une manière générale, différents facteurs exogènes, qu’ils
soient physiologiques comme l’effort, pathologiques comme le
stress ou encore pharmacologiques comme les traitements hormonaux semblent moduler la réponse immunitaire lors des réactions
d’hypersensibilité immédiate, peut-être par le biais du système
rénine-angiotensine-aldostérone [42-44].
INVESTIGATIONS DIAGNOSTIQUES
L’idéal est de pouvoir réaliser un bilan biologique dans l’heure
qui suit le choc et un bilan secondaire pour faire la preuve du mécanisme de l’accident, de l’agent causal et posséder un argument
médico-légal en cas d’évolution fatale ou de séquelles graves [45].
BILAN INITIAL IMMÉDIAT
Le bilan initial immédiat est réalisé lors des réactions anaphylactiques de grade II et au-delà. L’histamine et la tryptase seront
dosées dans le sang.
L’histamine plasmatique s’élève en quelques minutes, avec un
pic entre 2 et 5 minutes et une décroissance rapide en une heure.
Cela justifie de faire un prélèvement très précoce, bien que dans les
cas d’hypotension sévère son métabolisme soit ralenti et que des
concentrations élevées puissent encore être détectées jusqu’à deux
heures plus tard [46]. Par ailleurs, il existe des faux positifs en cas
d’hémolyse ou d’erreur de manipulation du prélèvement au laboratoire et des faux négatifs, par exemple en fin de grossesse [47].
La tryptase d’origine mastocytaire est à son taux maximum
dans le sérum une à deux heures après la survenue du choc anaphylactique puis diminue progressivement dans les 10 à 12 heures
suivantes [48]. Dans les chocs sévères, elle est encore élevée
24 heures après. Pour permettre en post mortem le diagnostic de choc
anaphylactique, il a été conseillé de doser la tryptase sérique
prélevée par ponction cardiaque, carotidienne ou veineuse périphérique [49-51]. Cependant l’intérêt de ce dosage post mortem est de
plus en plus discuté. En effet, le seuil de normalité et surtout la spécificité de ce dosage ne sont pas encore suffisamment connus [52] et il
existe des facteurs qui élèvent le taux de tryptase post mortem comme
la ponction intracardiaque sur cœur pathologique et un antécédent
immédiat de choc électrique externe ou de massage cardiaque [53].
Contrairement à l’histamine, on a donc plus de chance de trouver
un taux élevé de tryptase quel que soit le moment du dosage après
l’accident. Cependant le taux sérique de tryptase peut demeurer
faible, voire nul, au décours d’accidents anaphylactiques de faible
gravité, d’origine alimentaire ou lors de bronchospasmes isolés [25,
54].
Le dosage des anticorps spécifiques de certains produits est
disponible et validé; il permet d’établir définitivement le mécanisme
de réaction d’hypersensibilité immédiate (IgE-médiée ou non) de la
réaction allergique. Les IgE spécifiques de certains allergènes tels que
venins d’hyménoptères, latex, certains antibiotiques, curares ou
hypnotiques (thiopental, propofol) pourront être détectées dans le
sang par des dosages radio-immunologiques (technique du RAST).
La combinaison des dosages précoces des médiateurs et des
anticorps spécifiques possède une sensibilité diagnostique de 87 % et
une spécificité de 93,3 % si les tests cutanés sont pris comme référence diagnostique pour les chocs survenant à l’induction de
l’anesthésie [55].
En pratique, il suffit de prélever 2 tubes de sang (un tube EDTA
et un tube sec) dans l’heure qui suit le choc pour le dosage des
médiateurs et des anticorps. La centrifugation immédiate permettra
d’individualiser du plasma pour le dosage de l’histamine et du sérum
pour la tryptase et les anticorps. Les dosages sont à effectuer dans les
24 h, sinon il faut congeler le plasma et le sérum.
BILAN ALLERGOLOGIQUE SECONDAIRE
La recherche de l’étiologie nécessite une consultation immunoallergologique, quatre à six semaines plus tard, afin de réaliser un
803
interrogatoire circonstancié. L’immuno-allergologue réalisera des
tests cutanés (épidermiques : prick tests, intradermiques, ou par
contact : patch tests) et s’aidera des tests biologiques : recherche
d’IgE spécifiques et tests d’histaminolibération leucocytaire [56, 57].
Dans certains cas, il est licite d’envisager des tests de provocation.
Toutes ces investigations ont pour buts essentiels de distinguer
l’anaphylaxie vraie de chocs anaphylactoïdes liés à des mécanismes
pharmacologiques, de définir les conduites préventives visant à
éviter les récidives, soit par l’éviction des allergènes identifiés, soit
par la prescription d’une trousse d’urgence, et de proposer, dans
certains cas, une immunothérapie spécifique (désensibilisation) [8,
58, 59].
DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL
L’association de symptômes cardiovasculaires, respiratoires,
digestifs et cutanés survenant après une réexposition à un allergène
potentiel signe le diagnostic d’accident anaphylactique. Les accidents anaphylactiques aux curares sont une exception à cette règle.
En effet, 30 % des accidents anaphylactiques aux curares surviennent en l’absence d’antécédents anesthésiques [27]. Ceci s’explique
vraisemblablement par une sensibilisation préalable à des radicaux
ammonium quaternaire communs aux agents curarisants et à
certains produits ménagers [26].
Le choc anaphylactique doit être différencié d’un choc
septique, cardiogénique ou hémorragique, d’une tamponnade, d’un
œdème aigu du poumon cardiogénique ou non et d’une syncope
vagale qui s’accompagne d’une bradycardie ou d’un surdosage médicamenteux. Dans ces cas, la symptomatologie clinique et les
circonstances de survenue sont radicalement différentes. La symptomatologie respiratoire ne doit pas être confondue avec une crise
d’asthme, une laryngite, une épiglottite, une inhalation de corps
étranger, un pneumothorax, un œdème pulmonaire a vacuo ou une
embolie pulmonaire. Les signes cutanéomuqueux peuvent évoquer
un syndrome carcinoïde, une mastocytose ou une crise d’œdème
angioneurotique.
Ces diagnostics différentiels sont souvent aisés à éliminer car le
contexte de survenue et les antécédents des patients sont totalement
différents. Cependant, en cours d’anesthésie, le diagnostic n’est pas
toujours évident, surtout lorsque les signes cutanéomuqueux
manquent. C’est tout l’intérêt du bilan précoce dans l’aide secondaire au diagnostic.
TRAITEMENT DU CHOC ANAPHYLACTIQUE
Le traitement est bien codifié et doit débuter immédiatement de
façon à éviter la survenue de complications et de séquelles.
Il convient avant tout, si possible, de stopper le contact ou
l’administration de l’allergène présumé [60].
Il faut ensuite allonger le patient, relever les jambes afin de
favoriser la redistribution sanguine vers le cerveau, supprimer les
entraves vestimentaires faisant obstacle à la ventilation, assurer la
liberté des voies aériennes et oxygéner si possible le patient en lui
administrant de l’oxygène pur par un masque facial ou après intubation trachéale.
L’adrénaline est la thérapeutique d’urgence du choc anaphylactique. Elle s’oppose point par point aux effets systémiques induits
par la libération des différents médiateurs. Elle est vasoconstrictrice
(effet alpha), inotrope positive (effet bêta 1), bronchodilatatrice
(effet bêta 2) et inhibe la dégranulation des mastocytes et des basophiles. En l’absence de voie veineuse, l’administration s’effectue
initialement à la posologie de 1 mg (10 µg/kg chez l’enfant) par voie
sous-cutanée ou préférentiellement par voie intramusculaire.
L’absorption systémique est en effet plus rapide et le pic plasmatique
plus important par voie intramusculaire [25]. Dès qu’une voie
veineuse est disponible, on injecte alors des bolus de 0,1 à 0,2 mg.
Pour cela, on dilue une ampoule de 1 mg dans 10 ml de sérum
physiologique et on injecte 1 ml ou 2 ml [61, 62]. Le bolus initial
doit être renouvelé après quelques minutes si la tension artérielle
n’évolue pas, jusqu’à concurrence de 1 mg, voire plus s’il existe une
résistance au traitement. Après restauration d’un niveau tensionnel
normal, l’entretien en continu peut être nécessaire. Dans les formes
mineures, une ampoule d’adrénaline peut être cassée sur un sucre
placé sous la langue et conservé 2 minutes dans la bouche avant
d’avaler : outre le fait que le passage par les veines sublinguales est
très rapide, l’action locale est particulièrement intéressante, la vasoconstriction permettant d’inhiber le développement de l’œdème
44200_Volume4_1 Page 804 Jeudi, 12. février 2009 2:16 14
Affections et leurs traitements
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laryngé. L’intérêt de l’adrénaline inhalée est prouvé surtout en cas de
bronchospasme mais aussi en raison d’une résorption systémique
importante et rapide [63, 64]. L’adrénaline, notamment lorsqu’elle
est administrée durant la période préhospitalière, n’est pas sans
effets indésirables : troubles graves du rythme cardiaque, infarctus
du myocarde et hémorragie cérébrale dans le cadre d’une poussée
tensionnelle [65-67]. Il n’est pas indiqué de donner de l’adrénaline
lorsqu’il n’y a pas de chute de tension artérielle.
L’utilisation avec succcès de vasopressine [68] ou de l’un de ses
analogues (Terlipressine®) [69] a récemment été proposé dans quelques cas cliniques résistant à l’adrénaline. Toutefois, certains travaux
expérimentaux récents ont mis en évidence un effet bénéfique de la
vasopressine, mais à faible dose [70] et après administration
première d’adrénaline [71], l’utilisation de vasopressine à forte dose
ou en première intention conduisant à un accroissement de la
mortalité. Des études complémentaires sont nécessaires pour
préciser la place exacte de la vasopressine dans le traitement du choc
anaphylactique. Dans l’état actuel des connaissances, l’adrénaline
doit demeurer le traitement de première intention.
Un remplissage vasculaire par du sérum salé à 0,9 % à la posologie de 10 à 25 ml/kg en 20 min, renouvelé si besoin, doit être
débuté conjointement à l’administration d’adrénaline. Si malgré ce
remplissage la pression artérielle demeure instable, il faut renouveler
l’administration de cristalloïdes voire utiliser des substituts colloïdaux (amidons de préférence aux gélatines) à la posologie initiale de
10 ml/kg en 15 minutes.
Le traitement du bronchospasme résistant à l’adrénaline
s’effectue par du salbutamol en spray ou en aérosol en utilisant une
chambre de nébulisation à adapter sur le circuit inspiratoire (Aérovent
ou Aérochambre, Laboratoire Peters), par voie sous-cutanée, voire en
continu par voie intraveineuse à la posologie de 5 à 25 µg/min.
Si le patient est traité par bêtabloquants, il faut augmenter les
doses d’adrénaline (jusqu’à 10 mg ou plus), adjoindre de l’atropine
(1 à 2 mg par voie intraveineuse) et du glucagon (1 à 5 mg puis
1 mg/heure par voie intraveineuse), voire recourir au pantalon antichoc [72].
Chez la femme enceinte, il est classique de préférer l’éphédrine
à fortes doses (25 à 50 mg par voie intraveineuse) à l’adrénaline,
dont l’effet vasoconstricteur sur les vaisseaux utérins est moins
important [73], ce qui réduit le risque d’anoxie fœtale par baisse du
débit utéroplacentaire. Cependant, en cas d’échec, l’adrénaline sera
utilisée, sans trop tarder. Si le choc survient en salle de naissance,
l’extraction rapide de l’enfant s’impose pour éviter une souffance
fœtale, mais aussi pour améliorer l’efficacité du remplissage vasculaire en supprimant la compression cave inférieure.
Les corticoïdes n’ont pas leur place dans le traitement immédiat
du choc anaphylactique. Leur action bronchodilatatrice n’est en
effet notable qu’au bout de 4 à 6 heures [74]. Ils ont cependant un
rôle anti-oedèmateux, antiprurigineux et préviendraient les rechutes
notamment lors des chocs liés aux aliments, bien que cela soit
discuté [14]. Ils ne sont donc indiqués qu’en deuxième intention. Si
le choc persiste, des thérapeutiques d’exception seront débutées en
milieu de réanimation sous contrôle hémodynamique par sonde de
Swan Ganz : ventilation assistée avec pression expiratoire positive
s’il existe un syndrome de détresse respiratoire aigu, traitement par
noradrénaline s’il existe une vasodilatation persistante malgré l’adrénaline et s’il n’existe pas de bronchospasme (posologie initiale de 4 à
8 µg/min) [74], dobutamine en cas d’œdème aigu du poumon
d’origine cardiogénique, voire utilisation d’une contrepulsion
aortique [75]. Les inhibiteurs des phosphodiestérases et la prostaglandine E1 qui possèdent des propriétés vasodilatatrices pourraient
être utilisés en cas d’hypertension artérielle pulmonaire majeure
(énoximone 0,5 à 1 mg/kg puis 5 à 10 μg/kg/min, milrinone 50 à
75 μg/kg puis 0,37 à 0,75 μg/kg/min) [76]. Une voie de recherche est
l’inhibition de l’enzyme responsable de la synthèse du monoxyde
d’azote, puissant vasodilatateur produit en excès au cours du choc
anaphylactique. Cependant, l’inhibition de la production du
monoxyde d’azote semble déprimer l’inotropisme cardiaque et
augmenter le bronchospasme chez le lapin en choc anaphylactique.
D’autres études sont nécessaires [77].
Si le choc survient en dehors du milieu hospitalier et malgré
une évolution favorable, l’hospitalisation est indispensable car des
rechutes sont possibles durant les 24 heures qui suivent la réaction
initiale.
En cas de choc survenu à l’induction anesthésique, si cela est
possible, il faut reporter l’intervention à une date ultérieure, même si
la récupération a été obtenue rapidement. En effet, les effets
inotropes négatifs des médiateurs rendent plus vulnérable l’équilibre
hémodynamique du patient en cas de poursuite de l’anesthésie.
Chaque patient doit être averti du diagnostic d’anaphylaxie, du
produit incriminé, des risques que comporterait une réexposition et
de la nécessité de faire un bilan après les premiers symptômes sans
attendre la deuxième manifestation qui peut être mortelle. Tout
patient ayant fait une réaction anaphylactique à un médicament ou
un aliment doit posséder une carte d’allergique ou un bracelet, ainsi
qu’une liste de médicaments ou d’aliments contre-indiqués. Par
ailleurs, il doit être informé de la conduite à tenir en cas de récidive,
notamment de la possibilité d’une auto-administration d’adrénaline
[78, 79]. Il bénéficiera de la prescription d’une trousse d’urgence
contenant de l’adrénaline en seringue prête à l’emploi ou d’adrénaline en ampoules destinée à une administration sublinguale, ainsi
qu’un corticoïde buvable. Quant à la trousse d’urgence de tout
médecin, elle doit comporter de l’adrénaline injectable (ampoules de
1 mg dans 1 ml), un corticoïde injectable et le matériel nécessaire à
la perfusion intraveineuse d’un soluté de remplissage vasculaire.
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