PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE Armelle Godener, Marianela Fornerino Association Francophone de Comptabilité | « Comptabilité Contrôle Audit » 2017/2 Tome 23 | pages 85 à 110 © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------https://www.cairn.info/revue-comptabilite-controle-audit-2017-2-page-85.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Association Francophone de Comptabilité. © Association Francophone de Comptabilité. Tous droits réservés pour tous pays. 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Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) ISSN 1262-2788 ISBN 9791093449104 DOI 10.3917/cca.232.0085 © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Participation du manager au contrôle de gestion et performance managériale, une nouvelle approche Participation in Management Control and Managerial Performance, a new approach Armelle GODENER* et Marianela FORNERINO* Résumé Abstract Au croisement du courant comportementaliste et du courant relationnel en contrôle de gestion, un modèle expliquant la Performance managériale par la Participation du manager au processus de contrôle de gestion a été développé et testé auprès de 157 managers. Il se nourrit de la transposition au contrôle de gestion des travaux du management de la connaissance. La Participation du manager comporte deux dimensions, la Contribution du manager au contrôle de gestion et l’Utilisation qu’il fait des informations qui émanent de ce processus. La Contribution du manager Combining behavioural and relational management control research streams, a model explaining managerial performance by manager participation in management control processes was developed and tested with a sample of 157 managers. This model has benefited from the research findings in knowledge management. Manager participation has two dimensions: 1) the manager’s contribution to management control, and 2) the use of the information emanating from the management accountant. The results indicate that the relevance of the information provided by the management accountant * Grenoble École de Management. Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) 85 © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE reçu en mai 2014 / accepté en juillet 2016 par Aude Deville Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE influence positivement sa Performance managériale à travers une double médiation de la Pertinence des informations que le contrôleur fournit au manager et de l’Utilisation que le manager fait de ces informations. Mots-clés : performance managériale, participation au contrôle de gestion, contribution du manager au contrôle de gestion, pertinence des informations, utilisation des informations. Correspondance : © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Armelle Godener Grenoble Ecole de Management 12 rue Pierre-Sémard 38000 Grenoble Cedex 1 [email protected] and the manager’s use of this information mediate the influence of manager’s contribution on managerial performance. Keywords: participation manager managerial in performance, management contribution to control, management control, information relevance, information use. Marianela Fornerino [email protected] Introduction Les travaux sur l’asymétrie de l’information et les matelas budgétaires (Merchant 1985 ; Dunk 1990 ; Fisher et al. 2002), comme des travaux relatifs aux échanges entre contrôleurs de gestion et managers (Oriot 2004 ; Bollecker et Niglis 2009) montrent que ces derniers sont tentés de ne pas partager avec leurs contrôleurs de gestion toutes les informations qu’ils détiennent. Et si leur intérêt était tout autre ? L’abondante littérature rattachée au courant comportementaliste du contrôle de gestion cherche depuis des décennies à comprendre dans quelle mesure la performance des managers est influencée par leur participation budgétaire (Kren 1997 ; Naro 1998). Malgré les efforts déployés, une méta-analyse récente met en évidence la non-significativité globale de ce lien (Bonache et al. 2012). Une raison de ces résultats décevants pourrait provenir du périmètre étroit de la variable participation retenu par ce courant. D’une part, celle-ci est limitée au seul processus budgétaire alors que le contrôle de gestion s’est considérablement élargi et comprend de nos jours le pilotage d’objectifs non financiers ou des études ponctuelles d’aide à la décision. D’autre part, elle est restreinte aux seules négociations annuelles entre le manager et son supérieur hiérarchique, tandis que les décisions se discutent régulièrement et que le service contrôle de gestion joue un rôle important dans les transferts d’informations. C’est ce que montre un courant plus récent de travaux académiques, que nous appellerons le courant relationnel, qui étudie les échanges entre contrôleurs de gestion et managers (Bourguignon 2001 ; Pierce et O’Dea 2003, Löning et al. 2003 ; Oriot 2004 ; Bollecker et Niglis 2009) : il conclut que ces Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) 86 © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) relations continues favorisent l’efficacité du processus en termes de collecte d’informations, d’adaptation aux besoins du manager et d’appropriation par ces derniers. Pour sortir de l’impasse du courant comportementaliste, nous faisons appel aux apports du courant relationnel. Notre recherche se situe donc au croisement de ces deux courants de recherche. Nous proposons d’étudier les échanges d’informations entre manager et contrôleur de gestion et leur impact sur la Performance du manager. Pour atteindre cet objectif, nous avons retenu le concept de Participation du manager au contrôle de gestion proposé par Godener et Fornerino (2005). Ce concept considère le contrôle de gestion comme un ensemble de sous-processus indissociables, dont le processus budgétaire n’est qu’un des composants. Il est défini comme le degré selon lequel un manager s’engage dans le processus global de contrôle de gestion, à la fois en transmettant au contrôleur de gestion les informations de qualité dont il dispose, et en utilisant les informations que ce dernier lui apporte à son tour, que ce soit pour ses actions quotidiennes ou pour ses décisions importantes. Pour développer notre modèle théorique, nous avons établi un parallèle entre le champ du management de la connaissance et celui du contrôle de gestion. Le management de la connaissance postule que l’individu a des connaissances qui doivent être mises à disposition de l’organisation dans son ensemble au travers d’un processus formalisé. Le but est de favoriser la diffusion du savoir, au service de la réalisation des objectifs de l’organisation (Ipe 2003). De façon similaire, le contrôle de gestion prévoit la centralisation d’informations en provenance des différents services de l’entreprise, pour – après traitement par le contrôleur de gestion – mettre à disposition de chaque manager les informations dont il a besoin. Ces deux processus ont ainsi pour point commun la génération d’un savoir collectif visant à favoriser la performance des différentes activités. Cela donne sens à la transposition au contrôle de gestion de résultats de la recherche en management de connaissance. Notre intérêt s’est focalisé sur les concepts centraux du management de la connaissance que sont la Contribution au savoir (knowledge contribution) et l’Utilisation des connaissances partagées (knowledge reuse) (Markus 2001 ; Majchrzak et al. 2004 ; Watson et Hewlett 2006). Ces deux concepts présentent des similarités fortes avec les deux composantes de la Participation du manager au contrôle de gestion (Godener et Fornerino 2005). Nous approfondissons l’étude de ces deux variables et explicitons le lien qui les unit. Le développement de notre modèle prend aussi appui sur des théories qui relèvent de la psychologie sociale, comme c’est le cas de nombreux modèles du courant comportementaliste du contrôle de gestion (Naro 1998). Notre apport académique consiste à enrichir les travaux en contrôle de gestion en intégrant deux approches complémentaires, jusque-là disjointes. Nous ouvrons une voie de recherche autour de la variable Participation au contrôle de gestion et de son lien avec la Performance managériale. Au-delà, la transposition au contrôle de gestion de résultats de la recherche en management de connaissance correspond à une proposition nouvelle, qui pourrait se révéler fructueuse en termes théorique et managérial. De plus, notre travail vise à fournir aux managers et contrôleurs de gestion une meilleure compréhension des déterminants de la performance managériale et de l’importance pour chacun d’entre eux de leurs échanges d’information. Pour présenter notre travail, nous proposons d’abord une revue de littérature qui nous amène à expliciter progressivement notre modèle (partie 1). Nous présentons alors l’étude empirique réalisée à partir d’une enquête auprès de 157 managers (partie 2). Les résultats sont ensuite discutés (partie 3) Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) 87 © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 88 et nous concluons sur les implications académiques et managériales de notre recherche ainsi que sur ses limites. Revue de littérature © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) L’identification de la dimension humaine et sociale du contrôle de gestion a suscité dès les années 1950 un important courant de recherche, le courant comportementaliste du contrôle de gestion1. Son objet d’étude est le manager, ses comportements et attitudes dans le cadre du processus budgétaire, et sa performance. L’enjeu est de comprendre les conditions selon lesquelles le processus budgétaire favorise la performance managériale, définie comme le degré selon lequel le manager et le service qu’il dirige atteignent leurs objectifs sur l’ensemble des dimensions attendues (Govindarajan et Gupta 1985). La Participation budgétaire est l’un des comportements les plus étudiés. Elle correspond au degré d’implication et d’influence du manager dans l’élaboration de son propre budget (Milani 1975 ; Nouri et Parker 1998) ou à la possibilité qu’a un manager de participer à l’élaboration de ses objectifs budgétaires (Kenis 1979 ; Besson et al. 2004). Les résultats des travaux empiriques sont contradictoires : certains concluent à un lien positif entre Participation budgétaire et Performance managériale, d’autres à un lien négatif et d’autres encore à l’absence de lien (Nouri et Parker 1998). Devant ce constat, les chercheurs se sont lancés dans l’étude de variables susceptibles d’intervenir dans la relation. Malgré tous ces efforts, une méta-analyse récente n’a pas pu mettre en évidence la significativité globale du lien attendu entre la Participation budgétaire et la Performance managériale (Bonache et al. 2012). Le problème pourrait provenir du concept Participation budgétaire lui-même. D’une part, la fixation des objectifs budgétaires ne provient pas uniquement d’une négociation avec le supérieur hiérarchique une fois par an. D’autre part, elle ne devrait pas être dissociée des réflexions et échanges sur les plans d’actions et leurs suivis (Besson et al. 2004). De plus, depuis l’émergence de ce courant de recherche dans les années 1950, le contrôle de gestion s’est notablement développé. Au contrôle budgétaire initial sont venus s’ajouter l’élaboration d’objectifs non financiers, le suivi de leurs réalisations au travers de tableaux de bord ou de Balanced scorecards, ou encore la réalisation d’études ponctuelles. En conséquence, nous plaidons pour que les recherches considèrent le système de contrôle de gestion comme un ensemble de sous-processus indissociables, à l’instar de ce que promeuvent Malmi et Brown (2008). Les activités liées au contrôle de gestion sont interdépendantes (Widener 2007 ; Fullerton et al. 2013) et l’étude d’une composante – par exemple, l’élaboration du budget – indépendamment du reste du processus de contrôle de gestion risque de conduire à des conclusions peu pertinentes. Dans ce sens, nous avons cherché à expliquer la Performance managériale par le comportement participatif du manager au contrôle de gestion, considéré dans la globalité de ses composantes et non restreint au seul contrôle budgétaire. La variable Participation du manager au contrôle de gestion est définie ainsi comme le degré selon lequel celui-ci s’engage dans ce processus, à deux niveaux : 1) en transmettant au contrôleur de gestion les informations de qualité dont il dispose, relatives à ses activités passées ou à venir, et 2) en se servant des informations qui cette fois lui proviennent du contrôle de gestion, pour ses actions quotidiennes et pour prendre des décisions importantes (Godener et Fornerino 2005). Cette définition Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) 1. Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 89 met en évidence deux formes de participation que les travaux du management de la connaissance nous suggèrent de distinguer en deux concepts distincts, car ils correspondent à des flux d’information de sens contraire et obéissent à des motivations différentes (Markus 2001 ; Majchrzak et al. 2004 ; Watson et Hewlett 2006). La Contribution à la connaissance est un comportement altruiste puisqu’il s’agit de mettre à disposition des autres des informations susceptibles de leur être utiles. Au contraire, l’Utilisation d’informations présentes dans le système est un comportement intéressé. La transposition de cette observation au contrôle de gestion nous amène à dissocier les deux composantes de la Participation au contrôle de gestion. Les interactions entre le contrôleur de gestion et le manager © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Pour réaliser un travail de qualité, un contrôleur de gestion a besoin de travailler à partir d’informations provenant des différents services de l’entreprise. Certaines sont factuelles et disponibles dans les bases informatiques de l’entreprise. Mais d’autres informations ne peuvent être obtenues qu’auprès des acteurs directement concernés par les activités considérées (Löning et al. 2003, p. 248 ; Giraud et al. 2011, p. 276). C’est le cas par exemple lorsqu’un écart au budget est identifié : son explication ne peut souvent émerger que du terrain (Byrne et Pierce 2007 ; Berland et De Rongé 2010, p. 320 ; Giraud et al. 2011, p. 243). De même, les contrôleurs de gestion ont généralement besoin de faire parler chaque manager de l’entreprise pour élaborer une proposition budgétaire qui tienne compte de sa perception de l’environnement et de ses projets. Beaucoup de ces informations relèvent de ce que les auteurs en management de la connaissance appellent précisément la connaissance, à savoir un mélange d’expérience, de valeurs, d’informations contextuelles, d’idées d’expert qui procurent un cadre pour évaluer et intégrer de nouvelles expériences et informations (Davenport et Prusak 1998). Or, l’obtention d’une bonne qualité d’information de la part du manager n’est pas évidente (Oriot 2004 ; Godener et Fornerino 2005 ; Bollecker et Niglis 2009). La littérature souligne que de nombreux managers se montrent réticents à interagir, par exemple du fait de l’image négative associée au contrôle de gestion (Siegel 2000 ; Bollecker 2001 ; Godener et Fornerino 2005 ; Bollecker et Niglis 2009). L’interaction peut aussi être perçue comme conduisant à une réduction de l’autonomie (Bollecker et Niglis 2009), ou à des interprétations risquant d’être défavorables à l’équipe. Un autre problème mis en évidence provient de l’asymétrie de l’information : la participation du responsable d’activité à l’élaboration de son propre budget peut lui permettre de se constituer des matelas budgétaires (Merchant 1985 ; Dunk 1990 ; Fisher et al. 2002 ; Besson et al. 2004). L’existence de tels matelas dans un budget ne présente pas que des inconvénients (Davila et Wouters 2005), mais ils constituent un biais de l’information communiquée. Un des rôles du contrôleur de gestion, conscient de ces risques d’informations déformées ou appauvries, est de favoriser leur qualité en rencontrant leurs détenteurs pour des entretiens approfondis. Les managers sont alors amenés à commenter leur activité et leur vision de l’avenir et ne peuvent pas se contenter de la réponse superficielle qu’ils pourraient être tentés de donner de prime abord. L’interaction peut aussi permettre au manager de préciser ses idées, de verbaliser ses perceptions et de mûrir ses raisonnements. De plus, l’échange peut être l’occasion pour que le contrôleur de gestion apporte au manager des éclaircissements dont il a besoin pour avancer dans sa réflexion. Le contrôleur Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) 1.1. Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 90 © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) 1.2. La qualité des informations et rapports mis à disposition par le contrôleur de gestion Pour mettre en perspective la qualité du travail du contrôleur de gestion, nous ferons appel à nouveau au management de la connaissance. Cette littérature montre que la qualité de l’information mise à disposition de tous dépend de l’existence d’un processus de collecte, stockage, diffusion, mais aussi des opérations de vérification, consolidation, mise en forme, etc. opérées par un manager responsable du système (Goh 2002 ; Nesheim et Gressgård 2014). Dans le domaine qui nous intéresse, ces opérations sont du ressort du contrôleur de gestion. Il procède aux opérations de collecte et fiabilisation des informations de gestion, aux contrôles de cohérence, recoupements, etc. Il s’assure de la collecte des informations requises et de leur qualité, en participant à l’organisation du système d’informations de gestion, en interagissant avec les différents acteurs de l’entreprise qui détiennent des données spécifiques, en confrontant les données collectées d’origine différentes, etc. Il travaille ainsi à la production d’informations et de rapports qui intègrent au mieux les connaissances disponibles dans l’entreprise. Son travail réside aussi dans l’adaptation de ces informations aux besoins de chaque manager. Nous définissons la Pertinence des informations émises par le contrôleur de gestion comme la perception qu’a le manager du degré d’adéquation à ses besoins des informations et analyses produites et transmises par le contrôleur de gestion. La Contribution du manager enrichit la base d’informations à partir de laquelle le contrôleur de gestion produit l’ensemble des informations et rapports attendus. La Pertinence de ceux-ci en sera donc améliorée. Mais parce qu’elle s’accompagne d’interactions avec le contrôleur, la Contribution permet aussi à ce dernier de mieux comprendre les interrogations de son interlocuteur, la nature des informations supplémentaires dont il a besoin, les décisions qu’il s’apprête à prendre (Byrne et Pierce 2007). En conséquence, elle favorise la capacité du contrôleur de gestion à s’adapter à ses besoins, à lui fournir une information pertinente. L’enjeu est important. La littérature a mis en évidence que de nombreux contrôleurs de gestion méconnaissent les besoins en information des managers pour lesquels ils travaillent (Johnson et Kaplan 1987 ; Dupuy 1999 ; Pierce et O’Dea 2003). Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) de gestion obtient une information meilleure grâce, entre autres, à ses questionnements, reformulations, recoupements avec les apports d’autres managers ou des informations du passé, et grâce à l’enrichissement progressif des idées du manager (Byrne et Pierce 2007). À ce stade, nous sommes à même de définir la Contribution du manager au contrôle de gestion comme le degré selon lequel le manager partage avec le contrôleur de gestion, sans les déformer, l’essentiel des informations et connaissances dont il dispose, ainsi que ses réflexions, analyses et interprétations. Ces informations et connaissances partagées sont pour certaines issues de son travail terrain et managérial, tandis que d’autres émergent ou prennent forme au travers de l’interaction avec le contrôleur de gestion. Il est à noter que Godener et Fornerino (2005) ont nommé « Implication dans la transmission et l’interprétation d’informations » cette première dimension de la variable Participation au contrôle de gestion. Nous avons remplacé ce long intitulé par celui de Contribution, retenu par le management de la connaissance, car en un seul mot il évoque bien la richesse du concept proposé par Godener et Fornerino (2005). Il met en valeur l’enrichissement collectif obtenu grâce aux échanges et à la somme des contributions des différents managers. Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 91 La théorie de l’échange social (social exchange theory, Blau 1964), qui trouve ses fondements dans la théorie du don (Mauss 1950), peut être mobilisée pour expliquer les échanges d’informations entre manager et contrôleur de gestion. Elle postule que le don appelle un contre-don, et apporte un argument additionnel de l’ordre de l’engagement. Appliquée aux relations entre le manager et le contrôleur de gestion, elle suggère que la Contribution du manager favorise l’obligation morale du contrôleur de gestion d’apporter à son tour l’information attendue. À l’inverse, lorsque les managers érigent une barrière relationnelle par rapport à leurs contrôleurs de gestion, ces derniers sont moins motivés pour maintenir l’échange et répondre aux besoins (Bollecker et Niglis 2009). Nous formulons en conséquence l’hypothèse suivante : H1 : Plus la Contribution du manager au contrôle de gestion est importante, plus la Pertinence des informations émises par le contrôleur de gestion est élevée. Des leviers de l’Utilisation par le manager des informations émises par le contrôleur de gestion © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) L’Utilisation par le manager des informations émises par le contrôleur de gestion constitue la deuxième dimension de la variable Participation du manager au contrôle de gestion. Un système de contrôle de gestion ne peut porter ses fruits par la seule mise à disposition d’outils, d’informations ou d’analyses : ceux-ci ne peuvent jouer leur rôle qu’en fonction de leur degré d’utilisation par le manager lorsqu’il prend ses décisions et manage ses équipes. L’Utilisation par le manager des informations émises par le service contrôle de gestion est donc un concept essentiel qui touche à la raison d’être du contrôle de gestion. En nous appuyant sur la définition du concept re-use du management de la connaissance (Alavi et Leidner 1999), nous le définissons comme le degré de prise en compte par le manager, lorsqu’il prend ses décisions, de l’information générée par le processus contrôle de gestion. Ce degré d’utilisation est variable. Il a ainsi été démontré, dans des organisations publiques (Lee et Fisher 2007) et des entreprises privées (Wiersma 2009), que certains managers utilisent plus que d’autres les informations financières et non financières disponibles susceptibles de les aider à prendre des décisions. C’est que les décideurs peuvent agir sur d’autres bases que celles proposées par le contrôle de gestion du fait de leurs habitudes, convictions, envies, priorités. L’importance (ou non) portée par leurs supérieurs hiérarchiques aux informations du contrôle de gestion impacte également l’utilisation qu’ils en ont (Newman et Warren 1977 ; Hachmanian et Hussenot 1984 ; Schein 1985 ; Jarvenpaa 2007). Les travaux relevant du management de la connaissance indiquent que l’intensité du re-use est expliquée par la valeur perçue de la connaissance, sa facilité d’accès et la confiance que l’utilisateur accorde au processus (Watson et Hewett 2006). Or, la variable Pertinence de l’information émise par le contrôleur de gestion reflète la valeur que le manager accorde à cette information par rapport à ses besoins de décideur, tant sur le fond que sur sa facilité d’utilisation. La transposition au contrôle de gestion du management de la connaissance suggère ainsi que plus le manager estime que la Pertinence de l’information émise par le contrôleur de gestion est grande, plus il s’en sert. Deux théories relevant de la psychologie sociale permettent de conforter encore cette relation de cause à effet. Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) 1.3. 92 © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) En premier lieu, la théorie des attentes (expectancy theory, Vroom 1964) postule qu’un individu est motivé pour une action lorsqu’il estime qu’elle lui permettra d’obtenir un résultat qui l’intéresse, une récompense qu’il apprécie. La décision d’agir dépend ainsi notamment de la croyance que ses efforts seront couronnés de succès, et de la croyance qu’il obtiendra une récompense s’il réussit. L’atteinte de ses objectifs peut être envisagée comme la récompense attendue par le manager lorsqu’il utilise les informations du contrôle de gestion. Selon la théorie des attentes, un manager serait alors d’autant plus motivé pour utiliser les informations émises par le contrôleur de gestion qu’il les perçoit comme pertinentes, car il estime alors qu’elles sont à même de l’aider à prendre une bonne décision, et à atteindre ses objectifs. En deuxième lieu, nous mobilisons l’approche coût-bénéfice (Beach et Mitchell 1978 ; Payne 1982), dont le raisonnement est très proche de celui de la théorie des attentes. Selon cette théorie, le manager recherche un bon compromis entre son désir de prendre une bonne décision et l’effort requis pour la préparer. Plus le contrôleur de gestion lui donne une information adaptée à ses besoins – déjà analysée, mise en forme, sélectionnée en fonction de ses questionnements et de son environnement – moins il aura à faire d’efforts pour s’en servir et plus il aura tendance à l’utiliser pour prendre sa décision. Nous posons en conséquence l’hypothèse suivante : H2 : Plus la Pertinence des informations émises par le contrôleur de gestion est forte, plus l’Utilisation de ces informations par le manager est importante. Par définition, un médiateur est une variable qui permet de « transmettre » l’impact d’une variable A sur une variable B. Dès lors que la variable A impacte la variable médiatrice M, et que la variable M impacte la variable B, les variables A et B sont en relation au travers de la variable M, médiatrice de la relation (Baron et Kenny 1986). Ainsi, la combinaison de nos hypothèses H1 (la Contribution impacte la Pertinence) et H2 (la Pertinence impacte l’Utilisation) montre que la Contribution est un levier de l’Utilisation au travers de la variable médiatrice que constitue la Pertinence des informations. Cette hypothèse de médiation, qui est une hypothèse de synthèse, montre le mécanisme par lequel la Contribution impacte l’Utilisation. Elle intègre le rôle du manager à travers sa Contribution, le rôle du contrôleur de gestion d’une part dans les interactions avec le manager et d’autre part dans l’élaboration de rapports et analyses pertinents, puis à nouveau le rôle du manager qui va d’autant plus utiliser ces rapports qu’il les trouvera adaptés à ses besoins. Nous la formulons de la façon suivante : H3 : La Pertinence des informations émises par le contrôleur de gestion est une variable médiatrice de l’impact de la Contribution du manager sur l’Utilisation qu’il fait de ces informations. 1.4. Le contrôle de gestion comme levier de la Performance managériale L’Utilisation de l’information du contrôle de gestion peut avoir plus d’impact sur la Performance que le design du système de contrôle (Ferreira et Otley 2009). C’est que l’Utilisation de l’information donne tout son sens au processus de contrôle de gestion lui-même, dont la raison d’être est Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 93 l’accompagnement de la réalisation des objectifs de l’entreprise (Anthony 1988 ; Merchant et Van der Stede 2007, p. 5). Si le contrôle de gestion remplit sa mission, l’Utilisation des informations du contrôle de gestion devrait donc favoriser la Performance managériale. Cette présomption est confortée par la littérature en management de la connaissance où le lien entre l’Utilisation de la connaissance partagée (knowledge re-use) et la Performance a été mis en évidence notamment par McIver et al. (2013). Elle reste à être mise en évidence en contrôle de gestion sous la forme suivante : © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) L’enchaînement de l’hypothèse de médiation H3, qui modélise le transfert de connaissances entre manager et contrôleur de gestion, et de l’hypothèse H4 donne lieu à une hypothèse de double médiation. Cette hypothèse postule un impact de la Contribution du manager sur sa Performance, véhiculée, dans l’ordre et en série, par deux variables médiatrices : la Pertinence de l’information et son Utilisation par le manager. Elle correspond à la transposition au contrôle de gestion des travaux du management de la connaissance qui postulent l’impact du processus de transfert de la connaissance, au travers de la Contribution et de l’Utilisation, sur la Performance (Kogut et Zander 1992 ; Nonaka 1994 ; Argote et Ingram 2000 ; Goh 2002). Il s’agit d’une hypothèse de synthèse qui donne sens aux relations entre le manager et le contrôleur de gestion. Elle explique comment ce mécanisme relationnel impacte la Performance managériale. H5 : La Pertinence de l’information fournie par le contrôleur de gestion et l’Utilisation par le manager de ces informations sont deux variables médiatrices de l’impact de la Contribution du manager sur sa Performance managériale. 2. Méthodologie À partir des hypothèses formulées précédemment, nous présentons dans la figure 1 le modèle ainsi proposé. Figure 1 Les hypothèses et le modèle proposé H5 : Médiation double Contribution du manager au contrôle de gestion H1 Pertinence des informations émises par le contrôleur de gestion H2 Utilisation des informations émises par le contrôleur de gestion H4 Performance managériale H3 : Médiation simple Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) H4 : Plus le degré d’Utilisation par le manager des informations émises par le contrôle de gestion est important, plus la Performance managériale est forte. Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 94 Pour tester nos hypothèses de recherche, nous avons conduit une étude quantitative auprès d’un échantillon de managers travaillant pour des entreprises présentes sur le territoire français. Nous présentons d’abord la méthode de collecte des données (§2.1) puis la description des mesures utilisées pour les variables du modèle testé (§2.2) ainsi que les variables de contrôle (§2.3). La validation des échelles (§2.4) et la méthode de test d’hypothèses sont ensuite explicitées (§2.5). Collecte des données © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) L’échantillon de cette étude est constitué de managers travaillant en relation avec des contrôleurs de gestion dans des entreprises installées en France. Puisque l’étude s’intéresse aux managers qui sont en relation directe avec des contrôleurs de gestion, nous avons écarté volontairement les entreprises de petite taille, inférieures à 20 personnes. Cinq cents entreprises ont été contactées (parmi le catalogue d’entreprises partenaires de l’institution d’appartenance des chercheurs) à travers un étudiant en stage dans chacune d’entre elles. L’étudiant devait soumettre le questionnaire à un manager travaillant en lien avec le contrôle de gestion. Il devait ensuite récupérer le questionnaire rempli sous format papier dans une enveloppe cachetée et l’envoyer directement aux chercheurs. Le contact personnel avec l’étudiant, dont l’action de recueil était stimulée par une récompense d’un point de plus sur la moyenne de l’évaluation de son stage, permettait d’impliquer les managers dans la collecte. À notre demande, les répondants donnaient (séparément pour garantir la confidentialité) leurs numéros de téléphone. Cela a permis de contacter une sélection aléatoire de participants à l’enquête afin de nous assurer qu’ils avaient rempli eux-mêmes ce questionnaire. Dans la lettre d’accompagnement, pour favoriser un taux de réponse satisfaisant et des réponses de qualité, les chercheurs s’engageaient à maintenir la confidentialité des réponses et à informer le répondant sur les résultats globaux de l’étude. Ce mode de distribution par l’intermédiaire d’un étudiant permet aussi de limiter l’éventuelle sur-représentativité de managers particulièrement intéressés par le contrôle de gestion qui pourrait découler d’une distribution directe. Au final, 182 questionnaires ont été recueillis (36,4 %). Une double saisie a permis de constituer notre base de données avec un minimum d’erreurs. Après purification de la base de données initiale, 157 questionnaires ont finalement été conservés (31,4 %) ce qui correspond au nombre de questionnaires reçus intégralement complétés. La structure de l’échantillon en termes de caractéristiques de l’entreprise, du système du contrôle de gestion et du manager-répondant est présentée dans le tableau 1. Il ne nous est pas possible d’établir sa représentativité sur le critère des effectifs en le comparant aux chiffres de l’INSEE : la population mère concernée par notre recherche ne correspond qu’aux entreprises qui ont mis en place un contrôle de gestion, ce qui limite la proportion de petites et moyennes entreprises. Pour les critères liés au système de contrôle de gestion et au profil des managers, cet organisme officiel ne propose pas de données. En revanche, la validité externe des résultats est garantie par la représentativité des neuf secteurs d’activité. Après avoir vérifié les conditions d’applicabilité, un test de χ² d’homogénéité a mis en évidence que la distribution de l’échantillon est significativement égale à celle de la population mère définie par l’INSEE (χ²≈ 15,51 ; ddl = 8 ; p ≈ 0,05). Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) 2.1. Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 95 Tableau 1 Structure de l’échantillon de l’étude Industrie Agro-Alimentaire Industrie Hors Agro-Alimentaire Construction Effectif de l’entreprise © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Nationalité/culture (votre entreprise est…) Direction de rattachement du contrôle de gestion Situation géographique du contrôle de gestion Activité du répondant 32,03 % 5,41 % Commerce 21,35 % Transports 8,42 % Activités immobilières 3,01 % Services aux entreprises 16,09 % Services aux particuliers 4,51 % Éducation, santé, action sociale 5,41 % Entre 20 et 499 27,4 % Entre 500 et 10 000 23,0 % Entre 10 000 et 100 000 34,1 % Plus de 100 000 15,5 % Française, avec des implantations uniquement en France 23,2 % Française, avec des implantations à l’étranger 44,8 % Internationale 32,0 % Direction administrative et financière 51,0 % Direction générale 27,4 % Direction de l’entité à laquelle le répondant travaille 21,6 % Sur le même site que l’entité pour laquelle le répondant travaille 72,6 % À distance 27,4 % Commercial 33,0 % Marketing 10,2 % Ressources Humaines Achats Gestion de projets Genre du répondant 3,76 % 7,1 % 3,8 % 21,2 % Logistique 5,8 % Production 5,8 % R&D 2,6 % Autres 10,3 % Homme 70,1 % Femme 29,9 % Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Secteur d’activité Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 2.2. Les mesures © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Notre travail repose sur la mesure de la perception qu’ont les managers des variables étudiées. Pour les variables Contribution du manager, Pertinence et Utilisation des informations, les acteurs eux-mêmes sont clairement les mieux placés pour savoir ce qu’ils pensent et ce qu’ils font. Pour la Performance managériale, il s’agit d’une auto-évaluation, ce qui est une pratique courante (Nouri et Parker 1998 ; Leach-Lopez et al. 2007). Pour l’ensemble des items constituant les échelles de mesure, les répondants étaient invités à se positionner sur une échelle de Likert en 5 points allant de « pas du tout d’accord » à « tout à fait d’accord ». Ce choix se situe à la limite inférieure de l’intervalle préconisé (entre cinq et neuf ) par Cox (1980) qui permet de restituer un maximum d’information sans pour autant induire des biais de réponses liés aux motivations et aux capacités cognitives des répondants. Puisque l’enquête a fait partie d’une étude plus large, le nombre minimum de cinq échelons a été choisi afin de diminuer la fatigue du répondant (Jolibert et Jourdan 2006). Pour mesurer la contribution du manager au contrôle de gestion, nous avons utilisé l’échelle de mesure mise au point par Godener et Fornerino (2005) pour appréhender la dimension Transmission et interprétation d’informations de la variable Participation du manager au contrôle de gestion. Cette échelle a été conçue pour mesurer les perceptions des contrôleurs de gestion. Ses items ont été adaptés dans leur formulation pour tenir compte du fait que nos répondants sont des managers (Annexe 1). Pour mesurer la Pertinence des informations émises par le contrôleur de gestion, nous avons proposé une échelle à deux items (Annexe 2). Puisqu’il s’agit d’une échelle nouvelle, elle a été soumise à un pré-test auprès de dix managers. Quelques modifications de forme ont été apportées à l’issue de ce pré-test. Concernant l’Utilisation des informations du contrôle de gestion, nous nous sommes à nouveau référées à l’échelle de Godener et Fornerino (2005) sur les dimensions « Prise en considération par les managers des informations reçues par le processus de contrôle de gestion » et « Intégration des informations du contrôle de gestion dans la vie quotidienne ». De même, la formulation des items a été adaptée pour nous permettre de nous adresser à des managers et non à des contrôleurs de gestion (Annexe 3). La Performance managériale rend compte de la réalisation des objectifs du manager concerné. Nous avons utilisé l’échelle de Govindarajan et Gupta (1985), déjà utilisée par exemple par Nouri et Parker (1998). Cette mesure de la Performance managériale (Annexe 4) est formative plutôt que réflective puisque chacune des dimensions (ou des items) ne constitue pas un reflet de cette performance, mais participe au contraire à former celle-ci. 2.3. Les variables de contrôle Afin de diminuer les biais liés aux variables omises dans l’estimation des paramètres du modèle, cette étude contrôle l’effet de certaines caractéristiques générales de l’entreprise d’appartenance du manager, ainsi que quelques caractéristiques du service du contrôle de gestion. En premier lieu, concernant les caractéristiques de l’entreprise, le secteur d’activité et sa nationalité ont été retenus comme variables de contrôle. Le choix de la première se justifie par les différences de mise en œuvre des composantes du contrôle de gestion selon les secteurs d’activité (Alcouffe et al. 2013). De plus, il a été montré Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) 96 Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 97 que la culture nationale de l’entreprise influence les comportements des managers dans le cadre du contrôle de gestion (Lau et Buckland 2000 ; Douglas et Wier 2005). En second lieu, concernant les caractéristiques du service du contrôle de gestion, deux variables ont été retenues : la direction de rattachement hiérarchique et la situation géographique par rapport au manager. L’une et l’autre sont susceptibles d’impacter la qualité des relations entre managers et contrôleurs par la proximité hiérarchique (Bouin et Simon 2004 ; Giraud et al. 2011, p. 282) ou géographique. Les niveaux de mesures de toutes ces variables ont été décrits dans le tableau 1. Pour des contraintes statistiques nécessaires aux méthodes de tests d’hypothèses, les variables de contrôle multinomiales ont été opérationnalisées par des variables binaires (muettes) (Tableau 2). Concernant le secteur d’activité, deux groupes ont été créés à partir de la liste des secteurs d’activités de l’INSEE : industrie (ou secteur secondaire) et services (secteur tertiaire). Concernant le rattachement hiérarchique qui comporte trois niveaux, deux variables binaires ont dû être créées. © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Variable de contrôle Opérationnalisation binaire Secteur d’activité de l’entreprise Industrie (secteur secondaire) : 1 Services (secteur tertiaire) : 0 Nationalité (culture) de l’entreprise Française : 1 Internationale : 0 Département Contrôle de gestion rattaché à la Direction Administrative et Financière Oui : 1 Non : 0 Département Contrôle de gestion rattaché à la Direction Générale Oui : 1 Non : 0 Situation géographique du département Contrôle de gestion. Au même endroit que l’entité pour laquelle travaille le répondant : 1 À distance : 0 2.4. La validation des échelles La méthode traditionnelle d’épuration et de validation des échelles de mesures réflectives (Gerbing et Anderson 1988) a été appliquée à la Contribution du manager au contrôle de gestion ainsi qu’à la Pertinence et à l’Utilisation des informations. En premier lieu, une analyse factorielle en composantes principales (ACP sous SPSS) a été réalisée (Tableau 3). L’unidimensionnalité a été vérifiée grâce au critère de Kaiser (1960) et au scree test de Cattell et Vogelmann (1977). En particulier, dans le cas de l’échelle d’Utilisation des informations émises par le contrôleur de gestion, il est important de signaler que Godener et Fornerino (2005) avaient trouvé deux facteurs correspondant à l’utilisation des informations : 1) dans la gestion quotidienne et 2) dans les principales décisions. Ces deux dimensions correspondent à la perception des contrôleurs. Les managers ne dissocient pas les deux aspects. En deuxième lieu, les échelles ont été soumises à un contrôle de leur fiabilité par l’alpha (α) de Cronbach (1951) et par le rhô (ρ) de Joreskög (1971). Une phase confirmatoire (avec le logiciel Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Tableau 2 Variables de contrôle Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 98 AMOS sous SPSS) a permis de vérifier la structure de l’échelle d’Utilisation des informations émises par le contrôle de gestion, la seule possédant plus de 3 items. Les indices d’ajustement sont satisfaisants au regard des normes habituellement recommandées (Hu et Bentler 1998). Les poids estimés ainsi sont tous significatifs au seuil de 5 % et supérieurs à 0,739 (Tableau 3). ACP Contribution (3 items) Pertinence (2 items) Utilisation (5 items) Variance Expliquée 82,1 % 82,9 % 71,5 % Communautés > 0,795 > 0,829 > 0,642 Poids standards > 0,892 > 0,910 > 0,801 Poids Standards > 0,792 > 0,910 > 0,739 © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) p-value AFC Fiabilité Validité convergente < 0,001 χ2/df 1,742 RMSEA 0,066 SRMR 0,032 α 0,883 0,785 0,899 ρ 0,932 0,908 0,922 ρvc 0,821 0,832 0,704 Notes : L’analyse factorielle confirmatoire ne pouvant pas être faite avec moins de 4 items, nous avons reporté la valeur minimum des poids obtenus dans le modèle causal complet. Le contrôle de la validité convergente des trois variables est fait à partir du ρvc qui, dans les trois cas, est supérieur au seuil de 0,5 (Tableau 3) (Bagozzi et Yi 1991). De même, le contrôle de la validité discriminante des différentes variables est fait selon la procédure de Fornell et Larcker (1981) qui consiste à vérifier que la variance extraite pour chaque variable est bien supérieure au carré des corrélations entre les variables deux à deux (Tableau 4). À la différence des trois premières variables, la mesure de la Performance managériale est une mesure formative et non pas réflective : ses items correspondent aux différentes caractéristiques définissant le construit et ne partagent pas nécessairement un thème commun entre eux (Jarvis et al. 2003). De ce fait, la méthode traditionnelle d’épuration et validation des échelles, qui cherche, en particulier, à trouver une variance commune partagée par les différents items (Gerbing et Anderson 1988) n’est pas appropriée. Nous avons ainsi suivi la démarche de construction d’index proposée par Diamantopoulos et Winklhofer (2001) pour calculer l’index de performance. La condition de nonmulticolinéarité des indicateurs est vérifiée (le VIF maximum est égal à 1,765 et est donc inférieur Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Tableau 3 Analyse en composantes principales, fiabilité et validité convergente des échelles de mesure Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 99 à 10). L’index formatif est finalement calculé par la moyenne des scores des huit items de la performance. Le tableau 4 montre les paramètres de statistiques descriptives de l’ensemble des variables du modèle. Tableau 4 Moyennes, écarts-types, variances expliquées et corrélations Matrice de Corrélations Écart type Min Max VE CONTRIBUTION (1) 3,487 0,920 1,00 5,00 0,821 1 0,090 0,319 0,335 PERTINENCE (2) 3,624 0,777 1,00 5,00 0,829 0,329** 1 0,123 0,013 UTILISATION (3) 3,543 0,770 1,00 5,00 0,715 0,536*** 0,353 ** 1 0,291 PERFORMANCE (4) 5,543 0,623 4,00 7,60 N.D. 0,530 *** 0,103 n.s. 0,536 *** 1 (1) (2) (3) (4) Notes : VE : Variance expliquée. R : coefficient de corrélation (partie inférieure de la matrice) et R² (partie supérieure de la matrice). *** : significatif au seuil de 0,001 ; ** : significatif au seuil de 0,01 ; n.s. : non significatif. Avant d’examiner le modèle de mesure, nous avons procédé à une dernière vérification liée au fait que selon notre design de recherche, toutes les variables sont mesurées à partir des perceptions du même répondant (Podsakoff et Organ 1986). L’objectif est de nous assurer de l’absence d’un biais de variance commune dans les données que nous avons collectées. Nous avons procédé selon la méthode proposée par Williams et al. (1989). Suivant cette méthode, nous avons comparé les ajustements de deux analyses factorielles : la première analyse factorielle confirmatoire inclut les quatre construits de notre modèle ; la seconde analyse inclut les quatre construits du modèle auxquels est ajouté un cinquième facteur, le facteur commun lié à tous les items mesurés. Les résultats montrent que l’ajout de ce facteur commun n’améliore pas l’ajustement (Δχ2 = 12,14, Δddl = 10, p > 0,05). Nous en concluons qu’il n’existe pas un facteur commun qui partage la variance entre les construits, et donc qu’il n’existe pas de biais dû au fait que les variables ont été évaluées par le même répondant. 2.5. Méthode de test des hypothèses Un des avantages de la méthode d’équations structurelles est qu’elle permet de tester les différentes hypothèses simultanément parce qu’elle fournit une fonction intégrative. Cette méthode présente par ailleurs une très grande sensibilité à la taille de l’échantillon (Bagozzi et Yi 2012). L’échantillon de cette étude étant relativement de petite taille (n = 157), il est impossible d’inclure simultanément les variables du modèle théorique et toutes les variables de contrôle proposées. En conséquence, une série d’ajustements a été réalisée. L’ajustement du modèle théorique sans variables de contrôle a été suivi Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Moyenne Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 100 © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Tableau 5 Comparaison des ajustements des différents modèles Variable de contrôle χ² Ddl χ²/ddl RMSEA SRMR ∆χ² ∆ddl Sig 1 Aucune 97,431 42 2,320 0,068 0,074 - - - 2 RH et SG 139,141 60 2,319 0,065 0,072 79,431 18 < 0,00 N° Notes : Le modèle 2 est comparé avec le modèle 1. RH : Rattachement Hiérarchique ; SG : Situation géographique du contrôle de gestion. Le test de l’effet médiateur a été mis en œuvre suivant les recommandations de Shrout et Bolger (2002), MacKinnon et al. (2007) et Cheung et Lau (2008). Une procédure de ré-échantillonnage BCa avec le logiciel AMOS sous SPSS (bias-corrected and accelerated bootstrap) avec 1 000 échantillons a permis de calculer des intervalles de confiance à 95 % pour le paramètre indicateur de la double médiation. En même temps, cette procédure de ré-échantillonnage est conseillée quand il s’agit d’un échantillon de taille relativement petite pour contrôler l’hypothèse de multi-normalité des mesures (Bollen et Stine 1992). 3. Résultats La figure 2 montre les résultats de l’ajustement du modèle théorique aux données en incluant les deux variables de contrôle impactant significativement les variables dépendantes. Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) par des ajustements prenant en compte, à chaque fois, une seule variable de contrôle parmi la liste du tableau 2, afin de détecter celles qui influencent significativement les variables dépendantes. À la fin de ces ajustements, deux variables de contrôle ont été identifiées comme ayant un impact significatif : 1) l’impact du Rattachement hiérarchique à la Direction Administrative et Financière sur la Performance managériale et 2) l’impact de la Situation géographique du contrôle de gestion sur l’Utilisation des informations. Enfin, un dernier ajustement a été réalisé en incluant simultanément ces deux variables de contrôle. Tous ces ajustements par la méthode d’équations structurelles ont été réalisés en utilisant le logiciel AMOS sous SPSS, avec recours à la fonction du maximum de vraisemblance (MV). Celle-ci est mieux adaptée aux échantillons de petite taille (Hu et Bentler 1998). Le tableau 5 montre les ajustements du modèle sans variables de contrôle et celui incluant les deux variables de contrôle à effet significatif. Selon la comparaison des χ², il existe ainsi une différence significative entre les deux ajustements avec une légère amélioration des indices d’ajustement en présence des variables de contrôle. Ce dernier ajustement a donc été retenu. Par ailleurs, il est important de signaler que tous les ajustements réalisés, y compris les intermédiaires, se sont révélés satisfaisants au regard des normes habituellement recommandées par Hu et Bentler (1998). Ces différents ajustements permettent aussi d’accroitre la crédibilité des résultats obtenus. Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 101 Figure 2 Résultats de l’ajustement du modèle et test des hypothèses Médiation double : Effet indirect : 0,108 ; I.C. à 95 % [0,032 ; 0,371] R² = 0,253 R² = 0,218 Contribution du manager au contrôle de gestion 0,467** (0,057) Pertinence des informations émises par le contrôle de gestion 0,496** (0,131) Utilisation des informations émises par le contrôle de gestion -0,140* S.G. R² = 0,236 0,466** (0,097) Performance managériale -0,117* R.H. © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) RMSEA = 0,065 ; SRMR = 0,072 ; ²/ddl = 2,319 ; IFI = 0,952 ; TLI = 0,945 Notes: ** : significatif au seuil de 0,001 * : significatif au seuil de 0,05 S.G. : situation géographique du contrôle de gestion R.H. : rattachement hiérarchique du contrôle de gestion Les erreurs standard associées aux estimations sont indiquées entre parenthèses La Contribution du manager au processus de contrôle de gestion impacte positivement la Pertinence des informations émises par le contrôleur de gestion (β = 0,467, p < 0,01) validant ainsi l’hypothèse H1. La Pertinence des informations impacte positivement l’Utilisation par le manager des informations émises par le contrôleur de gestion (β = 0,496, p < 0,01) validant ainsi l’hypothèse H2. L’effet indirect de la Contribution des managers au processus de contrôle de gestion sur l’Utilisation des informations au travers de la Pertinence des informations émises est significatif (βindirect = 0,284) au seuil de 1 %, ce qui valide l’hypothèse H3. L’Utilisation des informations du contrôle de gestion par les managers impacte positivement leur Performance managériale (β = 0,466, p < 0,01), conformément à l’hypothèse H4. Enfin, l’effet indirect de la Contribution du manager au contrôle de gestion sur la Performance managériale à travers les deux variables médiatrices, la Pertinence des informations émises par le contrôleur de gestion et l’Utilisation de ces informations par les managers est significatif (βindirect = 0,108) au seuil de 5 %, validant ainsi notre hypothèse H5 de médiation double. Cette hypothèse englobe les autres et apparaît la plus importante car elle explicite le mécanisme de l’impact de la Participation, en distinguant le rôle de la Contribution et celui de l’Utilisation, sur la Performance des managers. Un autre résultat important à souligner est le fait que l’effet direct de la Contribution du manager au contrôle de gestion sur l’Utilisation par le manager des informations émises par le contrôle de gestion d’une part et sur sa Performance d’autre part ne sont pas significatifs au seuil de 5 %. Globalement, cela indique pour le premier que l’effet de la Contribution sur l’Utilisation passe nécessairement par Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Médiation simple : Effet indirect : 0,231 ; I.C. à 95 % [0,111 ; 0,342] 102 © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) la Pertinence des informations. Pour le second, cela indique que la double médiation identifiée est totale, et donc que l’effet de la Contribution du manager au contrôle de gestion sur la Performance passe nécessairement par la Pertinence des informations et leur Utilisation. L’absence d’effets directs montre aussi que le modèle théorique proposé est complet et que nous n’avons pas omis d’autres variables médiatrices en parallèle avec le chemin indirect proposé (Zhao et al. 2010). Concernant les variables de contrôle, le Rattachement hiérarchique du contrôle de gestion a un impact significatif sur la Performance managériale (β = –0,117, p < 0,05) et la Situation géographique du contrôle de gestion a un impact significatif sur l’Utilisation des informations émises par le contrôle de gestion (β = –0,140, p < 0,05). Les résultats obtenus supportent ainsi l’ensemble des hypothèses formulées dans la partie 1, pour une erreur de première espèce de 5 %. En termes de poids explicatif des variables, le modèle explique 21,8 % (R² = 0,218) de la variance de la Pertinence des informations, 25,3 % (R² = 0,253) de l’Utilisation des informations et 23,6 % (R² = 0,236) de la Performance managériale. Ces coefficients de détermination sont, du point de vue pratique, plus facilement interprétables que les coefficients de régression. Ils vont nous permettre dans la suite de discuter les implications managériales de nos résultats. 4. Discussion et conclusion Notre modèle montre ainsi que la Participation du manager au contrôle de gestion est un déterminant de sa Performance managériale. Celle-ci est expliquée pour 23,6 % par l’ensemble des variables proposées. Ce résultat, s’il est confirmé par d’autres études, valide l’importance du contrôle de gestion, puisqu’il explique près d’un quart de la Performance managériale. Notre modèle apporte de plus un nouvel éclairage sur la variable Participation du manager au contrôle de gestion. En dissociant ses deux dimensions – la Contribution au contrôle de gestion d’une part et l’Utilisation des informations émises par le contrôleur de gestion d’autre part –, nous avons pu formuler leur lien théorique de cause à effet. Plus le manager contribue au processus de contrôle de gestion, plus il utilise l’information qu’il reçoit à son tour du contrôleur de gestion, car cette information est plus pertinente, grâce notamment aux interactions avec le contrôleur de gestion qui accompagnent la contribution du manager. Au-delà de la validation de notre modèle, un apport important de notre travail est de proposer la variable Participation au contrôle de gestion en lieu et place de la variable Participation budgétaire, pour sortir de l’impasse des modèles du courant comportementaliste. Notre travail répond aussi à l’appel du courant relationnel à donner plus de place aux acteurs (Oriot 2004 ; Bollecker et Niglis 2009) puisqu’il prend en compte non seulement le rôle du manager, mais aussi celui du contrôleur de gestion. Nous rapprochons ainsi ces deux courants de recherche qui s’étaient jusqu’ici développés indépendamment l’un de l’autre. Un apport académique additionnel est le lien établi entre le champ du management de la connaissance et celui du contrôle de gestion, deux champs de recherche disjoints jusque-là. Nous avons mis en évidence que le processus de contrôle de gestion, favorisé par l’interaction entre le manager Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) et le contrôleur de gestion, conduit à la transformation de la connaissance individuelle en connaissance partagée et rejoint en cela le management de la connaissance. Les similitudes des variables Contribution et Utilisation relevant de ces deux champs disciplinaires distincts sont frappantes. La transposition au contrôle de gestion d’apports du management de la connaissance semble ainsi pouvoir être fructueuse, comme elle l’a été dans notre recherche pour approfondir la connaissance de la variable Participation au contrôle de gestion. Le champ du management de la connaissance mériterait sans doute d’être mieux exploré et exploité à cet effet dans des recherches à venir. D’un point de vue pratique, nos conclusions confirment l’intérêt pour l’entreprise de favoriser la Participation du manager au contrôle de gestion. En particulier, elles apportent un argument important susceptible d’être utilisé par les contrôleurs de gestion pour convaincre leurs interlocuteurs de partager les informations qu’ils détiennent : au-delà de rendre service à la collectivité ou au contrôleur de gestion, ce partage devrait favoriser en retour la Pertinence de l’information qu’ils recevront du contrôleur de gestion. Nos conclusions soulignent également l’interdépendance du manager et du contrôleur de gestion. La qualité de leur travail respectif, leurs performances, dépendent de leur travail collaboratif et de leurs échanges. Ceux-ci permettent d’une part une meilleure Contribution du manager, grâce aux questionnements du contrôleur de gestion, aux recoupements auxquels il procède, et même aux éclairages complémentaires qu’il apporte. Ils permettent d’autre part une meilleure Pertinence des informations émises par le contrôleur de gestion car la collaboration avec le manager l’aide à mieux comprendre ses besoins et son environnement, et qu’elle le place dans l’obligation morale de s’y adapter au mieux. Ce travail comporte des limites, essentiellement méthodologiques, qui ouvrent sur des pistes de recherche à venir. Premièrement, comme dans toute recherche quantitative, le choix des variables a été fait sur une base théorique, ce qui peut conduire à des biais liés aux variables omises et à de possibles problèmes d’endogénéité (Chenhall et Moers 2007). Ainsi une voie de recherche importante serait l’enrichissement du modèle par d’autres variables. En particulier, des variables utilisées dans le cadre du courant comportementaliste mériteraient d’être transposées pour améliorer le pouvoir explicatif de notre modèle. La motivation du manager (Milani 1975 ; Searfoss 1976 ; Brownell et McInnes 1986), son engagement envers ses objectifs (Wentzel 2002), son engagement envers l’organisation (Cherrington et Cherrington 1973 ; Chenhall et Brownell 1988) seraient notamment des variables intéressantes à intégrer. Le courant relationnel du contrôle de gestion permet également d’identifier des variables additionnelles, telles que la qualité de la relation entre le contrôleur et le manager (Oriot 2004), l’adhésion des acteurs au système de pilotage (Bollecker et Niglis 2009), ou encore la confiance entre le manager et le contrôleur de gestion (Bollecker 2001 ; Oriot 2004). Enfin, la littérature propre au management de la connaissance peut également nourrir cette voie de recherche. Ce courant suggère ainsi des facteurs explicatifs à la Contribution tels que la nature de la connaissance – tacite ou explicite –, la motivation pour la partager, les opportunités de partage, la qualité des relations interpersonnelles, les personnalités des managers et des contrôleurs de gestion, le sentiment d’efficacité personnelle (Ipe 2003 ; Wang et Noe 2010). Une deuxième limite porte sur l’impact des caractéristiques du contrôle de gestion. Bien que notre étude contrôle ces variables (tableau 2), elle n’étudie pas en détail les différences liées au Rattachement Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) 103 © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE 104 Armelle Godener et Marianela Fornerino PARTICIPATION DU MANAGER AU CONTRÔLE DE GESTION ET PERFORMANCE MANAGÉRIALE, UNE NOUVELLE APPROCHE © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Comptabilité – Contrôle – Audit / Tome 23 – Volume 2 – Septembre 2017 (p. 85 à 110) © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) hiérarchique du contrôle de gestion ou la Localisation géographique de ce service par rapport à celle des managers pour lesquels il travaille. Cela pourrait faire l’objet de recherches à venir. La nature perceptuelle des mesures constitue également une limite. Pour la réduire, il serait intéressant de croiser le regard des managers, ici interrogés, avec celui des contrôleurs de gestion. La dernière limite que nous citerons est cette fois liée au choix du périmètre de notre recherche, limité géographiquement à la France. S’agissant d’une recherche sur les comportements, de futures études devraient s’intéresser à d’autres pays ayant une culture différente, et peut-être des pratiques de contrôle de gestion différentes. Note 1. Pour une revue de littérature, voir Kren (1997), Naro (1998) ou Bonache et al. (2012). Bibliographie © Association Francophone de Comptabilité | Téléchargé le 01/03/2022 sur www.cairn.info (IP: 82.125.151.105) Alavi, M., Leidner, D.E. (1999). Knowledge management systems: issues, challenges and benefits. Communications of the AIS, 1 (2) : 1-37. Alcouffe, S., Boitier, M., Rivière, A., VillesèqueDubus, F. 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