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26 octobre 2011 0
et un faible risque d’arythmies ont été rapportés avec les
prostaglandines, mais qu’il n’existe pas de contre-indica-
tion à leur utilisation.1
Durant le travail d’accouchement, il faut absolument évi-
ter les modifications hémodynamiques brusques pouvant
conduire à une décompensation cardiaque aiguë. Pour évi-
ter l’augmentation de la fréquence cardiaque et de la pres-
sion artérielle, l’analgésie péridurale est recommandée de
façon précoce en cas d’accouchement par voie basse. Durant
le travail, la patiente sera installée en décubitus latéral gau-
che pour atténuer les fluctuations hémodynamiques asso-
ciées aux contractions utérines. Il n’y a pas de consensus
concernant le degré de surveillance hémodynamique qui
sera donc adapté selon les cas : signes vitaux/rythme car-
diaque, cathéter artériel, cathéter veineux central, voire ex-
ceptionnellement cathéter artériel pulmonaire.4
La césarienne n’est pas recommandée de routine chez
les patientes atteintes de cardiopathie. En effet, le risque
d’hémorragie et d’embolie pulmonaire est augmenté en
comparaison avec un accouchement vaginal, même si la
décharge adrénergique due aux contractions utérines est
évitée.1,12 Il n’y a pas de consensus sur les contre-indications
absolues à un accouchement vaginal. Selon les dernières
recommandations européennes, la césarienne devrait être
considérée chez les patientes avec aortopathies : syndrome
de Marfan avec une dilatation de la racine aortique L 45 mm,
dissection aortique aiguë ou chronique, chez les patientes
en insuffisance cardiaque réfractaire et celles sous anticoa-
gulation orale en travail prématuré.1 Certains auteurs pro-
posent une césarienne lors de syndrome de Marfan avec
une dilatation de la racine aortique L 40 mm,13 lors de sté-
nose aortique sévère et en cas d’hypertension pulmonaire
sévère.
La gestion de la deuxième phase du travail a été peu
étudiée et reste controversée. Généralement, en cas de
cardiopathie modérée à sévère, les manœuvres de Valsalva
lors des efforts de poussée peuvent être évitées par une
extraction instrumentale. Cependant, le risque de lésions
périnéales et d’hémorragie du post-partum est plus élevé
en cas d’accouchement instrumenté.6,9 La balance risques/
bénéfices de cette intervention doit donc être bien éva-
luée.12 En cas de césarienne, l’anesthésie rachidienne est
souvent contre-indiquée du fait des modifications hémo-
dynamiques brutales qu’elle induit. L’anesthésie péridurale
est mieux tolérée et a longtemps été la technique de choix.
L’inconvénient est son taux plus élevé d’échec ou d’anes-
thésie insuffisante. Plus récemment, la technique de rachi-
péridurale séquentielle (ou combinée), associant une faible
dose d’anesthésique inthrathécale combinée avec une pé-
ridurale lombaire, présente le double avantage d’un bloc
d’excellente qualité et de faibles répercussions hémody-
namiques.12,14,15 L’anesthésie générale peut être indiquée
en cas d’instabilité hémodynamique, mais dans certaines
situations, comme en cas d’hypertension pulmonaire sévère,
elle peut être très mal tolérée.15 Une perfusion intraveineu-
se d’ocytocine devrait être administrée lentement (20 U dans
500 ml en trois ou six heures selon le degré de contraction
utérine) pour la prévention de l’hémorragie du post-partum.
A noter que le sulprostone est contre-indiqué en cas de
cardiopathie préexistante et la méthylergométrine est con-
tre-indiquée en cas de maladie coronarienne et d’hyper-
tension artérielle.
La période du post-partum est à haut risque de décom-
pensation cardiaque chez les patientes atteintes de cardio-
pathies. Chez les patientes à haut risque, une surveillance
étroite d’au moins 24 heures après l’accouchement est pré-
conisée.1
Prévention de l’endocardite infectieuse
La prévention de l’endocardite infectieuse a fait l’objet
de nouvelles directives récentes.16 L’antibioprophylaxie est
maintenant recommandée uni quement pour une popula-
tion à haut risque (antécédent d’endocardite infectieuse,
prothèse valvulaire ou matériel prothétique, ainsi que cer-
taines cardiopathies congénita les) et uniquement lors d’in-
terventions dentaires. L’antibio prophylaxie n’est donc plus
recommandée pour l’accouche ment vaginal ou la césa-
rienne.1 A relever cependant que les recommandations de
l’American college of obstetrics and gynecology suggèrent
qu’une antibioprophylaxie pourrait être considérée pour
les patientes à haut risque d’endocardite lors d’un accou-
chement vaginal.17
cardiopathies déclenchées par
la grossesse
Maladie coronarienne
En raison de l’augmentation du nombre de femmes en-
ceintes à haut risque cardiovasculaire, on s’attend à une
augmentation de la survenue d’événements coronariens
au cours de la grossesse,1,18 avec une fréquence actuelle de
6/100 000 accouchements. La grossesse augmente le risque
d’événements coronariens d’environ 3 à 4 x en comparaison
avec des femmes non enceintes du même âge,18 ceci pou-
vant être en lien avec l’augmentation du travail du myocar-
de, la diminution du contenu artériel en oxygène secondaire
à l’hémodilution et l’état d’hypercoagulabilité de la fin de
grossesse. Comme les symptômes d’ischémie myocardique
peuvent mimer ceux de la grossesse (dyspnée, épigastral-
gies par exemple), le diagnostic est souvent tardif.2 L’élec-
trocardiogramme peut être modifié chez la femme enceinte,
raison pour laquelle il est important de doser la troponine
en cas de doute. La prise en charge du syndrome corona-
rien aigu est la même que chez une femme non enceinte, en
tenant compte cependant de la présence du fœtus. L’inter-
vention coronarienne percutanée a été bien documentée
pendant la grossesse, sans conséquence sur la survie fœta-
le.18 Les risques d’irradiation sont les plus importants au
premier trimestre et peuvent être réduits par une appro-
che radiale et une diminution des temps de fluoroscopie.
L’utilisation de stents nus est recommandée pour éviter
une double thérapie antiplaquettaire prolongée. L’accouche-
ment vaginal est possible dans la plupart des cas. La mor-
talité maternelle après un syndrome coronarien aigu est
estimée à 5-10% et prédomine dans la période péripartum.1
Cardiomyopathie du péripartum (CMPP)
Il s’agit d’une cardiomyopathie idiopathique associée à
une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection ventriculaire
gauche diminuée (l 45%) durant le dernier mois de la gros-
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