L’Etat et les crises du XIVe siècle Contraste marquant de l’essor économique et social du XIIe et XIIIe siècles, où l’on voit fleurir la naissance du grand commerce, l’extension et l’amélioration des cultures, le XIVe siècle représente une période de crise économique, politique et sociale. Succédant ainsi à une grande période de dépression. Les causes de cet affaiblissement économico-sociale sont divers et variés : les périodes de famines s’étalent de 1315 à 1316, les prémices de la série de conflits distincts de la guerre de Cent Ans en 1337, les vagues pestes (la première qui s’amorce de 1348 à 1353). Ces différents fléaux occasionnent des crises démographiques, économiques et sociales structurelles. Contribuant ainsi à la fin du siècle à des révoltes paysannes qui provoquent à leur tour une réaction seigneuriale. Selon l’historien médiéviste Edouard Perroy (1901-1974), il faut distinguer les diverses crises du XIVe. D’une part, de “l’affaissement durable et prolongé de l’économie”, deux phénomènes courants dans le XIVe siècle : “une série de crises rapprochées - crise frumentaire de 1315-1320, crises financière et monétaire de 1335-1345, crise démographique de 1348-1350 - ont exercé une action paralysante sur l’économie et l’ont maintenue, pour un siècle siècle, dans un état de construction durable”. Le Moyen-Age n’emploi pas le mot Etat, ni dans son équivalent latin (status), ni au sens actuel de corps politique organisé. En France, la notion d’Etat s’inscrit dans le fondement d’une hiérarchisation pyramidale de la société sous la forme de trois ordres, qui représentent la situation d’un individu dans la société : le clergé, la noblesse et le tiers-état. Période marquée compliquée par diverses, déséquilibres structuraux et des fléaux du siècle : crise agraire, guerres, peste, le XIVe siècle s’inscrit dans une forte instabilité politique en raison des révoltes paysannes succinctes. Tout en décrivant ce retournement de la conjoncture au XIVe siècle, on se demandera dans quelles en sont les causes de même que les limites de ce dernier : en quoi les crises du XIVe siècle sont-elles le miroir des morcellements des Etats et des sociétés féodales ? On définira dans un premier temps le déséquilibre de l’économie rurale et des famines, avant de décrire la peste ainsi que les mentalités liées à cette dernière. On discutera en dernier lieu de la conjoncture démographique du XIVe siècle. L’Etat et les crises du XIVe siècle La peste avait délaissé l’Europe occidentale depuis plus longtemps que la famine : la dernière grande épidémie de peste remontait du VIe siècle. Cette dernière réapparaît subitement sous deux formes distinctes à la fin de 1347 : la peste bubonique et la peste pulmonaire. La première a un taux de mortalité avoisinant les 80 % et la seconde, un taux de 100%. Pour la peste bubonique, communément appelée la “Peste noire”, proviendrait d’une épidémie qui faisait alors rage en Asie centrale, et des navires transportant dans leurs cales des rats contaminés de la bactérie causant ainsi le fléau des comptoirs de la mer Noire aux ports méditerranéens par des groupes mongoles en 1346. Se propageant dans un premier temps dans le Moyen-Orient avant de s’étendre dans tout le reste de l’Europe en empruntant des circuits commerciaux de l’époque : décembre 1347, elle était à Marseille, en juin 1347 à Paris et à Venise; en décembre 1349 elle avait infecté Londres et Francfort, pour atteindre la Suède en 1350. Difficile de connaître avec exactitude le nombre de décès : en raison de la propagation progressive de l’épidémie, les régions de l'Europe ne furent pas atteintes au même degré. On peut considérablement supposés que les villes furent sans doute nettement plus impactées que les campagnes en raison de la densité de population. L’effet démographique de la première vague de la peste bubonique (1347-1350) fut intensifié par les diverses périodes successives sévissant l’Europe jusqu’au XVIIIe siècle. La répétition des épidémies de peste a eu pour effet d’abaisser durablement et dans des proportions importantes la démographie européenne; les épisodes de famines et de guerres ont également contribué à cette décroissance démographique en Europe. Les effets de la peste sur les mentalités sont non négligeables. Deux faits frappent particulièrement, les pogroms et l'apparition des flagellants. Pour le premier, le terme de pogrom n’est pas médiéval. Il peut toutefois désigner les flambées de persécution dont certaines communautés juives ont fait l’objet en cette période épidémique. Le second, dépeint les membres de confréries pénitentes au sein desquelles on se livre en commun à la flagellation. Ces derniers dérivent dans des sentences publiques à caractère violent et antisémites. Les Juifs, rendus en bien des endroits responsables de l’épidémies, furent accusés d’avoir empoisonnés les puits. En Espagne, ce sont les pogrom eurent plus de violence, toutefois les Juifs furent également massacrés à Strasbourg mais aussi dans d’autres villes en Europe.