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Les études de mortalité par chablis et de leurs conséquences sur la forêt sont complexes et
nécessitent de prendre en compte plusieurs variables afin de mieux les comprendre : la taille des
trouées, leur forme, leur orientation, le mode de chute des arbres (cassure, déracinement), la date
de chute, la configuration spatiale, la demi-vie (temps pour que la trouée couvre la moitié de la
surface de la forêt) et le turn-over (période nécessaire pour que toute la surface d’étude soit couverte
par les trouées ; Nierstrasz 1975, Bonnis 1980, Jans et al. 1993, Obame 2015b, Obame et al. 2015).
De toutes ces variables, la taille des trouées est la plus importante car elle renseigne sur l’écart des
conditions écologiques et microclimatiques entre l’intérieur de la trouée et le sous-bois de la forêt
environnante (Obame 2015b, Obame et al. 2015). En forêt tropicale, cette taille varie entre 10 et
5000 m2 et dépend de la méthode d’estimation utilisée (Schliemann and Bockheim 2011). Plusieurs
études (Brokaw 1987, Durrieu 1992, Riéra 1995b, Arévalo and Fernández-Palacios 2007, Egbe et
al. 2012, Obame 2015b, Obame et al. 2015) ont mis en évidence son influence, à la fois sur la
composition floristique, la structure et la dynamique forestière.
La taille de la trouée influence la composition floristique et la structure de la forêt en régulant
l’intensité de la ressource lumineuse atteignant le sol. Elle contribue aussi à l’hétérogénéité des
niches écologique au sein de la forêt (Nierstrasz 1975, Baraloto 2003, Obame 2015). L’arrivée d’une
grande quantité de lumière, jadis bloquée et/ou filtrée par la canopée, entraîne une réponse de la
végétation en place. Les espèces pionnières vont s’installer parmi les premières. Elles ont une
croissance rapide et une durée de vie relativement courte. Les espèces tolérantes à l’ombrage vont
s’installer plus tard et atteindre la canopée forestière. Dans certains cas, l’apparition de trouées de
grande taille peut entraîner la mise en place d’une monodominance temporaire d’espèces ligneuses
dont le maintien dépendra du fort niveau d’éclairement apporté par la trouée. C’est le cas des forêts
à Backhousia bancroftii, Maesopsis eminii, Musanga cecropioides ou encore Shorea albida (Sabongo 2015).
De nombreuses espèces ligneuses ont besoin de trouées pour se régénérer (Nierstrasz 1975,
Brokaw 1987, Alexandre 1989a, Boyemba 2011, Obame 2015b, Obame et al. 2015). Au sein de ces
trouées, ces plantes peuvent soit se régénérer à partir de la banque de graines contenue dans le sol
(potentiel séminal édaphique), soit à partir des graines disséminées au sein de la trouée (potentiel
séminal advectif) soit par émission de boutures ou de rejets issus des plantes présentes avant la
création de la trouée (potentiel végétatif ; Alexandre 1989). Ces 3 sources constituent les potentiels
de régénération. D’après Alexandre (1989) et Young and Hubbell (1991), l’activation de l’un des 3
potentiels de régénération dépend de la taille de la trouée. Ainsi, les trouées de petite taille stimulent
davantage le potentiel séminal végétatif (on parlera alors de la régénération de substitution) alors
que les trouées de grande taille stimulent plutôt les potentiels séminaux édaphique et advectif (on
parlera alors de la régénération par succession ; Alexandre 1989). C’est ainsi qu’au Gabon, Obame