Telechargé par Yassine Ait mohamed

le spectre et le radical de jacobson dans un anneau commutatif(10) 2

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Université Moulay Ismail
Faculté des Sciences Meknès
Département de Mathématiques
Projet de fin d’études
Licence en Mathématiques et Applications
Promotion : 2019/2020
Le spectre et le radical de Jacobson
dans un anneau commutatif.
Realisé par :
Yassine Ait Mohamed
Encadré par le Professeure : Mme. Bakkari Chahrazade
Soutenu le 08/10/2020
TABLE DES MATIÈRES
1
2
Généralités sur les anneaux
1.1 Définitions et premières propriétés . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.1.1 Anneaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.2 Éléments remarquables d’un anneau . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.3 Sous-anneaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.3.1 Sous-anneau engendré par une partie non vide d’un anneau
1.4 Morphisme d’anneaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.4.1 Propriétés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.5 Anneaux produits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.6 Idéaux d’un anneau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.6.1 Définitions, premières propriétés . . . . . . . . . . . . . . .
1.6.2 Idéal principal, anneau principal . . . . . . . . . . . . . . .
1.6.3 Idéal engendré par une partie, somme d’idéaux . . . . . . .
1.6.4 Produit d’idéaux, opérations sur les idéaux . . . . . . . . .
1.7 Anneaux quotients . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.7.1 Définitions, premières propriétés . . . . . . . . . . . . . . .
1.7.2 Théorèmes d’isomorphisme d’anneaux . . . . . . . . . . . .
1.8 Idéaux premiers et maximaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.8.1 Idéaux premiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.8.2 Idéaux maximaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.9 Divisibilité et idéaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.9.1 Divisibilité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.9.2 Éléments irréductibles ; éléments premiers . . . . . . . . . .
1.10 Anneau local . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.11 Localisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.11.1 Construction de l’anneau S −1 A . . . . . . . . . . . . . . . .
1.11.2 Idéaux d’un anneau localisé . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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20
21
23
Spectre et radical de Jacobson
2.1 La notion de spectre d’anneau . . . . . . . .
2.1.1 Spectre de quelques anneaux spéciaux
2.2 Nilradical et radical de Jacobson . . . . . . .
2.2.1 Notion de Radical et Nilradical . . .
2.2.2 Radical de Jacobson . . . . . . . . . .
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DÉDICACE
Nous dédions ce modeste travail à nos parents
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REMERCIEMENTS
N ous tenons tout d’abord, et en priorité, à exprimer nos vifs remerciements au
professeure BAKKARI CHAHRAZADE, directrice de ce mémoire, pour la qualité
de son encadrement, ainsi que pour ses conseils et sa rigueur méthodologique dans
la conduite de nos travaux de recherche.
Nous voudrions, à l’occasion de cette tentative, remercier toutes celles et tous ceux
qui de manières variées et à des moments différents, nous ont permis de découvrir
que Les Sciences mathématiques restent aujourd’hui l’un des enjeux majeurs de notre
devenir personnel et collectif.
Nos remerciements vont également à tous ceux qui ont contribué à la réalisation
de ce travail de recherche, de près ou de loin, en particulier à notre entourage familial. Puissent nos amis trouver ici l’expression de notre profonde reconnaissance.
4
INTRODUCTION
L’objectif de ce travail est d’initier le lecteur aux outils de base qui lui permettront
de manier des objets plus complexes faisant intervenir d’autres théories, notamment
la géométrie algébriques. Parmi les nombreux ingrédients auxquels celle-ci fait appel
figurent les spectres et les radicaux de Jacobson. Avant d’introduire de telles notions,
il faudra d’abord créer le cadre, le contexte ou elles vont siéger. Pour ce faire, il
conviendrait de lister et caractériser les objets nécessaires à cette construction. Ceci
dit, dans un souci de cohérence, une hiérarchie s’impose : étudier les anneaux et les
morphismes qui les relient en premier, puis décrire les idéaux. Au passage nous découvrirons une palette d’opérations, de relations et de manipulations qui vont consolider
et enrichir nos acquis relativement aux notions évoquées.
Le plan s’organisera donc en deux parties et suivra le cheminement suivant : une
section dédiée aux constructions sous-jacentes dont on citera la localisation, et une
deuxième section consacrés à la description des spectres et des radicaux.
A ce stade nous aimerions préciser que si l’on considère un anneau commutatif, il est
possible de définir deux sortes de spectres associés à celui-ci, chacun étant l’ensemble
d’idéaux : le spectre maximal et le spectre premier. Le premier étant l’ensemble de
ses idéaux maximaux et le second celui de ses idéaux premiers. Ces notions ont été
dégagées vers les années 1955 par Serre (cas maximal) et Chevalley (cas premier).
Finalement, une application à la géométrie algébrique sera donnée en guise de conclusion.
5
CHAPITRE
1
GÉNÉRALITÉS SUR LES ANNEAUX
1.1
1.1.1
Définitions et premières propriétés
Anneaux
Définition 1.1.1. Un anneau est la donnée d’un ensemble non vide A et de deux lois de composition
internes, notées + et · (appelées respectivement addition et multiplication), telles que :
(i) (A, +) est un groupe abélien (on notera 0A son élément neutre)
(ii) ∀(a, b, c) ∈ A3 , (a · b) · c = a · (b · c),
(iii) ∀(a, b, c) ∈ A3 , a · (b + c) = a · b + a · c et (b + c) · a = b · a + c · a.
1. Si la loi · est commutative, on dit que l’anneau A est commutatif.
2. Si la loi · admet un élément neutre distinct de 0A , noté 1A ou 1 (s’il n’y a pas d’ambiguı̈té),
on dit que l’anneau A est unitaire. On convient que l’on a toujours 0A 6= 1A . Donc, un
anneau unitaire a au moins deux éléments, à savoir 1A et 0A .
3. A est dit nul, si A = {0A }. Cet anneau n’est pas unitaire.
Exemple 1.1.2.
1) (Z, +, ·), (Q, +, ·), (R, +, ·), (C, +, ·) sont des anneaux commutatifs et unitaires.
2) Z/nZ est un anneau (ou + et . sont les lois qui lui sont associées)
3) L’anneau K[X] des polynômes à une indéterminée à coefficients dans un corps K est un
anneau commutatif unitaire.
4) Soit A un anneau unitaire. L’ensemble Mn (A) des matrices n × n à coefficients dans A muni
des règles de calcul habituelles, (la somme de deux matrices et le produit des matrices) est
un anneau unitaire non commutatif.
Dans la suite, on notera la multiplication dans A par ab, en omettant le point ·
6
1.2
Éléments remarquables d’un anneau
Définition 1.2.1. Soit A un anneau.
1) On dit que a ∈ A est :
i) diviseur de zéro à gauche (resp. à droite) si ∃b(0 6= 0A ) ∈ A tel que ba = 0A ( resp. ab = 0A ).
Dans un anneau commutatif on parlera seulement de diviseur de zéro.
ii) régulier à gauche (resp à droite) ssi ∀b, c ∈ A, ba = ca ⇒ b = c (resp ab = ac ⇒ b = c).
iii) régulier ssi a est régulier à gauche et à droite.
iv) Si A est unitaire , a est dit inversible ssi il existe b ∈ A, ab = ba = 1A , on note A∗ ou (U(A))
l’ensemble des éléments inversibles de A. On peut vérifier facilement que (U(A), ×) est un
groupe abélien.
2) On dit que A est un corps si U(A) = A \ {0A }.
Exemple 1.2.2.
1) Soit n ≥ 2 non premier, ∃(n1 , n2 ) ∈ {1, ...n − 1} tel que n = n1 n2 . Dans
Z/nZ. Cette égalité donne n1 n2 = 0 avec n1 6= 0 6= n2 . n1 et n2 sont donc diviseurs de 0.
2) U(Z)={-1,1}.
3) U(Z/nZ)={a ∈ Z/nZ , a ∧ n = 1}
4) Notons que x inversible implique que x n’est pas un diviseur de zéro. Donc un corps n’a pas
de diviseur de zéro.
5) Q, R et C sont des corps commutatifs.
Définition 1.2.3. Soit A un anneau commutatif. On dit que A est intègre, ou encore que A est
un domaine d’intégrité, lorsqu’il est non-nul et vérifie la propriété suivante : pour tous a, b ∈ A,
(ab = 0A ) ⇔ (a = 0A ou b = 0A ). En d’autres termes, A est intègre si et seulement s’il n’admet
pas de diviseurs de zéro.
Exemple 1.2.4.
1) Z, R, Q, C sont intègres.
2) M2 (R) n’est pas intègre.
3) Si A est intègre alors A[x] est intègre où A[x] est l’anneau de polynômes à coefficients dans
A.
En particulier, si K est un corps, alors l’anneau K[X] est intègre
4) Si n est premier. alors Z/nZ est intègre.
Remarque 1.2.5.
a) Si A 6= {0A }, 0A n’est pas régulier.
b) Un élément diviseur de zéro n’est pas régulier . En effet : si a est diviseur de zéro, il existe
b 6= 0A tel que ab = 0A ou ba = 0A . On a donc ab = 0A et b 6= 0A . D’où a n’est pas régulier.
Théorème 1.2.6. Soit A un anneau et a ∈ A . a est régulier ssi a n’est pas diviseur de 0A .
Démonstration. ⇒) La remarque précédente assure le résultat.
⇐) Supposons que a n’est pas un diviseur de 0A . Soient b, c ∈ A2 tels que ab = ac et ba = ca. On
a a(b − c) = 0 = (b − c)a, or a n’est pas diviseur de 0A donc b − c = 0A et b = c.
7
1.3
Sous-anneaux
Définition 1.3.1. Soit (A, +, ·) un anneau et ∅ 6= B ⊆ A. B est un sous-anneau de A ssi :
(i) (B, +) est un sous-groupe de (A, +) .
(ii) · est interne dans B.
Pratiquement, pour montrer qu’un sous-ensemble non vide B d’un anneau A est un sous-anneau
de A, il suffit de vérifier que : pour tous a, b ∈ B, on a a − b ∈ B et ab ∈ B . Si de plus 1A ∈ B,
B est un sous-anneau unitaire.
Remarque 1.3.2.
i) Si A est unitaire , on impose que 1A ∈ B. B est alors unitaire , ce qui
revient à dire que (B, +, ·) est un anneau unitaire si A l’est.
ii) Si A est commutatif, alors tout sous-anneau de A est commutatif.
iii) En général, un anneau B contenu dans un anneau A n’est pas nécessairement un sous-anneau
de A (au sens des anneaux unitaires). L’anneau B = {0, 2, 4} n’est pas un sous-anneau de
l’anneau A = Z/6Z (au sens des anneaux unitaires) car 1A = 1 ∈
/B
Exemple 1.3.3.
unitaire).
a) A et {0A } sont des sous-anneaux de A. (si A est unitaire, {0A } n’est pas
b) Z(A) = {a ∈ A /ab = ba, ∀b ∈ A} est un sous-anneau de A appelé le centre de A. (Z(A) 6=
A ssi A est non commutatif ).
c) ∀n 6= 1, nZ n’est pas un sous-anneau de (Z, +, ·).
d) Z est un sous-anneau de Q, Q est un sous-anneau R et R est sous-anneau de C.
Proposition 1.3.4. Dans tout anneau A, l’intersection d’une famille quelconque de sous-anneaux de
A est un sous-anneau de A.
Démonstration. Soit (Ai )i∈I une famille de sous-anneaux de A. On pose F = ∩i∈I Ai . Montrons
que F est un sous-anneau de A. il est clair que (F, +) est un sous-groupe de (A, +). Il reste à
montrer que pour tous x et y ∈ F on a xy ∈ F .
x, y ∈ F ⇒ ∀i ∈ I; x, y ∈ Ai . Puisque Ai est un sous-anneau de A alors xy ∈ Ai , ∀i ∈ I donc
xy ∈ F .
Proposition 1.3.5. A étant un anneau , si {Ai }i∈I est une famille des sous-anneaux de A totalement
ordonné par l’inclusion, alors ∪i∈I Ai est un sous-anneau de A.
1.3.1
Sous-anneau engendré par une partie non vide d’un anneau
Définition 1.3.6. Soit S une partie non vide de l’anneau A. Notons BS l’ensemble des sous-anneaux
de A contenant S et posons < S >=∩B∈BS B. < S > est un sous-anneau de A, (proposition 1.3.4)
appelé sous-anneau de A engendré par S.
Remarque 1.3.7. Dans l’ensemble des sous-anneaux de A ordonné par l’inclusion, < S > est le
plus petit sous-anneau de A content S.
Exemple 1.3.8. L’anneau des entiers de Gauss Z[i] est un sous-anneau de C engendré par {i}.
1.4
Morphisme d’anneaux
Définition 1.4.1. A et B étant deux anneaux, une application f de A dans B est un morphisme
d’anneaux si :
i) f (x + y) = f (x) + f (y), quels que soient x et y dans A.
ii) f (xy) = f (x)f (y), quels que soient x et y dans A.
8
On notera Hom(A, B) l’ensemble des morphismes d’anneaux A dans un anneau B.
Un morphisme d’anneaux est aussi appelé un homomorphisme d’anneaux.
Remarque 1.4.2. Si A et B sont unitaires on impose aussi la condition f (1A ) = 1B pour que f
soit un morphisme d’anneaux unitaires.
i) Si f est bijective, on parle d’isomorphisme d’anneaux. On note dans ce cas f ∈ Iso(A, B).
ii) A et B sont dits isomorphes s’il existe un isomorphisme d’anneaux de l’un sur l’autre, dans
ce cas, on écrit A ' B.
iii) Si A = B, on parle d’endomorphisme d’anneaux. On note alors f ∈ End(A). De plus si f
est bijectif, on parle d’automorphisme d’anneaux. On note dans ce cas f ∈ Aut(A).
Exemple 1.4.3.
a) ∀a ∈ A, l’application fa de (A, +) dans Hom((A, +),(A, +)) définie par
fa (x) = ax est un morphisme d’anneaux.
b) dét : (Mn (K), +, ·) 7−→ (R, +, ·) n’est pas un morphisme d’anneaux.
1.4.1
Propriétés
Définition 1.4.4. Soient A et B deux anneaux et f ∈ Hom(A, B) ; alors f (A)={f (x), x ∈ A} est
appelé l’image de A et noté Im f.
f −1 (0B ) = {x ∈ A/f (x) = 0B } est appelé noyau de f noté kerf .
0
0
Proposition 1.4.5.
1) A est un sous-anneau de A ⇒ f (A ) est un sous-anneau de B. En particulier, Im f est un sous-anneau de B.
2) Si A est unitaire Alors Imf est un anneau unitaire dont l’élément unité est f (1A ). De plus
si x est inversible dans A alors f (x) est inversible dans Imf et f (x)−1 =f (x−1 ).
0
0
3) B un sous-anneau de B ⇒ f −1 (B ) est un sous-anneau de A.
Démonstration.
0
0
1) Soient A un sous-anneau de A et f ∈ Hom(A, B). Montrons que f (A ) est un sous-anneau
de B.
0
D’après les propriétés des morphismes de groupes f (A ) est un sous-groupe de (B, +). Il reste
0
0
0
à montrer que pour tout x, y ∈ f (A ) on a xy ∈ f (A ). En effet : x et y ∈ f (A ) alors il existe
0
a et b ∈ A tels que f (a) = x et f (b) = y.
0
0
f (a)f (b) = f (ab) = xy. Puisque ab ∈ A alors f (ab) = xy ∈ f (A ).
2) Si x ∈ U(A) montrons que f (x) ∈ U(Imf ). En effet x ∈ U(A) ⇔ ∃y = x−1 ∈ A,xx−1 =
x−1 x = 1A ⇒ f (xx−1 ) = f (x−1 x) = f (1A ) ⇒ f (x)f (x−1 ) = f (1A ), ainsi f (x−1 ) = (f (x))−1 .
3) Vérification facile.
1.5
Anneaux produits
Définition et Proposition 1.5.1. Soient A1 et A2 deux anneaux commutatifs unitaires.
i) Le produit cartésien A1 × A2 = {(x1 , x2 ), x1 ∈ A1 , x2 ∈ A2 } est un anneau commutatif
unitaire pour les lois définies par :
(x1 , x2 ) + (y1 , y2 ) = (x1 + y1 , x2 + y2 ) et (x1 , x2 )(y1 , y2 ) = (x1 y1 , x2 y2 ),
ceci pour tous x1 , y1 ∈ A1 , x2 , y2 ∈ A2 et l’on a 1A1 ×A2 = (1A1 , 1A2 ). Cet anneau est appelé
le produit direct de A1 par A2 .
9
ii) L’application p1 : A1 × A2 → A1 qui à tout élément (x1 , x2 ) ∈ A1 × A2 , associe sa première
composante x1 , est un morphisme d’anneaux unitaires (appelé première projection).
iii) L’application p2 : A1 × A2 → A2 qui, à tout élément (x1 , x2 ) ∈ A1 × A2 , associe sa seconde
composante x2 , est un morphisme d’anneaux unitaires (appelé seconde projection).
Démonstration. Simple vérification.
Remarque 1.5.2.
a) Le produit direct A1 × A2 est isomorphe au produit direct A2 × A1 .
b) On définit de même de façon évidente le produit direct d’un nombre fini quelconque d’anneaux.
Proposition 1.5.3. (dit théorème des restes chinois). Soient deux entiers n > 2 et m > 2. L’anneau
produit Z/nZ × Z/mZ est isomorphe à l’anneau Z/nmZ si et seulement si n et m sont premiers
entre eux.
Démonstration. Il a été démontré dans le cours de théorie des groupes que, si n et m sont premiers
entre eux, l’application x 7→ (x̃n , x̃m ) réalise un isomorphisme de groupes de Z/nmZ sur Z/nZ ×
Z/mZ. Il est clair, par définition même des multiplications dans ces différents anneaux, que c’est
aussi un isomorphisme d’anneaux unitaires. La réciproque est évidente.
1.6
1.6.1
Idéaux d’un anneau
Définitions, premières propriétés
Nous allons étudier dans ce paragraphe la question du passage d’un anneau au quotient. Pour
les groupes, cette question mène à la notion de sous-groupe distingué : si H est un sous-groupe
d’un groupe G, le passage au quotient G → G/H est un morphisme de groupes si et seulement si
le sous-groupe H est distingué. Pour les anneaux, la question amène la notion d’idéal.
Définition 1.6.1. Soit A un anneau commutatif. On appelle idéal de A toute partie non vide de A
qui vérifie les deux conditions suivantes :
i) I est un sous-groupe du groupe additif (A, +).
ii) Pour tous x ∈ I et a ∈ A, on a xa ∈ I.
ˆ A et {0A } sont des idéaux de A appelés idéaux triviaux de A.
ˆ Un idéal I est dit propre si I 6= {0A } et I 6= A.
Proposition 1.6.2. Soit (A, +, ·) un anneau commutatif et I une partie de A. I est un idéal de
l’anneau A si et seulement si :
i) I 6= ∅,
ii) ∀x, y ∈ I : x − y ∈ I ,
iii) ∀x ∈ I, ∀a ∈ A, ax ∈ I, càd AI ⊆ I.
Exemple 1.6.3.
Z.
1) Pour tout n ∈ Z, l’ensemble nZ des multiples de n est un idéal de l’anneau
2) Dans l’anneau F (R, R), l’ensemble des fonctions qui s’annulent en 0 est un idéal.
Lemme 1.6.4. (Très utile dans la pratique). Soit A un anneau commutatif unitaire.
i) Si I est un idéal de A qui contient 1A , alors I = A.
ii) Si I est un idéal de A qui contient un élément de U (A), alors I = A.
Démonstration. Supposons que 1A ∈ I. Tout a ∈ A s’écrit a = 1A a .Comme 1A ∈ I il résulte de
la proposition 1.6.2 (iii) que a ∈ I. On a alors A ⊆I, donc A = I, ce qui prouve i). Supposons
maintenant que I contient un élément x inversible dans A. On a 1A = xx−1 avec x ∈ I et x−1 ∈ A,
par conséquent 1A ∈ I. En appliquant (i) on conclut que I = A.
10
Proposition 1.6.5. Soient A et B des anneaux commutatifs unitaires. Soit f : A → B un morphisme
d’anneaux unitaires. On a :
a) Pour tout idéal J de B, l’image réciproque f −1 (J) est un idéal de A.
b) En particulier, kerf = {x ∈ A; f (x) = 0B } est un idéal de A.
c) Pour tout idéal I de A. L’image directe f (I) est un idéal de l’anneau f (A) = Imf (attention,
ce n’est pas en général un idéal de B).
Démonstration. Sous les hypothèses de a), on sait déjà que f −1 (J) est un sous-groupe additif de
A . Soit x ∈ f −1 (J) et a ∈ A. On a f (xa) = f (x)f (a) avec f (a) ∈ B , f (x) ∈ J, donc f (xa) ∈ J
puisque J est un idéal de B, c’est-à-dire xa ∈ f −1 (J), ce qui prouve que f −1 (J) est un idéal de A.
On obtient b) en appliquant ce qui précède à J = {0B }.
Pour c), considérons un idéal I de A. On sait que f (I) est un sous-groupe additif de B. Soit
y ∈ f (I), de sorte qu’il existe x ∈ I tel que y = f (x). Pour tout élément b ∈ B qui appartient à
Imf , il existe a ∈ A tel que b = f (a) ; on a alors yb = f (a)f (x) = f (ax) avec ax ∈ I. Puisque
x ∈ I et que I est un idéal, yb ∈ f (I). Ceci prouve que f (I) est un idéal de l’anneau Imf .
Proposition 1.6.6. Soit A un anneau commutatif unitaire. L’intersection de deux idéaux de A est
un idéal de A. Plus généralement, l’intersection d’une famille quelconque d’idéaux de A est un idéal
de A.
Démonstration. Il suffit de montrer le second point. Soit donc (Ij )j∈X une famille d’idéaux de A.
Posons I =∩j∈X Ij l’intersection de tous les Ij . On sait déjà que I est un sous-groupe additif.
Soient x ∈ I et a ∈ A. On a xa ∈ Ij pour tout j ∈ X puisque Ij est un idéal alors xa ∈ I. Ce qui
prouve que I est un idéal.
1.6.2
Idéal principal, anneau principal
Définition et Proposition 1.6.7. Soit A un anneau commutatif unitaire. Pour x ∈ A, on note :
xA = {xy ; y ∈ A} = {z ∈ A ; il existe y ∈ A tel que z = xy}
(i) xA est un idéal de A, appelé l’idéal principal engendré par x.
(ii) xA est le plus petit idéal de A contenant x.
(iii) On a : (xA = A) ⇔ (x ∈ U(A)).
Démonstration. Il est clair que xA est non vide. Il contient x puisque x = x1A . Soient y ∈ xA et
z ∈ xA quelconques ; il existe a, b ∈ A tels que y = xa et z = xb, donc y − z = x(a − b) ∈ xA, ce
qui prouve que xA est un sous-groupe additif. Soient y ∈ xA et c ∈ A quelconques. Il existe a ∈ A
tel que y = xa, ainsi yc = xac = x(ac) ∈ xA. On conclut que xA est un idéal de A.
(ii) Soit I un idéal de A contenant x. Comme x ∈ I, on a xa ∈ I pour tout a ∈ A. Donc xA ⊆ I,
d’où (ii).
(iii) Si xA = A, alors 1A ∈ xA, de sorte qu’il existe y ∈ A tel que xy = 1A , ce qui prouve x ∈ U(A).
L’implication réciproque découle de 1.6.4.(ii).
Corollaire 1.6.8. Soit A un anneau commutatif unitaire.
( A est un corps ) ⇔ Les seuls idéaux de A sont {0A } et A .
Démonstration. Supposons que A est un corps. Soit I un idéal de A. Si I 6= {0A }. Il existe dans
I un élément non-nul. Donc inversible dans A puisque A est un corps. On conclut avec 1.6.4.(ii)
que I = A. Supposons réciproquement que A n’admet que {0A } et A comme idéaux. Soit x ∈ A
quelconque non-nul. L’idéal xA étant alors distinct de {0A }, on a nécessairement xA = A, d’où
x ∈ U(A) d’après (1.6.7.(iii)). Ainsi tout élément non-nul de A est inversible dans A. On conclut
que A est un corps.
Définition 1.6.9. On appelle anneau principal tout anneau intègre A dont tous les idéaux sont
principaux.
11
Exemple 1.6.10.
1) Pour tout n ∈ N, nZ={nk ; k∈ Z} est un idéal de Z.
2) Z est un anneau principal.
3) Les idéaux de Z/4Z sont {0}, 2Z/4Z =< 2 > et Z/4Z =< 1 > mais Z/4Z n’est pas intègre.
4) L’anneau Z[X] est intègre mais non principal. Pour voir cela, on peut voir facilement que
l’idéal I =< 2, X > n’est pas principal.
1.6.3
Idéal engendré par une partie, somme d’idéaux
Définition et Proposition 1.6.11. Soit A un anneau commutatif unitaire.
i) Si I et J sont des idéaux de A, alors l’ensemble I + J = {x + y; x ∈ I, y ∈ J} est un idéal de
A, appelé l’idéal somme de I et J, et c’est le plus petit idéal contenant I et J.
ii) En particulier, si x et y sont des éléments de A, l’ensemble xA + yA = {xa + yb; a, b ∈ A}
est le plus petit idéal de A contenant x et y.
Démonstration. Soient I et J deux idéaux de A. Il est clair que I + J est un sous-groupe additif
de A (c’est le sous-groupe engendré par I ∪ J). Soit z ∈ I + J et a ∈ A quelconques ; il existe x ∈ I
et y ∈ J tels que z = x + y, d’où za = xa + ya. Or xa ∈ I car x ∈ I et I est un idéal ; de même
ya ∈ J. On conclut que za ∈ I + J, ce qui prouve que I + J est un idéal de A. Il est clair que
I ⊆ I + J, puisque tout x ∈ I s’écrit x = x + 0A avec 0A ∈ J ; de même J ⊆ I + J. Pour montrer
que c’est le plus petit, supposons que K est un idéal de A contenant I et J. En particulier, K est
stable par addition, et donc, quels que soient x ∈ I ⊆ K et y ∈ J ⊆ K, on a x + y ∈ K. ce qui
achève de prouver (i). l’assertion (ii) s’en déduit avec I = xA et J = yA
Remarque 1.6.12. Soit A un anneau commutatif unitaire.
(a) Plus généralement, pour toute partie X 6= ∅ de A, l’idéal engendré par X est par définition
l’intersection de tous les idéaux de A contenant X. C’est le plus petit idéal de A contenant
X.
La proposition1.6.7 correspond à X = {x}, l’assertion (i) de 1.6.11 à X = I ∪ J et
l’assertion (ii) de 1.6.11 à X = {x, y}.
(b) L’intérêt de la notion d’idéal somme réside dans le fait que la réunion de deux idéaux pas un
idéal en général. (Ce n’est pas un sous groupe additif : On peut considérez l’exemple A = Z,
I = 2Z et J = 3Z).
1.6.4
Produit d’idéaux, opérations sur les idéaux
Définition et Proposition 1.6.13. Soit A un anneau commutatif unitaire. Si I et J sont des idéaux
de A, on appelle produit des idéaux I et J, et on note IJ, l’ensemble des éléments de A qui sont
somme d’un nombre fini de produits d’un élément
Pnde I par un élément de J. (x ∈ IJ)⇔( il existe
n ∈ N∗ ,y1 , ..., yn ∈ I, z1 , ..., zn ∈ J tels que x = i=1 yi zi ).
Pn
Démonstration. Il est clair que IJ est un sous-groupe additif de A. Soit x = i=1 yi zi un élément
quelconque de IJ, avec
Pyn1 , ..., yn ∈ I et z1 , ..., zn ∈ J. Pour tout a ∈ A on a ayi ∈ I quel que soit
1 ≤ i ≤ n, donc ax = i=1 (ayi )zi appartient encore à IJ. Ceci prouve que IJ est un idéal. Il est
clair qu’il contient X = {yz; y ∈ I, z ∈ J}. Soit maintenant K un idéal qui contient X. Il contient
également les sommes d’éléments de X. Par conséquent IJ ⊆ K.
Remarque 1.6.14. Soit A un anneau commutatif unitaire. Si I, J et K sont des idéaux de A, on
peut monter que :
I + (J + K) = (I + J) + K, I(JK) = (IJ)K, I(J + K) = IJ + IK. .
12
1.7
Anneaux quotients
1.7.1
Définitions, premières propriétés
Rappelons qu’une relation < sur un ensemble X est dite relation d’équivalence si elle est réflexive (pour tout x, x<x), symétrique (si x<y, alors y<x) et transitive (si x<y et y<z, alors x<z).
L’ensemble des classes d’équivalence de X pour la relation < est noté X/<. Soient A un anneau
et I un idéal de A. En particulier I est un sous-groupe distingué puisque A est un groupe abélien
pour la somme. On peut considérer le groupe quotient A/I dont les éléments sont les classes pour
la relation d’équivalence < définie par :
x<y ⇐⇒ x − y ∈ I.
On note x = x + I la classe de l’élément x de A. , On va munir A/I d’une structure d’anneau.
On définit sur A/I l’addition et la multiplication de la façon suivante :
(a + I) + (b + I) = a + b + I, (a + I)(b + I) = ab + I, a, b ∈ A.
Notons que la somme et la multiplication sont compatibles avec cette relation.
On dit que A/I est l’anneau quotient de A par l’idéal I.
Si A est unitaire, 1A + I est l’élément unité pour la multiplication pour A/I. De même, si A est
commutatif alors A/I est commutatif.
La surjection canonique π : A → A/I est un morphisme d’anneaux. Ce morphisme est surjectif de
noyau I.
Remarque 1.7.1. Si I = {0A }, A/(0A ) s’identifie à A (π(a) = a pour tout a ∈ A). Si I = A, A/A
est l’anneau nul, car π(a) = 0 pour tout a ∈ A.
Exemple 1.7.2. Soient A = Z[i], I = (3) et J = (1 + i). On veut comprendre A/I et A/J.
On a a + bi ≡ c + di(mod(3)) ssi (a + bi) − (c + di) = 3(k + li) pour quelques k ∈ Z ssi a − c = 3k
et b − d = 3 pour quelques k, lZ, ssi a ≡ c (mod 3) et b ≡ d (mod 3). Donc, l’ensemble {a + bi : 0 ≤
a, b ≤ 2} est un système complet de représentants de résidus mod I. Cependant, on affirme que
Z[i]/(3) Z/3Z × Z/3Z
comme anneaux. En effet, puisque 3 est premier dans Z[i], on voit que Z[i]/(3) est intègre (si
ab = 0,il faut que 3|ab ; donc soit 3|a ou 3|b). Par contre, Z/3Z×Z/3Z n’est pas intègre :(0,1)(1,0) =
(0,0).
Le quotient A/J est plus compliqué à analyser. D’abord, on cherche une représentation de J. On a
a + bi ∈ J ssi a + bi = (m + ni)(1 + i) = m(1 + i) + n(−1 + i). On voit alors que J est constitué de
toutes le combinaisons linéaires sur Z de vecteurs/nombres complexes 1 + i et −1 + i. En faisant un
dessin, on peut voir que cet ensemble forme tourné par 45 degrés. En fait, ce réseau peut être obtenu
par translations, du carré dont les sommets sont 0, 1 + i, −1 + i, 2i. On voit alors que l’ensemble
{0, 1} est un système complet de représentants de résidus mod J. Par conséquent,
A/J ∼
= Z/2Z
1.7.2
Théorèmes d’isomorphisme d’anneaux
Théorème 1.7.3. (1er théorème d’isomorphisme d’anneaux). Soit φ : A → B un morphisme d’anneaux. Son noyau ker(φ) est un idéal de A et son image φ(A) est un sous-anneau de B. De plus,
on a :
A/ker(φ) ' φ(A)(=Imφ).
Démonstration. Puisque φ est un morphisme entre les groupes additifs de A et de B, ker(φ) est
un sous-groupe additif de A et φ(A) est un sous-groupe additif de B. De plus, si a ∈ ker(φ) et
a0 est n’importe quel élément de A, alors φ(aa0 ) = φ(a)φ(a0 ) = 0B φ(a0 ) = 0A et, de manière
similaire φ(a0 a) = 0B . On en déduit que ker(φ) est un idéal de A. Puis, si b, b0 ∈ φ(A), alors
b = φ(a) et b0 = φ(a0 ) pour quelques a, a0 ∈ A. Donc bb0 = φ(a)φ(a0 ) = φ(aa0 ) ∈ φ(A). Ceci montre
que φ(A) est un sous-anneau de B. Finalement, pour prouver que A/ker(φ) ' φ(A), on définit
13
ψ : A/ker(φ) ' φ(A) par ψ(a) = φ(a). On sait d’après la théorie des groupes que ψ est bien
défini et qu’il est un isomorphisme entre les groupes additifs. A/ker(φ) et φ(A). Finalement, on a
ψ(a1 · a2 ) = ψ(a1 a2 ) = φ(a1 a2 ) = φ(a1 )φ(a2 ) = ψ(a1 )ψ(a2 ).
Voici une application :
Soit ϕ : R[X] → C défini par P 7→ P (i). On voit facilement que ϕ est un morphisme. Son noyau est
constitué des polynômes à coefficients réels dont i est racine : ce sont les multiples de X 2 + 1 (car
si i est racine, −1 aussi). Le morphisme ϕ est surjectif (prendre les polynômes de degré inférieur
à 1) et donc R[X]/(X 2 + 1)' C.
Théorème 1.7.4. (Deuxième théorème d’isomorphisme) Soit A un anneau, I un idéal de A et B
un sous-anneau de A, alors :
i) B + I = {b + x/b ∈ B, x ∈ I} est un sous-anneau de A et I est un idéal de B + I.
ii) B ∩ I est un idéal de B.
iii) Les anneaux (B + I)/I et (B ∩ I)/I sont isomorphes.
Démonstration. Il est facile de vérifier que B + I est un sous-anneau de A contenant I, et que
B ∩ I est un idéal de B. Définissons φ : B + I → B/B ∩ I par φ(b + i) = b. Elle est bien définie :
si b1 + i1 = b2 + i2 , alors b1 − b2 = i2 − i1 ∈ B ∩ I car b1 − b2 ∈ B et i2 − i1 ∈ I. On en déduit
que b1 ≡ b2 (mod B ∩ I), comme requis. Puis, on montre que φ est un morphisme d’anneaux.
L’additivité de φ a déjà été établie en théorie des groupes. Pour la multiplicativité, on a :
(b1 + i1 )(b2 + i2 ) = b1 b2 + i,
où i = b1 i2 + i1 b2 + i1 i2 ∈ I,
φ((b1 + i1 )(b2 + i2 )) = b1 b2 = φ(b1 + i1 )φ(b2 + i2 ).
Finalement, si x ∈ ker(φ), alors x = b + i et φ(x) = b = 0, ce qui implique que b ∈ I. Donc,
x ∈ I. Vice versa, si x ∈ I, alors x = 0 + i et φ(x) = 0, c’est-à-dire x ∈ ker(φ). On en déduit que
ker(φ) = I. Le théorème découle ainsi du théorème 1.7.3.
Théorème 1.7.5. (3ème théorème d’isomorphisme d’anneaux). Soit A un anneau. Si I ⊆ J,où I et
J sont deux idéaux de A, alors J/I est un idéal de A/I et
(A/I)/(J/I) ' A/J
Démonstration. Il est simple de vérifier que J/I est un idéal de A/I. Pour la deuxième partie de la
preuve, considérons φ : A/I → A/J, définie par φ(a + I) = a + J. Par ailleurs, on vérifie aisément
que Elle est bien définie, car si a ≡ a0 (mod I), alors a ≡ a0 (modJ), vu que a − a0 ∈ I ⊆ J. C’est
facile aussi de prouver que φ est surjective. Finalement, on a φ(a + I) = 0 ssi a ∈ J, ssi a+I ∈ J/I.
Le résultat alors découle du théorème 1.7.5.
Théorème 1.7.6. (4ème théorème d’isomorphisme d’anneaux - théorème de correspondance). Soient
A un anneau et I un idéal de A. Désignons par S l’ensemble de sous-anneaux de A contenant I,
et par I l’ensemble d’idéaux de A contenant I,
(a) Si B ∈ S, alors B/I est un sous-anneau deA/I.
(b) Si J ∈ I, alors J/I est un idéal de A/I.
(c) Si B, C ∈ S, alors B ⊆ C ssi B/I ⊆ C/I.
(d) Tous les sous-anneaux de A/I sont de la forme B/I, où B ∈ S.
(e) Tous les idéaux de A/I sont de la forme J/I, où J ∈ I.
14
Démonstration. Les assertions (a) et (b) sont évidentes.
(c) Un sens est évident : si B ⊆ C, alors B/I ⊆ C/I. Vice versa, supposons que B/I ⊆ C/I et soit
b ∈ B. Donc b + I ∈ C/I, c’est-à-dire il existe c ∈ C et i ∈ I tels que b = c + i. Puisque C ⊇ I et
C est stable pour l’addition comme un sous-anneau de A, on trouve que b ∈ C. Ceci montre que
B/I ⊆ C/I, ce qu’il fallait prouver.
(d) Il faut montrer que si R est un sous-anneau de A/I, alors il existe B ∈ S tel que R = B/I.
Définissons B := {b ∈ A : b + I ∈ R}. On affirme que B ∈ S. Tout d’abord, il est clair que
B ⊇ I, car I = 0R ∈ R. En particulier , B 6= ∅. De plus, si b1 , b2 ∈ B, alors b1 + I, b2 + I ∈ B.
Donc b1 − b2 + I = (b1 + I) − (b2 + I) ∈ R car R est stable sous la soustraction, ainsi que
b1 b2 + I = (b1 + I)(b2 + I) ∈ R car R est stable sous la multiplication. Ceci montre que B ∈ S. Or,
on montre que B/I = R. Par définition, b + I ∈ R pour tout b ∈ B, donc B/I ⊆ R. Vice versa, si
b + I ∈ R, alors b ∈ B et donc b + I ∈ B/I.
(e) On remarque que si R est un idéal de A/I, alors il est un sous-anneau de A/I. On peut alors
définir B := {b ∈ A : b+I} comme ci-dessus. On sait déjà que B est un sous-anneau de A contenant
I et que R = B/I. Pour montrer que B est un idéal de A, considérons b ∈ B et a ∈ A. Puisque
b + I ∈ R et R est un idéal, on a ab + I = (a + I)(b + I) ∈ R. On déduit que ab ∈ R. De même on
montre que ba ∈ R également. Ceci conclut la démonstration.
Définition 1.7.7. Soient A un anneau unitaire et φ : Z → A, n 7→ n1A . On appelle caractéristique
de A, l’unique entier k ∈ N tel que ker φ = kZ.
Exemple 1.7.8.
1) L’anneau Z, ainsi que les corps Q, R, C sont de caractéristique 0.
2) Pour n > 1 dans N, l’anneau Z/nZ est de caractéristique n.
Dans toute la suite, les anneaux considérés
sont supposés commutatifs.
1.8
1.8.1
Idéaux premiers et maximaux
Idéaux premiers
Soit I un idéal de A. On dit que I est un idéal propre de A si I 6= A.
Définition 1.8.1. Soit A un anneau et soit P un idéal de A. On dit que P est un idéal premier si
i) l’idéal P est propre ;
ii) a, b ∈ A sont tels que : si ab appartient à P alors a ∈ P ou b ∈ P .
Cette notion généralise celle de nombre premier. En effet, si un produit d’entiers ab est
multiple d’un nombre premier p, alors a ou b est multiple de p. La condition que soit P est
propre, donc que P 6= A, est analogue à la convention qui dit que 1 n’est pas un nombre
premier. Parfois on utilise la seconde assertion sous sa forme contraposée : si a et b sont
deux éléments de A n’appartenant pas à P , alors leur produit ab n’appartient pas à P .
Proposition 1.8.2. Soient A un anneau et P 6= A un idéal de A. Les assertions suivantes sont
équivalentes.
(i) L’anneau A/P est intègre.
(ii) Pour tous a et b éléments de A, [ab ∈ P ]⇒ [a ∈ P ou b ∈ P ].
Démonstration. Supposons que l’assertion i) est vérifiée et soient a et b deux éléments de
A tels que ab ∈ P . Alors la classe ab de ab dans A/I est nulle. On a donc ab = 0A et
puisque l’anneau A/P est intègre, on a a = 0A ou b = 0A , i.e. a ∈ P ou b ∈ P . Supposons
maintenant que l’assertion (ii) est vérifiée et soient a et b deux éléments de A/P tels que
ab = 0A . Cela signifie que ab appartient à P , donc a ou b appartient à P . Autrement dit,
(ab = 0A ) ⇒ (a = 0A ou b = 0A ) et l’anneau A/P est intègre.
15
Exemple 1.8.3.
a) Les idéaux premiers de Z sont les pZ où p est un nombre premier.
b) A est un domaine d’intégrité si et seulement si (0A ) est un idéal premier.
c) Si K est un corps, les idéaux (X) et (X, Y ) de K[X, Y ] sont premiers.
Lemme 1.8.4. Soient A un anneau et P un idéal de A, alors : P est premier ⇐⇒ Pour tous idéaux
I, J de A, (IJ ⊆ P ⇒ I ⊆ P ou J ⊆ P ).
Démonstration. ⇒) Supposons que P est premier, soient I et J deux idéaux de A tels que IJ ⊆ P .
Supposons que I * P , soient donc i ∈ I tel que i ∈
/ P et j ∈ J, on a ij ∈ P et puisque P est
premier et i ∈
/ P alors j ∈ P , donc J ⊆ P
⇐) Supposons que pour tous idéaux I, J de A, (IJ ⊆ P ⇒ I ⊆ P ou J ⊆ P ). Soient x, y ∈ A tels
que xy ∈ P , donc (xy) ⊆ P . Or (xy) = (x)(y) et par suite (x)(y) ⊆ P . Il découle de l’hypothèse
(x) ⊆ P ou (y) ⊆ P ie. x ∈ P ou y ∈ P , d’où P est premier.
Corollaire 1.8.5. P étant un idéal premier d’un anneau unitaire commutatif A, pour tout n ∈ N∗
on a :
1) (x ∈ A et xn ∈ P ) ⇒ x ∈ P .
2) (I idéal de A et I n ⊆ P ) ⇒ I ⊆ P .
Proposition 1.8.6. Soient A et B deux anneaux et f : A −→ B un morphisme d’anneaux. Alors on
a:
i) Quel que soit l’idéal premier J de B, f −1 (J) est un idéal premier de A contenant ker(f ).
ii) Dans le cas où f est surjectif, quel que soit l’idéal premier I de A contenant ker(f ), f (I) est
un idéal premier de B.
Démonstration. i) J étant un idéal de B, d’après la proposition 1.6.5.(a) f −1 (J) est un idéal de A
contenant ker(f ) car 0A ∈ J. Il reste à vérifier que : J est premier dans B ⇒ f −1 (J) est premier
dans A. Soient x, y ∈ A tel que xy ∈ f −1 (J), alors f (xy) = f (x)f (y) ∈ J et comme J est premier
on aura f (x) ∈ J ou f (y) ∈ J ie : x ∈ f −1 (J) ou y ∈ f −1 (J). D’où f −1 (J) est premier.
ii) Étant donné un idéal I de A, d’après la proposition 1.6.5.(c), f (I) est un idéal de B. Montrons
alors que f (I) est premier. Soient x, y ∈ B tels que xy ∈ f (I), comme f est surjectif, alors
∃a, b ∈ A tel que x = f (a) et y = f (b). Or xy = f (ab) ∈ f (I) donc ∃z ∈ I tel que f (z) = f (ab) ie :
f (z − ab) = 0B ie : z − ab ∈ ker(f ) ⊆ I.Par conséquent ab ∈ I et puisque I est premier alors a ∈ I
ou b ∈ I ie : x = f (a) ∈ f (I) ou y = f (b) ∈ f (I) d’où f (I) est premier.
Lemme 1.8.7. Un idéal P d’un anneau A est premier si et seulement s’il existe une partie S stable
par multiplication (contenant 1 et ne contenant pas 0A ), telle que P soit maximal parmi les idéaux
de A ne rencontrant pas S.
Démonstration. ⇒) On suppose que P est premier, alors on pose S = A \ P . Soit I un idéal de A
tel que S ∩ I = ∅ i.e. (A \ P ) ∩ I = ∅ i.e. I ⊆ P d’où P est maximal parmi les idéaux de A qui ne
rencontrent pas S.
⇐) Soient S une partie stable par multiplication (contenant 1A et ne contenant pas 0A ) et P un
idéal de A maximal parmi les idéaux de A ne rencontrant pas S. Soient x, y ∈ A tels que xy ∈ P,
supposons que x ∈
/ P et y ∈
/ P , les idéaux P + (x) et P + (y) contiennent strictement P , donc
rencontrent S. Soient s1 , s2 ∈ S et s1 ∈ P + (x), s2 ∈ P + (y), le produit s1 s2 sera dans P ∩ S, ce
qui contredit le fait que P ∩ S = ∅.
16
1.8.2
Idéaux maximaux
Définition 1.8.8. Soit A un anneau. Un idéal m est dit maximal s’il est propre et si les seuls idéaux
de A contenant m sont m et A.
Un idéal maximal est donc un élément maximal de l’ensemble des idéaux propres de A pour la
relation d’ordre donnée par l’inclusion.
Proposition 1.8.9. Un idéal m d’un anneau A est maximal si et seulement si l’anneau A/m est un
corps.
Démonstration. Tout d’abord, affirmer que A/m est nul est équivalent à dire que m n’est pas
propre : si m est maximal, A/m n’est pas nul ; si A/m est un corps, il est en particulier non nul
puisque l’anneau nul n’est pas un corps. Par ailleurs A/m est un corps si et seulement s’il a deux
idéaux, 0A et A/m. Par image réciproque, d’après le corollaire 1.6.8, cela signifie que m et A sont
les deux seuls idéaux de A contenant m.
Exemple 1.8.10.
1) Dans tout corps K, (0) est le seul idéal maximal.
2) Un idéal maximal est premier. En effet, si I est maximal, A/I est un corps et par conséquent
intègre.
Cependant la réciproque n’est pas vraie en général. Dans l’anneau Z, l’idéal (0) est premier
puisque Z est intègre mais non maximal puisque Z n’est pas un corps.
Ceci dit, nous aboutissons au résultat suivant : Dans un domaine principal, tout idéal premier
non nul est maximal.
Remarque 1.8.11. Soit f : A → B un morphisme d’anneaux. On a vu que l’image réciproque d’un
idéal premier de B par f est encore premier. Un énoncé analogue pour les idéaux maximaux n’est
pas vrai en général. Par exemple, si l’on prend pour f le morphisme d’anneaux injectif f : Z → Q,
alors l’image réciproque de l’idéal (0) n’est pas maximal.
Existence d’un idéal maximal
Est-ce qu’un anneau admet toujours un idéal maximal ? Est-ce que tout idéal propre est contenu
dans un idéal maximal ? Pour répondre en général à ces questions, il faut s’autoriser à utiliser
l’axiome du choix ou, sous sa forme équivalente, le lemme de Zorn. Rappelons qu’un ensemble
ordonné est totalement ordonné si tous ses éléments sont comparables. Le lemme de Zorn affirme
alors que si E est un ensemble ordonné non vide satisfaisant à la propriété : toute partie totalement
ordonnée non vide a une borne supérieure dans E, alors E a un élément maximal.
Théorème 1.8.12. Tout anneau non nul possède au moins un idéal maximal.
Démonstration. On va appliquer le lemme de Zorn à l’ensemble E des idéaux propres de A ordonné
par l’inclusion. Cet ensemble n’est pas vide puisqu’il contient l’idéal nul. Montrons que toute famille
(It ) totalement ordonnée d’idéaux propres a une borne supérieure dans E, à savoir l’idéal I = ∪It .
Il s’agit de vérifier d’une part que I est bien un idéal et d’autre part que I est propre. En général,
la réunion d’une famille d’idéaux n’est pas un idéal. Ici, dans le cas de la réunion d’une famille
totalement ordonnée, c’est cependant le cas. Il est clair que 0 ∈ I. Si x, y ∈ I, il existe s et t tels
que x ∈ Is et y ∈ It . On a It ⊆ Is ou Is ⊆ It puisque la famille est totalement ordonnée. Sans
restriction, on peut supposer que Is ⊆ It . Alors x + y ∈ It et donc x + y ∈ I. Si a ∈ A et x ∈ I,
on sait qu’il existe t tel que x ∈ It . Comme It est un idéal ax ∈ It et par conséquent ax ∈ I. Pour
montrer la seconde assertion supposons le contraire, c’est-à-dire que I = A. Dans ce cas, 1A ∈ I. Il
existe donc t tel que 1A ∈ It . Mais alors It = A et It ne serait pas propre, d’où la contradiction.
Corollaire 1.8.13. Dans un anneau non nul, tout idéal propre est contenu dans un idéal maximal.
Proposition 1.8.14. Soit A un anneau. Un élément de A est inversible si et seulement si il n’appartient à aucun idéal maximal.
17
Démonstration. Si a est inversible, l’idéal (a) contient 1A et est donc égal à A. Ainsi, le seul idéal
contenant a est égal à A et a ne peut appartenir à aucun idéal maximal. Réciproquement, si a n’est
pas inversible, (a) 6= A. D’après le corollaire précédent, il existe un idéal maximal de A contenant
(a) et donc en particulier a
On achève la section en explication la relation entre les idéaux d’un anneau et ceux du quotient
décrit dans le théorème 1.7.5
Proposition 1.8.15. Soient A un anneau, I un idéal de A et π : A → A/I la surjection canonique.
La bijection donnée par π −1 entre les idéaux de A/I et les idéaux de A contenant I induit des
bijections entre
- Les Idéaux premiers de A/I et les idéaux premiers de A contenant I .
- Les Idéaux maximaux de A/I et les idéaux maximaux de A contenant I.
Démonstration. Soit J un idéal de A contenant I. Il s’agit de montrer que J est premier (resp.
maximal) si et seulement J/I ⊆ A/I l’est. Or, on sait déjà que A/J est isomorphe à (A/I)/(J/I)
d’après le théorème 1.7.5. En utilisant les critères de l’anneau quotient pour qu’un idéal soit premier
ou maximal (propositions 1.8.2 et 1.8.9), on voit que J/I est premier (resp. maximal) dans A/I si
et seulement si J est premier (resp. maximal) dans A.
1.9
1.9.1
Divisibilité et idéaux
Divisibilité
Clarifions la relation entre divisibilité et inclusion des idéaux. Dans un anneau intègre A, on
dira que a divise b et on note a|b s’il existe c ∈ A tel que b = ca ou autrement dit si b ∈ (a) ou
encore si (b) ⊆ (a). L’application de l’ensemble A vers l’ensemble de ses idéaux, qui associe à un
élément l’idéal principal qu’il engendre transforme donc la divisibilité en inclusion. Quand est-ce
que deux éléments engendrent le même idéal principal ?
Proposition 1.9.1. Deux éléments x et y d’un anneau intègre A engendrent le même idéal principal
si et seulement s’il existe un élément inversible u telle que : y = ux. Quand c’est le cas, on dit que
x et y sont associés.
Démonstration. Par définition x|y et y|x ⇔ (x) = (y). Si y = ax et x = by, alors xy = abxy et
donc (1 − ab)xy = 0A . Comme l’anneau est intègre on doit avoir ab = 1A , si bien que a et b sont
inversibles. La réciproque est claire.
Dans un anneau principal A, si a et b sont des éléments de A, l’idéal (a, b) est de la forme (c).
Alors c divise a et b et c’est le plus grand des diviseurs au sens de l’inclusion des idéaux. D’après
la proposition précédente, l’élément c est bien défini à un inverse près. On pourra donc construire
le pgcd de a et b comme étant un générateur de (a, b), sachant qu’il est bien défini à un inverse
près.
1.9.2
Éléments irréductibles ; éléments premiers
Définition 1.9.2. Soit A un anneau intègre. Un élément q de A est dit irréductible si
- q n’est pas inversible ;
- Si b, c ∈ A sont tels que q = bc, alors b ou c est inversible.
Autrement dit, un élément non nul q dans A est irréductible s’il n’est pas une unité et s’il n’a que
des factorisations q = bc banales, avec b ou c une unité. Remarquons au passage 0A = 0A 0A n’est
pas irréductible.
Définition 1.9.3. Un élément d’un anneau intègre est premier si l’idéal qu’il engendre est premier.
En d’autres termes, un élément est premier si, quand il divise un produit, il divise l’un des facteurs.
18
Proposition 1.9.4. Soit x ∈ A, on a l’équivalence suivante :
i) x est irréductible dans A.
ii) (x) est maximal parmi les idéaux principaux de A.
Démonstration. i)⇒ ii) Supposons que x est irréductible, ainsi (x) est différent de {0A } et
de A. Si y ∈ A tel que (x) ⊆ (y) alors x ∈ (y) i.e. ∃a ∈ A tel que x = ya donc y ∈ U(A) et
(y) = A ou bien a ∈ U(A). On aura y = xa−1 donc (y) ⊆ (x) d’ou (y) = (x). Il en résulte
que (x) est maximal parmi les idéaux principaux de A.
ii)⇒i) Supposons que (x) est maximal parmi les idéaux principaux de A, donc il est évident
x 6= 0A et x ∈
/ U(A). Soient a, b ∈ A tels que x = ab, alors (x) ⊆ (a) donc (a) = A et a ∈ U(A)
ou bien (a) = (x) et par suite b ∈ U(A). D’où x est irréductible.
Corollaire 1.9.5. Si A est un corps alors A[X] est principal.
Démonstration. Comme A est un corps, c’est un anneau intègre et par suite A[X] est également
un anneau intègre.
Soit I un idéal non trivial de A[X]. On pose : W = {deg(P )|P ∈ I \ {0}}. Comme I est non trivial,
alors W 6= ∅. Puisque W est une partie non vide de N∗ en effectuant elle admet un plus petit
élément, notons le n0 .
Soit Q ∈ I tel que deg(Q) = n0 . Soit P ∈ I, on fait la division euclidienne de P par Q, il existe
T, R dans A tels que P = T Q + R avec R = 0 ou deg(R) < deg(Q). Or R = P − T Q donc R ∈ I.
Q étant de degré minimal dans les élément de I on aura R = 0 et par suite P = T Q i.e. P ∈ (Q)
c-a-d I ⊂ (Q) et comme (Q) ⊂ I alors on a l’égalité. Ceci dit, I est principal.
Ceci prouve que A[X] est principal.
Théorème 1.9.6. Soit A un corps et P ∈ A[X], il y a une équivalence entre :
i) P est irréductible.
ii) (P ) est premier.
iii) (P ) est maximal.
Démonstration. i) =⇒ ii) :P est irréductible, donc premier et par suite (P ) est premier.
ii)=⇒ iii) : Facile à établir.
iii) =⇒ i) : Comme A[X] est principal, (P ) est maximal parmi les idéaux principaux de A[X] et
d’après la proposition 1.9.4, on déduit que P est irréductible.
1.10
Anneau local
Soit A un anneau.
Définition 1.10.1.
i) On dit que A est un anneau local s’il admet un seul idéal maximal m .
On note (A : m) l’anneau local A d’idéal maximal m. S’il possède un nombre fini d’idéaux
maximaux, on dit qu’il est semi-local.
ii) Le corps A/m s’appelle le corps résiduel de A.
Exemple 1.10.2. Tout corps K est un anneau local. En effet, les seuls idéaux d’un corps sont l’idéal
nul et lui-même et d’après le théorème de Krull, K admet un idéal maximal. Ceci dit, l’unique
idéal (l’idéal nul) de K qui est différent de K sera forcément maximal.
Proposition 1.10.3. Soit (A : m) un anneau local. Alors :
m = A \ U(A)
Démonstration. Comme m est un idéal strict de A, alors tout élément de m est non inversible.
Inversement soit a ∈ A non inversible, donc l’idéal (a) est un idéal strict de A. D’après le théorème
de Krull, (a) est contenu dans un idéal maximal. Comme A est local alors (a) ⊂ m et par suite
a ∈ m.
19
Remarque 1.10.4. (1) Soit A un anneau et M un idéal propre de A tel que tout x n’appartenant
pas à M est inversible.Alors A est local d’idéal maximal M .
(2) si M un idéal maximal d’un anneau A et supposons que tout élément x de 1A + M =
{1 + m/m ∈ M } est inversible, alors (A, M ) est local.
Théorème 1.10.5. Les assertions suivantes sont équivalentes :
i) (A, m) est un anneau local.
ii) L’ensemble des idéaux de A distincts de A possède un plus grand élément.
iii) L’ensemble des éléments non inversibles forme un idéal.
Démonstration. iii) =⇒ ii) : Soit I := A \ U(A).
Soit J un idéal strict de A, alors J ∩ U(A) = ∅ donc J ⊂ A \ U(A) et par suite I est le plus
grand élément dans l’ensemble des idéaux de A distincts de A.
ii) =⇒ i) : Par définition un élément maximum est un élément maximal. Montrons qu’il est
unique. En effet : Soient m cet élément maximum et I un autre élément maximal. Alors
forcément I ⊂ m. Donc nécessairement I = m.
i) =⇒ iii) C’est la proposition 1.10.3, (m = A \ U(A)).
1.11
Localisation
Dans cette section nous allons généraliser le passage de l’anneau des entiers Z au corps des
rationnels Q aux anneaux quelconques. On procédera par imitation le calcul de fractions qu’on
apprend au collège.
Définition 1.11.1. Soit A un anneau. Une partie S de A est dite multiplicative si elle vérifie les
propriétés
- 1A ∈ S ;
- si s, s0 ∈ S alors ss0 ∈ S.
Autrement dit, une partie S de A est multiplicative si tout produit fini d’éléments de S appartient
à S.
Exemple 1.11.2. On vérifie sans peine que les parties suivantes sont multiplicatives dans leurs
anneaux respectivement.
a) S = {1A } ;
b) S = Z \ {0} dans Z ;
c) S = {1, 10, 100, ...}, l’ensemble des puissances de 10 dans Z ;
d) S = A \ P dans un anneau A si P ⊆ A est un idéal premier ;
e) Soit f : A → B un morphisme d’anneaux . Si S est une partie multiplicative de A, alors f (S)
est encore une partie multiplicative de B. Inversement, si T est une partie multiplicative de
B, alors f −1 (T ) est encore une partie multiplicative de A.
i) Si I est un idéal de A. Alors l’ensemble S = 1A + I des éléments de la forme 1A + x
avec x ∈ I est une partie multiplicative. En effet, il s’agit de l’image réciproque de la partie
multiplicative {1} de A/I sous la surjection canonique π : A → A/I.
Notre but sera de construire, pour un anneau A et une partie multiplicative S de A un anneau
S −1 A aussi petit que possible, et un morphisme d’anneaux i : A → S −1 A tel que i(S) est formé
d’éléments inversibles dans S −1 A. On souhaite retrouver par exemple A = Z et S = Z \ {0} le
corps des rationnels Q et pour A = Z et S = {1, 10, 100, ...}, l’ensemble des nombre décimaux,
c’est-à-dire l’ensemble des nombres rationnels qui peuvent s’écrire de la forme a/10n avec a ∈ Z
et n ∈ N.
20
1.11.1
Construction de l’anneau S −1 A
Soient A un anneau et S une partie multiplicative de A. On définit sur l’ensemble A × S la
relation d’équivalence ∼ comme suit
(a, s) ∼ (b, t) ⇔ il existe u ∈ S tel que r(at − bs) = 0A
C’est bien une relation d’équivalence. En effet :
a) On a (a, s) ∼ (a, s) puisque 1 ∈ S et 1A (as − as) = 0A (réflexivité) .
b) Si (a, s) ∼ (b, t), il existe r ∈ S tel que r(at − bs) = 0A et donc r(bs − at) = 0A d’où
(b, t) ∼ (a, s) (symétrie) .
c) Si (a, s) ∼ (b, t) et (b, t) ∼ (c, u), on choisit v, w ∈ S tels que v(at − bs) = 0A et w(bu − ct) =
0A . Il en découle
t(au − cs) = u(at − bs) + s(bu − ct),
avec vwt(au − cs) = 0A , et puisque r = vwt ∈ S on a (a, s) ∼ (c, u) (transitivité).
On désigne par S −1 A l’ensemble des classes d’équivalence. La classe de (a, s) est notée a/s. On
note i : A → S −1 A l’application qui associe a ∈ A à la classe a/1 dans S −1 A. On va maintenant
munir S −1 d’une structure d’anneau de manière à ce que i soit un morphisme d’anneaux. On va
mimer la définition habituelle pour la somme et le produit de fractions. Par définition l’élément
0 ∈ S −1 A est la classe 0A /1A . L’élément 1 ∈ S −1 A est la classe 1A /1A . Ensuite on pose
(a/s) + (b/t) := (at + bs)/st, (a/s)(b/t) := (ab/st).
pour la somme et
i(ab) = (ab)/1 = (a/1)(b/1) = i(a)i(b)
pour le produit. Si s ∈ S alors i(s) = s/1 et i(s)1/s = s/s = 1. Ainsi i(s) est inversible dans S −1 A
pour tout s ∈ S. Souvent on appellera le morphisme i : A → S −1 A morphisme canonique.
- Dans la construction ci-dessus, la relation d’équivalence peut paraı̂tre surprenante puisqu’elle
semble moins forte que la règle habituelle at = bs. Dans le cas où A est intègre et 0 ∈
/ S c’est bien
sûr équivalent. Cependant, la règle at = bs ne nous donne pas en général une relation d’équivalence.
Ce qui explique pourquoi nous sommes obligés de procéder comme ci-dessus : le calcul de fractions
dans un anneau non intègre. Donc l’utilisation d’un élément r ∈ S tel que r(at − bs) = 0 dans
la relation d’équivalence nécessite un peu d’attention en général. Le plus simple dans un premier
temps sera de toujours écrire la relation explicitement dans ce cas pour ne pas se laisser induire en
erreur par ses habitudes du calcul de fractions. Bien entendu, dès que A est intègre. On calculera
comme à l’accoutumée.
Exemple 1.11.3. - Voilà quelques exemples d’anneaux S −1 A
a) Soit A un anneau et S = {1}. Alors S −1 A = A.
b) Soit A = Z est S = Z \ 0. Alors S −1 A = Q.
c) Soit A un anneau intègre et S = A\{0}. Alors S −1 A est un corps. En effet : Soit a/s ∈ S −1 A
Si cet élément est nul il existe par définition b ∈ A \ {0} tel que ab = 0. Comme A est intègre,
a = 0. En particulier 1/1 6= 0 et l’anneau S −1 A est non nul. Si a/s est non nul, on a a 6= 0
et s/a est donc un élément de S −1 A. Comme (a/s)(s/a) = 1, il suit que (a/s) est inversible.
L’anneau S −1 A est donc bien un corps. Ce corps est appelé corps de fractions de l’anneau
A et noté K(A). Dans le cas particulier où A = k[X] pour un corps k, le corps S −1 k[X] est
noté k(X) et est appelé le corps des fractions rationnelles à coefficients dans k.
d) Soit A un anneau et S = {1, a, a2 , a3 , ...} pour un élément a ∈ A. L’anneau S −1 A sera noté
Aa et appelé le localisé de A par rapport à a.
21
e) Soient A un anneau et P un idéal premier. L’anneau S −1 A pour S = A \ P sera noté AP et
appelé le localisé de A en P .
L’anneau S −1 A est en général appelé le localisé de l’anneau A par rapport à la partie multiplicative
S. Cette appellation provient de la géométrie algébrique.
Remarque 1.11.4.
1) Soient A un anneau et S une partie multiplicative. Est-ce qu’il peut arriver
que S −1 A soit l’anneau nul ? D’après la définition la fraction a/s est nulle dans S −1 A si et
seulement si il existe r ∈ S tel que r(a1 − s) = ra = 0. Dire que S −1 A est nul signifie que
1/1 = 0, c’est-à-dire qu’il existe r ∈ S tel que r1 = r = 0, ou autrement dit que 0 ∈ S On voit
donc que l’anneau S −1 A est nul si et seulement si 0 ∈ S. Cela nous explique l’interdiction de
diviser par zéro dans le calcul des fractions du collège. Sinon, toute fraction serait égale à 0
2) Soient A un anneau et S une partie multiplicative. Sous quelle condition est-ce que le morphisme canonique i : A → S −1 A est injectif ? Supposons que a ∈ ker(i). Alors a/1 = 0/1
dans S −1 A ou, en d’autres termes, il existe r ∈ S tel que ra = 0. On voit donc que i est
injectif si et seulement si aucun élément de S n’est un diviseur de zéro de A. En particulier,
si A est intègre, le morphisme canonique est toujours injectif.
Au début de la section, on avait mentionné qu’on cherchait un anneau aussi petit que possible.
Cela se traduit par la propriété universelle suivante :
Proposition 1.11.5. Soient A un anneau, S une partie multiplicative de A et i : A → S −1 A le
morphisme canonique. Alors, pour tout morphisme anneaux f : A → B tel que f (S) ⊆ B \ 0B il
existe un unique morphisme d’anneaux g : S −1 A → B rendant commutatif le diagramme
g
A
/ S −1 A
i
" B
f
Démonstration. Si l’application g existe, on doit avoir
g(a/s)f (s) = g(a/s)g(s/1) = g(a/1) = f (a)
et par la suite, puisque f (s) est inversible.
g(a/s) = f (a)f (s)−1
La relation ci-dessus nous confirmera que g est unique, dès que g existe. Pour l’existence, on définira
g par cette formule, on établira d’abord que g est bien définie, c’est-à-dire qu’elle ne dépend pas
des représentants d’une classe, puis que g définit bien un morphisme d’anneaux. Ces vérifications
sont immédiates.
L’anneau Aa obtenu par localisation d’un élément a de A est en fait un anneau quotient :
Proposition 1.11.6. Soient A un anneau et a un élément de A. Soit S = {1, a, a2 , ..} la partie
multiplicative des puissances de a. Le morphisme canonique
f : A[X] → S −1 A,P 7→ P (1/a).
est surjectif ayant pour noyau l’idéal (1 − aX). En particulier, on a un isomorphisme
f : A[X]/(1 − aX) w S −1 A.
Démonstration. Un élément de S −1 A s’écrit sous la forme b/an pour un certain b ∈ A et n ∈ N.
Il est l’image du monôme bX n de A[X] et f par conséquent bien surjectif. On a f (1 − aX) =
1 − a/a = 0 donc le noyau de f contient bien l’idéal (1 − aX). Pour prouver que ce noyau est
précisément (1 − aX), on va montrer que le morphisme f est un isomorphisme, en construisant son
inverse. Considérons le morphisme
A → A[X]/(1 − aX), b 7→ [b]
22
ou autrement dit le morphisme qui associe à l’élément b ∈ A la classe du polynôme constant b dans
le quotient A[X]/(1 = aX). Dans ce quotient [aX] = 1 et [a] est donc inversible d’inverse [X].
Ainsi, par la propriété universelle du localisé (proposition 1.10.5) il existe un unique morphisme
g : S −1 A → A[X]/(1 − aX) tel que l’on ait g(b) = g(b/1) = [b]. Par construction, g(b/an ) = [bX n ].
Montrons que P
g est bien l’inverse de f . Si P ∈ A[X], on a par définition g(f (P )) = g(P (1/a). Si
l’on écrit P =
bn X n . On voit que
P
P
P
P (1/a)) = g( bn /an ) = g(bn /an ) = [bn X n ] = [P ]
D’où g ◦ f = Id. Si on applique d’abord g et ensuite f on trouve
f (g(b/an )) = f [bn ] = f (bX n ) = b/an
Ainsi on a f ◦ g = Id et f est donc bien un isomorphisme.
1.11.2
Idéaux d’un anneau localisé
Le localisé d’un anneau conserve bien des aspects de l’anneau d’origine et peut en être vu comme
une simplification. C’est en particulier le cas en ce qui concerne les idéaux. Soient A un anneau
et S ⊆ A une partie multiplicative. Si I est un idéal de A, l’ensemble S −1 I formé des fractions
x/s dont le numérateur x est dans I est un idéal de l’anneau S −1 I. C’est un idéal propre si et
seulement si I ne rencontrant pas S. Inversement si J est un idéal de l’anneau S −1 A, son image
réciproque i−1 (J) dans A est un idéal de A.
Proposition 1.11.7. Soit A un anneau et soit S ⊆ A une partie multiplicative de A.
a) Pour tout idéal J dans S −1 A, on a S −1 (i−1 (J)) = J ;
b) Pour tout idéal I dans A, on a : (S −1 I) ∩ A ⊃ I ;
c) Si J est un idéal premier de S −1 A, l’idéal I = i−1 (J) est l’unique idéal premier de A disjoint
de S tel que S −1 I = J.
Proposition 1.11.8. Soit A un anneau et soit S ⊆ A une partie multiplicative de A. Alors l’application J → i−1 (J) induit une bijection entre les idéaux premiers de S −1 A est les idéaux premiers
de A ne rencontrent pas S.
Corollaire 1.11.9. Soit A un anneau et soit S ⊆ A une partie multiplicative de A. Alors si S ne
contient pas l’élément 0, il existe un idéal premier disjoint de S.
Démonstration. Comme S ne contient pas 0, l’anneau S −1 A est non nul. Il contient donc un
idéal maximal M , d’après le théorème (1.8.12). Soit P = i−1 (M ). Alors P est premier d’après
la proposition (1.8.6), disjoint de S. Si A est intègre, le morphisme canonique i : A → S −1 A est
injectif. En identifiant A avec son image dans S −1 A, l’idéal i−1 (J) de A n’est autre que J ∩ A où
l’intersection est prise dans S −1 A. Dans ce cas la bijection ci-dessus est donnée par J → J ∩ A.
Remarque 1.11.10. Soit A un anneau et P ⊆ A un idéal premier de A. D’après ce que nous avons
vu, les idéaux premiers de l’anneau A/P sont les idéaux premiers de A contenant P ; les idéaux
premiers de l’anneau AP sont les idéaux premiers contenus dans P . Selon les questions, si l’on est
intéressé par les idéaux contenant P , il sera naturel de passer au quotient A/P ; si par contre on
s’intéresse aux idéaux premiers contenus dans P , on passera au localisé AP .
Exemple 1.11.11. Soit P un idéal premier de A. Le localisé AP n’a qu’un seul idéal maximal : le
localisé S −1 P ⊆ S −1 A de l’idéal P .
23
CHAPITRE
2
SPECTRE ET RADICAL DE JACOBSON
Soit A un anneau commutatif, unitaire et admettant A au moins un idéal maximal.
2.1
La notion de spectre d’anneau
Définition 2.1.1. L’ensemble des idéaux premiers de A s’appelle le spectre de A noté Spec(A).
Remarque 2.1.2. Spec(A) est non vide car A admet des idéaux maximaux .
Exemple 2.1.3.
1) Spec{0A } = ∅.
2) Spec(Z) ={(a) | a = 0 ou a est premier}.
3) Si K est un corps alors Spec(K) = {0} .
2.1.1
Spectre de quelques anneaux spéciaux
Spectre de produit d’anneaux : Soient A1 et A2 deux anneaux. On considère l’anneau produit
A = A1 × A2 .
ˆ Déterminons l’ensemble des idéaux de A :
Soit I un idéal de A. Notons I1 et I2 les images de I par les projections pr1 et pr2 respectivement.
Soit i ∈ {1, 2}, montrons que Ii un idéal de Ai : on a Ii = pri (I) et pri est un morphisme
d’anneaux surjectif, donc d’après la proposition 1.6.5.[chapitre 1.page 10] Ii est bien un idéal
de Ai .
Montrons que I = I1 × I2 :
Soit (x, y) ∈ I, alors x ∈ I1 et y ∈ I2 donc I ⊂ I1 × I2 .
Inversement, soit (x, y) ∈ I1 × I2 , il existe alors x0 ∈ A1 et y 0 ∈ A2 tels que (x, y 0 ) ∈ I et
(x0 , y) ∈ I. Alors on a :
(x, y) = (1, 0)(x, y 0 ) + (0, 1)(x0 , y) ∈ I
D’où I1 × I2 ⊂ I.
Il en résulte que l’ensemble des idéaux de A est {I1 × I2 / Ii un idéal de Ai ; i ∈ {1, 2}}.
ˆ Déterminons Spec(A) :
Soit I = I1 ×I2 un idéal de A, I1 ×I2 est premier implique que l’anneau A/I = A1 /I1 ×A2 /I2
est intègre, ce produit est intègre si et seulement s’il n’a qu’un terme (disons Ai /Ii ) et que
ce terme est intègre. Donc Ii est premier. Ainsi, les idéaux premiers de A sont de la forme
I1 × A2 ou A1 × I2 avec Ii ∈ Spec(Ai ).
24
Spectre d’anneau de polynômes :
1. Le Spec(C[X]) est l’ensemble constitué par l’idéal nul et les idéaux engendrés par les polynômes de degré 1.
2. Le Spec(R[X]) est l’ensemble constitué par l’idéal nul et les idéaux engendrés par les polynômes de degré 1 ou les polynômes de degré 2 avec un discriminant strictement négatif.
2.2
2.2.1
Nilradical et radical de Jacobson
Notion de Radical et Nilradical
√
Définition 2.2.1. Soit I un idéal de A . Le radical de I noté I est l’ensemble :
√
I= {a ∈ A : ∃n ∈ N∗ tq an ∈ I }
p
Exemple 2.2.2.
1) Si p ∈ Z est premier alors (pn ) = (p).
p
Qr
2) En général si n = i=1 pei i avec des pi distincts alors on a (n) = (p1 p2 ....pr ).
√
Proposition 2.2.3. Soient A un anneau et I un idéal de A, alors le radical I est un idéal de A
contenant I
√
√
√
pour tout a ∈ A a1 = a ∈ I. Ensuite I ⊆ A
Démonstration.
-√
Il est clair que I contient I car √
√
et I 6= ∅ (0A ∈ I). Par ailleurs pour tout a, b ∈ I, il existe n, m ∈ N∗ tel que an ∈ I et bm ∈ I
. Posons N := n + m. Alors par la formule du binôme, on a :
PN
k N −k
(a − b)N = k=0 CN
a
(−b)k
Notons que N − k > n ou k > m pour chaque terme de la somme dans le membre droit, donc on
a toujours aN −k ∈ I ou (−b)k ∈ I est stable absorbant sous l’addition,
alors
√
√ le membre de droite
N
est lui même un élément de I, donc
(a
−
b)
∈
I
d’où
a
−
b
∈
I
et
ainsi
I est un sous-groupe
√
de (A, +). Il reste à montre
que
I
est
absorbant.
√
∗
Soit donc r ∈ A et a ∈ I, alors il existe n ∈ N√
tel que √
an ∈ I. comme rn ∈ A et I est absorbant
n
n n
alors (ra) = r a ∈ I. Il en découle que ar ∈ I donc I est un idéal de A.
Définition 2.2.4. Soit A un anneau et a ∈ A, on dit que a ∈ A est un élément nilpotent s’il existe
n ∈ N∗ tel que an = 0A .
Remarque 2.2.5. Tout élément nilpotent est un diviseur de zéro. La réciproque est fausse car 3 est
un diviseur de zéro dans Z/6Z mais n’est pas nilpotent.
Remarque 2.2.6. Soit a ∈ A un élément nilpotent alors (1A − a) ∈ U(A).
p
p
Définition 2.2.7. Le radical de l’idéal (0A ) noté (0A ) est appelé Nilradical de A. i.e (0A )={a ∈
A; ∃n ∈ N∗ tel que an = 0A }.
Notation : le Nilradical de A sera noté N (A).
Proposition 2.2.8. On a :
N (A) =
T
P ∈Spec(A)
P
∗
n
Démonstration. Soient x ∈ N (A) et P ∈ Spec(A). Comme
T il existe n ∈ N tel que x = 0A (∈ P )
et P est premier. Alors x ∈ P . Inversement, soit x ∈ P ∈Spec(A)P . Supposons que x ∈
/ N (A) et
considérons :
Σ={Idéaux I de A ; n > 1⇒ xn ∈ I}. En appliquant le lemme de Zorn à Σ, l’élément (c’est à dire
l’idéal) maximal de Σ donne la contradiction. D’où le résultat.
Remarque 2.2.9.
T Si A est un domaine d’intégrité. Alors son Nilradical est nul, car (0A ) étant un
idéal premier, P ∈Spec(A) P = (0A ) ; mais la réciproque est fausse. En effet, N (A/N (A)) = (0) est
nul, cependant A/N (A) n’est pas nécessairement intègre car N (A) n’est pas forcément premier.
25
Théorème 2.2.10. Soient A un anneau et I un idéal de A. Alors :
√
T
I = I⊂P ∈Spec(A) P .
√
Démonstration. On commence par montrer l’inclusion facile selon laquelle I est contenu
dans
√
tout idéal premier de A qui contient I. Soit donc P un tel idéal premier. Soit a ∈ I. Il existe
ainsi n > 1 tel que an ∈ I et donc an ∈ P . Comme P est premier,
a ∈ P.
√
L’autre inclusion est plus difficile. Si a est un élément de A\ I, il faut montrer qu’il existe un idéal
premier de A √
contenant I mais ne contenant pas a. Soit π : A → A/I l’homomorphisme canonique.
/ I, ou encore π(a)n 6= 0 dans A/I. Ainsi, π(a)
Dire que a ∈
/ I signifie que pour tout n > 1, an ∈
n’est pas nilpotent dans A/I. Soit S la famille multiplicative S = {1, a, a2 ; , ...} dans A. La famille
T = π(S) = {1, π(a), π(a)2 ...} est alors une famille multiplicative de A/I et il ne contient pas 0.
Il en résulte que l’anneau T −1 (A/I) possède un idéal maximal M . Considérons l’homomorphisme
composé A → A/I → T −1 (A/I). Donc d’après la proposition (1.8.5) , l’image réciproque de M
dans A/I est un idéal premier de A/I disjoint de T . L’image réciproque de M dans A est ainsi
idéal premier P de A contenant I disjoint de S. Comme a ∈ S, a ∈
/ P.
Proposition 2.2.11. Étant donné un anneau A. Soient I, J et K des idéaux de A. Alors on a les
assertions suivantes :
√
√
(a) Si I est contenu dans J, I est contenu dans J.
√
√
(b) IJ = I ∩ J.
√
√
√
(c) I ∩ J = I ∩ J.
p√
√
(d)
I = I.
√
√
√
(e) I + J ⊂ I + J .
p√
√
√
(f ) I + J =
I + J.
p
p
(g) I ∩ (J + L) = (I ∩ J) + (I ∩ L)
Démonstration.
√
√
(a) soit x ∈ I, ∃n > 1 tel que xn ∈ I mais comme I ⊆ J,xn ∈ J, et donc x ∈ J.
√
(b) on sait que IJ ⊂ I ∩ J. Réciproquement,
si x ∈ I ∩ J,∃n > 1 tel que xn ∈ I ∩ J alors
√
x2n = xn xn ∈ IJ, si bien que x ∈ IJ
√
√
√
√
√
(c) on a I ∩ J ⊂ I, donc
I ∩ J ⊂ I et de même pour J, soit I ∩ J ⊂ I ∩ J. Dans
√
√
m
l’autre sens, si x ∈ I ∩ J,
√ il existe n > 1 et m > 1 tel que x ∈ I et x ∈ J. Alors
m+n
x
∈ IJ ⊂ I ∩ J d’où x ∈ I ∩ J.
(d) Démonstration simple
√
√
√
√
√
(e) On a I ⊂ I + J, donc I ⊂ I + J, et de même pour J, si bien que I + J ⊂ I + J.
p√
p√
p
p
√
√
√
(g)
I
∩
(J
+
L)
=
I(J
+
L)
=
IJ
+
IL
=
IJ
+
IL
=
I
∩
J
+
I ∩L =
p
(I ∩ J) + (I ∩ L).
2.2.2
Radical de Jacobson
En algèbre, le radical de Jacobson d’un anneau commutatif est l’intersection de ses idéaux
maximaux. Cette notion est due à Nathan Jacobson qui, le premier, en a fait l’étude systématique.
Un élément x appartient au radical de Jacobson de l’anneau A si et seulement si 1+ax est inversible
pour tout a de A.
Définition 2.2.12. Le radical de Jacobson, noté J(A), est défini comme étant l’intersection de tous
les idéaux maximaux de A :
26
J(A) =
T
M ∈max(A)
M
N.B : max(A) désigne l’ensemble des idéaux maximaux de A.
Proposition 2.2.13. on a :
[x ∈ J(A)] ⇔ [1 − xy ∈ U(A), ∀y ∈ A]
Démonstration. Soit x ∈ J(A). Supposons qu’il existe y ∈ A tel que 1 − xy ∈
/ U(A). Donc (1 −
xy)A
A et par suite il existe un idéal maximal M tel que (1 − xy)A ⊆ M
A. Ainsi on a
1 − xy ∈ M et donc 1A ∈ M (car x ∈ M puisque x ∈ J(A)) ; c’est à dire que M = A, absurde. Et
on a (1 − xy) ∈ U(A) pour tout y ∈ A.
Inversement, supposons que (1 − xy) ∈ U(A), pour tout y ∈ A. Par absurde, supposons que
x∈
/ J(A). Donc il existe M ∈ max(A) tel que x ∈
/ M . Dès lors, on a M +(x) = A car M M +(x) et
M est maximal. Ainsi, il existe y ∈ A et m ∈ M tels que 1 = m+yx et par suite 1−xy(= m) ∈
/ U(A),
absurde. Par conséquent, x ∈ J(A) et cela termine la preuve de la proposition.
Il est évident que le radical d’un anneau est inclus dans le radical de Jacobson. En général le radical
de Jacobson diffère du radical.
Rappelons la notion d’anneau local.
Définition 2.2.14. Un anneau A est dit local s’il admet un seul idéal maximal. Dans un anneau
local, on a J(A) = M et :
x ∈ M ⇔ (1 − xy ∈ U(A) ∀y ∈ A)
Proposition 2.2.15. Les deux propriétés suivantes sont équivalentes :
i) Tout idéal premier est intersection d’idéaux maximaux.
ii) Pour tout quotient B de A on a N (B) = J(B).
On dit alors que A est un anneau de Jacobson.
Démonstration. Supposons i) et montrons ii). Soit B = A/I un quotient de A. On a comme toujours
N (B) ⊂ J(B). Les idéaux premiers (resp. maximaux ) sont en bijection avec les idéaux premiers
(resp. maximaux ) de A qui contiennent I. D’après i), si P est un idéal premier qui contient I,
il est égal à une intersection d’idéaux maximaux, qui contiennent nécessairement I. Finalement
N (B) est une intersection d’idéaux maximaux qui contiennent I, donc contient J(B). On a donc
prouvé que N (B) = J(B).
Dans l’autre sens, supposons ii) et soit P un idéal premier de A. Le radical nilpotent de A/P est
nul (car A/P est intègre). Donc le radical de Jacobson de A/P aussi, ce qui signifie que
T
M ⊂P M = P
Par suite, P est intersection d’idéaux maximaux et i) vérifiée.
27
CONCLUSION
Après avoir présenté d’anneaux, nous allons expliquer à quoi ils servent à travers
l’exemple suivant : à tout idéal a d’un anneau A, nous pouvons associer l’ensemble
V(a) = {p idéal premier tel que a est inclus dans p}
Si maintenant a et b sont deux idéaux de A on a :
V(a) ∪ V(b) = V(ab)
P
Par ailleurs, si {ai }i est une famille d’idéaux de A alors ∩V (ai ) = V ( i ai )
Notons que V(A) = ∅ et V(0A ) = Spec A.
Ceci dit, les ensembles V(a) sont les fermés d’une certaine topologie sur Spec (A) appelée la topologie de Zariski étant donné que l’intersection quelconque ainsi que la réunion finie d’ensembles
de la forme V(a) est encore un ensemble de la forme V(a).
Sur Spec (A) muni de la topologie de Zariski, nous pouvons récupérer les propriétés usuelles
(continuité, séparation, compacité...) quitte à mimer les situations qui existent en topologie et les
traduire en langage purement algébrique. Grâce à la continuité nous pouvons également construire
d autres objets appelés ’faisceaux’ relevant de la géométrie algébrique de telle sorte à définir des
schémas. Ce qui nous amène aux questions suivantes :
Qu’est ce qu’un faisceau ? Comment l’obtenir ? Par quelles étapes passe la construction d’un
schéma ? quel rôle joue cette notion dans la géométrie algébrique ?
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RÉFÉRENCES
[1]J. Galais, Eléments de la théorie des anneaux commutatifs, 2006.
[2]D. Guin, Algèbre II, Anneaux, Modules et Algèbre Multilinéaire.
[3]M. Karoumi, Algèbre Commutative et Applications SMA-S6.
Polycopié du cours enseigné à L’université Cadi Ayad Faculté Polydsiciplinaire de Safi.
[4]D. Koukoulopoulos, Algèbre 2 Introduction aux anneaux et aux modules, Université de Montréal.
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