sous l’action de plusieurs signaux non complètement identi-
fiés
[4, 5]
. Ces bourgeons fusionnent bientôt au centre après une
croissance antéropostérieure et forment le septum intermedium
qui divise le canal en deux orifices droit et gauche. Deux autres
masses endocardiques, les bourgeons latéraux, se forment aux
bords droit et gauche du canal, et contribuent à la formation
des valves auriculoventriculaires.
Pendant ce temps, un renflement endocardique apparaît au
toit de l’oreillette primitive et prolifère rapidement vers le bas
et l’avant sous forme d’un croissant : c’est le septum primum
qui cloisonne l’oreillette en deux cavités, droite et gauche. Son
bord ventral libre délimite avec le septum intermedium un
orifice interauriculaire, l’ostium primum
[6]
. Celui-ci est bientôt
oblitéré par le septum intermedium qui s’incurve en un arc à
convexité postérieure vers les oreillettes et fusionne avec le
septum primum. Dans le même temps, la partie céphalique du
septum primum se résorbe partiellement ; c’est l’ostium secun-
dum, dont l’occlusion partielle sera plus tardive par apparition
d’une deuxième ébauche septale à droite du septum primum :
le septum secundum. Quant au cloisonnement ventriculaire, la
moitié gauche de la partie droite du septum intermedium
s’incurve et fusionne avec le septum interventriculaire muscu-
laire pour former le septum atrioventriculaire qui sépare
l’oreillette droite du ventricule gauche. La moitié droite de la
partie droite et la partie gauche du septum intermedium qui
s’accroissent latéralement contribuent à former respectivement
le feuillet septal de la valve tricuspide et le feuillet antérieur de
la valve mitrale. Les bourgeons endocardiques latéraux sont
incriminés dans la formation des autres feuillets des valves
tricuspide et mitral, le feuillet antérieur de la tricuspide
provenant du septum conal.
■Anatomie pathologique
Lésions élémentaires
Vu leur rôle crucial dans les formations septale et valvulaire,
toute évolution déficitaire des bourgeons endocardiques est
responsable de malformations du CAV
[7]
. Elles sont d’autant
plus complexes et plus graves que l’interruption de l’embryoge-
nèse décrite est plus précoce. Les lésions élémentaires caracté-
ristiques qui en résultent sont la communication interauriculaire
type ostium primum, la communication interventriculaire
d’admission et les fentes valvulaires
[8]
.
Septum interauriculaire
Le sous-développement du septum intermedium résulte en
une déhiscence de la partie caudale du septum interauricu-
laire
[9]
. Cette communication se limite en haut par le bord
inférieur en croissant du septum interauriculaire. En bas, soit
elle s’arrête aux valves auriculoventriculaires dans les formes
partielles, soit elle se poursuit par la communication interven-
triculaire dans les formes complètes.
D’autres communications interauriculaires type ostium
secundum peuvent être associées. Très rarement, les ostia
primum et secundum peuvent fusionner et produire une
oreillette unique, où le septum interauriculaire n’est plus qu’un
vestige musculaire céphalique appendu au toit de
l’oreillette
[10]
; l’oreillette unique est trouvée communément
dans le syndrome d’Ellis Van Crefeld.
Septum interventriculaire
Il s’agit d’un défaut de tissu musculaire au-dessous des valves
auriculoventriculaires
[11]
. Cet orifice s’ouvre à gauche très près
de la valve mitrale antérieure mais à distance des valves
aortiques. Il s’agit donc d’une communication interventriculaire
très postérosupérieure, dans le septum d’admission. Elle s’étend
souvent en avant dans le septum membraneux. Elle peut être
associée à un ou plusieurs orifices dans le septum trabéculé.
L’absence du segment atrioventriculaire du septum interventri-
culaire explique que la valve gauche est plus bas insérée que la
normale. La continuité fibreuse des valves réalise l’anneau
atrioventriculaire commun.
Valves auriculoventriculaires
Les lésions valvulaires résultent d’un défaut de fusion des
bourgeons endocardiques antérosupérieur et postéro-inférieur.
L’appareil auriculoventriculaire gauche devient trifolié par
division du feuillet septal, qui devrait être la grande valve
mitrale, en deux éléments médians antérieur et postérieur
séparés par une fente de taille variable
[12]
. Les bords de cette
fente sont souvent irréguliers, épaissis, ourlés et parfois attachés
au septum sous-jacent par quelques cordages primaires courts.
La valve postérieure qui provient du bourgeon endocardique
latéral gauche est en règle normale. Il peut exister rarement un
double orifice valvulaire gauche du fait d’un orifice accessoire
situé en arrière de l’orifice principal
[13, 14]
. Les deux muscles
papillaires antérolatéral et postéromedian peuvent se rapprocher
l’un de l’autre, comme il peut exister un pilier antérolatéral
unique sur lequel convergent tous les cordages, réalisant en
finale une valve en parachute
[15]
.
À droite, les anomalies sont plus discrètes. Il s’agit le plus
souvent d’un sous-développement de la valve septale pouvant
conduire à une véritable lacune entre la valve septale et la valve
antérieure d’origine conale.
Les lésions valvulaires élémentaires s’observent exceptionnel-
lement à l’état isolé, en dehors de tout défaut septal. Elles sont
à différencier des fentes mitrales congénitales isolées. Dans le
CAV, le rapport chambre de remplissage/chambre de chasse est
inférieur à 1
[16]
, la valve gauche étant basculé vers le bas et
l’avant, et faisant partie d’une valve auriculoventriculaire
commune. La rotation antihoraire des muscles papillaires
gauches, plus accentuée au pilier postéromédian, est responsable
d’un feuillet postérieur de plus petite taille
[17]
(moins de 40 %
de la surface valvulaire gauche totale). La fente pointe vers le
septum d’admission
[18]
, au lieu d’avoir une direction antérieure
envers l’aorte, selon certains auteurs ; cette position est en fait
peu spécifique, pouvant varier dans les fentes isolées, selon Kohl
et Silverman
[19]
. Finalement, la fente congénitale isolée peut
être aussi dépourvue de cordages
[20]
, rendant sa différenciation
encore plus difficile des formes avec CAV.
Anomalies associées
Vu la bascule de la valve gauche, et la réduction de longueur
de la chambre de remplissage avec allongement de la chambre
de chasse du ventricule gauche
[21]
, cette dernière se trouve
étirée en un canal sous-aortique, éventuellement obstructif,
donnant en angiographie l’image typique en « col de cygne ».
Quand l’obstruction est sévère, une hypoplasie de l’aorte
horizontale et/ou une coarctation aortique sont fréquemment
associées. D’autres anomalies obstructives sont possibles
(membrane sous-aortique, insertion septale d’un cordage
accessoire de l’hémivalve antérieure, mal-alignement postérieur
du septum infundibulaire). Le mal-alignement du septum
infundibulaire peut être antérieur ; une tétralogie de Fallot est
associée alors. Le CAV peut aussi s’associer à une hétérotaxie.
Le système de conduction du CAV se caractérise par un
déplacement postérieur du nœud auriculoventriculaire derrière
la communication interventriculaire et par un déplacement
postéro-inférieur de la branche gauche du faisceau de His, avec
un allongement de la branche droite. Ceci est responsable d’une
dépolarisation inférieure droite-supérieure gauche avec un axe
QRS anormal sur l’électrocardiogramme
[22]
. Ce trajet particulier
a des répercussions importantes sur la réparation chirurgicale.
Les deux ventricules sont en général bien équilibrés (de 85 à
90 %), mais l’un des deux peut être dominant, le ventricule
droit le plus souvent, avec une hypoplasie relative du ventricule
controlatéral
[16, 23]
. Le pronostic postopératoire est dans ces cas
plus sombre. L’anatomie est parfois incompatible avec une
réparation à deux ventricules, et la chirurgie devient palliative
avec une dérivation cavopulmonaire.
11-940-C-40
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Canal atrioventriculaire
2Cardiologie