Elles s’élevaient très haut à une trentaine de mètres de la plage pour retomber
verticalement sur les rochers en dessous. Des nageurs pouvaient être pris juste
derrière les vagues, ce qui provoquait la panique ou de passer par la puissante
expérience du ‘’dumping’’.
Comme séance d’entraînement hebdomadaire, tous les membres devaient participer
aux courses d’endurance régulières du dimanche matin. Celles-ci combinaient la nage
et une course de 3,5 km dans les dunes pour développer les muscles des bras et des
jambes.
Souvent, les participants arrivaient sur la ligne de départ, fatigués par un samedi
chargé. Au journal, je devais travailler jusque tard le soir, le samedi. Pour compenser,
le journal me donnait congé le mercredi après-midi.
Certains membres essayaient de gagner ; d’autres, comme moi, essayaient
simplement de terminer la course. Il y avait deux grosses bouées placées à environ
500 mètres de la plage. Environ 800 mètres les séparaient. Nous luttions contre les
fortes vagues côtières pour atteindre la première bouée, puis nous longions la côte
jusqu’à la bouée suivante, et puis nous changions de direction pour revenir vers la
plage. Ensuite suivait une course exténuante dans les dunes.
Beaucoup d’entre nous tombaient dans les pommes sur la ligne d’arrivée, ce qui
nécessitait l’intervention du pharmacien local, qui était un membre du club, pour
nous ranimer. Ce qu’il nous faisait inhaler nous remettait sur pied.
Un certain dimanche matin dont je me souviendrai toujours, j’ai pris part à la course,
fatigué par le travail du soir précédent. J’ai bataillé contre des vagues énormes
successives et je suis rapidement retombé à la dernière place. Pour protéger les
nageurs, le lourd surf boat du club suivait l’équipe.
J’ai atteint la deuxième bouée, j’ai nagé autour et à l’instant précis où je prenais la
direction de la côte, le canot de sauvetage tout proche franchit la crête d’une vague
énorme. Au lieu de s’écarter de la vague, l’homme qui était à la barre la prit et dans
les rires et les acclamations, lui et les autres me dirent au revoir en étant rapidement
emportés vers le rivage.
Quelques minutes après avoir contourné la grosse bouée, mes oreilles remplies d’eau
entendirent faiblement le hurlement de la sirène de la tour du club de surf. Tout en
continuant à nager en crawl, je vis aussi un drapeau qui s’agitait sur la tour. Ces deux
signaux étaient toujours redoutés, car ils signifiaient que l’aileron d’un requin
mangeur d’hommes avait été repéré. Ces requins nageaient le long des côtes et
d’habitude, les clubs de surf des autres plages téléphonaient pour prévenir d’un
danger imminent. Il y avait des cas où un aileron apparaissait soudainement, ce qui
laissait peu de temps pour sonner l’alerte. C’était l’un de ces cas malheureux.
Je regardai par-dessus mon épaule en direction de la bouée, à quelques mètres de là,
et je vis l’aileron d’un grand requin qui tournait autour. Quelques minutes auparavant
seulement, j’avais nagé autour de la bouée. Je passai directement du crawl à la brasse,
ce qui permet de nager sans fendre l’eau et sans faire de bruit, car le plus infime
remous attirera un requin.