MAÎTRISE ET LEADERSHIP J’ai eu la grande chance de pouvoir descendre en raft la rivière Motu à deux reprises, l’année dernière, en Nouvelle-Zélande. Ce magnifique périple de quatre jours traverse l’une des dernières zones sauvages de l’île du Nord. Buzz, un guide américain doté d’une grande expérience du rafting et qui avait beaucoup d’histoires à raconter à propos de rivières puissantes comme le Colorado dirigea la première expédition. Avec un leader tel que Buzz, il n’y avait aucune raison de redouter aucun des grands rapides de la Motu. Nous avons passé la première demi-journée sur un tronçon tranquille en amont de la rivière, à développer l’esprit d’équipe et la coordination. Nous devions maîtriser nos gestes et la discipline de suivre les ordres sans poser de questions était essentielle. Dans la furie bouillonnante d’un rapide, il n’y aurait aucun droit à l’erreur. Quand Buzz hurlait par-dessus les eaux rugissantes, une réaction instantanée était indispensable. Nous sommes parvenus à maîtriser la Motu. Lors de chaque rapide, nous avons lutté contre la rivière et nous l’avons vaincue. Le hurlement des ordres de Buzz ne le disputait qu’à la fureur de nos coups de pagaie, tandis que nous amenions le raft précisément là où Buzz voulait qu’il aille. A la fin du périple régnait un grand sentiment de triomphe. Nous avions gagné ! Nous avions prouvé que nous étions supérieurs. Nous savions que nous pouvions le faire. Nous nous sentions forts et nous nous sentions bien. Le mystère majestueux de la Motu avait été surmonté. La seconde fois que j’ai descendu la Motu, l’expérience que j’avais acquise aurait dû être inestimable, mais le guide, cette fois-ci, était un Kiwi à la voix très douce. Il semblait qu’il serait même impossible d’entendre sa voix par-dessus le bruit des rapides. Tandis que nous nous approchions du premier rapide, il n’éleva même jamais la voix. Il ne tenta jamais de prendre les commandes par rapport à nous ou à la rivière. Doucement et tranquillement, il sentit l’humeur de la rivière et il observait le moindre tourbillon. Il n’y avait ni cris, ni drame. Il n’y avait aucune compétition à remporter. Il aimait la rivière. Nous avons traversé chaque rapide avec grâce et élégance et après une journée, la rivière était devenue notre amie, pas notre adversaire. Le Kiwi calme n’était pas notre chef, mais seulement quelqu’un dont la sensibilité était plus développée que la nôtre. Le rire remplaçait la tension de l’accomplissement. Bientôt, ce Kiwi posé put faire un break et ‘’se reposer’’ et nous permit de diriger la manœuvre, à tour de rôle. Un signe de tête tranquille était suffisant pour attirer notre attention sur les choses que notre manque d’expérience nous empêchait de voir et si nous commettions une erreur, alors nous en riions et c’était le tour du suivant. Nous commencions à pénétrer le mystère de la Motu. Maintenant, comme le Kiwi paisible, nous écoutions la rivière et nous observions soigneusement toutes ces choses que nous n’avions même pas remarquées, la première fois. Au terme de notre périple, nous n’avions triomphé de rien du tout, hormis nousmêmes. Nous ne voulions plus abandonner notre amie, la rivière. Il n’y avait pas eu de compétition et donc, nous n’avions rien remporté. Nous étions plutôt devenus UN avec la rivière. Il reste difficile à croire que les circonstances extérieures des deux périples étaient semblables. La différence se situait dans l’attitude et dans l’état d’esprit. Au bout du premier périple, il semblait qu’il ne pouvait pas y avoir d’autre voie. Si nous avions eu l’opportunité de choisir un guide, tout le monde aurait choisi quelqu’un comme Buzz. Mais au bout du second périple, nous avions entraperçu quelque chose de très différent, nous ressentions beaucoup d’humilité – et nous étions profondément heureux ! (Auteur inconnu)