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De Einstein à ITER

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De Einstein à ITER :
Bases scientifiques et technologiques de la fission et de la fusion
Chapitres :
A.
B.
C.
D.
E.
Introduction
E = m·c²
Fission
Fusion
Tokamak
Sculpture à Berlin en l'honneur d'Albert Einstein
à l'occasion du centenaire de sa théorie de la relativité (2005)
K.H. Gobrecht, atelier UTD 2016/02/23 page 1/26
A. Introduction
Les Grecs ont imaginé que si l'on coupe en deux un objet, puis à
nouveau une de ses moitiés, et ceci suffisamment souvent, il arrive
un moment où il n'est plus possible de continuer à couper. On arrive
à la taille de l'atome (du grec : ατομος = "insécable").
Aujourd'hui nous savons qu'il suffit de couper env. 30 fois pour
arriver à la dimension de l'atome..(Ø 10-10 m = 1 Å).
Pourtant au début du 20e siècle, après la découverte de la
radioactivité, il devint évident que l'atome possède une structure :
il est constitué d'un noyau (du latin nucleus) dont la charge électrostatique est positive, et autour duquel gravitent des électrons qui ont
une charge électrostatique négative. Le noyau concentre
pratiquement toute la masse de l'atome, alors qu'il est 100.000 fois
plus petit que l'atome lui-même.
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Pour illustrer ces dimensions imaginons
une épingle au centre d'un vélodrome.
La tête de l'épingle (Ø = 1 mm)
représente le noyau de l'atome, les
cyclistes représentent les électrons qui
tournent autour. Toute la masse de
l'atome est concentrée dans le noyau
(la tête de l'épingle). Les électrons
pèsent 2000 fois moins que le noyau.
On constate que la matière est
constituée essentiellement de vide.
Mais ce vide est rempli de champs
immatériels de toutes sortes. La lumière
visible ne peut pas entrer dans ce vide.
La stabilité de l'atome provient de l'attraction entre charges électrostatiques de polarité opposée : les électrons e- et (dans le noyau) les
protons p+, qui s'attirent mutuellement.
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Le noyau de l'atome est lui-même composé de particules (appelées
nucléons) : les protons (chargés +) et les neutrons (pas de
charge électrostatique).
Le noyau de l'atome hydrogène (H) possède un proton et aucun
neutron, celui de l'uranium (U, le plus lourd des atomes naturels) est
constitué de 92 protons et 143 neutrons (quand on considère son
isotope U235). D'autres isotopes de l'uranium (U238 p.ex.) ont un
nombre différent de neutrons (ici 146). La somme des nucléons
représente la masse du noyau, appelée masse atomique. La masse
atomique de l'élément est donc différente d'un isotope à l'autre.
Dans le tableau périodique des éléments les atomes sont rangés
selon leur nombre de protons.
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B.
E = m·c²
Isaac Newton (1642 - 1727)
avait déjà trouvé que l'énergie
cinétique Ect contenue p.ex. dans
une pomme de 100 g tombant
d'une hauteur h = 1 m est égale
à 1 J (1 joule = 1 kg·m²/s²).
Avant de tomber, la pomme
possédait une énergie identique,
appelée énergie potentielle Epp.
L'énergie potentielle contenue
dans l'eau d'un barrage p.ex.
devient l'énergie cinétique qui fait
tourner les turbines.
La force (en N) agissant sur la pomme
F = m (en kg) x g (9,81 m/s²). En multipliant
F par la hauteur h de la chute (en m), on
trouve l'énergie Ect en J (= kg·m²/s²).
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En 1905 Albert Einstein, peu après avoir publié sa théorie de la
relativité restreinte, postule que l'énergie est équivalente à une
masse selon la fameuse formule :
E = m·c²
c étant la vitesse de la lumière (c = env. 3·10+8 m/s = 300.000 km/s).
On voit immédiatement qu'une très petite masse peut se
transformer en une énorme énergie.
La masse de la pomme de Newton serait équivalente à l'énergie
suivante :
0,1 kg x (3·10+8 m/s)² = 9·10+15 J (env. 25 milliards de kWh)
Dans une centrale nucléaire moderne on "brûle" (transforme en
énergie) à peu près cette masse (100 g) en un an.
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C. Fission
Voici comment vérifier la formule
E = m·c²
La masse de l'uranium, avant
d'être "brûlé" dans la centrale
nucléaire, est plus grande que
celle de ses "cendres". La
différence entre ces masses est
appelée la masse manquante.
On la retrouve en fait transformée en énergie cinétique.
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Énergie de liaison
Le noyau de l'uranium contient donc 92 protons.
On doit se poser la question : Pourquoi tous ces protons (chargés
positivement) restent-ils confinés dans le noyau alors qu'ils
subissent une forte poussée électrostatique tendant à les écarter ?
Explication par la formule de Einstein :
Peu après le big bang, les noyaux d'éléments lourds se sont formés
par la fusion de noyaux légers.
Une partie de leur masse, cette "masse manquante", s'est
transformée en énergie potentielle, qui dans le noyau annule la
poussée électrostatique des protons.
Cette énergie est appelée "énergie de liaison".
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Énergie de fission
Une partie de l'énergie de liaison peut être récupérée en faisant
pénétrer un neutron dans un noyau d'U235.
Comme je l'ai déjà dit, le noyau éclate, et les débris partent avec
une grande énergie cinétique qu'on appelle l'énergie de fission.
Le neutron ne possède pas de charge électrostatique (d’où son
nom). Rien ne l’empêche donc de pénétrer dans le noyau et de le
faire éclater. Mais si le neutron est trop rapide il traverse le noyau
sans interagir avec lui. D'où l’intérêt de ramener la vitesse moyenne
des neutrons à env. 3000 m/s. Dans un réacteur nucléaire on fait
passer les neutrons rapides dans une substance modératrice (de
l'eau ou du graphite, p.ex), avant qu'ils retrouvent à nouveau un
noyau d'uranium.
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Fission de l'uranium 235
Après l'éclatement du noyau par un
neutron, on observe, outre les
fragments, l'apparition de 2 à 3
neutrons. Ces neutrons trouvent (après
modération) d'autres noyaux d'U235
qu'ils font éclater, libérant encore plus
de neutrons.
Si la masse de l'U235 est assez grande
(plus grande que la fameuse "masse
critique") on se trouve en présence
d'une "réaction en chaîne".
La fission crée ainsi en une fraction de
seconde une quantité d'énergie
énorme : il s'agit d'une explosion
nucléaire (comme dans une bombe A).
réaction en chaîne
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Fission contrôlée
Si en revanche, on empêche les neutrons libérés de créer trop de
nouvelles fissions (en absorbant certains d'entre eux dans des
barres de contrôle du réacteur nucléaire, p.ex.), on peut utiliser
l'énergie ainsi libérée à des fins civiles (= fission contrôlée).
Les centrales nucléaires fabriquent ainsi de l'énergie à partir de la
matière. Leur technologie est très bien développée et a fait ses
preuves des milliers de fois.
S'il est possible de gagner de l'énergie en cassant des noyaux
lourds (plus lourd que l'atome du fer, Fe) on peut aussi en gagner
en faisant fusionner des noyaux plus légers que ceux de l'atome du
fer (qui possède 26 protons).
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D Fusion
La formule de Einstein
(E = m·c²) est aussi
applicable quand on
considère une réaction
nucléaire entre deux
noyaux légers, p.ex.
deux isotopes
d'hydrogène.
Cette réaction nucléaire
est appelée "fusion"
Les isotopes de l'hydrogène
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Schéma d'une fusion d'atomes
Quand on met en contact deux
noyaux légers (ici le deutérium H2 et
le tritium H3), ils fusionnent et créent
un nouveau noyau plus lourd (ici un
noyau d'hélium). C'est la fusion
nucléaire. La différence des masses
en jeu avant et après la fusion s'est
transformée en énergie cinétique.
Cette énergie peut être récupérée.
Il faut env. 340 milliards de fusions
pour générer l'énergie d'un joule.
MeV = unité d'énergie au niveau
atomique, 1 J = 6*10+12 MeV.
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Le plasma
La difficulté d'exploiter cette énergie réside dans le fait que deux
objets (ici les noyaux) d'une même polarité électrostatique (ici +) se
repoussent, alors que pour fusionner, ils doivent pouvoir se toucher.
Le soleil nous montre que ceci est possible. Sous l'effet de la
gravité son intérieur se trouve à une pression et une température
telles que les noyaux se rapprochent suffisamment pour fusionner.
C'est ce qu'on appelle le confinement gravitationnel.
L'état de la matière au centre du soleil est appelé le plasma.
Un plasma (dans le sens physique) est une entité d'atomes légers
débarrassés de leurs électrons, c.à.d ionisés. Le plasma est
souvent considéré comme étant le quatrième état de la matière
(après le solide, le liquide, et le gaz).
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Du plasma à la fusion
Il est possible de créer sur terre, sous certaines conditions, le "vrai"
plasma, et de mettre en contact les noyaux pour qu'ils fusionnent.
On peut p.ex. faire imploser une enceinte remplie d'isotopes
d'hydrogène par l'application d'une pression brutale pendant un
temps extrêmement bref. La température monte, le plasma se
forme, les noyaux se rapprochent jusqu'à fusionner.
Ces conditions peuvent être réunies en plaçant en face de
l'enceinte en question une bombe A dont la détonation fournit la
pression nécessaire à l'implosion.
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C'est ainsi que fonctionne la bombe H (H comme hydrogène).
L'énergie en jeu va jusqu'à l'équivalent de 50 mégatonnes de TNT,
correspondant à 10+17 J.
Avec la formule de Einstein on trouve que la bombe, en explosant,
transforme env. 10 kg de matière en énergie.
Schéma d'une bombe H
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Fusion contrôlée
Par analogie à la fission contrôlée, on cherche des procédés pour
entretenir une fusion contrôlée.
Il faut créer un environnement similaire à celui qui règne au centre
du soleil :
un plasma dense et chaud (température 100 million °C).
Une possibilité est de miniaturiser la bombe H.
Au lieu d'utiliser une bombe A pour créer le plasma on installe une
batterie de lasers super-puissants qui développent une énergie
élevée en un temps très court (10-15 s). Les lasers tirent sur une
cible microscopique contenant le mélange d'isotopes. Les noyaux
n'ont pas le temps de se dilater, ils fusionnent.
On parle de confinement inertiel.
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Plusieurs expériences de ce type sont en route ou en construction,
en France p.ex. le projet "Laser Mégajoule" à Bordeaux.
Les diverses tentatives n'ont encore donné aucun résultat.
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E. Tokamak
Une autre méthode d'obtenir la fusion nucléaire contrôlée est une
installation appelée tokamak.
Le tokamak a été inventé en Union Soviétique à Moscou en 1951.
Le mot vient d'une contraction du nom russe de ce dispositif
expérimental :"chambre toroïdale avec bobines magnétiques".
La traduction en français de tokamak serait donc chataboma.
Depuis, beaucoup de tokamaks ont été construits et mis en route
dans différents pays, sans résultats satisfaisants (entretenir le
plasma coûte plus d'énergie que la fusion n'en dégage).
Les tokamaks précurseurs de ITER sont le JET (Culham, GB) et
Tore Supra (Cadarache, FR).
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Le tokamak sert donc à créer un plasma proche de celui qui règne à
l'intérieur du soleil. Ce plasma est obtenu en ionisant par un
accélérateur de particules le mélange d'isotopes d'hydrogène dans
une enceinte toroïdale et vide d'air. Avant de pouvoir chauffer le
plasma il faut l’empêcher de toucher les parois de l'enceinte, il faut
le confiner.
Le confinement du plasma est obtenu par un champ magnétique
toroïdale. On parle de confinement magnétique (troisième type de
confinement après les confinements gravitationnel et inertiel).
Au départ le plasma est chauffé par micro-ondes et par induction
(variations rapides du champ magnétique). Quand la température a
atteint 10+8 °C (= 100 million °C) la fusion démarre et entretient le
plasma.
Le chauffage extérieur peut être coupé progressivement.
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Fonctionnement d'un tokamak
Comme déjà dit, l'hélium et
les neutrons créés par la
fusion de deutérium et
tritium possèdent une
importante énergie
cinétique. Ils s'échappent
du plasma et chauffent les
parois du tokamak.
Celles-ci sont refroidies
par l'eau. La chaleur est
récupérée sous forme de
vapeur qui fait tourner les
turbo-alternateurs.
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Durée du plasma
La vitesse de refroidissement naturel du plasma pose un problème
dès qu'on arrête de le chauffer. A la surface du plasma le nombre de
fusions par seconde diminue, le plasma se refroidit.
Plus le plasma est volumineux plus le rapport "nombre d'atomes à
la surface" sur le "nombre d'atomes à l'intérieur" diminue. Au final le
plasma garde mieux sa chaleur et met plus de temps à se refroidir.
Ce temps de maintien de la température est appelé "temps de
confinement", et explique notamment la course au gigantisme des
tokamaks.
En attendant ITER, le record de temps de confinement est détenu
par JET (Culham, GB) avec env. 10 minutes (en1991).
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ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor) est une
collaboration internationale (la Chine, l'Union européenne, l'Inde, le
Japon, la Corée, la Russie et les États-Unis) lancée en 1985. Il veut
être le premier tokamak produisant (par la fusion d'isotopes
d'hydrogène) plus d'énergie que nécessaire pour créer
l'environnement propice à la fusion (plasma dense, confiné et assez
chaud). Ceci implique un temps de confinement illimité.
Iter est aussi le mot latin pour itinéraire, ce qui permet le jeu de
mots :
"Au départ du chemin (en latin ITER) vers une énergie
illimitée se trouve "une pierre" (en allemand "Ein_Stein")".
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Maquette du tokamak ITER (source CEA)
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Je m’arrête ici, car mon exposé est fait pour ceux qui visiteront ITER
le 10 mars prochain. Ils verront les détails de la construction et du
fonctionnement de ITER sur place à Cadarache.
Pour que les autres ne restent pas sur leur faim, voici deux liens
internet :
http://www.iter.org
http://www.itercad.org/projet.php
Le lien suivant permet de relire mon exposé :
ottosix.eklablog.com
K.H. Gobrecht, atelier UTD 2016/02/23 page 26/26
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