Grammaire Française I Unité 2 : La phrase
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UNITÉ 2 : LA PHRASE
Contenus
1. Les unités du discours : la phrase, la rhèse, l’interjection
2. La phrase minimale. La phrase étendue.
3. La phrase simple et la phrase complexe
4. Eléments constitutifs de la phrase : Type et Matériau
5. Types obligatoires. Types facultatifs
6. Les constituants immédiats. Eléments obligatoires. Eléments facultatifs
7. Les classes de mots
8. Les fonctions syntaxiques
9. La représentation graphique de la phrase
Bibliographie
Baylon Ch., Fabre P. (1975) :
Grammaire systématique de la langue française
, Paris, Nathan.
Blois J., Bar M. (1968) :
Notre langue française, grammaire
, Paris, Didier.
Dubois J., Dubois Charlier F. (1970) :
Eléments de linguistique française, syntaxe,
Paris, Larousse.
Dubois-Charlier, F., Leeman, D. (1974) :
Comment s'initier à la linguistique ?
Paris, Larousse.
Tomassone R. (1996) :
Pour enseigner la grammaire
, Delagrave.
1. Les unités du discours : la phrase, la ‘rhèse’ et l’interjection
Pour communiquer quoi que ce soit à autrui nous procédons par étapes successives : le discours doit donc pouvoir se
diviser en unités, qui correspondent chacune à un acte simple de communication.
Dans l'ensemble complexe formé par un énoncé oral, nous identifions ces unités parce qu'elles sont limitées par des
pauses et marquées par des changements de ton. Les unités du discours sont en effet essentiellement phonétiques.
Nous trouvons ainsi trois unités différentes : Laphrase, la rhèse et l’interjection.
Ces unités du discours n'ontpas de fonction grammaticale, elles n'ont qu'une fonction de communication.Bloomfield
dit à ce propos :
"Each sentence is an independent linguistic form, not included by virtue of any grammatical construction in any
larger linguistic form."
E. Benveniste ajoute : "
Constituée d'éléments discrets, la phrase n'est pas elle-même constituante d'un
niveau supérieur. Le niveau inférieur d'analyse est le monème".
La phrase : C'est une unitédont les éléments sont groupés autour d'un verbe conjugué ou d'un présentatif. Sous sa
forme la plus simple, elle ne comprend qu'un seul verbe à l'impératif.
Patrick range sa chambre.
Un soir, les rafales glacées avaient accumulé dans cette casemate les hôtes habituels de la cuisine.
Mangez !
Voici votre passeport.
Ce sont les collègues d’Anne.
Les mots qui constituent une phrase n’apparaissent pas de manière aléatoire. Des règles ou des régularités ordonnent
ces mots selon deux réseaux de solidarités :
- une solidarité sémantique : la phrase a un sens ;
- une solidarité syntaxique : les mots sont organisés en syntagmes qui entretiennent des rapports entre eux.
La rhèse : C'est une phrase à structure incomplète, sans base verbale, qui se réduit parfois à un mot. On pourrait former
des véritables phrases avec les éléments d'une rhèse, mais pour diverses raisons : facilité, moindre effort, allégement,
renforcement de l'expression, économie de la langue (on laisse de côté le connu -thème- on conserve le nouveau -
rhème), on a préféré grouper ces éléments dans des structures plus concises.
Rhèses assimilables à la phrase ou à la proposition :
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Tous les mots qui les composent peuvent s'analyser comme s'ils faisaient partie d'une phrase ou d'une proposition. C'est le cas:
a) S'ils dépendent d'une base qui n'a pas été répétée
Sur la cheminée ancienne s'alignaient des assiettes de porcelaine. [A côté d'elles, 4 chandelles d'étain.]
On pourrait reconstruire la phrase, en restituant le thème : A côté d'elles, s'alignaient 4 chandelles d'étain.
b) Si la ponctuation a brisé des liens syntaxiques :
Il a un tablier noir très propre ; [un cou et des mains bien lavés.] [Une gentille figure sérieuse, même triste.] [De beaux yeux honnêtes.]
On pourrait reconstruire les phrases, en restituant le thème :Il a un cou et des mains bien lavés. Il a une gentille figure sérieuse,
même triste. Il a de beaux yeux honnêtes.
c) Dans une rhèse de réponse, lorsque les éléments qui y manquent sont présents dans la question.
Quand viendras-tu ? [Demain]
Pourquoi n'es-tu pas venu ? [Parce que j'étais malade]
On pourrait reconstruire les phrases, en restituant le thème :Je viendrai demain. Je ne suis pas venu parce que j’étais malade.
Rhèses à structures spéciales : les éléments de ces unités dépendent d'une base qui n'est plus un verbe, mais un
nom, un pronom, un adjectif qualificatif ou un adverbe. La base de la rhèse correspond ici au centre du groupe :
a) Rhèses impératives :Défense de fumer ! Vite !
b) Rhèses déclaratives :
- descriptives :Et locomotives, petites, vieilles, poussives, familières. Débardeurs. Toutes les peaux.
- affectives : (traduisent un sentiment de joie, de peur, de regret) :Heureusement qu'il est venu.
- de titres :(unités linguistiques purement indicatives) :Avis à la population. Cent francs le kilo
- sentencieuses :Tel père, tel fils. A malin, malin et demi
c) Rhèses interrogatives :Quand ? Qui ? Pourquoi ? Demain ?
d) Rhèses exclamatives :Lui ! Pas vrai !
e) Rhèses optatives :Bonne année ! Bon voyage ! Bon appétit !
f) Rhèses interpellatives :Monsieur ! Garçon ! Paul ! Mon ami !
L’interjection : C'est une sorte de cri qui traduit un état de conscience, au moyen d'un mot s'employant
exclusivement à cet usage ; ou au moyen d'un mot ayant perdu son contenu significatif original. On ne peut pas
rétablir la phrase. Il n'y a pas d'opposition thème/propos. L'interjection est toujours isolée par des signes de ponctuation, même
si elle est inclue dans une phrase ou dans une rhèse. Jamais, elle ne dépend syntaxiquement d'un verbe.
Même si l’on définit fréquemment
l’interjection
comme
onomatopée
, il faut noter que cette définition est réductrice.
Le terme
onomatopée
ne correspond qu’en partie à l’interjection, parce que toute onomatopée n’est interjection et toute
interjection n’est onomatopée. Les onomatopées qui ne sont pas des interjections sont les mots onomatopéiques qui ne
répondent plus au critère morphosyntaxique de l’expression isolée, fonctionnant comme mot-phrase, mais qui s’insèrent
pleinement dans la morphologie et dans la syntaxe : nous pouvons trouver dans le lexique beaucoup de mots onomatopéiques
qui ne sont pas des interjections : un tic-tac, cocorico, miaou.
a) Interjection Impératives Chut. Hue. Sh.
b) Interjection Exclamatives Tiens. Zut. Parbleu. Hélas. Hein. Fichtre. Allez
c) InterjectionInterrogatives Hein ?
d) InterjectionsInterpellatives Allo, eh, hé, holà, hep là-bas, pst.
Récapitulation
Phrase déclarative exclamative impérative interrogative + négation/ emphase/ passif
Rhèse déclarative exclamative impérative interrogative interpellative optative
Interjection exclamative impérative interrogative interpellative
Exercices
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1. Analysez les unités du discours(phrase, rhèse et interjection) dans le dialogue suivant :
Modèle : Tu ne l’as pas vue, ma maman ?
phrase interrogative, négative, emphatique
L’enfant perdu. Dans un grand magasin :
Le monsieur : Qu’est-ce que tu as ? Pourquoi tu pleures ?
L’enfant : J’ai perdu ma maman.
Le monsieur : Ta maman ? Tu as perdu ta maman ?
L’enfant : Oui, je sais pas où elle est.
Le monsieur : Comment tu t’appelles ?
L’enfant : Sabine.
Le monsieur : Sabine comment ?
L’enfant : Dupuis.
Le monsieur : Et tu habites où ?
L’enfant : Rue Lhomond.
Le monsieur : A quel numéro ?
L’enfant : Au numéro 5.
Le monsieur : Bon, viens avec moi, on va appeler ta maman.
Micro : Votre attention, s’il vous plaît. La petite Sabine Dupuis attend sa maman au bureau de renseignements, situé à l’entrée du magasin,
porte 4. Merci.
2. Analysez les unités du discours dans le dialogue suivant :
A l’entracte. Dans un cinéma :
L’ouvreuse : Bonbons, esquimaux, chocolats glacés…
Le jeune homme : Madame !
L’ouvreuse : Vous désirez ?
Le jeune homme : Une vanille café. Et toi, tu prends quelque chose ?
La jeune fille : Hein ?
Le jeune homme : Si tu prends quelque chose.
La jeune fille : Non, merci.
Le jeune homme : Ça fait combien ?
L’ouvreuse : 25 francs
Le jeune homme : Parbleu ! Que c’est cher !
La jeune fille : Attention ! Tu vas salir ma robe!
Le jeune homme : Tu n’en veux pas ?
La jeune fille : Non merci. Bon appétit.
Un homme : Pst ! Vous deux ! Sh ! Le film va commencer.
2. La phrase minimale. La phrase étendue
Quand on veut étudier la grammaire de la phrase, c'est-à-dire ce qui se passe dans la phrase, on se heurte à une
difficulté : il n'y a pas une phrase en français, mais des formes multiples. Ainsi :
Le petit chat est mort.
Je vous présente notre nouveau président.
Entrez !
J'ai passé mon enfance dans une grande ville de province coupée en deux par une rivière très encombrée, très remuante, j'ai pris de bonne
heure le goût de voyages et la passion de la vie sur l'eau.
Seule la première phrase est à peu près "normale", et l'avant-dernière est verbale aussi, mais ne contient qu'un
impératif. Une phrase complexe, comme la dernière, peut contenir un certain nombre de subordonnées et être assez longue.
Aussi est-il nécessaire de fixer un cadre qui permette de regrouper toutes ces formes et de les analyser de la même
manière : c'est celui de la phrase canonique.
La phrase canonique
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La phrase canonique, c'est une phrasesimple(qui n’a pas de subordonnées),assertive(déclarative : pas
d'interrogation, etc.), neutre sur tous les plans(pas négative, sans procédés de mise en relief...), avec les mots dansl'ordre
le plus simple, le plus caractéristique de leur fonction. L'ordre sera le suivant :sujet - verbe - complément(s) / attribut. Avec
éventuellement un ou des compléments circonstanciels, facultatifs et mobiles ; au total :(CC) - sujet - (CC) - verbe -
complément(s) / attributs - (CC)
Les phrases à peu près canoniques sont relativement fréquentes dans le discours oral ou écrit. Mais la phrase
canonique n'est pas un point de départ dans l'apprentissage du langage ou la constitution de la pensée : les enfants
n'apprennent pas forcément à parler ainsi. C'est un cadre théorique, qui est une sorte de point de rencontre de toutes
les phrases, et qui permet d'analyser le contenu des phrases. Cela représente donc un effort d'abstraction dans
l'étude du langage.
La phrase minimale
Au-delà de la phrase canonique, et constituant un cadre encore plus théorique, toujours destiné à permettre des
analyses, se trouve la phrase minimale. C'est à elle que l'on fait référence quand on doit étudier une fonction : le sujet, le COD,
l'attribut entrent dans le cadre de la phrase canonique minimale. Le complément du nom, l'apposition, les compléments
circonstanciels n'entrent pas dans ce cadre.
On réduit la phrase au maximum, et on observe ce qui estessentiel, non supprimablesous peine de rendre la
phrase agrammaticale, incorrecte, ou de modifier fortement le message.
Pendant des années, l'affreux gros chien noir de l'ancienne concierge de l'immeuble effrayait tous les enfants qui passaient plusieurs fois par jour
devant la loge.
Phrase minimale :Le chien effrayait les enfants.
La phrase minimale est donc elle aussi, et encore davantage, un cadre théorique pour étudier ce qui se passe à
l'intérieur de la phrase. Elle montre que toute phrase canonique est réductible à une séquence qui se résume
en :Syntagme nominal Syntagme verbal (SN - SV).Le SN correspond à la fonction sujet. Le groupe verbal contient, s'il y
en a, le ou les compléments essentiels ou l'attribut.
Contrairement à ce que l'on voit dans une analyse traditionnelle, on s'aperçoit que le sujet (SN) n'est pas à mettre sur
le même plan que le complément d'objet, simplement parce qu'il appartient à un autre niveau hiérarchique, le verbe étant le
pivot. Il y a des relations de solidarité entre le sujet et le verbe, une dépendance réciproque. La phrase minimale comprend
deux constituants ; le COD ne fait pas le 3ème, il entre dans le 2ème, malgré l'apparence de symétrie avec le sujet.
On utilise généralement le terme de prédicat pour exprimer la fonction, le rôle à la fois syntaxique et sémantique du
groupe verbal ; c'est un terme qui fait allusion aux rapports nécessaires et réciproques entre le sujet et le SV.
La phrase étendue
Enfin, on parle de phrase étendue quand on rajoute une ou plusieurs expansions. A côté du SN et du SV
peuvent se trouver des éléments mobiles et facultatifs qui sont des compléments circonstanciels ; et dans un groupe nominal,
on peut rajouter des adjectifs ou d'autres éléments équivalents.
Exercices :
1. Récrivez les phrases suivantes en les réduisant à la phrase minimale.
1. Du haut des gradins, nous ne verrons pas le match.
2. Au zoo de La Flèche, nous avons vu des animaux qui semblaient heureux.
3. Dans la cour de récréation, tous les matins, des élèves vendent des croissants.
4. Il pleut sans discontinuer depuis un mois.
5. Tous les soirs, pendant la belle saison, je fais une promenade à vélo.
6. Dans mon village, un bal est organisé, tous les ans.
7. Pendant les vacances, Sébastien a réalisé une très belle maquette d’avion.
2. Les phrases suivantes ne contiennent qu'un groupe sujet, un verbe et un complément de ce verbe; récrivez-
les en introduisant les compléments circonstanciels donnés entre parenthèses.
Grammaire Française I Unité 2 : La phrase
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1. Les élèves de Sixième participent au tournoi (avec enthousiasme - tous les mercredis).
2. Les habitants du lotissement organiseront un pique-nique (dès les premiers beaux jours - sur la plage).
3. Nous avons rencontré un sanglier (hier - lors de notre promenade - au détour d'un sentier).
4. Je protège mes géraniums (à l'automne - dès les premières gelées).
5. Un groupe d'élèves réalise une fiche de biologie (sans se presser - avec soin).
3. La phrase simple et la phrase complexe
3.1. La phrase simple
La phrase simple est constituée d’un groupe verbal (mots groupés autour d’un verbe conjugué), mais peut
comporter un ou plusieurs groupes nominaux :
Les mammouths n’existent plus.
Malgré leur poids considérable, les hippopotames se déplacent vite.
Paul et Pierre se promènent.
La phrase simple est donc formée d’une seule proposition. Elle peut être longue :
Dans ce texte, les renseignements sur ces animaux disparus sont nombreux et intéressants.
Les dimanches et les jours de fête, j’ai souvent entendu dans le grand bois, à travers les arbres, les sons de la cloche lointaine.
3.2. La phrase complexe
C’est une phrase contenant plusieurs groupes verbaux qui constituent le pivot de la proposition et qui comportent des
‘satellites’ associés (tels que le sujet, l’OD, l’OI, etc.). Les phrases complexes comportent donc plusieurs verbes conjugués. De
ce fait, la phrase complexe comporte plusieurs propositions.
Il veut que je vienne. (Il veut quelque chose. Je viens.)
Le livre que tu m’as conseillé est vraiment intéressant. (Le livre est vraiment intéressant. Tu m’as conseillé ce livre.)
Il ignore comment résoudre le problème. (Il ignore quelque chose. Comment résout-il le problème ?)
Les liens entre les propositions
Les propositions ne sont pas toutes liées entre elles de la même façon. Elles peuvent être mises sur le même plan par
juxtapositionou par coordination. Au contraire, une proposition peut dépendre d’une autre par subordination.
3.2.1. La juxtaposition
C’est la séparation des mots, des groupes de mots ou de propositions d’une phrase uniquement par des signes de
ponctuation :
• des mots :Ce produit est très efficace contre les insectes volants : mouches, guêpes et moustiques. Ce sont des animaux énormes, puissants,
extraordinaires.
• des groupes de mots :En cette journée d'automne, je pense aux bons moments de l'été : le pique-nique avec Jean -Pierre, les retrouvailles à
la piscine, les fous rires avec Stéphanie. Émile a acheté un matelas pneumatique, un maillot de bain, un parasol à rayures.
des propositions :J'ai pour elle une affection que je ne sais comment manifester ; les gestes qui expriment ma tendresse l'effraient ou
l'ennuient. J’ai faim ; je n’ai pas encore mangé.
Les signes de ponctuation qui juxtaposent sont la virgule (,), lepoint (.),le point-virgule (;) et les deux points (:).
3.2.2. La coordination
Coordonner, c'est lier des mots, des groupes de mots, des propositions ou des phrases par des conjonctions de
coordination ou des mots équivalents.
[Nous avons marché dans la forêt]et [nous sommes revenus par (les champs)et(la ferme Rigau)].
Dans cette phrase, le premier
et
coordonne deux propositions. Le deuxième
et
coordonne deux groupes de mots.
Les conjonctions de coordination sont peu nombreuses :
mais, ou, et, donc, or, ni, car.
Certains adverbes, appelés adverbes de liaison, peuvent aussi coordonner :
ainsi, alors, cependant, d'ailleurs, d'autre part,
enfin, ensuite, par conséquent, pourtant, puis, toutefois...
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