les villages fortifiés
de Chenini et Douiret
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Chenini et Douiret, villages troglodytiques situés
ù une vingtaine de kilomètres de Tataouine, sont
désertés par les touristes depuis la vague d'attentats
qui ont endeuillé la Tunisie. Aujourd'hui, le silence
a envahi les ruelles escarpées et les mosquées
marquées par l'influence de l'architecture ibadite.
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À l'ouest de Tataouine, sur les
sommets escarpés du djebel
Demmer, se dressent haut per-
chés les deux anciens villages ber-
bères de Chenini et Douiret. Avant
la révolution tunisienne de 2011,
des flots de cars déversaient ici
leurs centaines de touristes quo-
tidiens venus tenter l'expérience
du Grand Sud. Aujourd'hui, alors
que la Tunisie se remet pénible-
ment de la vague d'attentats qui
a fait fuir les vacanciers, il n'y a
presque plus personne, à l'excep-
tion de quelques guides désoeuvrés
qui tentent de tuer le temps comme
ils le peuvent. Éloignée des grands
centres, la région de Tataouine
incarne de fortes revendications
sociales. Les habitants réclament
au gouvernement davantage d'em-
plois et d'infrastructures modernes,
que le pétrole produit plus au sud
à El-Kamour devrait pouvoir leur
assurer.
Lorsque nous entrons à
Tataouine, en mai 2017, la situa-
tion n'a pas encore dégénéré mais
la tension est très palpable : à de
nombreux endroits, les rues des
faubourgs de la ville sont barrées
par des constructions hétéroclites,
amoncellements de tôles, de pneus
ou de troncs d'arbres tagués par
les manifestants en colère. Dès que
nous quittons la ville, le calme
absolu s'impose, les routes
sont vides.
Cet hiver, la pluie est tom-
bée en abondance, provo-
quant à plusieurs reprises des
crues meurtrières. Sur ce sol
généralement si aride sont
nées de petites oasis éphémères à
l'herbe grasse, de petits morceaux
de Normandie jaillis de ce sol cra-
quelé par la chaleur. Les plantes aro-
matiques, l'armoise, le thym et le
romarin sauvages, ont redoublé de
vigueur et embaument l'air torride.
Les oliviers, rois de la végétation
locale, ont également fière allure,
revigorés par ces pluies providen-
tielles. Nous croisons un individu
célèbre pour sa production extraor-
dinaire : plus de 900 litres d'huile par
an ! Mais si les pluies ont donné au
paysage une luxuriance inhabituelle
et promettent de belles récoltes, les
habitants voient d'un mauvais oeil
ces épisodes climatiques de plus en
plus soudains, fréquents et violents.
La mosquée principale
du vieux Chenini
Nous atteignons Chenini et traver-
sons d'abord le village moderne bâti
dans la vallée, qui compte environ
1 300 habitants. Plus loin, en grim-
pant, c'est la vieille ville de Chenini
qui apparaît, avec le ksar - le gre-
nier collectif fortifié - qui domine
un vaste amphithéâtre formé de
ruines et de demeures troglody-
tiques : les grottes ont été creusées
sur le plan horizontal, en profitant
des couches de calcaire tendre, et
non pas en profondeur comme des
puits. Cent familles vivent encore là
tant bien que mal, guettant l'arrivée
d'hypothétiques touristes qui pour-
raient loger dans une des grottes de
l'hôtel Dar Kenza.
L'un des buts de notre voyage est
d'aller visiter la mosquée dite des
Sept Dormants, dont le nom fait
allusion à la légende bien connue,
qui constitue un des symboles
du dialogue islamo-chrétien : au
me siècle, pour échapper à la per-
sécution ordonnée par l'empereur
romain Dèce (249-251), sept jeunes
chrétiens se sont réfugiés dans une
caverne de la région d'Éphèse et
y ont été emmurés vivants. Bien
plus tard, ils se sont réveillés et ont
témoigné de l'époque de la
perté-
Ci-dessus :
reliefs de
manifestations
à Tataouine.
Page de gauche,
en haut :
mosquée
principale du
vieux Chenini.
Page de gauche,
en bas :
arrivée
au
ksar
de Douiret.
gantant 104 été 2017