(1693), entre autres...
•Les deux tragédies mettent en scène un héroïsme du refus, de la résistance, du
non
: dans
Antigone
(La Table ronde, coll. la Petite Vermillon, p. 78 sq., p. 93 et 104) s'opposent le
non
d'Antigone et le
oui
de Créon ; dans
Médée
, où les mots « oui » et « non » apparaissent
souvent, s'oppose le camp de l'acceptation (Créon, Jason, la nourrice) et celui du refus
(Médée, seule).
•Les deux héroïnes, Antigone et Médée, refusent également le bonheur (
Antigone
p. 92, p.
96 par exemple ;
Médée
p. 16 : « Quelque chose bouge dans moi [...], c'est quelque chose
qui dit non au bonheur. »)
•Les deux héroïnes affirment leur autonomie jusqu'à une solitude radicale – qui n'est pas
l'isolement, mais au contraire le
spectacle
de leur irréductible différence. « Pour personne.
Pour moi » (
Antigone
, p. 73, et dans
Médée
il y a de nombreuses affirmations de cette
sorte).
•Les dialogues rendent palpable l'hétéronomie entre l'héroïne et les autres, jusqu'à la surdité
ou la demande à l'autre de se taire (
Antigone
p. 25-26 : « Je ne t'écoute pas. » ; « tais-toi »
demande Créon à plusieurs reprises ; « Tu ne sais plus ce que tu dis. — Si, je sais ce que je
dis. » De telles répliques se trouvent aussi dans
Médée
, voir ci-dessous).
•le poids du passé, de l'enfance, est commun à Antigone et à Médée : enfance royale,
jalousies et rivalités dans le cas d'Antigone (mises à jour par son dialogue avec Ismène ;voir
p. 32, 50-51, 63) ; dans le cas de Médée, une enfance royale également, et le rôle de
prêtresse qui fut le sien. Le présent porte le poids du passé. Ce passé est représenté sur la
scène d'
Antigone
par la nourrice et par Ismène, la soeur d'Antigone. Dans
Médée
c'est la
nourrice, qui exprime une certaine nostalgie, mais qui incarne surtout l'idée que
le temps
passe
, qu'il y a
un avant
et
un après
, et que rien, fondamentalement, ne change.
•Médée et Antigone sont infantilisées : Antigone est perçue comme un enfant (p. 50-51 :
c'est un
enfant
qu'on voit enterrer Polynice), et la nourrice adresse à Médée des noms
affectueux, d'ailleurs lourds d'ambiguïté (« ma chatte » p. 12, « Mon aigle fier, mon petit
vautour... » p. 20 « ma louve » p. 22, ...). Jason, lui aussi, infantilise Médée, en faisant écho
aux surnoms de la nourrice : « Tu as l'air d'une
petite bête
éventrée... »
•Le poids de la génération : dans
Médée
trois générations sont représentées (celle des
« vieux », celle de Créon et de la nourrice ; celle de Jason, de Médée et de Créuse ; enfin,
celle des enfants), et les figures paternelles ou maternelles sont relativement nombreuses :
Créon, Jason, Médée, la nourrice... et il est fait allusion à Pélias, au père de Jason, Éson, au
père de Médée, Éétès, et à son aïeul le soleil. Créon, dans
Antigone
, dit à son fils :
« Regarde-moi, c'est cela devenir un homme, voir le visage de son père en face, un jour. »
Hémon le regarde, recule en criant, et s'enfuit... Dans
Médée
, les personnages de pères, sur
la scène, sont Jason et Créon, qui veulent le bonheur de leurs enfants, et pour cette raison
précipitent la catastrophe. Dans les paroles de Jason et de Médée apparaissent Pélias
(l'usurpateur, roi de Iolchos, tué par ses propres enfants, à cause d'une ruse de Médée),