Les Hémoglobinopathies I - Généralités et définitions • Le terme d'hémoglobinopathie désigne les pathologies de l'hémoglobine • C’ est une affection héréditaire dont la transmission est variable selon la variété de l'hémoglobinopathie). • un problème de santé publique dans de vastes parties du monde. Les praticiens sont confrontés de plus en plus souvent à ces affections en raison des migrations de populations. • Ils doivent poser un diagnostic précis pour prendre en charge les patients, donner un conseil génétique et, si nécessaire, porter un diagnostic prénatal. L’hémoglobine • L’hémoglobine appartient à la famille des pigments respiratoires qui sont des macromolécules protéiques fixant réversiblement l’oxygène, • Son rôle principal: - le transport de l’oxygène des poumons aux tissus, - l’élimination du gaz carbonique des tissus vers les poumons. II - Rappels structuraux II-1. Structure de l’hémoglobine: 2 β1 α2β2 α1β1 α1 2 II-2. La structure des gènes de l’hémoglobine Les gènes de la famille α : sont situés sur le chromosome 16, localisation en 16p13.3, et comporte trois gènes. Les gènes de la famille β : sont situés sur le chromosome 11 localisation en 11p15.5 et comporte cinq gènes • L’ordre des gènes de 5’ en 3’ sur le chromosome correspond à l’ordre de leur expression au cours du développement. • Chez l’embryon, trois hémoglobines coexistent : - Hb Gower 1 (ζ2ε2) - Hb Gower 2(α2ε2) - Hb Portland (ζ2γ2) • Chez le foetus apparaît l’hémoglobine foetale (α2γ2). Les chaînes γ sont produites par deux gènes dupliqués : Gγ et Aγ, après la naissance, l’hémoglobine F diminue rapidement, • Le statut hémoglobinique adulte est atteint, en principe, entre l’âge de 1 et 2 ans, et comporte : - HbA1 (α2β2) ≈ 97 % - Hb A2 (α2δ2) ≤ 3,1 % - Hb F (α2γ2) ≤ 1 % Les globines humaines sont des molécules homologues, leurs gènes appartiennent à une famille de gènes, la famille des globines Les séquences nucléotidiques degré de similitude des protéines homologues ainsi que les gènes qui les codent. Tous ces gènes dérivent d'un même gène ancestral. Beta.pro FGKEFTPPVQAAYQKVVAGVANALAHKYH-----Delta.pro FGKEFTPQMQAAYQKVVAGVANALAHKYH-----gammaG.pro FGKEFTPEVQASWQKMVTAVASALSSRYH-----gammaA.pro FGKEFTPEVQASWQKMVTAVASALSSRYH-----Epsilon.pro FGKEFTPEVQAAWQKLVSAVAIALAHKYH------ Alpha1.pro Alpha2.pro Theta.pro LPAEFTPAVHASLDKFLASVSTVLTSKYR-----LPAEFTPAVHASLDKFLASVSTVLTSKYR-----YPGDFSPALQASLDKFLSHVISALVSEYR------ Myoglob.pro HPGDFGADAQGAMNKALELFRKDMASNYKELGFQG :* . :.: :* : . : .*: Chaque noeud de cet arbre correspond à une duplication génique, suivie d'une évolution indépendante des deux duplicata par fixation de mutations différentes Exemple: - Les gènes Gγ et Aγ codent pour la chaîne γ , avec 1 acide aminé différent en 136. - Existence d'un pseudogène ψβ, apparenté aux gènes normaux mais présentant des mutations telles qu'il ne code pour aucune protéine. Les anomalies de l’hémoglobine se répartissent en deux grands groupes 1. Hémoglobinopathies quantitatives (les anomalies de synthèse des chaînes de globine): caractérisées par la diminution ou l'absence de production des chaînes de globine. Les thalassémies sont un groupe de maladies héréditaires autosomales récessives. Lors d'une anomalie de la synthèse de la chaîne b on parle de thalassémie b, alors que lors d'une anomalie de la synthèse de la chaîne a on parle de thalassémie a. 2. Les hémoglobinopathies structurales (les anomalies de structure de la protéine): L’anomalie est l’apparition d’une hémoglobine pathologique qui se distingue des hémoglobines normales par une modification structurale affectant certaines chaînes polypeptidiques de l’hémoglobine. responsables d’anémies, plus rarement de polyglobulie ou de cyanose. C’est dans cette catégorie que se situe la drépanocytose par exemple. N.B: Les deux types d’anomalies peuvent être intriqués : ce sont par exemple les syndromes thalassodrépanocytaires. Les mécanismes moléculaires responsables de ces anomalies sont multiples. Il existe une grande diversité des syndromes cliniques. Circonstances de diagnostic d’une hémoglobinopathie Les situations amenant à étudier une hémoglobinopathie sont multiples et comprennent : 1. Le diagnostic étiologique d’anomalies biologiques : - anomalies hématologiques au niveau d’un frottis sanguin, - signes d’hémolyse, - fraction hémoglobinique anormale sur le tracé chromatographique pour dosage de l’hémoglobine glyquée 2. Le diagnostic étiologique d’anomalies cliniques : - anémie hémolytique - polyglobulie, - cyanose, 3. L’enquête familiale, suite à la découverte d’une hémoglobinopathie la recherche systématique chez les nouveau-nés de certaines maternités. DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE D’UNE ANOMALIE DE L’HÉMOGLOBINE • Selon la NABM (nomenclature des actes de biologie médicale), « un bilan standard pour la recherche d’une hémoglobine anormale » doit inclure 3 tests phénotypiques distincts, dont au moins une technique électrophorétique avec interprétation. • Les techniques utilisées sont, soit séparatives permettant de différencier les hémoglobines en fonction de leurs caractéristiques physico-chimiques (électrophorèse et chromatographie), soit non séparatives, mais mettant en évidence des propriétés spécifiques : test Itano (ou test de précipitation de l’HbS), recherche de corps de Heinz, test de précipitation à l’isopropanol, spectrophotométrie pour la méthémoglobine, courbe de dissociation de l’oxygène,... A) Les techniques d’étude séparatives 1) L’électrophorèse: L’électrophorèse sépare les hémoglobines en fonction de leur différence de charge dans un champ électrique. - L’électrophorèse de zone à pH alcalin (pH = 8,6 ) - L’électrophorèse à pH acide (pH = 6) - L’isoélectrofocalisation (IEF) - L’électrophorèse capillaire (EC) 2) La chromatographie - La chromatographie liquide haute performance (CLHP) 3) La spectrophotométrie de masse B) Les techniques d’étude non séparatives 1) Test de solubilité de l’HbS - Le test Itano est essentiel pour confirmer la présence d’HbS et repose sur le principe que seule l’HbS désoxygénée précipite en milieu réduit. - Le test de falciformation de Emmel est une alternative au test Itano. C’est également une technique manuelle qui met en évidence les drépanocytes sur lame en déclenchant au laboratoire la falciformation, soit en rajoutant du métabisulfite au sang du malade, soit en créant artificiellement une atmosphère pauvre en oxygène. Le test de falciformation de Emmel 2) Autres tests: -Tests de stabilité de l’Hb : Le test à l’isopropanol: est le test de référence . Il doit être pratique sur un prélèvement frais (< 6 heures) et toujours en parallèle d’un témoin prélevé dans les mêmes conditions. Le principe est les forces de cohésion internes de la molécule d’hémoglobine diminuent dans un milieu apolaire que constitue l’isopropanol. Quand celui-ci est à la concentration de 17 % V/V, l’hémoglobine A précipite après 50 à 60 minutes à 37°C. L’instabilite d’une hémoglobine se manifeste par une précipitation précoce (de 5 à 20 minutes). - Mesure de l’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène : étude fonctionnelle réservée à des laboratoires spécialisés dans un contexte d’hémoglobine ayant une affinité modifiée pour l’oxygène. C) Place de la biologie moléculaire La transmission des hémoglobinopathies se fait principalement selon un mode autosomique récessif. La caractérisation moléculaire est utile voire nécessaire pour le conseil génétique de couples à risque, pour affirmer ou simplement préciser le phénotype des cas index, de façon sporadique, pour caractériser des mutants. Les techniques utilisées sont des techniques de biologie moléculaire classiques : séquençage, dot-blot, gap-PCR,...