4 RELATIVITÉ GÉNÉRALE
Introduction
La relativité générale d’Einstein est l’une des théories physiques les plus élégantes. L’idée
fondamentale à la base de cette théorie est que le champ de gravitation, que nous mesurons
par ses effets sur le mouvement des corps massifs, est en fait une manifestation de la géomé-
trie courbe de l’espace-temps. Après sa formulation il y a bientôt un siècle, ses prédictions à
l’échelle astrophysique (déviation de la lumière par les corps massifs, précession du périhélie
des planètes, décalage des raies spectrales vers le rouge) ont été rapidement confirmées par
l’observation. Une prédiction moins évidente de la théorie, qui a mis beaucoup plus long-
temps à se dégager, est maintenant aussi bien confirmée par les observations. C’est celle de
l’existence des trous noirs, des régions de l’espace-temps où la courbure est si forte que la
lumière – ainsi que tous les objets tombés dans ces régions – est piégée et ne peut plus s’en
échapper.
La nature de la géométrie spatio-temporelle des trous noirs peut être élucidée par l’étude
de certaines solutions exactes des équations d’Einstein, ou des équations couplées d’Einstein-
Maxwell. Ces solutions stationnaires (indépendantes du temps), dont la plus connue est la
solution de Schwarzschild, feront l’objet de ce cours.
Dans une première partie, nous rappellerons brièvement les notions de base de la rela-
tivité générale qui seront utilisées dans la suite du cours. La seconde partie sera consacrée
à l’étude de la géométrie des trous noirs stationnaires, en commençant par la solution de
Schwarzschild. Nous verrons comment la singularité apparente de cette solution sur la sphère
de rayon r= 2GM peut être éliminée par la transformation de coordonnées de Kruskal,
cette sphère (l’horizon évènement) correspondant simplement à une frontière entre l’exté-
rieur du trou noir, où la géométrie spatio-temporelle est qualitativement la même que celle
de l’espace-temps de Minkowski, et l’intérieur du trou noir, où le cône de lumière a basculé
de sorte que les rôles du temps et de la coordonnée radiale sont échangés. Nous introduirons
ensuite les diagrammes de Penrose, qui permettent de visualiser simplement la structure cau-
sale des espace-temps stationnaires. Puis nous verrons que les équations d’Einstein-Maxwell
admettent également une solution trou noir, la solution de Reissner-Nordström, dont la struc-
ture plus complexe (existence de deux horizons) peut être aisément visualisée à l’aide de dia-
grammes de Penrose. Après ces solutions à symétrie sphérique, nous étudierons la solution de
Kerr, qui est seulement à symétrie axiale, et représente le champ gravitationnel à l’extérieur
d’un objet massif en rotation autour de son axe de symétrie. Enfin, nous mentionnerons très
rapidement quelques éléments de la thermodynamique des trous noirs.
La troisième partie sera axée sur la géométrie, non plus de l’espace-temps, mais de
l’“hyperespace” des solutions stationnaires des équations d’Einstein ou d’Einstein-Maxwell.
Nous verrons comment ces solutions peuvent être reliées entre elles par des transformations
appartenant à un groupe de symétrie caché du système d’équations des champs. Nous mon-
trerons d’abord comment réduire les équations d’Einstein stationnaires à celles d’une théo-
rie effective de gravitation à seulement trois dimensions, avec comme source un champ dit
de “modèle sigma” associé au groupe SL(2, R). Puis nous passerons au cas des équations
d’Einstein-Maxwell stationnaires, dont le groupe d’invariance est SU(2,1), et verrons com-
ment une transformation du groupe permet de générer la solution de Reissner-Nordström à
partir de celle de Schwarzschild. Nous verrons ensuite comment la combinaison de transfor-
mations du groupe SU(2,1) avec une transformation de coordonnées permet de générer la