De la physique à la technologie
Les écrans à plasma
Dans les écrans à plasma, chaque élément d’image est constitué d’une cellule dont les dimensions
sont de l’ordre de quelques centaines de microns, et contenant un mélange de gaz rares.
Le passage d’un courant dans le volume gazeux d’une cellule conduit à la formation d’un plasma
froid dont les électrons énergétiques excitent les atomes de gaz rares sur des niveaux émetteurs
de photons ultraviolets. Ces photons UV sont convertis en photons visibles dans les trois couleurs
fondamentales par des luminophores disposés sur les parois des cellules. Les écrans à plasma
représentent la technologie la plus prometteuse pour la télévision murale de grandes dimensions.
Bien que la production de ces écrans ait déjà démarré au Japon, des progrès restent à faire pour
améliorer les performances de ces systèmes. Nous montrons ici l’apport de la modélisation du
plasma à la compréhension des phénomènes de transport des particules chargées et des photons
dans ces systèmes et à leur optimisation.
L
es plasmas créés par décharge
électrique dans un gaz sont
des plasmas froids, dont le
degré d’ionisation (proportion d’ato-
mes ou molécules ionisés) est typi-
quement inférieur à 10
–4
et les tem-
pératures de l’ordre de l’eV
(1 eVz10 000 K). C’est le cas par
exemple des plasmas d’arc électri-
que. Si la densité de courant traver-
sant le milieu gazeux est suffisam-
ment faible, le plasma peut être très
éloigné de l’équilibre thermodynami-
que, avec en général des « tempéra-
tures » électroniques très supérieures
à celles des ions et des neutres (la
fonction de distribution en énergie
des électrons n’est plus maxwel-
lienne dans ces conditions, et la
« température » électronique est en
fait définie à partir de l’énergie
moyenne des électrons). La possibi-
lité de découpler l’énergie électroni-
que de la température du gaz et de
moduler la forme de la fonction de
distribution électronique en jouant
sur les paramètres de la décharge
(tension, mode d’excitation continu,
haute fréquence, confinement magné-
tique, pression, géométrie des élec-
trodes) est à la base des applications
des plasmas de décharge hors équili-
bre. Une des applications récentes les
plus importantes de ces plasmas est
le traitement de surface, en particu-
lier en micro-électronique (gravure et
dépôt de couches minces). Dans cette
application, c’est la propriété du
plasma froid de permettre la création
d’un milieu réactif par excitation et
dissociation du gaz initial par impact
électronique, tout en maintenant le
milieu gazeux à basse température,
qui est utilisée.
LES ÉCRANS À PLASMA ET
LEURS CONCURRENTS
Avec les écrans à plasma, on re-
trouve l’une des toutes premières ap-
plications des plasmas froids, à sa-
voir l’utilisation du plasma en tant
que source de photons, comme dans
les lampes à décharge ou les lasers à
gaz. L’idée d’utiliser des décharges
électriques hors d’équilibre de peti-
tes dimensions comme éléments
d’images d’un écran de visualisation
est ancienne. Les premières images
monochromes d’écrans à plasma ont
été obtenues dans les années 70. Ce
n’est cependant qu’au début des
années 90, grâce à des progrès im-
portants sur les matériaux utilisés,
l’électronique de commande, et le
rendement lumineux du plasma, que
les écrans à plasma se sont imposés
comme la technologie la plus pro-
metteuse pour la télévision murale de
grande dimension (dans la gamme de
diagonales d’écran de 1 m à 1,5 m).
Les écrans à tube cathodique
dominent actuellement largement les
applications de type télévision. Mal-
gré leurs performances excellentes et
leurs coûts réduits, la taille et le
poids de ces écrans les rendent très
peu pratiques pour des diagonales
d’écrans supérieures à 80 cm.
Les écrans à cristaux liquides sont
très bien adaptés au marché des ordi-
nateurs portables où les limites sur le
poids et la consommation sont dras-
tiques. Cependant, l’application des
cristaux liquides aux écrans plats
semble être actuellement limitée à
des diagonales inférieures à 50 cm en
raison notamment de la difficulté à
réaliser, sur de grandes surfaces, les
réseaux de transistors en couches
minces nécessaires à la commande
électrique des pixels.
Par ailleurs, l’angle de vue relati-
vement faible des écrans à cristaux
liquides constitue encore une limita-
tion importante de cette technologie.
D’autres technologies à écrans
platstellesquecellesdesécransélectro-
luminescents et des écrans à émission
de champ semblent également pro-
metteuses mais leur faisabilité dans la
gamme de 1 m à 1,5 de diagonale n’a
pas encore été prouvée. Au-delà de
Centre de physique des plasmas et leurs
applications de Toulouse, ESA 5002 CNRS,
Université Toulouse 3, Bât. 3R2, 118 route
de Narbonne, 31062 Toulouse Cedex.
97
1,5 m de diagonale, on retrouve la
technologie à cristaux liquides, mais
cette fois pour des systèmes de pro-
jection.
L’épaisseur d’un écran à plasma
de 1 m de diagonale avec son élec-
tronique de commande est d’environ
10 cm, pour un poids inférieur à
20 kg, contre 100 cm et 150 kg res-
pectivement pour un écran à tube
cathodique. Leur angle de vue est su-
périeur à 160°, ils présentent un
excellent contraste et peuvent attein-
dre 16 millions de couleurs. La rapi-
dité des processus de transport de
particules chargées gouvernant le
plasma de décharge électrique permet
des vitesses d’adressage suffisantes
pour la télévision. Enfin, la fabrica-
tion d’écrans de grande taille pose
beaucoup moins de problèmes que
celle des écrans à cristaux liquides.
PRINCIPES DES ÉCRANS À PLASMA
Un écran à plasma est constitué
de deux dalles de verres parallèles
placées à environ 100 µm l’une de
l’autre (figures 1 et 2). L’intervalle
entre les deux dalles est rempli d’un
mélange de gaz rares (néon ou hé-
lium avec5à10%dexénon) à une
pression de l’ordre de 500 torr
(1 torr = 133 Pa). Des réseaux d’élec-
trodes parallèles sont déposés sur les
surfaces des dalles de verre en vis-à-
vis. Dans un écran de type matriciel
les réseaux d’électrodes des deux
dalles sont perpendiculaires. On peut,
en appliquant une tension suffisam-
ment élevée (supérieure à la tension
de claquage du gaz) entre une ligne
et une colonne, faire passer un cou-
rant dans le milieu gazeux, et créer
ainsi, à leur intersection, un plasma
de décharge électrique. La désexcita-
tion spontanée ou induite des atomes
de gaz rares excités par les électrons
énergétiques du plasma conduit à
l’émission de photons dont la lon-
gueur d’onde dépend de la nature du
gaz. Dans les écrans à plasma cou-
leur, on cherche à favoriser l’émis-
sion du plasma dans l’ultraviolet, de
façon à obtenir, après interaction des
photons UV avec des luminophores,
des photons visibles dans les trois
couleurs fondamentales. C’est géné-
ralement le xénon qui est utilisé pour
l’émission de photons UV. Le niveau
résonnant Xe(
3
P
1
) du xénon émet
des photons à 147 nm. Dans les
conditions de pression assez élevée
des écrans à plasma, les collisions à
trois corps entre l’état résonnant ou
l’état excité métastable Xe(
3
P
2
)et
des atomes de xénon et de néon en-
traînent également la formation
d’états moléculaires excités du xénon
(excimères) qui émettent dans un
continuum de longueur d’ondes
autour de 173 nm (cf. figure 3). Le
néon ou l’hélium sont utilisés comme
gaz tampons, uniquement pour abais-
ser la tension de claquage, qui est
trop élevée dans le xénon pur.
Dans la plupart des écrans à
plasma actuels, les réseaux d’électro-
des sont recouverts d’une couche di-
électrique d’émail. Le rôle de cette
couche isolante est double : d’une
part, la capacité qui lui est associée
permet de limiter le courant simple-
ment, sans avoir à placer une résis-
tance en série avec chaque cellule ;
d’autre part, elle permet un adressage
simple des cellules, basé sur un effet
mémoire dû aux charges stockées sur
Figure 1 - Coupe d’un écran à plasma alternatif matriciel. Chaque cellule de décharge est à l’inter-
section d’une électrode ligne et d’une électrode colonne. Les dimensions transverses d’une celle sont
entre 200 µmet 1 mm, suivant la taille de l’écran et sa résolution. La hauteur de l’espace gazeux en-
tre les surfaces diaélectriques est de l’ordre de 100 µm.L’épaisseur de la couche d’émail est d’envi-
ron 20 µm,celle de MgO est inférieure 1µm.
Figure 2 - Coupe d’une cellule d’écran à plasma alternatif matriciel (AC-M) et coplanaire (AC-C) dans
un plan parallèle aux barrières diélectriques (perpendiculaire à celui de la figure 1). La décharge s’ef-
fectue entre les électrodes notées X et Y.
98
les surfaces diélectriques (cf. enca-
dré 1). En fait, la présence de cette
couche capacitive au-dessus des élec-
trodes impose un fonctionnement en
régime alternatif. On distingue deux
catégories d’écrans à plasma alterna-
tifs : les écrans matriciels, AC-M, et
les écrans coplanaires, AC-C (cf. fi-
gures 1 et 2). La couche isolante au-
dessus des électrodes a environ
20 µm d’épaisseur, et est recouverte
d’une couche protectrice diélectrique
de MgO de moins de un micron.
Cette couche protectrice, qui est
bombardée par les ions de xénon et
de néon du plasma, doit également
avoir un coefficient d’émission élec-
tronique secondaire (nombre d’élec-
trons émis par ion incident) élevé.
Elle joue un rôle fondamental dans
un écran plasma car, d’une part, la
durée de vie de l’écran est directe-
ment liée à sa stabilité et à sa résis-
tance à la pulvérisation par impact
ionique, et, d’autre part, son coeffi-
cient d’émission électronique secon-
daire élevé doit permettre un
fonctionnement à basse tension d’en-
tretien. Le MgO est considéré actuel-
lement comme le matériau idéal en
raison de sa stabilité et de son coef-
ficient d’émission secondaire élevé,
de l’ordre de 0,3-0,5 pour des ions de
néon.
Comme décrit dans l’encadré 1,
l’état allumé d’une cellule d’écran
plasma alternatif est le résultat d’une
succession de décharges électriques
impulsionnelles. Pendant l’impulsion
de courant qui dure de 10 à 100 ns,
les électrons excitent et ionisent le
milieu. La décharge cesse rapidement
car la couche diélectrique recouvrant
les électrodes se charge, ce qui en-
traîne une chute de la tension au sein
du gaz. Les atomes excités libèrent
progressivement leur énergie en
émettant des photons pendant un
temps plus long, de l’ordre de 1 ou
2 µs après l’impulsion de courant. A
chaque changement de signe de la
tension appliquée entre les électro-
des, une nouvelle décharge impul-
sionnelle est activée.
Une cellule d’écran plasma fonc-
tionne dans un régime de décharge
luminescente caractérisé par un degré
d’ionisation (nombre d’électrons par
particule lourde) faible, inférieur à
10
–5
, et des énergies moyennes élec-
troniques inférieures à quelques eV.
Les tensions d’amorçage sont typi-
quement comprises entre 250 et
300 V, et les tensions d’entretien en-
tre 150 et 200 V. La densité de cou-
rant maximale dans une cellule
atteint 10 A/cm
2
, et les densités de
particules chargées dans le plasma
restent inférieures à quelque
10
14
cm
3
. La tension de claquage
dépend du produit de la pression par
la distance interélectrode. Les valeurs
optimales de ce produit pour un
écran plasma sont de5à10torr.cm.
Au-delà, la tension d’amorçage
devient trop grande (également, la
décharge peut devenir instable et fi-
lamentaire) et, pour des valeurs infé-
rieures, la marge de l’écran (cf.
encadré 2) diminue.
LA COURSE AU RENDEMENT
Les écrans plasma ont actuelle-
ment un rendement lumineux limité,
de l’ordre de 1 lm/W, ce qui signifie
que seulement 0,5 % de l’énergie
électrique dissipée dans une cellule
est convertie en lumière visible utile.
Cechiffreest2à3fois plus faible
que celui caractérisant les tubes à
rayons cathodiques.
L’augmentation de l’efficacité
lumineuse est donc un thème priori-
taire de recherche. Plusieurs facteurs
affectent l’efficacité lumineuse : 1) le
rendement UV de la décharge (éner-
gie émise sous forme de photons UV
rapportée à l’énergie électrique dissi-
pée dans le plasma) ; 2) l’efficacité
de collection des photons UV par les
luminophores ; 3) le rendement de
conversion des photons UV en pho-
tons visibles par les luminophores ;
4) l’efficacité de collection des pho-
tons visibles. Le rendement de la
décharge est évalué par les modèles à
environ 10 %, pour un mélange
Xe-Ne (10 %-90 %). Le rendement
de conversion des luminophores est
estimé à 20 %. Puisque le rendement
global est de 0,5 %, on peut estimer
l’efficacité de collection géométrique
des photons UV et visibles à 25 %
(beaucoup de photons sont perdus
vers la face arrière de l’écran).
L’étude de matériaux luminopho-
res plus efficaces, et l’optimisation de
la géométrie de la cellule pour mieux
collecter les photons sont donc des
axes de recherches importants. L’ef-
ficacité de la production de photons
UV par le plasma doit également être
améliorée. Elle est conditionnée prin-
cipalement par le mélange de gaz et
sa pression, et par la géométrie des
électrodes et de la cellule. Ces para-
mètres sont cependant soumis à des
contraintes : 1) faible tension de
fonctionnement pour simplifier
l’électronique de commande ; 2) mé-
lange de gaz stable, uniforme et non
réactif ; 3) durée d’une impulsion de
décharge courte pour permettre un
adressage télévision ; 4) pulvérisa-
tion de la surface de MgO par bom-
bardement ionique minimisée (durée
de vie) ; 5) structure des cellules
simple pour que le coût de fabrica-
tion reste modéré.
La contrainte 2) impose l’utilisa-
tion de gaz rares. Le xénon est un
gaz émetteur d’UV efficace, mais sa
tension d’amorçage est élevée car les
ions de xénon sont peu efficaces pour
l’émission secondaire. L’utilisation
d’un mélange de xénon et de néon
permet de réduire la tension d’amor-
çage. La figure 4 montre que le choix
du mélange de gaz résulte d’un com-
promis entre rendement lumineux
élevé et tension d’amorçage
faible.
Figure 3 - Spectre UV typique d’un plasma de
décharge luminescente à haute pression dans le
xénon.
De la physique à la technologie
99
Encadré 1
ALLUMAGE, ENTRETIEN ET EFFACEMENT
D’UN ÉLÉMENT D’IMAGE D’UN ÉCRAN PLASMA
ALTERNATIF
Une tension alternative rectangulaire, la tension d’entretien,
est appliquée en permanence entre l’ensemble des lignes et
l’ensemble des colonnes à l’écran. L’amplitude de la tension
d’entretien est inférieure à la tension d’amorçage des cellules.
Sa fréquence est de l’ordre de 100 kHz. Pour faire passer la
cellule de l’état éteint à l’état allumé, une brève surtension est
appliquée entre ses électrodes de telle sorte que la tension aux
bornes de la cellule dépasse la tension d’amorçage. Il en
résulte une décharge électrique et la formation d’un plasma
dans la cellule. Le courant qui traverse la cellule devenue
conductrice charge les couches diélectriques positivement et
négativement du côté cathodique et anodique respectivement.
La tension due aux charges déposées sur les diélectriques
s’oppose à la tension aux bornes des électrodes. La tension
vue par le milieu gazeux (tension entre les surfaces
diélectriques) chute et s’annule, et la décharge s’éteint. A
l’alternance suivante de la tension d’entretien une décharge
s’amorce à nouveau car la tension due aux charges sur les
diélectriques s’ajoute maintenant à la tension aux bornes des
électrodes. Cette décharge est à nouveau stoppée par
l’accumulation de charges sur les couches diélectriques. On
voit sur la figure ci-contre que, dans l’état allumé, une surface
diélectrique porte successivement les charges + Q, – Q, + Q...
à la fin de chaque demi-période de la tension d’entretien.
Puisque la tension aux bornes du gaz est nulle après chaque
impulsion de courant, la charge Q est liée à la tension
d’entretien Vspar Q =Ceq Vs,où Ceq est la capacité
équivalente des deux couches diélectriques. On peut en
déduire que la décharge correspondant à l’impulsion
d’allumage de la cellule doit déposer la charge + Q sur l’une
des deux surfaces diélectriques (– Q sur l’autre) tandis que les
décharges d’entretien qui suivent transfèrent respectivement
– 2 Q, + 2 Q, etc. (+ 2 Q, – 2 Q,... sur l’autre surface). La
cellule reste dans l’état allumé grâce à cet « effet mémoire »
lié aux charges déposées par l’impulsion d’écriture (ou
d’allumage) et qui passent d’un diélectrique à l’autre à
chaque impulsion de courant. Pour faire passer une cellule de
l’état allumé à l’état éteint, il faut annuler la charge de
mémoire. Cela peut se faire simplement en appliquant entre
les électrodes de la cellule une tension plus petite que Vset
ajustée de façon à ne transférer que + Q et – Q sur les
surfaces diélectriques.
Puisque la charge transférée par chaque impulsion de courant
est fixée par la capacité des couches diélectriques et par
l’amplitude de la tension d’entretien, on ne peut pas moduler
le courant de décharge ni l’intensité de l’émission lumineuse
d’une cellule. Les demi-teintes sont donc obtenues en
adressant plusieurs fois les cellules pendant une période
image. On obtient ainsi 256 niveaux de gris en adressant les
cellules 8 fois par période image. L’image est donc codée sur
24 bits par pixel trichrome (8 bits par couleur).
Enfin, la tension d’entretien d’un écran doit être choisie dans
un intervalle bien défini, la marge, dont la valeur maximale
est liée à la tension d’amorçage, et la tension minimale à la
tension de décharge luminescente (cf. encadré 2). Si la tension
d’entretien est au-dessus de la borne supérieure de la marge,
on ne peut pas effacer les cellules, si elle est plus petite que la
borne inférieure, on ne peut pas maintenir l’état allumé. Il est
fondamental de rechercher des conditions de fonctionnement
où la marge est grande, pour éviter que des cellules qui ne
seraient pas parfaitement identiques aient des marges
disjointes.
Tension appliquée et courant de décharge au cours d’un cycle « allu-
mage – entretien – effacement » pour une cellule d’écran plasma al-
ternatif matriciel. La charge des diélectriques avant et après chaque
impulsion de courant est représentée schématiquement. La tension rec-
tangulaire d’entretien (les temps de montée sont en fait de l’ordre de
200 ns) est appliquée en permanence entre les lignes et les colonnes.
Les paliers de la tension d’entretien sont utilisés pour exciter les
cellules.
100
La modélisation du plasma de
décharge est indispensable pour
comprendre la synergie des phéno-
mènes physiques mis en jeu et
rechercher les conditions optimales
de fonctionnement.
LA MODÉLISATION : UN OUTIL DE
DIAGNOSTIC INDISPENSABLE
Les plasmas froids sont décrits à
l’aide d’équations de transport pour
les particules chargées couplées aux
équations de champ. Une représenta-
tion fluide, particulaire, ou hybride
des phénomènes de transport est uti-
lisée suivant les cas. Dans un écran à
plasma, le milieu est suffisamment
collisionnel pour qu’une approche
fluide soit raisonnable. Dans un mo-
dèle fluide, les phénomènes de trans-
port électronique et ionique sont dé-
crits à l’aide de grandeurs moyennes
(densité, vitesse moyenne et énergie
moyenne) et il est nécessaire de faire
des hypothèses sur la distribution
énergétique des particules. Dans une
cellule d’écran à plasma, la fonction
de distribution électronique n’est pas
maxwellienne et ne peut pas toujours
être simplement définie par une tem-
pérature ou une énergie moyenne. On
utilise alors des modèles hybrides
dans lesquels la queue de la fonction
de distribution électronique (corres-
pondant aux électrons énergétiques
susceptibles d’exciter et d’ioniser les
atomes du gaz) est décrite de façon
particulaire tandis que les électrons
froids sont traités comme un fluide.
Dans la description particulaire, on
simule les trajectoires d’un nombre
représentatif d’électrons qui évoluent
dans l’espace des phases sous l’effet
du champ et des collisions. Les col-
lisions sont considérées comme des
événements stochastiques et traitées
par simulation Monte Carlo.
A ce modèle électrique du plasma
est adjoint un modèle décrivant la
cinétique des espèces excitées et le
transport des photons. Dans les
conditions d’une cellule d’écran
plasma, le modèle cinétique peut être
traité séparément, les taux de produc-
tion d’espèces excitées par impact
électronique étant tirés du modèle de
transport électronique. La présence
des atomes excités affecte relative-
ment peu la fonction de distribution
électronique et l’ionisation du milieu
(en d’autres termes, les collisions
entre électrons et atomes excités peu-
vent être négligées en première
approximation). Cela est dû à la re-
lativement faible puissance dissipée
dans une cellule d’écran plasma. Le
modèle cinétique fournit les taux de
production de photons par le plasma.
Les photons émis par l’état résonnant
Xe(
5
P
1
) peuvent être absorbés par un
autre atome de xénon, puis réémis, et
cela plusieurs fois avant d’atteindre
les surfaces de la cellule. Le transport
de ces photons « emprisonnés » ne
peut pas être décrit par un simple
mécanisme de diffusion car la dis-
tance d’absorption dépend fortement
de la fréquence du photon (la raie de
résonance a une largeur finie). On
utilise donc une simulation Monte
Carlo pour décrire le transport des
photons résonnants. Les photons
émis par les états excimères du
xénon ne sont pas réabsorbés par le
milieu et leur transport peut donc être
décrit très simplement.
Le modèle physique global fournit
donc, à partir de la donnée des condi-
tions de fonctionnement de la cellule
et des tensions appliquées, une des-
cription détaillée de la formation et
de l’extinction du plasma, et permet
de calculer les flux de photons vers
les différentes surfaces de la cellule.
La figure 5 illustre le modèle élec-
trique du plasma dans le cas d’une
cellule coplanaire en régime d’entre-
tien. Le modèle permet en particulier
de déterminer les régions dans les-
quelles l’excitation du xénon (et donc
la production de photons UV) est
plus intense. On voit sur cette figure
que les états excités du xénon sont
produits dans la zone de fort champ
électrique au-dessus de la cathode
(gaine ionique), mais également, et
en quantité non négligeable, dans la
zone de champ électrique modéré au-
dessus de l’anode. La production
d’états excités est en fait beaucoup
plus efficace dans cette région à
champ faible. En effet, dans la gaine
ionique au-dessus de la cathode les
électrons sont trop énergétiques et
transfèrent une partie non négligea-
ble de leur énergie au néon, dont les
énergies d’excitation et d’ionisation
sont supérieures à celles du xénon.
De plus, la région de la gaine catho-
dique est peu efficace pour la produc-
tion d’UV car une partie importante
de l’énergie totale y est dissipée par
les ions lors de collisions avec les
neutres ou avec les surfaces diélectri-
ques (environ 50 % de l’énergie
Figure 4 - a) Rendement lumineux mesuré et calculé d’une cellule d’écran matriciel, en fonction du
pourcentage de xénon dans le néon, pour une pression totale de 560 torr et une distance de 100 µm
entre surfaces diélectriques ; le modèle ne simulant pas la conversion photons UV – photons visibles,
les résultats sont normalisés par rapport au rendement expérimental à 10 % de xénon. b) Tensions d’en-
tretien minimale Vs, min et maximale Vs, max (définissant la marge) mesurées et calculées d’une cellule
d’écran plasma alternatif matriciel en fonction du pourcentage de xénon. Les valeurs élevées des ten-
sions de fonctionnement dans le xénon pur imposent un fonctionnement à faible concentration de
xénon (inférieur à 10 %), ce qui diminue le rendement.
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