Les 3 terroirs du vignoble de l’AOC Gaillac • Le vignoble de Gaillac, situé à 50 km au N-E de Toulouse dans le département du Tarn, s'étend sur les 2 rives du Tarn et vers le nord jusqu'à Cordes sur Ciel. • L'aire de l'AOC Gaillac (4000 hectares) regroupe aujourd'hui 76 communes viticoles. Les vallées parallèles de la Vère et du Tarn structurent le vignoble en 3 versants géologiquement distincts. 3-plateau 2-Coteaux 1-Terrasses rive gauche ou graves Carte géol. 1-Terrasses de rive gauche ou graves, au sud. Ce terroir viticole s'étend sur la rive gauche du Tarn sur 15 km autour des villages de Técou, Cadalen et Lagrave. Essentiellement graveleux (galets, graviers et sables), ces sols maigres, acides et bien exposés sont favorables aux vins rouges. 2-Coteaux de la rive droite. Délimitée par la Vère et le Tarn, cette zone s'étend d'est en ouest de Castelnau de Lévis à Rabastens en passant par Labastide de Lévis, Gaillac et Lisle sur Tarn. La plaine s'allonge le long du Tarn sur une largeur de 7 km, formant les premiers coteaux. L'exposition plein sud dominant la vallée du Tarn ainsi que la relative protection des forêts de Grésigne et Sivens engendrent un micro-climat privilégié. Les sols sont principalement argilo-calcaires profonds, pris de plein fouet, notamment au sud, par le vent d'autan, sec et chaud. Ils forment le cœur de l'appellation. La vigne exprime tout son caractère dans les blancs et rouges. 3-Plateau cordais. Le plateau Cordais s'étend sur la partie nord de Gaillac, de Cahuzac sur Vère à la cité médiévale de Cordes sur Ciel et il domine la vallée encaissé de la Vère. Altitude (250-300m) → zone tardive du vignoble. Sols caillouteux argilo-calcaire apportent la finesse aux vins blancs. Ce terroir se caractérise par des sols blancs calcaires avec une teneur en calcaire actif élevée. Le bassin aquitain • Entre massif central, Pyrénées et océan atlantique, le bassin aquitain est une vaste dépression drainée par la Garonne dont les vignobles se nomment Gaillac, Cahors, Bordeaux, Bergerac, Jurançon, etc.. • Son histoire mouvementée est dominée par 3 phénomènes majeurs. 3 phénomènes majeurs → il en résulte aujourd’hui une forte dissymétrie du bassin. • Au début de l’ère secondaire, le continent nordaméricain est soudé à l’Europe. Les 2 continents commencent à se séparer au début du jurassique, donnant naissance à l’océan atlantique. • Jusqu’au crétacé inférieur, le golfe de Gascogne est fermé et les monts Cantabriques (N-O d’Espagne) voisinent avec le Massif armoricain. La mini-plaque ibérique amorce une rotation et glisse vers le S-E, puis remonte vers le nord, entrant en collision avec la France actuelle → ouverture du golfe de Gascogne. • Le soulèvement des Pyrénées engendré par ce mouvement et dont les produits d’érosion vont recouvrir toute la moitié sud du bassin. Un bassin dissymétrique • Dès le trias, le bassin est séparé en 2 parties le long d’une ligne Arcachon-Toulouse. Au nord, les mers restent majoritairement peu profondes et l’évolution est comparable à celle du Bassin parisien: sédimentation ± régulière, faibles mouvements du socle et relèvement de la bordure orientale. • Au sud se trouve une mer profonde dont le fond n’a cessé de s’affaisser (subsidence) jusqu’à une époque récente. Aujourd’hui le socle hercynien se situe à 2000 m sous bordeaux mais à 7000m sous Pau. • Au début du jurassique, les eaux de la Mésogée (future mer Méditérannée) s’infiltrent par le nord de la Montagne noir (région de Rodez) et envahissent progressivement le bassin. Un bassin dissymétrique • Au jurassique moyen, une barrière de récifs qui irait aujourd’hui d’Angoulême à Agen, sépare à l’ouest les Charentes qui s’enfoncent et où s’accumulent des calcaires marneux, à l’est une zone en eaux peu profondes où se déposent des calcaires massifs → causses de Martel, de Gramat et de Limogne. • Au crétacé inférieur, la mer se retire presque totalement (demeure dans 2 dépressions: centre des Landes et bassin de l’Adour). Elle revient au crétacé et dépose les calcaires crayeux qui supporteront le vignoble de Cognac. Dans le sud du bassin, les produit de l’érosion de la chaîne des Pyrénées commencent à combler le sillon nord-pyrénéen. Une lutte d’influence • L’ère tertiaire est marquée par cette surrection qui entraine celle du Massif central. • Au nord d’une ligne Bordeaux-Montauban, l’évolution est uniquement continentale avec 3 types de dépôts. 3 types de dépôts • Le sidérolithique résultant d’une altération de surface des calcaires jurassiques et crétacés sous climat tropical humide comblant les dépressions de sables, graviers, argiles et sels de fer qui s’agglutinent. • Les argiles à graviers provenant de l’altération du Massif central, transportés par les rivières. • Des calcaires lacustres notamment au pied des plateaux calcaires jurassiques. Le sud de cette ligne est caractérisé • Par une formidable lutte d’influences entre (1) les dépôts arrachés au Massif central et aux Pyrénées, transportés par les rivières vers le centre du bassin et (2) les assauts de l’océan Atlantique repoussés chaque fois d’avantage vers l’ouest. • Les cours d’eau charrient des limons, des sables, des graviers qui s’accumulent en aval, en bordure de mer, dans des zones de lagunes et de deltas à l’arrière desquelles s’installent des lacs. Ces dépôts constituent aujourd’hui des alternances de molasses et bancs calcaires ± durs, sans ordre précis. Dépôts sédimentaires • L’océan atlantique a lancé 3 grands assauts au cours de l’ère tertiaire. C’est alors que se dépose le fameux calcaire à astéries, l’un des 2 supports phares des vignobles bordelais. • Au miocène, formation d’un lac immense (entre Bordeaux et Agen) responsable des calcaires gris de l’Agenais. • La fin du tertiaire est marquée par de vastes épandages d’argiles et de graviers provenant des Pyrénées sur une zone qui au pliocène, s’étend jusqu’à Bordeaux. Bassin aquitain (bassin sédimentaire) Le terroir de Loupiac est constitué d’argiles grises En AOC cahors, le vignoble du château du Cèdre est installé sur les hautes terrasses caillouteuses du Lot, à Vire-sur-Lot. Cahors et Gaillac • Pour comprendre les supports des vignobles du bassin aquitain, suivons l’ordre chronologique de leur implantation en commençant par ceux de la bordure du Massif central: Cahors et Gaillac. • Ces 2 appellations du Sud-Ouest ont pu renaître dans la 2e moitié du 20e siècle après avoir connu les heures sombres du phylloxéra. (1) Couvrant 5000 ha le vignoble cadurcien s’insère dans les méandres de la vallée du Lot. Production de vins rouge sombre (black wine). (2) Gaillac sur le Tarn, s’étend sur 5 terroirs: historiquement producteur de vins blancs, secs, doux ou effervescents, issus de cépages locaux, son vignoble donne également des vins rouges et rosés. Cahors: des calcaires massifs entaillés par le Lot. • L’aire d’appellation cahors est installée à cheval sur les causses de Gramat et Limogne, dont l’ossature principale est constituée par le plateau de calcaires durs du kimméridgien, très épais à cet endroit (380m). • Ce plateau affleure largement dans le causse de Limogne au sud de la vallée du Lot, où les alternances de calcaires massifs et calcaires marneux (plus tendres), créent un léger relief ondulé aux sols peu profonds et très caillouteux qu’affectionne le cépage côt. • Au sud de l’aire de cahors, le long de l’ancienne falaise kimméridgienne, parmi les formations tertiaires entamées par l’érosion, seuls les calcaires lacustres et quelques éboulis conviennent au vignoble. • Au nord du Lot, le kimméridgien est recouvert de 70m de calcaires durs et gris du portlandien, très résistants à l’érosion. La vigne y est rare tout comme sur les calcaires du crétacé sup au NO de l’appellation souvent recouverts de sidérolithique. • Au quaternaire s’est produit un mouvement capital pour la morphologie actuelle de la région: un nouveau soulèvement de la partie orientale du Massif central a conduit le Lot à entailler profondément sa vallée dans les calcaires kimméridgiens. Le lot a ainsi formé des méandres caractéristiques avec des rives concaves abruptes; les Cévennes. • L’intérieur du méandre est couvert d’alluvions disposés en éventail et décalées en térasses séparées par de petits talus: les cingles. • Le lot a déposé au cours du quaternaire 3 niveaux de terrasses aujourd’hui recouverts de vigne. La plus haute très caillouteuse et évoluée est la plus favorable au vignoble, la plus basse, limoneuse et sableuse est bordée par le Lot. • Enfin, au bord du plateau se trouvent fréquemment des cônes de déjection composés d’éboulis calcaires provenant de petites vallées adjacentes. • Cahors est le domaine du côt qui représente plus de 70% de l’encépagement. Ce cépage produit des vins très colorés, puissants et tanniques. • Il offre ses plus belles expressions sur la haute terrasse ± mêlées d’éboulis où on rencontre les meilleurs domaines. Le plateau qui était plus largement couvert de vigne avant la crise phylloxérique, lui convient également, mais sur le calcaire, ce plant craint la sécheresse en été et les gelées en hiver. Le clos de Saint-Jean sur le plateau calcaire de Cahors (Clos de Gamot). Les méandres de Parnac et Luzech en AOC Cahors. Gaillac: une vallée ouverte et dissymétrique • A Gaillac (comme à Cahors), le Tarn a creusé sa vallée dans les terrains tertiaires déposés au pied du Massif central dans le golfe de l’Albigeois, encadré par 2 massifs primaires soulevés en même temps que les Pyrénées: Grésigne au nord et Montagne noire au sud. • Composées d’argiles à graviers (secteur Cunac), de molasses, recouvertes de calcaires lacustres dans la région de Cordes, ces formations sont meubles. • Le Tarn a donné naissance à une vallée beaucoup plus ouverte que celle du Lot et totalement dissymétrique. La rive droite du Tarn • Abrupte (exposée au sud) recoupe une série de côtes, de bancs calcaires et de conglomérats durs qui forment un arc de cercle de Labastidede-Levis à Rabastens. • Derrière ces côtes, on trouve des coteaux calcaires et argilo-calcaires sur la molasse stampienne et le plateau calcaire de Cordes: c’est le vignoble des premières côtes, propice à la production de vins blancs (mauzac, ondenc, len de l’el). La rive gauche du Tarn • Exposée au nord, cette rive porte une série de paliers de terrasses séparées par des talus de 15-20 de dénivellation, où sont conservées les alluvions quaternaires du Tarn. • Discontinues, ces terrasses sont entrecoupées de petits vallons d’érosion perpendiculaires à la vallée principale. C’est le terroir des cépages rouges: fer-servadou. • Au sud de l’aire, la vallée du Dadou présente la même dissymétrie (à l’instar des autres affluents de la région). Origine de cette dissymétrie: pendant les périodes glaciaires, les rives exposées au soleil se réchauffaient plus vite et étaient plus sensibles à l’érosion que les versants au nord. Vignes au pied du château de Mauriac dans les calcaires et les molasses stampiens des Premières Côtes, au nord de Gaillac. Vallée dissymétrique du Tarn entre Gaillac et Rabastens Carte géologique au 1/50 000e de Gaillac (BRGM, 958, XXII-42) • Le territoire de la feuille Gaillac s'étend sur un secteur de la vallée du Tarn au Nord, de la vallée du Dadou au Sud, et sur les coteaux qui séparent ces 2 vallées. • Il occupe environ le centre du golfe tertiaire de l'Albigeois, à mi-chemin entre promontoire permien de la Grésigne et extrémité primaire de la Montagne Noire. • A peu de distance vers l'Est commence l'Albigeois cristallin, dont les premiers affleurements de gneiss s'observent à l'entrée de la vallée du Dadou sur le territoire de la feuille. TECTONIQUE • Il n'y a pas de mouvements brusques de la couverture tertiaire sur le territoire de cette feuille. • Par contre, on note un pendage de toutes les couches vers l'Ouest, évalué à 10m/km entre Albi-Marssac, 12m/km au Sud de Montdragon et 8m/km à Briatexte. • Le pendage s'amortirait à l'Ouest par suite de la rareté des bancs calcaires. MORPHOLOGIE • Le relief de la feuille Gaillac culmine à SaintLaurent-de-Bosgros, vers 320 mètres. C'est un plateau d'alluvions anciennes : Villafranchien (début Quaternaire). • Sur tout le reste du territoire, le relief actuel s'est entièrement élaboré au Quaternaire par le creusement des vallées enfoncées de plus de 200 m depuis le début du Quaternaire. 1°) Les vallées du Tarn et du Dadou Creusées, (comme toutes les vallées du Bassin Aquitain), en même temps qu'elles se déplaçaient vers le Nord, laissant au fur et à mesure de leur enfoncement des terrasses alluviales à des hauteurs correspondantes pour les 2 vallées sur leurs rives gauches. • Hauts niveaux à 320m (210m au-dessus de l'étiage). • Haute terrasse de 180 m d'altitude relative, très érodée, et absente vers l'amont des rivières. • Moyenne terrasse de 110-80 m, en plusieurs paliers, et dont la datation est proposée comme rissienne. • Basse terrasse à 35-45 m, avec paliers reproduisant les migrations d'anciens méandres du Tarn (wurmienne). • Bas niveaux à 30m et au-dessous. Cette dernière plaine, alternativement à droite et à gauche des rivières selon le jeu des méandres actuels peut dater de la fin du Würm. Quelques trouvailles d'industries préhistoriques confirment les datations précédentes. • L'enfoncement de 20-25 m des rivières en dessous de la plus basse plaine est un fait actuel, comme le montrent la fraicheur des talus, berges et la relative faiblesse de l'érosion remontante le long des ruisseaux affluents; les conditions sont créées pour que, si une phase de climat froid et humide venait à se produire, une large plaine puisse se dégager à 20-25 m au-dessous de l'actuelle qui deviendrait alors une vraie terrasse. 2) Les coteaux. Les ruisseaux ont facilement déblayé les terrains molassiques ou marneux pour y creuser de larges vallées dissymétriques pour 2 causes. • a) une cause structurale; le pendage est assez marqué pour que les vallées subséquentes se présentent sous forme de « cuesta », telles les vallées de l'-Assou et de l’Agros lorsque des bancs de calcaire plus durs se présentent dans la masse de la molasse. • b) une cause climatique pour les vallées orientées du SE au NW, où les différences d'insolation durant les périodes périglaciaires, et notamment pendant la dernière, ont provoqué une évolution très différente des 2 versants: telles sont les vallées des ruisseaux affluents sur les rives gauches du Tarn et du Dadou. • Au cours du creusement des vallées, des plates-formes structurales ont pu se dégager, surtout dans le triangle Cadalen-Labessière-Poulan, où le calcaire marneux d'Albi est bien développé. Les talus de ces plates-formes sont couramment ravinés et érodés en bad-lands lorsque le déboisement est total. • Enfin, le rôle protecteur des formations superficielles caillouteuses : les buttes couronnées de cailloutis dominent tout le paysage, même lorsque ces dépôts sont d'origine alluviale: il y a alors depuis le début du Quaternaire, une véritable inversion du relief. HYDROLOGIE • Les alluvions des terrasses quaternaires, caillouteuses, sont très poreuses, et il s'y établit des nappes phréatiques, peu constantes car les terrasses sont découpées en plateaux peu étendus, et les nappes mal alimentées par les eaux de pluie se vident rapidement par les ravins qui les entourent. • Il en est de même pour les basses plaines, où les lits des rivières, dépassant de 15 à 20m le niveau de la molasse, provoquent la vidange rapide de la nappe phréatique sans que les crues, généralement moins hautes que 15 ou 20 m, en assurent la reconstitution. Seuls, les emplacements d'anciens lits peuvent donner des sources à débit plus régulier, sous les alluvions des bas niveaux. • Dans les coteaux, de nombreuses petites sources irrégulières, au débouché des bassins de réception à l'amont de chaque vallon. • On ne connaît que quelques rares sources nées à partir de nappes contenues dans la masse du substratum; les lentilles sableuses ou graveleuses y sont rares, peu épaisses et leurs affleurements sont réduits; les bancs calcaires marneux sont peu perméables: on n'y observe pas de diaclase, ni de circulation karstique. Dans ces conditions; l'eau ruisselle plus qu'elle ne s'infiltre sur toute l'étendue du territoire et les réserves souterraines sont inférieures aux besoins de l'économie moderne. PEDOLOGIE • Les sols de la feuille Gaillac sont de types très divers pour 2 raisons principales: (i) les rochesmères sont très variées; (ii) les formations meubles superficielles dont dérivent les sols sont d'âge divers et ont subi des évolutions différentes, en degré et nature, selon leur ancienneté qui peut être précisée par la morphologie. • On distinguera 2 groupes de sols: 1) Les sols sur alluvions du Tarn et du Dadou, progressivement plus évolués des bas niveaux aux hauts niveaux des terrasses: a) Sols bruns décalcifiés des basses plaines. b) Sols lessivés des terrasses wurmiennes (boulbènes profondes). c) Sols évolués, avec ± d'hydromorphie, des terrasses rissiennes (boulbènes type). d) Sols à tendances podzoliques des niveaux supérieurs, marqués dans les colluvions caillouteuses issues des hauts niveaux et qui supportent les massifs forestiers (chênes, châtaigniers), de Giroussens à Cadalen. 2) les sols sur les formations tertiaires, plus variables selon la roche mère. En plus des Régosols provenant de la fissuration superficielle des molasses gréseuses, marnes fines, calcaires marneuses ou argiles à graviers, on trouve : a) Sols bruns ± calciques sur les alluvions modernes et sur les faibles pentes des vallées, souvent riches en argiles (terreforts). b) Sols lessivés sur les colluvions de versant, parfois sur les plateaux molassiques des interfluves, étendus sur le versant gauche des ruisseaux affluents du Tarn. c) Sols évolués, siliceux et acides sur les colluvions des argiles à graviers. d) Sols rendzinoides, gris ou noirs sur les calcaires marneux. e) Sols lessivés, sablo-argileux, sur les argiles de décalcification rouges des plateaux du calcaire d’Albi.