HISTOIRE NARRATIVE ET DESCRIPTIVE DU
PEUPLE ROMAIN
PAR CHARLES SEIGNOBOS
Docteur ès lettres. Maître de Conférences à la Faculté des lettres de Paris
PARIS - LIBRAIRIE ARMAND COLIN - 1901
CHAPITRE PREMIER. — Les anciennes populations de l'Italie. Géographie.
CHAPITRE II. — Les rois de Rome.
CHAPITRE III. — Abolition de la Royauté.
CHAPITRE IV. — Établissement de l'égalité légale.
CHAPITRE V. — Conquête de l'Italie.
CHAPITRE VI. — L'armée romaine.
CHAPITRE VII. — Le première guerre punique.
CHAPITRE VIII. — La deuxième guerre punique.
CHAPITRE IX. — Conquête du bassin de la Méditerranée.
CHAPITRE X. — Conséquences des conquêtes. Transformation des mœurs.
CHAPITRE XI. — Transformation sociale et politique.
CHAPITRE XII. — Les Gracques.
CHAPITRE XIII. — Marius.
CHAPITRE XIV. — Sylla.
CHAPITRE XV. — Pompée.
CHAPITRE XVI. — César et la conquête des Gaules.
CHAPITRE XVII. — Fin de la République.
CHAPITRE XVIII. — L'Empire.
CHAPITRE XIX. — Les lettres et les arts.
CHAPITRE XX. — Les empereurs de la famille d'Auguste.
CHAPITRE XXI. — Les Flaviens.
CHAPITRE XXII. — Les Antonins.
CHAPITRE XXIII. — Les arts, les spectacles et les lettres.
CHAPITRE XXIV. — Le christianisme.
CHAPITRE XXV. — La fin du haut Empire.
CHAPITRE XXVI. — Constantin et le christianisme.
CHAPITRE XXVII. — Derniers temps de l'Empire.
CHAPITRE PREMIER. — LES ANCIENNES POPULATIONS DE L'ITALIE.
GÉOGRAPHIE.
L'Italie. L'Italie
1
est une presqu'île épaisse qui s'allonge en travers dans la
Méditerranée, partant de la de France dans la direction de la Grèce. Les
deux côtes sont à peu près parallèles, l'épaisseur de la presqu'île est à peu près
la même partout, jusqu'à l'endroit elle se partage en deux pointes ; ce qui lui
donne la forme d'une botte dont le talon serait tourné vers la Grèce et la pointe
toucherait la Sicile.
L'intérieur de l'Italie, clans toute sa longueur, est formé d'un énorme massif de
montagnes de rochers gris, l'Apennin, dont la plus haute cime s'élève à 2 900
mètres. Ces montagnes ont leur pente la plus rapide vers l'est, du côté qui
descend à la mer Adriatique. Sur ce versant, il n'y a guère que des vallées
courtes et étroites séparées l'une de l'autre par des barrières de rochers. Au
contraire ; à l'ouest, du côté de la mer Tyrrhénienne, les montagnes s'abaissent
sur des pays de collines et des plaines fertiles. La mer venait autrefois jusqu'au
pied des montagnes, et formait des golfes, mais les volcans les ont comblés avec
des laves, des scories et de la cendre et ont créé tout un pays nouveau. C'est
donc vers l'ouest que coulent les principales rivières, à l'ouest que sont les pays
fertiles
(Toscane, Latium, Campanie)
, se sont formés les principaux peuples de
l'Italie antique.
Au sud, la montagne s'arrête brusquement ; les deux pointes qui terminent
l'Italie, les deux cornes comme disaient les anciens, ne font pas partie de
l'Apennin.
Celle qui va vers la Grèce, à l'est de Tarente, est un plateau bas, sec, gris,
poussiéreux et triste, brûlé par le soleil.
Celle qui s'avance vers la Sicile est formée de deux massifs de granit. Le
premier, la Sila, séparé de l'Apennin par une large plaine, est une masse énorme
couverte de forêts, dont la plus haute cime a 1.889 mètres et qui de trois côtés
se termine par une pente abrupte, en forme de mur, d'où les torrents sortent par
des gorges étroites ; ce fut de tout temps un repaire de brigands
(la Calabre)
.
L'autre massif, relié à la Sila par un isthme étroit formé de collines basses et
arrondies, est un plateau dominé par des cimes qui s'élèvent jusqu'à 1.974
mètres. Les forêts qui le couvrent fournissaient aux anciens du bois de charpente
pour les maisons et les navires et de la résine dont on faisait une poix
renommée.
Le climat. — L'Italie a un climat doux et humide.
L'hiver y est court ; pendant quelques semaines souffle l'Aquilon, un vent du
nord, froid et clair, qui chasse les nuages ; mais il gèle rarement dans la plaine
et la neige ne couvre que les montagnes.
1
Les anciens Romains ne donnaient pas au mot Italie le même sens que nous. Nous
comprenons sous ce nom tout ce qui est derrière les Alpes, non seulement la presqu'île,
mais le pays du et de l'Adige et la côte du golfe de Gênes. Les anciens (jusqu'au Ier
siècle) appelaient Italie la presqu'île seulement. Le nom s'est étendu peu à peu.
Dès le mois de février on sent un vent d'ouest léger et tiède
(les anciens
l'appelaient Favonius, le favorable)
, les hirondelles reviennent, les amandiers
fleurissent, le printemps commence.
Il dure peu, du moins dans l'Italie du Sud ; dès le mois de mai c'est l'été, un é
sec et brûlant qui grille les plantes si on ne les arrose pas ; la sécheresse dure
près de quatre mois, c'est le climat de la Grèce. Dans les plaines du nord et du
centre, dès la fin de mars, souffle d'ordinaire le vent du sud
(on l'appelait l'Auster,
le brûlant)
; il amène une chaleur lourde, une nuée suffocante qui trouble la
transparence de l'air, et de temps à autre de violents orages, avec du tonnerre et
de la grêle.
Cet été pénible et malsain dure jusqu'en septembre. Alors commence l'automne,
la saison des grandes pluies, jusqu'en novembre. Il tombe pendant ces trois mois
plus d'eau en Italie qu'en Allemagne dans toute l'année.
Les cours d'eau. Cette eau, tombant en pluies torrentielles sur des
montagnes abruptes, roule en bas rapidement ; ainsi se forment des torrents
impétueux, chargés de terre et de cailloux qu'ils déposent ou entraînent jusqu'à
la mer. Mais en été, pendant la sécheresse, ces torrents se réduisent à un filet
d'eau qui coule dans un large lit de pierre laissé à sec.
Le rocher calcaire de l'Apennin, percé de trous et de crevasses, laisse passer une
partie de l'eau des pluies et des neiges qui, au lieu de couler à la surface,
s'enfonce dans l'intérieur de la montagne et ressort au bas en grosses sources.
Ces eaux ainsi emmagasinées finissent par déboucher clans les rivières qu'elles
alimentent pendant la sécheresse.
La côte. Les côtes de l'Italie sont droites, peu découpées, presque
dépourvues de ports naturels, et les débris apportés par les torrents des
montagnes forment dans la mer des bancs de sable sous-marins qui barrent les
embouchures des rivières.
Sur l'Adriatique la côte est bordée de lagunes et de bancs de sable, qui ne
permettent pas aux navires d'approcher. La mer est agitée, surtout en hiver, par
de terribles coups de vent du nord.
Sur la mer Ionienne il n'y avait guère qu'un bon port, celui de Tarente,
aujourd'hui ensablé.
La côte de l'ouest est moins mauvaise. Encore les ports naturels y sont-ils rares.
A deux endroits seulement, en Toscane et sur le golfe de Naples, il y a des îles et
la mer est profonde près de la côte ; c'est qu'étaient les ports principaux de
l'antiquité.
L'Italie n'est pas, comme la Grèce, un pays naturellement disposé pour la
navigation. Les anciens Italiens ne furent pas des peuples de marins ; ce furent
des cultivateurs dans les plaines et les vallées, des bergers dans les montagnes.
LES PEUPLES DES MONTAGNES.
Les Ombriens. Au centre de l'Apennin, dominé par les plus hautes cimes,
s'étend un pays de vallées étroites et de petites montagnes, traversé par une
large vallée fertile qui descend du côté de l'ouest.
demeurait un peuple de laboureurs et de bergers, les Ombriens. Ils
habitaient de petites villes fortifiées bâties sur des rochers qui dominaient les
vallées. On disait qu'ils avaient é jadis un grand peuple établi sur toute la
Toscane et sur la plaine du et qu'ils avaient été repoussés dans la montagne
par des peuples nouveaux. Ils ne formaient pas une seule nation, chaque ville
était un petit État. Mais ils parlaient la même langue et cette langue ressemblait
au latin, à peu près comme le français ressemble à l'italien.
Les Sabins. Au sud de l'Ombrie s'élève un énorme massif de montagnes
sauvages, entouré de tous tés par des murailles de rochers qui en font une
sorte de forteresse naturelle ; ce sont les Abruzzes, un pays de brigands. En
avant, vers l'ouest, s'avance une longue rangée de montagnes plus basses en
pente plus douce, coupée par la vallée coule l'Anio ; ce sont les monts de la
Sabine.
C'était autrefois le pays des Sabins, paysans guerriers ; réputés comme des
cultivateurs sobres, honnêtes, laborieux ; ils travaillaient à la bêche le sol
pierreux et aride de leurs montagnes, et vivaient dans de pauvres maisons
groupées en villages ouverts.
Leur langue ressemblait au latin.
Les Sabelliens. — De ce pays des Sabins étaient sortis, disait-on, la plupart des
peuples qui habitaient les montagnes de l'Italie ; on les appelait Sabelliens
(c'est
le même nom que Sabins)
, et on expliquait leur origine par des légendes.
Les Sabins, disait-on, dans des moments de malheur, croyant les dieux
irrités, avaient cherché à les apaiser par un grand sacrifice. Ils
vouaient, c'est-à-dire consacraient d'avance à leur dieu tout ce qui
naîtrait pendant une année ; cela s'appelait un printemps voué. Tous
les enfants nés en cette année appartenaient au dieu. Arrivés à l'âge
d'homme, ils s'en allaient au loin s'établir où ils pouvaient. Ainsi
étaient parties de la Sabine, à diverses époques, plusieurs bandes ;
chacune avait suivi un animal sacré, un loup, tin taureau, un pivert,
comme un envoyé du dieu ; l'animal s'arrêtait, la bande
s'établissait et devenait un peuple.
Plusieurs peuples portaient ainsi un nom d'animal ; les Picentins
(c'était le peuple
du pivert)
, les Hirpins
(peuple du loup)
; d'autres avaient un nom de dieu
(Marses,
Vestins)
.
Ces Sabelliens avaient peuplé toutes les montagnes de l'Italie. Ils tenaient le
massif du centre. Ils occupaient le pays qui descend sur l'Adriatique. Ils
habitaient les chaînes de montagnes qui s'avancent vers la plaine
(pays des
Herniques et des Èques)
. Ils finirent même par descendre dans la plaine et s'établir
dans les collines qui longent la côte
(pays des Volsques)
.
Isolés dans leurs montagnes, ils restaient barbares et belliqueux, élevant leurs
troupeaux, cultivant des coins de terre. Presque tous vivaient dans la campagne,
sans villes, ayant seulement sur des montagnes escarpées quelques forteresses
en temps de guerre ils mettaient à l'abri leurs familles et leurs troupeaux. Ils
se groupaient en petits peuples sous des chefs qui les menaient à la guerre, mais
chaque peuple formait un État indépendant.
Les Samnites. De tous ces Sabelliens, les plus puissants furent les
Samnites. C'était une confédération de quatre peuples établis au milieu de
l'Apennin, dans un pays couvert de montagnes sauvages, d'accès difficile,
séparés par des gorges étroites, un pays de pacages l'herbe est courte, faite
plutôt pour les chèvres et les moutons que pour les bœufs.
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