L`heure est venue de faire plus pour le diabète en luttant contre l

DiabetesVoice Septembre 2014 Volume 59 Numéro 3
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L'heure est venue de faire
plus pour le diabète en luttant
contre l'inertie clinique
David Strain au nom du comité de direction de Time2DoMoreTM
En physique, l'inertie décrit la résistance au mouve-
ment. Appliqué à la médecine, ce terme décrit, de façon
similaire, la résistance au changement. De manière
plus spécifique, l'inertie est la différence entre les soins
médicaux qui devraient être visés et ceux réellement
prodigués. Des études ont montré que l'inertie clinique
est un problème fréquent dans le cadre du traitement du
diabète de type 21 (encadré 1). Malgré la disponibilité
d'un nombre sans précédent de traitements, près de la
moitié des patients continuent d'éprouver des difficultés
à contrôler leur glycémie.
À quoi l'inertie clinique est-elle due ?
Le diabète est une condition complexe et progressive, ce
qui signifie qu'elle requiert inévitablement une intensi-
fication du traitement au fil du temps. L'inertie clinique
peut se manifester à tout moment au cours de l'évolution
du diabète, et ne peut être surmontée que par une action
conjointe des médecins et des personnes atteintes de
diabète. Cette collaboration constitue la pierre angulaire
du projet Time2DoMore
TM
.
Le projet Time2DoMore a été récemment publié dans
Diabetes Research & Clinical Practice (DRCP).
2
Cette
enquête a étudié les causes de l'inertie clinique liée au
SoinS de Santé
diabète dans six pays : le Brésil, l'Espagne, les États-Unis,
l'Inde, le Japon et le Royaume-Uni. Au total, 337 méde-
cins et 652 personnes atteintes de diabète ont répondu
à un questionnaire en ligne. Sur la base des résultats
obtenus, nous avons formulé quatre principes simples à
l'intention des médecins et quatre autres à l'adresse des
personnes atteintes de diabète qui, d'après nous, peuvent
améliorer les soins du diabète dans le monde. Les prin-
cipes clés à l'intention des médecins, définis dans DRCP,
sont présentés dans l'encadré 2. Nous examinerons ici
Encadré 1. Définitions de l'inertie clinique
Pour les personnes chez qui un diabète de type 2 a été
récemment diagnostiqué, l'inertie clinique se définit
comme l'incapacité à démarrer un traitement au mo-
ment le plus approprié (généralement au moment du
diagnostic). Le traitement pour réduire les taux de gly-
cémie débute généralement par une modification des
schémas d'alimentation et d'activité physique et peut
inclure un ou plusieurs hypoglycémiants oraux.
Pour les personnes déjà sous traitement pour le dia-
bète de type 2, on parle d'inertie clinique en l'absence
d'intensification du traitement, que ce soit par une
augmentation des doses, des comprimés supplémen-
taires ou l'introduction de l'insuline, au moment le plus
approprié (généralement lorsque les taux de glycémie
dépassent l'objectif fixé par le médecin et le patient).
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25% of the Pakistani
population is
classified as
overweight
and obese.
SoinS de Santé
la manière dont les résultats de l'enquête affectent les
personnes atteintes de diabète et posent des jalons pour
l'amélioration des résultats.
L'inertie clinique débute souvent au moment
du diagnostic
Seul un tiers environ des personnes atteintes de diabète
ont accepté leur diagnostic et les réactions différaient
dans la majorité des cas (Figure 1). Bien que les méde-
cins aient pris le temps de souligner l'importance de
Encadré 2. Principes clés formulés à l'intention des
médecins en vue d'optimiser la gestion du diabète
1. Les résultats de santé des personnes atteintes de
diabète sont notamment fonction de la communica-
tion entre ces personnes et les professionnels des
soins de santé en tant qu'équipe.
2. Il est du devoir de cette équipe de se fixer des objec-
tifs communs réalistes et de conclure un contrat en
vue de les atteindre.
3. Les soins doivent être personnalisés en fonction des
besoins de la personne atteinte de diabète, en ne se
limitant pas à poursuivre les objectifs en matière de
glycémie, de pression artérielle ou de lipides.
4. Les acheteurs et les prestataires doivent encoura-
ger une gestion adéquate de la condition dès le dé-
but afin d'optimiser la qualité de vie des personnes
atteintes de diabète.
Figure 2. Réactions des personnes atteintes de diabète aux explications des complications
au moment du diagnostic dans le cadre de l'enquête Time2DoMore.
Effra
Déprimé
Nerveux
Choqué
Résigné
Confus
Détaché
Positif
Coupable
Acceptation
Figure 1. Réactions des personnes atteintes de
diabète au moment du diagnostic.
63 % savaient que ces problèmes
de santé pourraient les affecter dans le
futur, mais le risque semblait éloigné
Problèmes de vision /
perte de la vue /
rétinopathie
Cœur /
maladies
cardiaques
Reins /
problèmes
rénaux
Problèmes de
circulation Problèmes au
niveau des pieds /
jambes
Autres
25 % étaient dévastés
à l'idée de développer
des complications
9 % ne se sentaient
pas réellement
concernés
3 % aucun de
ces sentiments
Sentiments à l'égard des complications au moment du diagnostic :
Complications qui préoccupaient le plus les patients :
Base : Tous les patients se souvenant d'avoir discuté des complications potentielles du DT2 avec leur médecin au 4e trimestre (n=200)
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soins du diabète de qualité pour éviter le risque de
complications telles que des maladies cardiaques et
rénales, trois quarts des personnes atteintes de diabète
ont déclaré ne pas se sentir concernées par ce risque ou
le considérer comme très limité. Celles qui se sentaient
concernées étaient essentiellement préoccupées par le
risque de problèmes de vue (Figure 2). En outre, bien
que la majorité des médecins aient estimé avoir suffi-
samment expliqué le risque d'hypoglycémie (hypos),
moins d'une personne atteinte de diabète sur dix était
consciente que ces hypos pouvaient être mortelles.
Interrogées de manière plus spécifique sur les hypos,
seule une personne sur trois environ a déclaré signaler
à son médecin chacune de ses hypos et 3 % seulement
ont répondu correctement aux sept questions (Figure 3).
Il s'agit là d'un exemple de rupture de la communication
qui pourrait causer des problèmes de gestion du diabète.
Le premier de nos principes souligne la nécessité d'une
bonne communication pour parvenir à un contrôle
adéquat du diabète.
Personnalisation des soins
Le choix des médicaments donnés à une personne atteinte
de diabète est fonction de plusieurs facteurs, tels que l'âge,
les pathologies concomitantes et l'état de fonctionnement
du reste de l'organisme, en particulier la capacité de filtrage
des reins. Cela nous amène au deuxième principe pour
l'amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes
de diabète.
Ce principe simple constitue l'un des facteurs les plus
importants de la gestion du diabète. Une même approche
de la gestion du diabète pourra sauver la vie d'une per-
sonne mais en tuer une autre. Il va de soi que le choix
fait par le médecin est fonction des informations qu'il
reçoit. La meilleure façon pour la personne atteinte de
diabète de créer une individualité consiste à parler d'elle
à son médecin. Une fois de plus, la solution réside dans
la communication.
Figure 3. Réponses des personnes atteintes de diabète au quiz en six points
sur l'hypoglycémie dans le cadre de l'enquête Time2DoMore
Chaque personne atteinte
de diabète est différente.
Des « hypos » importantes peuvent vous faire perdre conscience
(évanouissement) et déboucher sur une crise d'épilepsie - VRAI
La meilleure solution pour éviter une « hypo » est de
manger une barre de chocolat riche en calories - FAUX
La consommation d'alcool peut augmenter
le risque « d'hypos » - VRAI
Les « hypos » peuvent être associées à une augmentation
du risque de problèmes cardiaques - VRAI
En cas « d'hypos », vous pouvez vous sentir essoufflé - VRAI
Certains médicaments augmentent le risque « d'hypos » - VRAI
Ont répondu correctement
Nombre moyen
de réponses
incorrectes
Nombre de réponses incorrectes données lors du quiz
Base : Tous les répondants (n=652)
Remarque : l'addition des chiffres peuvent ne pas
donner un total de 100 % en raison des arrondis
Base : Tous les répondants (n=652)
Différences intéressantes :
Les patients obèses ont commis plus
d'erreurs que ceux en surpoids
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David Strain
David Strain est médecin au sein du département de diabète et
de médecine vasculaire de la faculté de médecine de l'Université
d'Exeter, au Royaume-Uni.
Remerciements
Les auteurs tiennent à exprimer leur sincère gratitude à l'ensemble
des participants à l'enquête.
L'étude a été financée par Novartis. David Strain voudrait remercier
le National Institute for Health Research (NIHR) Exeter Clinical
Research Facility et le projet du NIHR Biomedical Research Centre
pour leur soutien. Il précise avoir reçu des honoraires personnels
de Boehringer Ingelheim et Pfizer, ainsi que des subventions
et des honoraires personnels de Novo Nordisk et Novartis.
Membres du comité de direction
Sir Michael Hirst, Président de la Fédération internationale du diabète
Dr David Strain, Faculté de médecine de
l'Université d'Exeter, Royaume-Uni
Dr Viswanathan Mohan, Dr Mohan's Diabetes Specialities Centre, Inde
Dr Sérgio Vencio, Université catholique de Goias, Brésil
Dr Xavier Cos, Centres de soins primaires
Sant Marti de Provençals, Espagne
Dr Daisuke Yabe, Hôpital Kansai Electric Power, Japon
Dr Zoltán Vokó, Université Eötvös Loránd, Hongrie
Dr Matthias Blüher, Université de Leipzig, Allemagne
Dr Päivi Paldánius, Novartis Pharma AG, Bâle
Références
1. Khunti K, Wolden ML, Thorsted BL, et al. Clinical inertia in people with type 2
diabetes: a retrospective cohort study of more than 80,000 people.
Diabetes Care 2013; 36: 3411-7.
2. Strain WD, Cos X, Hirst M, et al. Time to do more: addressing clinical inertia
in the management of type 2 diabetes mellitus. Diabetes Res Clin Pract 2014;
in press, DOI: 10.1016/j.diabres.2014.05.005
3. Franks PW. Diabetes family history: a metabolic storm you should not sit out.
Diabetes 2010; 59: 2732-3.
4. Wroblewska-Seniuk K, Wender-Ozegowska E, Szczapa J. Long-term effects of
diabetes during pregnancy on the offspring. Pediatr Diabetes 2009; 10: 432-40.
Que peut faire d'autre la personne atteinte de diabète ?
L'autonomisation du patient par le biais de l'éducation
constitue une étape essentielle en vue d'améliorer la santé.
Dans l'enquête Time2DoMore, seule la moitié environ
des personnes prévoyaient d'adapter leur alimentation et
moins de 40 % de suivre les conseils en matière d'activité
physique, bien que la quasi totalité des médecins (96 %)
aient indiqué avoir recommandé de tels changements de
style de vie. On est là en présence d'un autre phénomène
bien connu – le malentendu consistant à tenir le médecin
responsable du diabète. Le troisième principe s'attaque
à cette attitude :
Ce principe ne dégage nullement le médecin ou les
membres de la famille de leur obligation d'apporter un
soutien et de proposer des options de traitement optima,
mais reconnaît que le patient est au centre de tout et que
c'est lui qui jouit du contrôle ultime sur sa santé.
Même si la personne atteinte de diabète et son médecin
sont pleins de bonnes intentions et ont constitué un
partenariat avec des objectifs de traitement communs,
une progression de la maladie est possible et souvent
inévitable. Cela nous amène à notre dernier principe
pour améliorer la vie avec le diabète.
L'enquête Time2DoMore montre qu'une meilleure com-
munication permet de résoudre presque tous les aspects
de l'inertie clinique associée au diabète. Nous sommes
convaincus qu'en suivant cette approche simple en 4
étapes (Encadré 3) et en collaborant avec les équipes de
soins de santé, les personnes atteintes de diabète peuvent
améliorer leur qualité de vie et leur état de santé.
Encadré 3. Vivre avec le diabète : une approche en
4 étapes pour améliorer la santé des personnes
atteintes de diabète
1. La santé et le bien-être à long terme d'une personne
atteinte de diabète est fonction de la communica-
tion entre cette personne, sa famille, ses amis et ses
soignants et les médecins, le personnel infirmier et
les autres professionnels de la santé travaillant à
leurs côtés.
2. Chaque personne atteinte de diabète est différente.
3. Toute personne atteinte de diabète est tenue
d'accepter la responsabilité de sa maladie, avec le
soutien adéquat de sa famille, des soignants et de
l'équipe de soins de santé.
4. L'incapacité à atteindre les objectifs appropriés fixés
dans le cadre du partenariat entre la personne at-
teinte de diabète et son équipe de soins de santé doit
conduire à une réévaluation de ces objectifs et de la
stratégie de traitement sans reproches ni récrimina-
tions de la part de l'une ou l'autre partie.
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