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Février - Mars 2010 - Commission paritaire en cours - N° ISSN en cours
Bureau de la SOFOP
Président : C. Mo r i n
1er Vice-Président : C. Bo n n a r d - 2e Vice Président : C. ro M a n a - Fu t u r 2e Vice Président : J. Le C h e v a L L i e r
Ancien Président : J.M. CL a v e r t
Secrétaire Général : J.L. Jo u v e
Trésorier : P. La s C o M B e s
Membres du Bureau : B. de Bi L L y , s. Bo u r e L L e , a. Ka e L i n , P. Ma r y , P. Wi C a r t
Editorial SO.F.O.P.
De Beaujon sur Paris à Calot sur Berck
Dater, être dépassé et devenu « has been »,
c’est la crainte de tout retraité. Vers 60 ans,
le chirurgien sinquiète. Il veut rester dans la
course, connaître et utiliser encore les tech-
niques de pointe, faute de les inventer. C’est
l’avant-dernier combat ; j’ai connu cela.
Au-delà de 70 ans, on nit par accepter de da-
ter, d’être dépassé, de hasbeener. On nessaye
plus que d’amuser les jeunes en leur parlant
du bon vieux temps, de son folklore, en em-
bellissant tout avec nostalgie. C’est le dernier
combat, celui que je mène essoué. En voici
des épisodes.
Jean-Claude Rey a raison en disant que les
élèves de Jean Cauchoix « se souviendront de
lui avec regret et reconnaissance ». Mais…
J’étais linterne de Jean Cauchoix à Beaujon
en 1964 ; la plupart des lecteurs de cette ga-
zette nétaient pas nés ! Tant pis pour eux. Ils
n’auront pas connu l’aventure crispée d’un
aller Beaujon-Calot à la place du mort, Jean
Cauchoix conduisant son Alfa Romeo. Il aimait
être accompagné par l’un de nous. Il voulait
arriver le plus rapidement possible mais les
routes, s le sortir de Paris, n’avaient pas
les qualités de l’A 16, en projet seulement à
l’époque. Le compteur descendait rarement
au-dessous de 120 sauf parfois dans les tra-
versées des villes. Les virages me paraissaient
toujours très raides et le patron parlait en re-
gardant son passager comme pour guetter
ses réactions. Pour le jeune père responsable
de 3 enfants et habità une 2 CV, l’épreuve
était rude. Le respect, en ce temps ancien,
interdisait la moindre remarque sur cette
conduite sportive. C’est en sueurs, extén
de crampes, tremblotant que j’arrivais à Calot.
D’autres que moi ont connu l’expérience. Mais
seul comptait le résultat et l’on récidivait vo-
lontiers un mois plus tard.
Car à Calot, tout était enseignement. J’y
ai connu avec prot Héripret et Duriez
lorsqu’avec Jean-Claude Rey, nous exploitions
les dossiers « Epiphysiolyse » de l’Institut. Cest
de Georges Morel et d’Yves Cotrel que j’ai le
plus appris…mais je ne sais plus quoi car le
temps est passé là-dessus ! De Berck je me
rappelle cependant quelque chose avec cer-
titude : le vent. A-t-il disparu avec les progrès
des traitements des scolioses et de la luxation
congénitale de hanche ? Jinterrogerai Chris-
tian Morin sur ce point important. En eet, en
1967 (la plupart des lecteurs etc…) le sable,
poussé par lui (le vent) passait sous la porte
et par bien d’autres entrées ; il tapissait tout
l’intérieur, le sol, la table et sa nappe de toile
cirée, les objets, le dessus de lit (en toile cirée)
du petit appartement loué pour deux semai-
nes près de la plage. Nos garçons étaient ré-
veillés dès 6 heures le matin par les enfants de
mineurs du nord en vacances sur la côte. Ha-
bitués aux horaires de leurs pères, ils allaient
tôt se baigner et, en chemin, tapaient de leurs
pelles et de leurs seaux les murs de toutes les
maisons. Quel concert, quel repos ! Comme il
n’y a plus de mineurs, il n’y a plus d’enfants de
mineurs ; on peut dormir tard à Berck. Sur cela
aussi il me faudra interroger Christian Morin.
Quand je retourne à Calot, trop rarement
à mon goût, je prends le train car je n’ai pas
d’Alfa Romeo.
Henri Carlioz
Edito ........................................................................1
par Henri Carlioz
Hommage au Pr. Jean Cauchoix....................2
par Jean-Claude Rey
Lorthopédie pédiatrique
et les hôpitaux berckois ...................................4
par Jean-Claude Léonard
et Christian Morin
Brève histoire berckoise
du traitement orthopédique
de certaines déformations du rachis ........ 10
par Christian Morin
et René Vandermeulen
La technique du « no touch »
une touche de rigueur
pour moins d’infection ? ............................... 15
par Sébastien Raux et al.
La costo-transversectomie ........................... 17
par Jean-Claude Rey
Le cas du jour ....................................................21
par Philippe Violas et Jonathan Benoist
Technique chirurgicale
de la prothèse totale de hanche
chez le patient neurologique
non marchant ................................................... 22
par Christophe Delecourt et al.
Lenfant « pas comme les autres »
(suite) ................................................................... 25
par Jean-Louis Fournier et al.
Le cas du jour :
réponse à un problème
de vertèbre borgne .........................................27
par Philippe Violas et Jonathan Benoist
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Fondateur
J.C. POULIQUEN † (Paris)
Éditorialiste
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Rédacteur en chef
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La Gazette
de la SOciété Française d’Orthopédie Pédiatrique
N°29
2
Hommage au Professeur Jean Cauchoix
par Jean-Claude Rey
« C’est pour moi une tâche de mémoire, de délité et j’ajouterai
d’aection que de céder à la demande de Christian Morin pour
évoquer la personne du Professeur Jean Cauchoix, décédé le
23 juillet 2009 à l’âge de 97 ans. J’attribue les motifs de cette
demande largement à l’ancienneté de mes rapports avec lui et
je le remercie de la conance – et de l’honneur – qu’il me fait. »
Jean Cauchoix est né en 1912. Son père était Chirurgien des
Hôpitaux de Paris, il mourut des suites d’une opération le
laissant tout jeune aux soins de sa mère et de ses tantes.
Très vite il se t remarquer par sa vivacité, son intelligence et
sa mémoire, sachant par exemple à l’âge de quatre ans ses
départements. Ses études secondaires terminées il s’orienta
naturellement, suivant une pente familiale, vers la médecine.
Externe en 1932, interne des Hôpitaux de Paris en 1934 (8ème
sur 94), au même concours que Jean Mathey et Jean-Louis
Lortat-Jacob avec lesquels il formait un trio d’inséparables. Il
fut l’interne des plus grands patrons de l’époque, Lenormant,
Mathieu, Gosset et Quénu. Prosecteur en 1942, il est nommé
au Bureau Central, c’est-à-dire Chirurgien des Hôpitaux
en 1943 et sera nommé Agrégé de l’Université en 1952.
D’abord assistant à Cochin de son aîné et ami Robert Merle
d’Aubigné, son premier poste de chef de service à l’hospice
d’Ivry en 1954 sera de courte durée. Il est nommé à Saint-
Louis en 1955. Il y organisera dans des locaux historiques peu
adaptés un service de chirurgie orthopédique de qualité,
partageant avec Jacques Mialaret la charge des urgences,
impliquant deux internes de garde, l’un en chirurgie
générale, l’autre en chirurgie orthopédique : c’était une
innovation pour l’époque. La réforme hospitalo-universitaire
créa quatre chaires de clinique chirurgicale orthopédique et
Jean Cauchoix s’installa dans la chaire de l’hôpital Beaujon. Il
y resta jusqu’à la retraite. A côté de cette carrière hospitalière
il avait conservé une activité libérale qui ne l’empêchait pas
d’exercer dans son service une présence quasi quotidienne,
mais il avait aussi été choisi en 1955 pour diriger l’Institut
Calot de Berck-Plage et organiser cet établissement qui avait
perdu son lustre du début du siècle. Voilà en quelques lignes
l’essentiel de sa carrière professionnelle.
La guerre terminée il prit conscience avec d’autres du retard
de notre profession et de notre spécialité en particulier,
gée dans ses acquis d’après 14-18. Avec R. Merle dAubigné
et quelques autres, il sembarqua pour un voyage d’études
outre-atlantique, visitant Boston, New-York, Chicago et la
Mayo. Ce furent des découvertes sur le plan des techniques,
de lorganisation mais aussi sur le plan de l’anesthésie-
réanimation. Ce fut aussi l’occasion de liens amicaux durables
avec les chirurgiens américains. Au retour les voyageurs
étaient bien décidés à agir, à bousculer l’état de fait
hospitalier qui refusait l’individualisation de notre spécialité.
Un entêtement aussi des instances professionnelles puisque
l’Ordre des médecins n’accepta qu’en 1982 la spécialité
orthopédique !
Le service de Saint-Louis, quelles qu’aient été les dicultés
matérielles, devint vite un service recherché, avec trois
assistants, Jacques Duparc, André Lemoine et Alexandre
Maschas, et trois internes. La non-touch technique était
appliquée de la façon la plus rigoureuse et les plus réticents
s’y pliaient, d’autant plus nécessaire dans cet environnement
mal adapté. Rien nétait laissé à l’improvisation, on tremblait
à la grande visite du samedi d’être vertement prié de refaire
un plâtre pour quelques degrés d’équin. Puis cétait le sta,
présentation des opérés au programme et discussion des
indications ; le mercredi suivant c’était le déjeuner du service
dans le petit pavillon Henri IV, lon découvrait un Patron
un peu détendu. Suivait le sta plus rapide des opérés de la
semaine passée.
Tous les mois le Patron disparaissait quelques jours et
les mieux informés parlaient d’une expédition berckoise.
Pour ceux qui ont eu le privilège étant interne à Paris
d’accompagner le Patron, le contraste était étonnant. D’abord
l’ambiance de Calot, parfaitement tenu et administré par
les religieuses Franciscaines, dans une atmosphère étrange
d’encaustique et de désinfectant. Ensuite la transformation
du Patron : à Paris, tension permanente, visage contracté,
des appréciations autoritaires, à Berck un personnage tout
diérent, abordable, certes pas jovial mais pouvant plaisanter
avec beaucoup d’humour. C’était donc une fois par mois qu’il
arrivait à l’Institut Calot le mercredi soir vers vingt-trois heures
ou minuit, quel que soit le temps (le verglas dans la descente
sur Poix ou sur Abbeville l’enchantait). Le lendemain il était
prêt pour opérer avant huit heures, chaussé de ses tennis.
La n du séjour était consacrée à l’examen des dossiers de
malades passés et futurs. Les soirées étaient studieuses à
mettre au point une communication. Il imposait bien sûr à
Berck les mêmes exigences qu’à Paris. Cette activité de Berck
fut pour lui très heureuse car elle lui permettait d’envisager
la chirurgie orthopédique dans son ensemble, chez l’enfant
comme chez l’adulte, sans cette scission ridicule qui nexiste
que chez nous et qui sépare les services d’enfants des
services d’adultes, interdisant le suivi des jeunes patients au
delà de l’âge de quinze ans.
C’est à Calot que M. Cauchoix mit au point sa technique
d’allongement extemporané du fémur avec cette installation
originale du treuil mural. Il y développa la chirurgie
vertébrale, celle du mal de Pott, et engagea la chirurgie des
scolioses, y opéra son premier cas de sténose lombaire. S’il
abandonnait progressivement le traitement des scolioses à
Le Professeur Jean Cauchoix, Président de la SOFCOT en 1971
3
Hommage au Professeur Jean Cauchoix
par Jean-Claude Rey
Yves Cotrel avec le succès que l’on sait, il laissait à Georges
Morel le traitement des luxations congénitales de la hanche,
des ostéochondrites. Mais c’est à Calot qu’il réalisa ce qui
était pour lui un vieux rêve, la création d’un laboratoire de
recherches sur le tissu osseux, animé par Jean Duriez et
Gaston Héripret. Un vieux rêve car on a oublié ses premières
publications (1938) d’expérimentation endocrinienne sur
le cobaye et sa thèse, Hormone folliculaire et bromatose !
Plusieurs résidents étrangers passèrent à Calot pour
travailler au laboratoire, lequel possédait pour l’époque
des possibilités uniques en France (isotopes, animalerie).
Les visiteurs se succédaient, admiratifs d’une pathologie
souvent exceptionnelle, et quelques Journées réunirent les
plus grand noms, H. Hodgson, Paul Harrington, John Moe et
beaucoup d’autres.
Revenant à Paris, l’activité n’y faiblissait pas, avec Alain
Deburge qui lui succèdera, avec Bruno Lassale trop tôt
disparu, avec Michel Benoist et G. Massare, il centre ses
préoccupations sur la colonne vertébrale, en particulier
la pathologie dégénérative, conits disco-radiculaires,
spondylolisthésis, sténoses. Il est convaincu de l’intérêt de
la chimionucléolyse par la païkinase, malheureusement
abandonnée par le fabricant pour des raisons économiques.
Les Journées de Beaujon font périodiquement le point de
ces sujets.
Il était membre de nombreuses sociétés de chirurgie
orthopédiques françaises ou internationales, mais
particulièrement er d’être un des rares membres français
de la British Orthopaedic Society. Il avait encore participé à
la fondation de la Lumbar Spine Society dont il appréciait
le groupe de travail, il intervenait toujours en termes précis,
avec autorité mais sil lui arrivait de replacer la discussion
dans le droit chemin, cétait toujours avec courtoisie. Il fut
élu à lAcadémie de Médecine en 1983 et y t sa dernière
manifestation scientique en organisant avec J. Dubousset
et M. Guillaumat une séance spéciale sur les scolioses
idiopathiques en 1999.
Il avait beaucoup voyagé et parlant bien l’anglais,
entretenait des liens d’amitié à travers le monde, aux Etats-
Unis, au Royaume-Uni, aussi en Belgique, au Mexique et en
Argentine, en Italie, au Liban et en Afrique du nord.
Il avait de multiples pôles d’intérêt étrangers à la médecine,
cela lui permettait de sonder sur les sujets les plus
inattendus l’interlocuteur, qui restait désarmé. Avec l’âge il
avait abandonné la voile et le ski, mais restait très actif, se
consacrait à l’horticulture dans sa propriété de l’Ile-aux-
Moines et retenait les noms les plus compliqués. C’était pour
lui ces derniers temps une pénible inrmité que de ne plus
pouvoir lire un livre.
Il n’avait pas cessé de s’intéresser de près à notre spécialité et
à la médecine tout entière grâce aux séances de l’Académie
de Médecine il fut assidu jusqu’à quelques semaines
avant sa mort. Il regrettait aussi beaucoup que les liens
noués avec le monde anglophone se soient progressivement
distendus.
C’était le dernier représentant d’une époque révolue. Ses
élèves et tous ceux qui l’ont connu se souviendront de
lui avec regret et reconnaissance, que sa famille en soit
assurée.
4
L’orthopédie pédiatrique et les hôpitaux berckois
par Jean-Claude Léonard et Christian Morin
Au moment la vie des hôpitaux de Berck risque de sétein-
dre plus ou moins complètement, il nous a semblé utile, peut-
être pour la postérité, de faire revivre un pan de son histoire et
de ses artisans locaux. Pour cadrer avec l’esprit de la Gazette,
nous nen soulèverons qu’un pan, celle de l’assistance portée
aux enfants malades, plus particulièrement à ceux atteints
d’aections de l’appareil locomoteur.
Berck, sa plage, son air viviant,
et ses femmes de coeur
Au milieu du 19ème siècle, Berck n’est pas encore « sur mer ». La
plage s’échouent les bateaux (les obarts) de sa popula-
tion de pêcheurs est encore éloignée de la ville de plus d’un
kilomètre. La vie y est dure. Dans ces conditions diciles, une
femme veuve vit seule avec ses deux enfants rescapés d’une
épidémie de choléra dans une cabane sur la dune. Plus tard
Maxence van der Meersch écrira La Maison sur la Dune mais
dans un autre contexte. Marianne Gressier, qui restera pour la
postérité Marianne Toute-Seule (Fig. 1), prend en garde les en-
fants de pêcheurs pour quils protent du grand air et d’une
surveillance attentive. Le Dr Perrochaud, médecin des Enfants
Assistés de Paris et directeur de l’antenne locale de Montreuil-
sur-Mer, lui cone rapidement des enfants anémiés, scrofuleux,
malades de privation et de carences hygiéniques. En 1859, il
installe Marianne dans un bâtiment en dur accompagnée de 3
religieuses : la station maritime était née.
Une autre Marianne, Duhamel, à peu près à la même époque
reçoit également des enfants en garde pour les soigner avec
des bains de mer, les transportant sur une plage voisine de
Berck. Son nom sera moins connu que son homonyme mais
elle doit être associée à l’épopée locale.
Voici donc les pierres fondatrices de l’activité médicale berc-
koise. La « bonne air » est désormais reconnue dans un site pri-
vilégié : les médecins et leurs équipes peuvent entrer dans la
place, y travailler durement car la tâche est immense contre le
éau de l’époque : la tuberculose.
Berck et ses hôpitaux
En 1861, l’Assistance Publique de Paris fait construire « le pe-
tit hôpital », ébauche du futur Hôpital Maritime actuel (Fig. 2).
Sous l’impulsion de l’impératrice Eugénie (craignant une coxal-
gie pour son ls), l’Hôpital Napoléon est agrandi, modernisé,
avec le soutien de la baronne de Rothschild.
Un convoi ferroviaire sanitaire amène de Paris chaque mois
un groupe d’enfants en principe uniquement atteints de tu-
berculose osseuse, mais bien souvent porteurs de parasitoses,
de carences vitaminiques et protéiques, et de surinfections. Ils
étaient dans un état si précaire qu’un certain nombre mourait
durant le transport.
La ville de Berck trouve un essor retentissant avec la construc-
tion d’hôpitaux, d’hôtels, de pensions de famille, de casinos,
de champs de course, de villas…celle de Mme de Rothschild,
toute en bois, est la plus majestueuse, sur la dune.
D’autres hôpitaux sont construits : l’hôpital Rothschild en
1870, l’hôpital Cazin-Perrochaud en 1893 (Drs Cayre et Forest
de Faye aidés par les sœurs franciscaines chassées de l’hôpital
Maritime), l’Institut Orthopédique du Docteur Calot en 1900,
en 1902 l’Institut Hélio-Marin de Mme Bouville, et en 1923
la Fondation Franco-Américaine de Jacques Calvé et de son
épouse.
Guerres, incendies, restructurations en modieront l’architec-
ture au l des ans mais ces établissements hospitaliers conti-
nueront de donner au front de mer un aspect incomparable.
A la n du 18ème siècle ils vont servir de champ d’action à la
« bande des quatre ».
Fig. 1 : Marianne Toute-Seule, un obart, une pêcheuse de crevettes et les enfants
assistés
Fig. 2 : l’hôpital Maritime et le phare de la ville de Berck
5
L’orthopédie pédiatrique et les hôpitaux berckois
par Jean-Claude Léonard et Christian Morin
Les pionniers du Berck médical : « la bande des 4 »
Calot, Ménard, Calvé et Sorrel, voici donc cette fameuse « ban-
de des quatre » (Fig. 3) dont nous allons rapidement conter
l’équipée. Ils étaient tous brillants sujets, forts en caractère et
ont marqué, chacun à leur façon, l’histoire du Berck médical.
Victor Ménard (1854-1934)
Il succède à Pierre Cazin, gendre de Paul Perrochaud, en 1891 à
la suite d’un concours âprement disputé avec François Calot.
V. Ménard est l’homme de toutes les peines de lépoque : il
commence seul sa cheerie de service, sans interne, pour
700 malades et 400 enfants assistés répartis dans d’autres
établissements berckois ; il se fait refuser par l’administration
de lAP un appareil de radiographie quil doit installer en ville
chez un ami pharmacien ; il doit lutter non seulement contre
la tuberculose, mais contre les complications infectieuses, les
maladies parasitaires importées, les carences alimentaires des
milieux défavorisés, l’analphabétisme ; il opposera à ces éaux
l’association « grand air- instruction » en créant l’école à l’hôpi-
tal et en permettant l’accès au soleil et à la mer des enfants al-
longés en ajoutant tout simplement des roulettes sous les lits,
premiers pas vers les célèbres gouttières berckoises (Fig. 4) .
Malgré ce travail intense, inimaginable actuellement, il pu-
blie deux livres : « Étude sur la coxalgie » et « Le mal de Pott ». Il
donne son nom à une technique chirurgicale, la costo-trans-
versectomie et à une entité radiographique, le cintre cervico-
obturateur dont il démontre tout l’intérêt dans les luxations
de la hanche.
Peu belliqueux, il ne s’oppose que très discrètement aux at-
taques parfois « frontales » menées par F.Calot en matière de
traitement de la tuberculose osseuse.
On gardera de lui cette phrase souvent citée et toujours d’ac-
tualité : « Pour être médecin, il faut avoir une conscience ! Sans
conscience, on devient vite un forban ».
François Calot ( 1861-1944)
Contrairement à V.Ménard, F.Calot déborde de dynamisme
pour se faire connaître, pour développer ses hôpitaux, pour
valoriser un enseignement qui sera mondialement connu. Il
utilise avant l’heure le « management » et le « public relation ».
De nombreuses têtes couronnées viennent le consulter, créant
par voie de conséquence des besoins d’accueil en hôtellerie et
en distractions.
Il est un des premiers en France à préconiser l’asepsie opéra-
toire la plus stricte, dans la suite de Lucas-Champonnière et de
Lister. Après avoir opéré des lésions osseuses tuberculeuses en
grand nombre et après de nombreux échecs, il s’autocritique
et propose le traitement conservateur : « Ouvrir la tuberculose,
c’est ouvrir la porte de la mort ».
Ne pouvant succéder à V. Ménard, il prend la direction de l’Ins-
titut Cazin-Perrochaud avec l’aide nancière de la baronne de
Rothschild.
Sa publication « La guérison des bossus » en 1896 le fait connaî-
tre mondialement.
En 1900 il obtient la création du futur Institut Calot, en de-
vient le médecin chef tout en conservant ses cheeries dans
d’autres institutions : en tout 1350 lits…quelle santé !
Entre-temps il revient, sur les conseils d’Abbott, à une correc-
tion moins brutale des gibbosités pottiques. Il propose des
ponctions dans les abcès, leur stérilisation par des liquides
modicateurs... ce qui l’oppose à Ménard qui préconise l’abord
vertébral direct pour l’évacuation de ces abcès.
Il faut lui reconnaître une grande expérience chirurgicale et
quelques autocritiques qui lui font préférer par exemple le
traitement orthopédique des luxations de hanche à la chirur-
Fig. 3 : “la bande des quatre”1- Victor Ménard 2-François calot
3-Jacques Calvé 4-Etienne Sorrel
Fig. 4 : lits à roulettes, prégurant les gouttières de Berck
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