
DIAGNOSTIC AMINE
Il s’agit d’un
herpès digital ou panaris
herpétique.
L’herpès digital représente l’expres-
sion clinique d’une primo-infection ou
d’une récurrence isolée, le plus souvent
due au virus HSV1 (dans 75 % des cas).
La transmission se fait par un contact
direct cutanéomuqueux avec un sujet
qui excrète le virus. Il s’agit classique-
ment d’une auto-inoculation par suc-
cion à partir d’une récurrence labiale,
mais la transmission peut se faire à tra-
vers toute personne de l’entourage qui
présente une primo-infection ou une ré-
currence herpétique, quelle soit symp-
tomatique ou non. Chez l’adulte, l’her-
pès digital est classé dans les maladies
professionnelles que l’on rencontre es-
sentiellement chez les dentistes et les
anesthésistes.
Le plus souvent, les lésions sont loca-
lisées à la pulpe des doigts, mais la pau-
me ou le poignet peuvent être atteints.
Initialement apparaît une tuméfaction
inflammatoire, chaude et douloureuse,
surmontée de vésicules à contenu
trouble. Puis, les vésicules se regrou-
pent sous forme de bulles, réalisant le
« bouquet » herpétique, qui peut être
confondu avec un panaris bactérien.
L’enfant est tout au plus subfébrile.
L’extension des lésions peut durer une
dizaine de jours, puis l’évolution est
spontanément favorable avec érosion
des vésicules, qui prennent un aspect
croûteux et disparaissent en quinze
jours.
La principale complication est la sur-
infection bactérienne locale, essentielle-
ment staphylococcique. Il faut y penser
devant une fièvre persistante et une
mauvaise évolution locale (absence de
croûte). Par ailleurs, les récidives sont
fréquentes, surtout avec HSV2.
Le diagnostic est clinique. En cas de
doute, la méthode diagnostique de réfé-
rence est la culture virale après écou-
villonnage local.
Aucun traitement local n’est néces-
saire, et aucune crème ou désinfectant
local ne doit être utilisé (sauf en cas de
surinfection). Il faut également éviter
que l’enfant y touche ou se gratte. L’aci-
clovir n’est pas efficace en application
locale et n’est pas indiqué par voie gé-
nérale. Seul le traitement de la douleur
est indispensable.
Si les lésions récidivent (au moins six
récurrences par an), un traitement par
aciclovir per os peut être discuté. La po-
sologie est de 80 mg/kg/j en trois prises
sans dépasser 1000 mg/j avec réévalua-
tion au bout d’un an de traitement.
Par ailleurs, comme devant toute in-
fection herpétique, il ne faut pas oublier
de prévenir l’entourage eczémateux du
risque de syndrome de Kaposi-Julius-
berg.
DIAGNOSTIC MARIE
Il s’agit d’une
glossite migratoire bé-
nigne,
mieux connue sous le nom de
langue géographique.
Cette affection inflammatoire bé-
nigne de la muqueuse linguale peut se
voir à tout âge mais est plus fréquente
chez l’enfant, puisqu’elle touche de 4 à
14 % d’entre eux.
Cliniquement, les lésions sont gros-
sièrement annulaires, entre 0,5 et 5 cm
de diamètre, avec une bordure suréle-
vée blanc-jaune et un centre inflamma-
toire lisse correspondant à la disparition
des papilles filiformes de la langue.
Leur disposition est irrégulière, prédo-
minant sur la face latérodorsale de la
langue et réalisant l’aspect classique en
« carte de géographie ». Généralement,
aucun signe fonctionnel n’est associé à
ces lésions, mais l’enfant peut parfois se
plaindre d’un goût métallique dans la
bouche ou de brûlures au contact d’ali-
ments chauds ou épicés.
Cette affection évolue par poussées
successives de façon chronique et im-
prévisible. Les poussées peuvent être
déclenchées par une infection intercur-
rente, un stress ou une maladie auto-
immune, mais souvent aucun facteur
déclenchant n’est retrouvé. Pendant les
poussées, les lésions migrent au cours
de la journée et régressent en quelques
jours à quelques semaines. Une rémis-
sion complète peut s’observer pendant
plusieurs mois à plusieurs années.
La cause de cette glossite est incon-
nue. Un facteur génétique est évoqué du
fait de la fréquence des formes fami-
liales. D’autre part, plusieurs associa-
tions ont été décrites : avec le psoriasis,
avec la dermatite atopique, ainsi qu’avec
la langue fissurée, qui, pour certains, re-
présente le stade évolué de cette glossite.
Dans la forme typique, le diagnostic
est clinique, et aucun examen complé-
mentaire n’est nécessaire. Si les lésions
migrent peu, la possibilité d’une leuco-
plasie chevelue impose la réalisation
d’une sérologie VIH et d’un examen
anatomopathologique. Les autres dia-
gnostics différentiels incluent la candi-
dose linguale atrophique (lésions plus
érythémateuses), le lichen plan, le lu-
pus érythémateux, les lésions de syphi-
lis secondaire ou d’autres causes de
glossite plus rares (glossite à plasmo-
cytes, glossite losangique médiane).
Dans ces cas, un examen anatomopa-
thologique est nécessaire.
La prise en charge consiste principa-
lement à rassurer le patient sur la béni-
gnité de cette affection et le traitement
est uniquement symptomatique. L’ap-
plication locale de Xylocaïne
®
peut être
utile en cas de douleurs invalidantes,
mais il faut se méfier des risques de
fausse route ou de morsure de langue.
Dans un but esthétique, on peut propo-
ser l’application d’une solution de tréti-
noïde (Locoïd
®
) pour diminuer les bor-
dures blanchâtres.
Médecine
& enfance
décembre 2008
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Pour en savoir plus
sur l’herpès digital :
ANAES : Prise en charge de l’herpès cutanéomuqueux chez le
sujet immunocompétent, Conférence de consensus 2001.
LEBLANC A., GAUTHIER M., DENIS C : «L’herpès digital», Le
Concours Médical, 1990; 112: 1893-4.
AMIR J., HAREL L., SMETANA Z., VARSANO I. : «Treatment of
herpes simplex gingivostomatitis with aciclovir in children: a ran-
domised double blind placebo controlled study», BMJ,.1997;
314: 1800-3.
«Herpès labial récurrent» (rubrique Au coin du web), Méd. .Enf.,
2006; 26 : 308-9.
sur la glossite migratoire bénigne :
ABENSOUR M., GROSSHANS E. : «Langue géographique ou
glossite migratoire bénigne», Ann. Dermatol. Vénéréol.,1999;
126: 849-52.
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