
GÉRIATRIE
LA FIN DE VIE À DOMICILE
LA FMC
II Vendredi 10 novembre 2006 |numéro 2388
un sentiment de sécurité. Ce mot peut sembler curieux
dans ce contexte de fin de vie, mais il importe pour
le malade de savoir qu’on ne le laissera pas souffrir,
qu’on sera présent et immédiatement efficace en cas
de problème. Heureusement, la façon de travailler des
généralistes me semble être en train de changer et
d’aller dans le sens d’une collaboration en réseau, avec
des équipes multidisciplinaires – infirmières, aides
soignantes, kinésithérapeute, pharmacien…– avec des
temps de coordination où l’on se rencontre, où l’on se
concerte, où l’on se conforte, ce qui permet de mieux
organiser une continuité de soins 24 h/24. » (3)
L’efficacité technique, qui fait l’objet de ce dossier, ne
représente qu’un des éléments de l’approche globale
pour répondre aux multiples besoins du patient.
Encore moins que dans d’autres domaines de la mé-
decine, il n’y a aucun traitement médicamenteux
systématique en soins palliatifs. On doit écouter la de-
mande du patient et y répondre de son mieux. On es-
saie d’administrer les médicaments en respectant au
mieux les indications, contre-indications et posologies,
du moins tant qu’ils donnent satisfaction dans ces li-
mites. En revanche, on ne devrait faire aucune écono-
mie sur les innombrables soins physiques corporels.
TRAITEMENT ANTALGIQUE
En résumé : le paracétamol reste un excellent antal-
gique central. Les AINS et les corticoïdes sont très
efficaces dans des indications précises. Les morphi-
niques sans métabolites sont mieux tolérés que
la morphine. Le traitement des effets secondaires
des morphiniques doit être optimal.
La douleur n’est pas systématiquement présente. On
estime qu’environ 40 % des malades en fin de vie at-
teints d’un cancer ne se plaignent pas de douleurs.
Néanmoins, 60 % doivent être soulagés au mieux.
Antalgiques de palier 1
Le paracétamol est un excellent antalgique central.
Il est très efficace seul et peut suffire. On l’utilise éga-
lement en complément des morphiniques. Encore
faut-il que la voie orale ou intraveineuse soit possible.
La voie veineuse est plus volontiers utilisée chez les
patients qui ont une chambre implantable.
«Je me sers peu des paliers 2. La codéine, précise le
Pr Desfosses, est transformée en morphine et l’on
préfère utiliser la morphine elle-même. Nous utilisons
peu le tramadol. Nous choisissons des petites doses
de morphiniques, plus faciles à manier et à titrer.
Le néfopam est surtout utilisé par les chirurgiens, par
voie IV. Nous ne l’utilisons pas. En revanche, les
co-antalgiques ont notre faveur. »
Co-antalgiques
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) sont
très intéressants dans certaines indications spécifi-
ques, en particulier les métastases osseuses. On les
prescrit (volontiers kétoprofène ou diclofénac) par voie
orale ou par voie injectable à la dose efficace, en veil-
lant à hydrater le patient et à surveiller sa diurèse.
Les corticoïdes ont une moindre toxicité, mais ils sont
moins efficaces sur les douleurs osseuses. En revan-
che, ils sont très efficaces sur les douleurs liées aux
lymphangites carcinomateuses, aux tumeurs cérébrales,
aux métastases cérébrales, sur les dyspnées par enva-
hissement métastatique, les occlusions intestinales.
Par voie orale, lorsqu’elle est possible, sinon par voie
injectable, on les prescrit à la dose de 40 à 80 mg/j.
Dans les métastases cérébrales et les atteintes
neurologiques, on monte facilement à des doses de
120, 240, voire 500 mg/j.
Morphine et morphiniques
«La morphine sans relation, ça ne marche pas, sou-
ligne le Dr Desfosses. Les problèmes spécifiques des
personnes âgées concernant la tolérance aux médica-
ments, en particulier aux morphiniques, sont liés à
l’insuffisance rénale physiologique et aux troubles
cognitifs, qui sont aggravés par les médicaments. »
Les métabolites de la morphine sont actifs, pour
certains neurotoxiques, et d’élimination rénale.
En revanche, certains morphiniques comme le fen-
tanyl n’ont pas de métabolites d’élimination rénale
et exposent donc moins que la morphine aux risques
de troubles cognitifs et de surdosage.
On peut donc prescrire le Fentanyl®, même en cas
d’insuffisance rénale. Il entraîne moins de troubles
cognitifs et moins de myoclonies. Les patches de
Fentanyl® sont légèrement trop dosés. Actuellement,
on dispose de patches à 12 mg, que l’on peut couper
si besoin. Notons que le Fentanyl® sous-cutané utilisé
à l’hôpital n’est pas agréé en ville.
On peut également utiliser l’hydromorphone,
également dépourvue de métabolite actif ainsi que
l’oxycodone.
On commence les antalgiques à des doses très fai-
bles, par exemple pour la morphine de l’ordre de
3 mg. Les présentations en solution buvable permet-
tent d’administrer par gouttes et de titrer ainsi mg par
mg. On dispose également des présentations en
gélules, à libération prolongée ou à libération immé-
diate. Les voies d’administration privilégiées sont
la voie orale, tant qu’elle est possible, et la voie
transdermique. Mais, lorsque la voie orale n’est pas
possible ou que la peau âgée (sèche ou cartonnée)
risque de mal absorber la voie percutanée, on uti-
lise la voie sous-cutanée reliée à un système PCA
(pompe d’autocontrôle de l’analgésie). On injecte
ainsi des morphiniques ou de la morphine à petites
doses continues de 10 à 15 mg/24 heures, ou/et par
bolus à la demande, avant la toilette ou les soins
ou au moment des douleurs. Ils peuvent être admi-
nistrés par le patient ou par son aidant familial ou
professionnel.
La voie veineuse est le plus
souvent utilisée chez le patient
qui a une chambre implantable.
GARO/PHANIE
Le patient doit sentir que
l’on peut toujours
lui apporter rapidement
un soulagement efficace.
BURGER/PHANIE