L’actualité en médecine dentaire
Rev Mens Suisse Odontostomatol, Vol 112: 3/2002 301
tresse de la journée, cette spécialiste de
renommée internationale a passé en re-
vue les aspects physiopathologiques et
de la perception subjective de la douleur
en pédodontie,de même que les mesures
thérapeutiques qui s’ensuivent pour
l’équipe soignante. Les céphalées, les
douleurs auriculaires, digestives et den-
taires sont les plaintes les plus fréquentes
chez l’enfant. Dans les douleurs den-
taires, il convient de distinguer les dou-
leurs dues aux gestes thérapeutiques
(qui, dans les pays industrialisés, sont le
problème le plus important), par rapport
à celles causées par des lésions dentaires.
La perception de la douleur est toujours
subjective et elle est influencée par des
expériences en très bas âge. A ce propos,
il faut savoir que le fœtus possède un sys-
tème nerveux pleinement développé
pour la perception de la douleur à partir
de la 24esemaine de gestation. Il est éga-
lement intéressant de noter que «l’ap-
prentissage de la douleur» se déroule se-
lon le modèle de l’«inprinting», passant
de la perception de la douleur spontanée
à une diminution du seuil de réaction à
celle-ci, puis à l’augmentation de la dou-
leur suite à des stimulations répétées. De
ce fait, la gestion moderne de la douleur
est fondée sur la prévention de ce phéno-
mène de l’«inprinting», ainsi que sur le
rétablissement des fonctions inhibitrices
physiologiques. Et, comme l’a fait remar-
quer la conférencière, la gestion de la
douleur relève de l’éthique dans le sens
des Droits de l’enfant définis par l’ONU!
Plus les enfants sont petits, plus il est
difficile d’évaluer la douleur qu’ils res-
sentent. Jusqu’à l’âge d’environ 6 ans, ce
sont en premier lieu des appréciations de
signes cliniques ou comportementaux,
tels que l’expression faciale qui sont uti-
les; à partir de 4 à 6 ans, l’enfant peut soit
exprimer ses perceptions verbalement,
soit les représenter sur des échelles ana-
logiques,graduées par exemple de 1 à 10.
Concernant l’équipe soignante, il est in-
téressant de noter que les praticiens plus
expérimentés ont tendance à appréhen-
der davantage les traitements aux en-
fants. Selon différentes hypothèses, cette
observation serait due au fait que les pra-
ticiens chevronnés perçoivent de maniè-
re plus consciente les signes de la dou-
leur chez le jeune patient et investissent
peut-être plus de temps lors des soins
que leurs collègues plus jeunes. Inverse-
ment, la routine risque de rendre certains
médecins-dentistes «aveugles» à la dou-
leur.
Il faut toujours garder à l’esprit que les
enfants ne sont pas des petits adultes; ils
ont leur propre façon de penser et de
vivre la douleur.En pédodontie, une seu-
le expérience de douleur peut entraîner
une multiplication de l’anxiété dentaire
par un facteur dix! La peur des traite-
ments dentaires ne résulte pas unique-
ment de procédures douloureuses, elle
peut également être déclenchée par la
sensation d’une perte d’autonomie, voire
par une attitude ou un comportement
vécu par l’enfant comme étant insultants.
Pour cette raison, une anamnèse méticu-
leuse des préoccupations ou des appré-
hensions, tant de l’enfant que de ses pa-
rents, revêt une importance capitale. Elle
sert à établir une relation de confiance
correspondant aux besoins individuels et
spécifiques pour chaque petit patient.
Lors de tout geste thérapeutique,l’objectif
central est de bloquer la réaction à la dou-
leur. Cette inhibition peut être locale
(anesthésie) ou centrale (sédation médi-
camenteuse et/ou analgésiques préopéra-
toires et postopératoires). Ces derniers, de
même que la diffusion de musique,contri-
buent à relever le seuil de perception de la
douleur et à assurer une meilleure anes-
thésie locale. Avant toute injection, il faut
utiliser un anesthésique topique sous for-
me de spray, de gel ou de timbre (par
exemple patch Emla®qui contient de la li-
docaïne et de la prilocaïne). En pédodon-
tie, il faut éviter les anesthésies troncu-
laires, car elles sont très mal vécues par
l’enfant. Dans la majorité des cas, des in-
jections locales suffisent même pour les
traitements sur les molaires inférieures.La
spécialiste a relevé qu’il n’y a aucune évi-
dence étayant la supposée supériorité de
l’articaïne par rapport aux autres anesthé-
siques locaux. En pédodontie, les échecs
de l’anesthésie locale sont de l’ordre de 3 à
20% dans le maxillaire inférieur et de 5 à
18% dans le maxillaire supérieur. Ils sont
en général dus à des infections ou à des
erreurs techniques.
Revenant aux mesures d’inhibition cen-
trale de la douleur, Anna Lena Hallons-
ten a anticipé des sujets qui allaient en-
core être évoqués par deux conférenciers
de l’après-midi. Elle a ainsi passé en re-
vue les avantages et inconvénients de
l’oxyde nitrique et de la sédation médica-
menteuse par le midazolam (Dormi-
cum®). Pour ce qui est le fameux «gaz hi-
larant»,il faut savoir que plusieurs études
ont démontré que lorsque l’oxyde ni-
trique est utilisé à bon escient et en com-
binaison avec une anesthésie locale, les
résultats comportementaux ont été plus
favorables après une période d’observa-
tion de deux ans. La sédation médica-
menteuse par le midazolam (0,5 mg per
os ou 0,35 à 0,45 mg en application recta-
le par kilogramme de poids corporel) est
très intéressante, puisque non seule-
ment, elle permet de réaliser des anes-
thésies locales dans des conditions par-
faites, mais également du fait que le
midazolam entraîne une amnésie anté-
rograde. Ainsi, l’enfant ne se souvient
plus des circonstances accompagnant le
traitement,ce qui représente un avantage
psychologique non négligeable.
Jetant un regard dans le futur, la spécia-
liste danoise a évoqué l’importance crois-
sante de l’inhibition des douleurs accom-
pagnant certains traitements orthodon-
tiques, le méthode A.R.T (atraumatic
restorative treatment), le concept de
l’anes- thésie électrique EDA (electrical
dental anesthesia) ou encore le système
d’injection assistée par un microchip
(The Wand®, appellation astucieuse s’il
en est, puisque «wand» signifie en an-
glais le «bâton magique»...), lequel per-
met de minimiser la douleur dans le site
de l’injection grâce à une diffusion extrê-
mement lente du produit d’anesthésie.
Font également l’objet de recherches
actives les lasers ou des méthodes chi-
miques (Carisolv®) en tant qu’alternati-
ves aux instruments rotatifs.
Le diagnostic des caries occlusales
en denture de lait
DrP. Francescut, lauréate du prix Rudolf
Hotz 2001
Le diagnostic précoce des caries est une
exigence fondamentale pour éviter des
traitements complexes. Le diagnostic de
la carie occlusale non apparente est tou-
tefois une tâche complexe qui peut être
hautement subjective, et les incertitudes
inhérentes qui y sont associées peuvent
donner lieu à des décisions très diffé-
rentes en matière de traitement. Ceci est
d’autant plus important que la fluoration
systématique augmente la dureté des
couches superficielles des tissus den-
taires durs, mais pas de celles plus en
profondeur.
Les méthodes de diagnostic convention-
nelles (inspection visuelle, sonde, loupe)
comportent des limites notamment
quant à leur capacité de déceler les caries
débutantes. Les radiographies bite-wing
ne sont valables que pour le diagnostic
des lésions ayant atteint la dentine.
Les mesures de la fluorescence quantita-
tive induite par laser représentent à ce
propos une amélioration appréciable par
rapport aux méthodes de diagnostic clas-
siques, surtout sur le plan de la sensibili-
té et de la reproductibilité. Le système de
fluorescence laser DIAGNOdent®, mesu-