DOSSIER DOCUMENTAIRE Document 1 La culture adolescente est là et bien là, se moquant des frontières sociales et des barrières géographiques. Elle s'affirme à partir des années 60, dans ce fameux temps des « yé-yé » qui est aussi celui des « copains ». Elle semble alors promise à un bel avenir. « Chantant leur culture », les adolescents se détournent de leurs appartenances sociales, se posent en nouvelle « génération sociale ». Mais surviennent les événements de mai 1968 qui, d'un coup, réhabilitent - pour mieux les dissocier - deux jeunesses : l'une scolarisée (favorisée), l'autre (déjà) au travail (plus défavorisée). C'en est fini de la culture adolescente qui, au mieux, devient « sous-culture » ou « contre-culture ». Les années 70 - années du chômage -, oubliant l'univers culturel de la jeunesse, ne semblent avoir d'yeux que pour les jeunes des milieux populaires - les plus atteints, il est vrai, par la crise de l'emploi. Les sociologues donnent le ton et effacent de leurs préoccupations les approches plus « culturalistes » du monde adolescent. L'entrée dans le monde adulte est leur seul souci. L'arrivée, au début des années 80, de nouvelles pratiques culturelles (rap, tag) permet de rouvrir le dossier d'une culture spécifique aux adolescents. Culture de banlieue que l'on désigne communément sous le nom de culture hip-hop. Culture des beaux quartiers, avec certaines pratiques sportives comme le skateboard, ou musicales comme le hard-rock, qui exerce son attrait principalement chez les jeunes des couches moyennes. Pourtant, au-delà des particularismes sociaux et géographiques, révélateurs d'une très large palette de pratiques culturelles, c'est bien une culture adolescente qui se dessine en filigrane de ces multiples façons de faire et d'être, c'est-à-dire [ ... ] un style de vie qui imprègne et unifie toutes les attitudes et comportements d'un groupe donné. Michel Fize, le Peuple adolescent, Julliard, 1994. Document 2 Document 3 Portrait de la jeunesse La jeunesse n'est qu'un mot", notait en 1978 le sociologue Pierre Bourdieu. Le débat public sur le sort des générations tend à occulter les distinctions profondes qui existent en leur sein. Tous les baby-boomers ne sont pas des golden boys, et tous les jeunes ne sont pas au chômage au sortir de leurs études. L'élévation du niveau de vie et l'adoption de certaines normes de consommation commune occultent des situations sociales profondément divergentes. […] "Si le cadre est commun à tous, les jeunes sont loin d'être tous logés à la même enseigne", estiment Christian Baudelot et Roger Establet: "Les protections sont différenciées selon les groupes sociaux et l'aide que l'on peut attendre de la famille: aide matérielle, aide relationnelle et mobilisation de réseaux, aide intellectuelle dans le soutien aux études." Quoi de commun à 20 ans, hormis le portable et le jeans, entre l'intérimaire du bâtiment et l'élève d'une grande école dont les parents financent les études? Emploi, logement, santé..., pour partie, les jeunes sont d'abord confrontés aux problèmes de l'ensemble de la population de même milieu social: "En aucun cas, les jeunes d'aujourd'hui ne peuvent être considérés comme un groupe social à part, qui serait orienté par des systèmes de valeurs étrangers à l'ensemble des autres groupes d'âge", poursuivent-ils. Premières victimes de la crise. Les différences entre les jeunes ne doivent pas conduire à nier qu'ils subissent plus violemment les conséquences de la crise. […] Les violences de novembre 2005 et les manifestations étudiantes contre le contrat première embauche ont mis en scène des milieux très différents, avec des formes de manifestation non moins distinctes. Mais elles témoignent notamment de l'anxiété de l'ensemble d'une jeunesse "en panne d'avenir", selon Christian Baudelot et Roger Establet. La clé du problème réside dans l'amélioration de la situation globale de l'emploi et relève à ce titre de politiques qui ne concernent pas uniquement les jeunes. Ce qui n'empêche pas de chercher à améliorer le sort de ceux qui en sont le plus victimes. […] Louis Maurin, Alternatives Economiques n°256 - Mars 2007 Document 4 Effet d'âge ou effet de génération ? L'exemple des pratiques religieuses est significatif à cet égard. En première analyse, il y a incontestablement un effet d'âge […] Dés lors, on peut suggérer dans une optique proche du sens commun que la proximité de la mort augmente la religiosité*. En réalité, une étude récente démontre que ce qui est en jeu est moins un effet d'âge qu'un effet de génération. Ainsi au milieu des années 80, une ligne de fracture sépare nettement les moins et les plus de 50 ans, c'est-à-dire les personnes nées avant et après la seconde guerre mondiale. Il n'est pas évident que les retraités de la génération du baby boom se caractériseront par la même rigueur morale et la même religiosité que leurs aînés. De même, Henri Mendras dans La Seconde Révolution française, montre que ces retraités socialisés dans les années 60, auront des comportements sensiblement différents des retraités actuels. J. Etienne et alli. Dictionnaire de sociologie, Halier, 1995 * religiosité : être sensible à la religion. Q1 Qu'entend-on par « culture » , sous-culture » et « contre-culture » ? (doc 1)1,5 points Q2 Comment s'est affirmée l'idée de culture adolescente ? (doc1)2 points Q3 Faire une phrase avec le chiffre entouré. (doc2) 1pt Q4 Peut-on distinguer des pratiques jeunes dans le document 2 ? 1,5pts Q5 Expliquez la phrase soulignée ? Donnez des exemples. (doc3) 2pts Q6 Comment expliquer les « effets de génération » ? Donnez des exemples de génération. (doc4) 2pts Sujet : après avoir montré en quoi, concernant les pratiques sociales des adolescents, certains peuvent parler de "culture jeune", vous remettrez en cause l'existence d'une telle culture pour ce groupe. Eléments de corrigé Q1 Qu'entend-on par « culture » , sous-culture » et « contre-culture » ? 1,5 points Culture : ensemble des savoirs, des façons de penser, d'agir et de sentir propres à une société, transmis à ses membres par la socialisation. Sous-culture : ensemble des savoirs, des façons de penser, d'agir et de sentir propres à un groupe social déterminé. Ce sont donc des cultures spécifiques à des sous-groupes à l'intérieur de la société globale. On distingue ainsi des sous-cultures locales (corse, bretonne, francilienne ... ), de classe sociale (ouvrière, bourgeoise ... ), de classe d'âge (adolescente .... ). Contre-culture: sous-culture qui s'oppose explicitement à la culture de la société dans laquelle elle s'insère comme celles des criminels ou des hippies. Q2 Comment s'est affirmée l'idée de culture adolescente ? 2 points Quand sont apparues des pratiques, des volontés de constituer un groupe dépassant les appartenances sociales. C'est à partir des années 60, le temps des « yé-yé » selon l'expression d'Edgar Morin, qu'une nouvelle génération sociale se distingue par certaines croyances, certaines pratiques (notamment musicales et vestimentaires) et une adhésion plus ou moins grande à certains symboles, rites et mythes. Puis dépassée par les clivages sociaux dans les années 70, c'est seulement au début des années 80 avec l'apparition de nouvelles pratiques sportives, d'expression (musicale, graphique) qu'a émergé à nouveau l'idée d'une culture adolescente (C'est-à-dire d'une classe d'âge particulière). Q3 Faire une phrase avec le chiffre entouré. (doc2) 1pt Sur 100 jeunes de 15 à 29 ans, 96 ont choisi d’écouter de la musique au cours de l’année passée, et cela par les différents technologies du cd, K7 etc. Il y a donc une quasi unanimité sur cette pratique culturelle dans les tranches les plus jeunes de la population. Q4 Peut-on distinguer des pratiques jeunes dans le document 2 ? 1,5pts Il faut remarquer tout d’abord la présence très forte des catégories les plus jeunes de la population sur l’ensemble des pratiques culturelles. D’autre part, les 15-29 se conforment à la moyenne de l’ensemble avec 17% d’entre eux qui pratiquent le théâtre contre 16% tout âge confondu et 41% et 39% respectivement pour la visite du musée. Les autres pratiques, enfin, dominent largement la catégorie la plus jeune : 96% pour l’écoute musicale (75% pour l’ensemble), 41% pour le concert (31 pour l’ensemble) et 78% pour le cinéma quand l’ensemble pratique à 47% seulement et c’est 5 fois plus que les 70-79 ans par exemple. Cet ensemble de pratiques culturelles semble donc imprimer fortement les classes d’âge les plus jeunes. Q5 Expliquez la phrase soulignée ? Donnez des exemples. (doc3) 2pts L’évolution sociale, notamment depuis le début des 30 glorieuses, a été dominé globalement par le progrès et une amélioration sensible des conditions de vie de l’ensemble de la population française. Ainsi en particulier les ménages français ont-ils pu accéder à un certain nombre de consommations réservées jusque là aux catégories les plus élevées. Par exemple en matière d’équipement ménager, de logement mais aussi de santé , et d’équipement et de pratiques culturelles. Si l’on prend les dernières technologies culturelles, il est clair que la possession de téléphones portables ou d’écouteurs MP3 sont des consommations pratiquement unanimes chez les jeunes. Cela dit ces consommations portent en elles des marques d’appartenance sociale très claires : MP3 de Carrefour ou Leclerc et Ipod font partie de 2 mondes différents. On peut avoir la même approche concernant le portable basique gratuit avec l’abonnement ou à carte et la dernière version du téléphone multimédia recevant internet et la télévision. Q6 Comment expliquer les « effets de génération » ? Donnez des exemples de génération. (doc4) 2pts L’approche générationnelle est un type d’analyse originale qui enrichit et dépasse l’analyse par l’âge. Elle s’appuie sur trois principes essentiels : • ce qui unit les membres d’une génération, c’est de vivre la même histoire au même moment de sa vie : chaque génération a son propre calendrier de la vie avec une espérance de vie qui lui est spécifique, mais aussi des périodes de formation initiale plus ou moins longues, etc. ; • chaque génération est « marquée » – souvent pour la vie – par ses expériences initiatrices vécues au temps de sa jeunesse (c’est la notion de « marqueur générationnel »). C’est pourquoi une génération est qualifiée par les faits marquants de ses vingt ans ; l’impact est d’autant plus fort que l’Histoire aura été intense par ses événements ou par ses ruptures ; • chaque génération reçoit en héritage les valeurs transmises par celles qui l’ont devancée, mais au sein des générations les plus récentes, on vit et on apprend désormais davantage avec ses pairs qu’avec ses pères (notion de « mimétisme générationnel»). Une génération est définie comme un regroupement d’individus du même âge, partageant les mêmes valeurs, dont les principales se sont formées au moment de l’adolescence autour d’événements majeurs qui ont marqué ses membres. Sujet : après avoir montré en quoi, concernant les pratiques sociales des adolescents, certains peuvent parler de "culture jeune", vous remettrez en cause l'existence d'une telle culture pour ce groupe. I Les pratiques des jeunes peuvent amener à l’idée d’une « Culture jeune » I-1Une culture distinctive des autres générations I-1-1 Les bases d'une culture distinctive 1 (doc1 et Q 1et 2) I-1-1-1 Sous-culture/contre-culture. I-1-1-2 Des pratiques ostentatoires. I-1-2 L'exemple des pratiques adolescentes (doc 2 et Q 3 et 4 ) I-1-2-1 L'écoute musicale. I-1-2-2 Les autres particularités. I-2 Une culture identificatoire II-2-1 Les bases d'une culture identificatoire II-2-1-1 Homogénéité culturelle et acculturation II-2-1-2 Un mode de transmission particulier (la socialisation). II-2-2 L'exemple de la culture adolescente (doc 1) II-2-2-1 L'histoire de son apparition et de son identification. II-2-2-2 Socialisation et sociabilité adolescentes. II Mais la réalité sociale montre qu’il faut relativiser cette approche II-1 Les clivages sociaux traditionnels semblent dominer (doc 3 et Q 5 ) II-1-1 Malgré des conditions objectives les unifiant (allongement des études, rentrée plus tardive dans la vie active, chômage)… II-1-2 …les différences sociales sont largement héritées… Inégalité devant le travail ou le chômage Inégalité devant les conditions d’accès aux études (méritocratie) Inégalité dans les réseaux sociaux II-1-3…et expliquent des réactions qui pour être fortes n’en sont pas moins différentes les banlieues en novembre 2005 le CPE au printemps 2006 II-2 Il existe des effets de génération (docs 1 et 4 et Q 6) II-2-1 Des effets de génération… Distinction effet d’âge et effet de génération Caractérisation de l’effet de génération II-2-2 ….entraînent des évolutions de normes et valeurs Certaines classes d’âge sont marquées par ce qu’ils ont connu dans leur adolescence… ….et entraînent une rupture avant/après Exemples : années folles, les 30 glorieuses, les soixante-huitards, etc…