Article scientifique et pédagogique
Vol. 108 - Octobre 2014 Bernard POURPRIX
Union des professeurs de physique et de chimie 1233
équivalente à la spécification de la trajectoire de l’électron. De même, en mécanique
quantique, l’ensemble des fréquences, des amplitudes et des phases du rayonnement
émis par l’atome peut être considéré comme une description complète de l’atome.
Les coordonnées de l’électron ou, ce qui revient au même, les coefficients de Fourier
du mouvement orbital sont remplacés par un ensemble de paramètres correspondants.
Comme ce n’est plus le mouvement de l’électron sur son orbite qui est vu à l’origine
du rayonnement, mais la transition de l’atome entre deux états stationnaires, chacun
de ces paramètres est associé avec deux états stationnaires de l’atome, et il mesure la
probabilité de transition de l’atome d’un état à l’autre. Un ensemble de coefficients de
ce type est comparable à une matrice.
Pour préciser ces paramètres, on s’appuie sur le principe de combinaison de
Ritz, selon lequel la fréquence de chaque raie d’un atome se présente sous la forme
d’une différence de deux termes :
mn
o
. La totalité des raies de l’atome peut
donc être décrite au moyen d’un ensemble de nombres rangés dans un tableau carré à
double entrée, où chaque ligne et chaque colonne correspondent à un état stationnaire.
Puisque chaque raie possède une intensité, une fréquence et une phase, les éléments
de matrice en question sont des nombres complexes de la forme exp
t2
mn mn
ro
.
Le nombre situé au croisement de la ligne m et de la colonne n est représentatif de
la raie correspondant à la transition entre les états stationnaires m et n. À chaque
variable définissant le mouvement en mécanique classique (coordonnées de position q,
moment p, énergie E , etc.), on peut donc faire correspondre une matrice (q, p, E , etc.)
en mécanique quantique. Dans l’intention de construire une mécanique quantique en
correspondance la plus étroite possible avec la mécanique classique, on cherche quel est
l’analogue quantique de la multiplication des séries de Fourier. On en vient ainsi au
produit de matrices au sens de l’algèbre linéaire.
L’élément caractéristique de la théorie quantique, la constante de Planck, s’intro-
duit lors de la transcription des conditions de quanta de Bohr et Sommerfeld. Partant
de la forme donnée à ces conditions par Kuhn et Thomas, c’est-à-dire une relation
entre les coefficients de Fourier des coordonnées q et des moments p, on obtient
l’équation de matrices pq qp
–r
=. Ainsi la constante de Planck se manifeste, au
niveau du formalisme, par le fait que les matrices p et q correspondant à des variables
canoniquement conjuguées au sens de Hamilton ne sont pas permutables. En résumé, la
mécanique quantique consiste en un formalisme d’équations qui sont étroitement ana-
logues aux équations de la mécanique classique, avec la différence fondamentale que les
variables dynamiques, parce qu’elles satisfont à des conditions quantiques, n’obéissent
pas à la loi commutative de la multiplication.
Au début, les auteurs de la mécanique des matrices laissent entendre qu’il est
impossible de fournir une interprétation intuitive, visualisable, de cette théorie à l’aide
des concepts spatio-temporels habituels. Erwin Schrödinger considère cela comme