Importance de la Neuro-Nutrition pour une prise en charge personnalisée des troubles anxieux dépressifs Professeur Olivier Coudron Directeur et responsable des formations du diplôme universitaire « alimentation santé et micro nutrition » faculté de médecine pharmacie de Dijon Cofondateur et responsable de l’institut SiiN (institut scientifique pour une nutrition raisonnée) La Neuro-Nutrition discipline médicale moderne La Neuro-Nutrition est une discipline médicale au carrefour des neurosciences, de la nutrition et de la psychologie moderne. Elle offre aux praticiens des outils conceptuels, diagnostiques et thérapeutiques pour mieux prendre en charge de façon alternative, scientifiquement validée et très pratique un grand nombre de situations de souffrance et de troubles neuropsychiatriques. La Neuro-Nutrition a pour objectif la satisfaction des besoins essentiels du cerveau et du psychisme. Elle vise une optimisation des fonctions cérébrales et des fonctions psychiques en vue d’un état de bien-être et de bonne santé. Ses champs principaux d’application sont la prévention, la prise en charge mais également l’accompagnement de nombreuses autres thérapeutiques avec lesquels elle entre en synergie. 12 besoins fondamentaux du cerveau et du psychisme humain : Afin d’exprimer pleinement son potentiel de bien-être et de bonne santé et de faire face aux demandes d’adaptation et de performance permanentes, le cerveau et le psychisme humain ont un certain nombre de besoins fondamentaux, de nourritures essentielles. On distingue des nourritures matérielles (l’alimentation) mais également des nourritures tout aussi indispensables notamment neurosensorielles, affectives, psychologiques et relationnelles…. Succinctement et de façon pratique, on peut résumer les besoins de la façon suivante : 1. Les besoins nutritionnels et alimentaires : a. une assiette-santé optimale du cerveau b. un statut micronutritionnel optimale des neurones c. une chronobiologie nutritionnelle adaptée 2. Les besoins corporels : a. un temps de sommeil suffisant b. un respect des rythmes biologiques c. un équilibre mouvement-activité/ repos-relaxation 3. Les besoins sensoriels et émotionnels : a. Des sensations stimulantes (bruit, sont, lumière…) b. Des sensations agréables et du plaisir c. Des émotions positives 4. Les nourritures psychiques : a. Des pensées fonctionnelles et positives b. Des états de conscience élargie, de méditation, du ressourcement c. Un tissu relationnel ouvert et riche (relation à soi, aux autres, à l’univers…) Neuro-Nutrition et trouble anxio-dépressif Les trouble anxio-dépressifs constituent un domaine complexe et hétérogène de la pathologie psychiatrique. Au sein même des troubles anxieux ou des troubles dépressifs, il existe une grande disparité de situations cliniques, de support physiopathologique, de terrains particuliers et de patients ayant chacun leur histoire et leur profil. Cette diversité impose une approche personnalisée pour une meilleure prise en charge. La démarche de la Neuro-Nutrition se déroule en 3 étapes successives dans la prise en charge : 1. étape de diagnostic, d’évaluation et de score 2. étape de rééquilibrage des dysfonctions, déficits et carences éventuelles 3. étape de rééducation et prévention à long terme L’étape d’évaluation et de personnalisation : Dans un premier temps, nous effectuons une évaluation personnalisée de la problématique mais également de l’individu. Ainsi, nous établirons une évaluation des troubles en s’appuyant sur des échelles cliniques validées (échelle d’anxiété HAD , échelles de dépression BDI…) Mais également une évaluation « dimensionnelle et fonctionnelle » notamment par un repérage clinique des dysfonctions des principaux neurotransmetteurs impliqués dans ces troubles (troubles de la dopamine, noradrénaline, sérotonine, mélatonine et GABA). (Échelle DNSM®) des bilans biologiques peuvent éclairer le thérapeute à ce stade (Profils des acides gras, dosage de micronutriments, fer, vitamine D… Brainscreen..). L’étape de rééquilibrage et de correction thérapeutique : Dans un second temps, le thérapeute propose des solutions adaptées parmi la « boite à outils » de solutions thérapeutiques dont il dispose (conseil nutritionnel, prescription de compléments alimentaires, phytothérapie, acupuncture, conseils d’hygiène de vie, cohérence cardiaque, remise en mouvement, luminothérapie, chrono thérapeutique, prescription psychologique…). L’étape de consolidation et de prévention : Dans un troisième temps, le patient est invité à mettre en place une nouvelle attitude et un nouveau style de vie, pas à pas, en fonction de sa personnalité, de ses attentes et de son « style personnel ». Cette dernière étape peut se pratiquer parfois en petits groupes de travail de 4 à 10 personnes). Elle s’appuie alors sur des conseils d’alimentation santé, de psychologie de 3e vague, de pratique de yoga, méditation, de médecine environnementale… Il s’agit là plus d’une éducation thérapeutique visant à la prévention des rechutes et récidive (exemple la pratique de la Mindfullness ou méditation est bien validée dans la PREVENTION des rechutes dépressives). Quelques éléments thérapeutiques nutritionnels de la NeuroNutrition applicables dans les trouble anxio-dépressif Alimentation santé et assiette optimale du cerveau : Plusieurs publications montrent clairement que l’adoption d’un modèle alimentaire de type méditerranéen-crétois protège des troubles anxio-dépressifs dans un rapport de 30 à 40 % de moins par rapport à une alimentation type occidentale « modern diet ». Votre ordonnance : alimentation très richement végétale, variée et diversifiée. Consommation régulière de légumineuses, une assiette « oméga 3 » avec satisfaction des besoins essentiels en EPA, et DHA, un rapport oméga 6/oméga 3 <4. Une assiette antioxydante, une réduction des produits neurotoxiques, des acides gras trans industriel et sucre rapide… (Assiette « IN® »). Statut optimal en micronutriments essentiels du cerveau : Les déficits voire les carences de certain micro nutriments sont fréquents. Ils sont plus fréquents encore chez les patients vulnérables présentant les troubles anxieux-dépressifs. Une attention particulière sera portée à certain micronutriments notamment : le magnésium, le fer, le zinc et le sélénium. Sur le plan vitamines : vitamines D, vitamines du groupe B (plus souvent folates et B12) mais également la vitamine K1. Sur le plan des acides gras essentiels la satisfaction des besoins nutritionnels en acides gras oméga 3 longues chaîne et plus spécialement DHA… Votre ordonnance : Statut biologique initial pour évaluation de la vitamine D, du sélénium, du fer…Compléments alimentaires adaptés aux déficits du patient Chronobiologie nutritionnelle L’optimisation fonctionnelle des neurotransmetteurs s’intègre dans le respect de rythmes biologiques circadiens. Des travaux antérieurs de Richard Wurtman montrent que l’alimentation exerce un effet sur la production de certains neurotransmetteurs. Ainsi, le ratio protéines/glucides du repas est un outil efficace pour orienter la production cérébrale en dopamine ou en sérotonine. Votre ordonnance : La mise en place d’un petit déjeuner riche en protéines et glucides complexes, pauvres en sucreries et sucres raffinés associé à un goûter et/ou repas du soir ayant un rapport protéines/glucides bas, riche en légumineuses et légumes permettront l’optimisation chronobiologique de ces neurotransmetteurs. Quelques ordonnances et situations particulières : Patient jeune avec troubles anxieux généralisés Alimentation santé, compléments alimentaires de magnésium : 400 mg à 800 mg/jour (bien assimilé et bien toléré), recherche et corrections éventuelles d’une dysfonction de l’écosystème intestinal, pratiques 3 fois par jour de 5 minutes de cohérence cardiaque Jeune femme ayant un premier épisode de dépression majeure Bilan biologique et évaluation de son statut en fer, corrections éventuelles de son déficit Évaluation clinique et éventuellement biologique des neurotransmetteurs perturbés, le plus souvent sérotoninergique : corrections éventuelles apport d’acides aminés L tryptophane 1000 mg/jour et/ou Alphalactalbumine 50 g en une de prise loin des repas, recherche d’un déficit en sommeil et corrections éventuelles. Éventuellement phytothérapie initiale (extrait de safran ou millepertuis selon le profil) Homme de 40 ans dépression récidivantes (3e épisode) Rechercher un manque de satisfaction du besoin de sommeil (dette en sommeil) et correction éventuelle, recherche systématique d’un déficit en folates (vitamine B 9) et corrections si besoin : 400 µg/jour à 800 µg/jour, évaluation des dysfonctions des neurotransmetteurs et corrections adaptées aux patients : si troubles dopaminergiques : petit déjeuner protéiné et prescription d’acides aminés L tyrosine 1000 mg/prise le matin, si troubles sérotoninergiques : prescription d’Alphalactalbumine en milieu d’après-midi et soirée. En cas de demande de satisfaction des besoins en acides gras oméga 3, prescription de compléments alimentaires du de poisson 1 g/jour plus antioxydants. Femme de 50 ans, dépression chronique malgré traitement antidépresseur bien conduit : Rechercher systématiquement une dette en sommeil ou une désadaptation de son chrono type vis-àvis de ces heures de sommeil. Rechercher systématiquement un trouble de l’écosystème intestinal et le corriger si besoin (recherche d’intolérances alimentaires, hyper perméabilité intestinale…). Évaluation et corrections des déséquilibres des neurotransmetteurs (sérotonine, mélatonine, dopamine…). Évaluation et recherche d’un diagnostic différentiel notamment état de stress posttraumatique, stress chronique et burnout.