©Cécile Marc Poison Lot Vekemans Mise en scène Dag Jeanneret Production Cie In situ Coproduction sortieOuest / Printemps des Comédiens Poison Lot Vekemans Traduit du néerlandais par Alain van Crugten Le texte est édité aux Editions Espaces 34 Mise en scène Dag Jeanneret Avec Sophie Rodrigues et Christophe Reymond Scénographie Cécile Marc Lumières Christian Pinaud Régie générale Christophe Robin ©Marie Clauzade La Cie In situ est conventionnée par la DRAC Languedoc-Roussillon et associée à sortieOuest/Béziers, Domaine départemental d’art et de culture de Bayssan, scène conventionnée pour les écritures contemporaines. Poison Un homme et une femme qui sont séparés et qui ne se sont pas revus depuis plusieurs années, se retrouvent dans la salle d’attente d’un cimetière en passe d’être déplacé, dans la campagne des Flandres. L’un des deux a décidé qu’il le fallait. Pour tenter -peut-être- de vivre un peu moins mal à l’avenir. Ils ont en commun un poids terrible, un souvenir lancinant qui a brisé le cours de leur vie. Reprenant contact avec beaucoup de pudeur et de difficulté, ils arrivent pourtant, peu à peu, à aborder leur passé douloureux. Ce qui les a unis, ce qui les a séparés, cet enfant qu’ils ont eu ensemble, puis perdu. Comment tenter de construire un nouvel avenir ou au moins continuer à vivre. Leurs paroles creusent ce qui n’a jamais pu être dit au moment du drame ou même après. A l’issue de cette retrouvaille-confrontation ils repartiront chacun de leur côté, un peu apaisés, peutêtre. Poison, extrait LUI : Si tu ne ressens que du chagrin quand tu penses à quelqu'un Quand tu penses à quelqu'un que tu as tellement… Incroyablement aimé Et si après ce chagrin rien de nouveau n’arrive Est-ce qu’il n’y pas quelque part… une grande erreur ? ELLE : Je suis triste j’ai du chagrin ! C’est mon droit LUI : Ah oui ? ELLE : J’ai perdu un enfant Nous avons perdu un enfant Alors on a le droit d’avoir du chagrin Je trouve qu’on a le droit d’avoir du chagrin LUI : Et suppose que tu aies un autre enfant ELLE : Je n’en ai pas LUI : Mais suppose Est-ce qu’il n’aurait droit qu’à une mère triste, lui ? Ou à un père triste, ELLE : Je n’ai pas envie de tes hypothèses LUI : Ce n’est pas une hypothèse ELLE : Tu te souviens que quelqu’un nous a conseillé d’en prendre un autre ? En « prendre » un autre ! Comme s’il s’agissait d’un chat LUI : Nous aurions peut-être dû le faire ELLE : Tu n’es pas sérieux ? LUI : Si, je suis sérieux ELLE : Tu aurais… LUI : Pourquoi pas? Est-ce que ce poids diminue si tu ne continues pas à vivre ? Non Est-ce que ça diminue si tu continues à vivre ? Peut-être pas Mais ça vaut la peine d’essayer … A propos de Poison « Il faut vivre… un peu de temps encore, et nous saurons pourquoi cette vie, pourquoi ces souffrances… » Olga, dernière réplique des Trois sœurs de Tchekhov Il y a des œuvres qui, par leur puissance d’évocation, leur liberté formelle, leur profonde inscription dans l’époque et en même temps leur capacité à continuer à parler du monde quelques siècles ou quelques décennies après le temps de l’écriture, nous font rêver et nous tirent l’oreille. En vrac et me concernant, L’Orestie, les Œdipe, Le Roi Lear, Nathan le Sage, Le Misanthrope, et plus près de nous les pièces de jeunesse de Brecht, Tête d’Or, Victor ou les enfants au pouvoir, Le Retour au désert, les pièces de Pasolini, celles de Gabily, Le Pays lointain de Lagarce. Et puis il y a d’autres œuvres, toutes aussi importantes et fondatrices mais moins détonantes quant à leur forme. Tout au moins aujourd’hui. Des œuvres du 19ème siècle ou du tout début du 20ème, Ibsen, Strindberg, Tchekhov pour ne parler que des plus grands. C’est, je crois, de cette illustre lignée que vient Lot Vekemans, auteure néerlandaise encore très peu jouée en France. Poison parle magnifiquement du monde, des gens, de nous, de nos petits bonheurs, de nos profondes difficultés à exister, du travail acharné sur la résilience, du «métier de vivre » comme disait Cesare Pavese. Poison dont j’ai fait une première lecture publique au Printemps des Comédiens en 2011 puis un chantier de création à sortieOuest/Béziers en novembre 2014, est une pièce en apparence simple, limpide même. Presque trop compréhensible de prime abord. En tous cas de facture classique et c’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai hésité un moment avant de me décider à la monter. Et pourtant la pièce est d’une intensité dramatique peu commune, digne de Bergman. Alors pourquoi ? Sûrement à cause d’une construction imparable, d’un art du dialogue consommé et surtout de cette très ancienne chose du théâtre, née au début du siècle passé, à savoir qu’il y a les mots inventés par l’auteur et attribués aux personnages et… tout ce qu’il y a dessous les mots et qui est au moins aussi important que les paroles entendues. Vieilles lunes ? Je ne crois pas. Il ne s’agit pas ici de psychologie à la française mais de vérité et du mystère des êtres. D’aller chercher très profondément en soi pour faire remonter à la surface les existences cachées des personnages, les ressorts inavoués, les peurs ancestrales et les douleurs tues. C’est pour cette raison qu’il était indispensable de proposer la pièce à des comédiens certes accomplis et virtuoses mais travailleurs et humbles, Sophie Rodrigues et Christophe Reymond. Nous avons, lors du chantier de création, déjà vérifié dans les corps cette nécessité de profondeur et d’abandon, cette descente vertigineuse dans les sinuosités de l’âme. Il nous reste maintenant lors de la reprise des répétitions à continuer ce mouvement pour que -paradoxalement- la légèreté apparaisse, la légèreté du désespoir. Dag Jeanneret ©Marie Clauzade ©Marie Clauzade Interview de Lot Vekemans pour la brochure de saison du Nouveau Théâtre de Gand 2010 « Lorsque Elsie de Brauw interprétait de Sœur de, la pièce précédente de Lot Vekemans, elle et moi nous sommes posés la question d’une future collaboration. J’ai demandé à Elsie ce que pourrait être le thème d’une prochaine pièce, à quoi elle a répondu tout à trac : « Un homme et une femme qui ont perdu en enfant. » Tous ceux qui étaient autour de nous en sont restés baba. C’était un sujet terrible, chacun peut se rendre compte que la perte d’un enfant est l’une des choses les plus affreuses qui puissent arriver dans une vie humaine. De plus j’avais pu observer dans mon propre entourage l’impact d’un semblable drame. J’ai d’abord hésité, mais l’idée ne m’a pas lâchée. La nuit suivante, je n’en ai pas dormi, la question tournait dans ma tête : « Qu’est-ce que je pourrais bien faire de ce thème ? » J’ai trouvé l’ouverture le lendemain, en écrivant déjà les premières lignes, en me posant aussi la question : que peut-on faire quand le destin fait disparaître d’un seul coup tout ce à quoi vous tenez ? Je suis arrivée assez vite à la conclusion qu’il n’y a pas une seule manière de réagir à une telle catastrophe. Même sans tenir compte de tous les avis et conseils bien intentionnés que les gens de votre entourage vous donnent en un tel moment. La manière d’assimiler et éventuellement surmonter une telle douleur est essentiellement une affaire individuelle et c’est précisément cela qui peut donner une intéressante tension dramatique. C’est ce qui m’a fait choisir de présenter un dialogue entre un père et une mère, deux personnes qui ont vécu ensemble et sont maintenant séparées, tout en portant ensemble tout le poids de leur passé, de la perte de leur enfant. Je n’avais pas l’intention de manipuler des archétypes : pour moi, le rôle de l‘homme n’est pas un symbole de l’homme en général, de même pour le rôle de la femme. Cependant il y a des différences auxquelles vous ne pouvez pas échapper, même si vous le désirez : la distinction entre « typiquement masculin » et « typiquement féminin ». Nous avons tous tendance à faire de ces généralisations. Mais la chose est loin d’être nette : par exemple, en écrivant le rôle de l’homme j’ai eu longtemps l’impression que je lui faisais dire des choses « typiquement féminines », jusqu’à ce que, après une première lecture, plusieurs personnes m’aient dit qu’elles trouvaient son attitude typiquement masculine. L’écriture de la pièce s’est faite en plusieurs phases. J’ai d’abord beaucoup avancé dans l’élaboration du rôle de la femme, ce qui était évidemment en rapport avec le fait que j’écrivais ce rôle et cette pièce avant tout pour Elsie de Brauwer. J’entendais sa voix tandis que j’écrivais et cela m’aidait énormément. La différence la plus importante entre l’homme et la femme dans la pièce est que l’une est tournée vers le passé et l’autre veut regarder vers l’avant, mais n’ose pas encore vraiment le faire. L’homme voudrait entamer un nouveau chapitre, tout en hésitant, en se demandant si c’est bien possible. Si c’est permis ! Il a une nouvelle relation avec une femme, celle-ci attend même un enfant. Mais en même temps, il semble encore en demander l’autorisation à son ex-femme, alors que celle-ci est encore entièrement plongée dans le passé. Elle ne peut et ne veut pas se détacher du drame de la perte de l’enfant. Les deux sont en quelque sorte dos à dos, chacun regardant d’un autre côté. C’est pourquoi on peut aussi considérer leur dialogue comme deux récits existants côte à côte. Ils tentent bien de se rapprocher mais cela ne réussit que dans une certaine mesure. » Supposons que je n’aie jamais vu une de vos pièces ? A quoi pourrais-je la reconnaître ? « Il est très difficile de dire de son propre travail comment et pourquoi on peut le reconnaître. Ce que je peux dire, c’est qu’il est très important pour moi de savoir comment ce que j’écris sonne. En écrivant, j’entends mon texte. C’est une question de rythme, de musicalité. J’écris de façon assez dépouillée. Si je peux omettre un mot, je le fais. Donc, à première vue, cela paraît très ordinaire, très simple, très accessible, mais ce ne l’est pas toujours. C’est comme une partition dont les notes sont claires, mais dont la profondeur ne se perçoit que si l’on s’y plonge entièrement. Lors de la répétition d’une de mes pièces, j’ai pour la première fois entendu un acteur formuler cela. Il disait : On est à la table pour la première lecture et on pense : chouette, c’est facile ; le rythme, la légèreté, l’humour, tout s’y trouve déjà. Mais si on pense cela, on reste à la surface des mots, qui ne sont ancrés dans rien. C’est quand on commence à travailler le texte qu’on tombe très profondément dans la psychologie, qui est sous les mots. Mais c’est un piège que d’y rester. Il faut s’enfoncer dans ce marécage, mais pour pouvoir ensuite ressortir à la surface des mots. C’est une chose que j’ai aussi entendue à propos de « Poison », ce doit donc être vrai. Cela vient aussi de ce que je joue avec le paradoxe. On dit bien des choses avec les mots, mais les mots cachent aussi bien des choses. Et la manière dont vous faites cela en dit long également. C’est surtout sur la scène que cela marche magnifiquement, c’est cela, le miracle du théâtre. Il y a aussi une constante dans ma thématique. Mes textes parlent, en réalité, toujours de gens qui doivent affronter le destin, quelque chose de plus grand qu’eux, quelque chose qu’ils n’ont pas choisi. Il s’agit souvent de la mort, mais pas seulement. L’histoire prend un nouveau tour et le personnage doit y trouver un nouveau chemin. Et pour ce faire, il n’y a pas de manière unique, c’est ce que je montre souvent. Il n’y a pas de recette pour adapter le destin à votre volonté. Le destin est précisément là pour vous faire voir une autre face de la vie. » ©Marie Clauzade L’auteure Lot Vekemans, née en 1965, a fait des études de géographie sociale à l’Université de Utrecht puis a suivi les cours de l’école professionnelle d’écriture « ‘t Colofon ». Depuis 1997, elle écrit des textes de théâtre pour la jeunesse et pour adultes. Elle crée pour le théâtre Artemis Geen gewoon meisje (Pas une fille ordinaire), Hé payo pour Het lab van de Berenkuil, Truckstop pour le MUZtheater, Vreemde vogels (Etranges volatiles) pour le Theatergroep Kwatta, Licht ! (Lumière !) pour Barra, les monologues Zus van (Sœur de) et Judas étaient destinés à sa propre compagnie MAM ; enfin Sommige Mensen (Certaines personnes) pour Platform Theater auteurs et Le dacourt pour le Zuidelijk Toneel. Elle a reçu en 2005 le prix « Van derVies » (décerné tous les trois ans au meilleur texte théâtral de la période écoulée) pour Truckstop et Zus van. Ces pièces ont été publiées aux Editions Espaces 34 sous les titres Truckstop et Sœur de en 2010. Les Editions Espaces 34 poursuivent l'accompagnement de cette auteure par la publication d'une troisième pièce Poison en 2011. Celle-ci, dans sa langue originale, a reçu le Prix d’écriture théâtrale de la Taalunie, qui réunit Pays-Bas et Flandre, en 2010. Ses œuvres sont traduites et jouées dans plus de 15 pays. Elle a fait en 2012 ses débuts de romancière avec Une robe de mariée de Varsovie. Truckstop va être créé par Arnaud Meunier, directeur de la Comédie de Saint-Etienne au prochain Festival IN d’Avignon. Le metteur en scène Comédien puis metteur en scène, Dag Jeanneret a joué dans une trentaine de spectacles notamment avec Bérangère Bonvoisin et Philippe Clévenot, Philippe Delaigue, Olivier Maurin, Patrick Haggiag, Christian Esnay, Christian Rist, Alain Béhar, Jean-Marc Bourg, Jean-Louis Jacopin, Carlos Wittig, Louis-Guy Paquette, Denis Lanoy, Stéphane Laudier… En janvier 2002, il rejoint le collectif de direction de la Cie In situ, conventionnée par la DRAC Languedoc-Roussillon depuis 2002, en résidence au Théâtre de La Cigalière à Sérignan entre 2003 et 2005, et dès 2007 associée étroitement à la direction de sortieOuest, domaine départemental d’art et de culture de Bayssan, à Béziers. Il met en scène une vingtaine de spectacles dont Le Pain dur de Paul Claudel, Monsieur de Pourceaugnac de Molière et FUCK YOU Eu.ro.Pa ! de Nicoleta Esinencu, tous trois coproduits par le Théâtre des Treize Vents CDN de Montpellier, La Dernière Balade de Lucy Jordan de Fabrice Melquiot, Cendres de cailloux de Daniel Danis, Partition de Jean-Yves Picq, Au bout du comptoir la mer ! de Serge Valletti, Les secrets d’une nuit d’Yves Rouquette, Une nuit au jardin d’Emmanuel Darley, Stabat mater furiosa de Jean-Pierre Siméon. Occident de Rémi De Vos, créé à l’automne 2008 à sortieOuest/Béziers, a tourné nationalement jusqu’au printemps 2011 (60 représentations dont une série au TGP de Saint-Denis). Repris avec succès au Théâtre des Halles pendant le Festival d’Avignon 2012, il tourna à nouveau en France sur les saisons 13-14 et 14-15 et 15-16 et s’arrêta un mois au Théâtre du Rond-Point en mars 2014. Le spectacle s’arrêtera définitivement en mars 2016 à Marseille après 133 représentations. Radio clandestine, mémoire des Fosses Ardéatines d’Ascanio Celestini, 1ère en France, a été créé en novembre 2010 à sortieOuest/Béziers. Exploité sur deux saisons, il y aura eu 56 représentations dont une série à Vidy-Lausanne au printemps 2012. En 2013, il a mis en scène avec la Cie In situ Tambours dans la nuit de Bertolt Brecht, dans une nouvelle traduction commandée à Hélène Mauler et René Zahnd. Création à sortieOuest/Béziers le 9 novembre 2013 puis tournée nationale. 20 représentations. En novembre 2014, il a dirigé un chantier de création à sortieOuest/Béziers sur Poison de Lot Vekemans, pièce néerlandaise inédite, avec Hervé Briaux et Sophie Rodrigues. Ce spectacle a été recréé au Printemps des Comédiens 2016 avec Sophie Rodrigues et Christophe Reymond. A l’été 2015, au Festival del Catet, il a mis en scène Souvenirs assassins de Serge Valletti, qui sera exploité sur la saison 16-17. En janvier 2016, il dirigera un chantier de création à sortieOuest/Béziers sur La Brebis galeuse d’Ascanio Celestini. Il a été membre du comité de lecture des Editions Théâtrales de 1989 à 1992. Il a été membre du « Comité d'experts » de la DRAC Languedoc-Roussillon de 2006 à 2012. Il est conseiller artistique du Printemps des Comédiens depuis 2011 et de sortieOuest depuis 2006. Il est intervenu à deux reprises à l’ENSAD de Montpellier et a fait partie du jury d'entrée de l’avantdernière promotion en 2013. Sophie Rodrigues FORMATION : École du Théâtre National de Strasbourg, Conservatoire national de région de Montpellier. Au Théâtre, elle a été l’interprète d’Alain Françon (Ivanov), de Jean-Louis Martinelli (L’Avare, Phèdre, J’aurais voulu être égyptien, Les Fiancés de Loches, Kliniken, Détails), de Lars Nören (Guerre), de Bernard Sobel (Le Pain dur), de Gildas Milin (Anthropozoo, Le Premier et le dernier), de Sylvain Maurice (Dealing with Clair), de Richard Mitou (Les Histrions), de Wladimir Yordanoff (Droit de retour), de Chantal de la Coste (Judith), de Laurent Gutmann (Légendes de la forêt viennoise), de Nicolas Bigards (Traité des passions de l’âme, Nothing hurts), de Véronique Bellegarde (Petites formes autour d’Abel Neves), de Guillaume Delaveau (Peer Gynt), de Gilles Lefeuvre (Ball-Trapp), de Vincent Roumagnac (Kostia), d’Alfred Lot (Alinéa rose), du Groupe Incognito (Le cabaret des Utopies). Elle a joué le répertoire : Racine, Molière, Claudel, Ibsen, Feydeau, Tchekhov, Von Horvath et les contemporains : Lars Nören à plusieurs reprises, Howard Barker, Martin Crimp, Falk Richter, Marion Aubert, Gildas Milin, Alaa Al Aswany, Antonio Lobo-Antunes, Xavier Durringer, Wladimir Yordanoff, Alfred Lot… Au cinéma, elle a tourné dans des long-métrages de Jeanne Herry, Solveig Anspach et Claire Simon, et dans des courts de Benjamin Serrero, Jean-François Buiré, Sophie Kovess Brun et Erwann Augoyard. Christophe Reymond FORMATION : Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris (promotion 1994). Durant sa dernière année d’étude, Georges Lavaudant l’engage pour jouer dans Hamlet à la Comédie Française puis au Théâtre Mogador. A sa sortie du conservatoire en 1994, Stanislas Nordey lui propose de faire partie de la troupe des comédiens permanents du Théâtre des Amandiers de Nanterre que dirige alors Jean-Pierre Vincent pour jouer dans Splendid’s, Ciment d’Heiner Muller et Le songe d’une nuit d’été de W. Shakeaspeare. Il quitte la troupe en 1996 pour aller jouer sous la direction de Philippe Adrien : En attendant Godot, L’Homosexuel ou la difficulté de s’exprimer, Doux oiseau de Jeunesse… Il a également joué sous la direction de : Catherine Marnas : L’Héritage (création) de BernardMarie Koltès au Théâtre de la Ville et Femmes, guerre de Thomas Brasch, Daisy Amias : Les Quatre Jumelles, Claudia Stavisky : Cairn, Dag Jeanneret : Tambours dans la nuit… Il a également mis en scène : La nuit juste avant les forêts de B.M Koltés et La Tour de la défense de Copi au Théâtre de la Tempête. Depuis une quinzaine d’années, il a tourné dans une soixantaine de films pour le cinéma et la télévision sous la direction de : Bent Hamer, Luc Besson, Cédric Klapisch, Pierre Shoendoerffer, José Giovanni, Alain Tasma, Bourlem Guerdjou, Jacques Santamaria, Denys Granier-Deferre, Marc Rivière, Claude Goretta, Gérard Pires, Jean-Marc Moutout, Daniel Janneau, Grégory Robin, Bertrand Van Effenterre, Christophe Barraud, Illiana Lolic, Eric Barbier, Daisy Lamothe, Olivier Py, Frédéric Guelaff, Muriel Breton, Matthieu Taponier, Yves Thomas, Christian Bonnet, Dominique Tabuteau, Benoit D’Aubert, Stéphane Kurc, Christian De Chalonge, Alexandre Pidoux, Dominique Tabuteau, Marc Angelo, Akihiro Hata… Il vient de finir le tournage, comme personnage principal, du premier long métrage de Frédéric Guelaff, Royaume, sortie prévue en 2017. La Cie In situ La Cie In situ est une compagnie de théâtre fondée fin 1999 par Jean Varela, comédien et Christian Pinaud, éclairagiste. Ils sont rejoints quelques mois plus tard par Véronique Do, administratrice puis en 2002 et par Dag Jeanneret, comédien et metteur en scène. Début 2015, Véronique Do les quitte pour entamer d’autres aventures. Auparavant, dès le milieu des années 80, ils avaient déjà participé ensemble ou séparément, en Languedoc et à Paris, à la création de nombreux spectacles et à la fondation de plusieurs compagnies qui inscrivaient, chacune à sa manière, leur pratique dans un théâtre d’art et de service public. Désormais, ces trois personnes dirigent collectivement la Cie In situ, conventionnée par la DRAC Languedoc-Roussillon pour son projet artistique dès 2002 et renouvelée en 2005, 2008, 2011 et 2014. En seize ans d’existence, la Cie In situ a créé 24 spectacles et en a mis un 25ème au répertoire, créé en 1995, à l’époque de la Cie Abattoir (codirigée par Jean Varela et Jean-Marc Bourg) à Sigean dans l’Aude. Dès sa création, la Cie In situ a régulièrement suscité des projets et fait appel à des metteurs en scène extérieurs pour les mettre en œuvre. Cependant, depuis l’arrivée de Dag Jeanneret à la codirection de la Cie, elle privilégie naturellement ses projets de mise en scène. Mais elle continue pour autant à inviter d’autres metteurs en scène qui lui permettent de découvrir de nouvelles manières de travailler, d’aborder d’autres pans du répertoire ou, ponctuellement, de répondre à des commandes. Après Christian Esnay en 2001 et François Macherey en 2003, Jacques Allaire en 2007, Patrick Haggiag a été invité en 2007, 2010 et 2014. Elle est ainsi en accord avec son projet fondateur: ne pas confier à un seul metteur en scène omnipotent la destinée artistique de la Cie mais plutôt l’ouvrir à des esthétiques différentes, souvent cousines mais se distinguant dans leur fabrication et dans leur mode de représentation au public. Se rêver comme une petite fabrique de théâtre, un creuset d’où pourrait émerger des projets singuliers, des compagnonnages éphémères ou durables mais toujours éclairants. Cet éclectisme revendiqué poursuit un seul but : réunir le public, l’élargir, lui permettre de se divertir au sens brechtien du terme. L’inciter, par tous les moyens artistiques, à découvrir des moments de théâtre rares, exigeants, avec la volonté farouche de ne jamais l’exclure mais d’ouvrir des brèches, de déplacer des points de vue, de faire entendre des mondes ignorés et des langues inconnues. Les derniers spectacles de la Cie In situ - Chantier de création sur La Brebis Galeuse d’Ascanio Celestini, direction du chantier : Dag Jeanneret. SortieOuest/Béziers en janvier 2016 - 4 représentations. - Souvenirs assassins de Serge Valletti, mise en scène de Dag Jeanneret. Création au Festival Les Nuits de la Terrasse et del Catet à l’Instant T à Thézan-les- Béziers en juillet 2015. Reprise aux Atypiques des ATP d’Alès en novembre 2015. Exploitation prévue sur la saison 16-17. - Tout passe de Vassili Grossman, mise en scène et adaptation de Patrick Haggiag. Création à sortieOuest/Béziers en janvier 2015. Tournée au Domaine d’O Montpellier. Reprise en tournée nationale en février-mars 2017 (TGP de Saint-Denis, Théâtre des Bernardines, Théâtre royal de Namur). - Chantier de création sur Poison de Lot Vekemans, direction du chantier : Dag Jeanneret. SortieOuest/Béziers en novembre 2014 - 4 représentations. Création le 10 juin 2016 au Printemps des Comédiens. - Tambours dans la Nuit de Bertolt Brecht, mise en scène de Dag Jeanneret. Création à sortieOuest/Béziers en novembre 2013. Co-production : sortieOuest, Treize Vents Montpellier, SN Albi, SN Narbonne, SN Chambéry. Tournée nationale sur la saison 13-14 (Montpellier, Narbonne, Chambéry, Albi, Foix, Alès, Perpignan) - 20 représentations. - Radio clandestine, mémoire des Fosses Ardéatines d’Ascanio Celestini, mise en scène de Dag Jeanneret. Création française à sortieOuest/Béziers en novembre 2010. Tournée nationale et régionale sur les saisons 10-11 et 11-12. (Chambéry, Neuchâtel (Suisse), Auch, Foix, Bagneux, Vienne, Toulouse, Albi, Narbonne, Alès, Montpellier, Ganges, Cornèze, Villeneuve les Maguelone, Uzès, Vidy-Lausanne) - 56 représentations. - Occident de Rémi De Vos, mise en scène de Dag Jeanneret. Création à sortieOuest/Béziers en octobre 2008 - 18 représentations en région sur la saison 2008-2009. Tournée nationale sur la saison 2009-2010 dont une série au TGP de Saint-Denis. Tournée nationale saison 20102011.Reprise au festival Off d’Avignon 2012 au Théâtre des Halles. Reprise en tournée française sur les saisons 12-13, 13-14, 14-15 et 15-16, dont une série longue au Théâtre du Rond-Point en mars-avril 2014 - 130 représentations à ce jour. - Le Barbier de Séville de Beaumarchais, mise en scène de Patrick Haggiag. Création au Festival des Nuits de la Terrasse et del Catet à Thézan-lès-Béziers en juillet 2010. Reprise à sortieOuest puis dans le Grand Tour et en tournée régionale en janvier-février 2011 - 25 représentations. - Stabat Mater Furiosa de Jean-Pierre Siméon, mise en scène de Dag Jeanneret pour le Lycéen tours avec la Scène Nationale de Sète en 2009. Festival des Nuits de la terrasse et del Catet en 2009. Recréation à sortieOuest à l’automne 2010.Tournée à la Scène Nationale de Narbonne en novembre 2011 - 19 représentations. - La Trilogie de la Villégiature de Carlo Goldoni, mise en scène de Patrick Haggiag. Création au Théâtre de Vidy-Lausanne en septembre 2007. Coproduction avec le Théâtre de Vidy-Lausanne, le Cratère Scène Nationale d’Alès, Nuithonie à Fribourg et deux Cie suisses, le Théâtre de l’Ecrou et la Cie des Barbares. Tournée nationale, en Suisse et en région - 38 représentations dont 17 à Lausanne. Presse 13 juin 2016 « Ce Printemps-là fait bien des étincelles Poison, de l’auteure néerlandaise Lot Vekemans et mis en scène par Dag Jeanneret. Un face-à-face terrible, prégnant et poignant, entre un couple séparé après la mort de son enfant. Un théâtre sans effets de manches, centré sur les mots échangés, avec force et douceur, qui dit la douleur, la folie, la vie. Sophie Rodrigues et Christophe Reymond s’aiment et se déchirent dans une économie de gestes qui rend plus perceptibles les non-dits enfouis, s’affrontent, se querellent, rient, tanguent dans ce pas de deux vertigineux. » 14 juin 2016 15 juin 2016 Printemps des Comédiens à Montpellier : le bilan (acte 2) Le 11 juin : Retour au Théâtre d’O à 18 h pour Poison****, de Lot Vekemans, mise en scène par Dag Jeanneret. Un texte difficile et douloureux. Un homme et une femme se retrouvent cinq années après la mort accidentelle de leur enfant. Ce drame a provoqué la rupture du couple. La pièce pointe la façon différente dont réagissent deux personnes devant un évènement tragique qui les frappent dans leur chair. Le risque, avec un tel sujet, est de tomber dans le mélo, dans le pathos. La pièce de Lot Vekemans évite ces pièges. Son écriture minimaliste, intimiste, très contemporaine dans sa simplicité ne laisse pas de place aux dérives. Elle passe au scalpel les émotions pour tenter de débusquer les mystères des réactions de l’âme. Sa composition presque classique en trois parties en souligne la dramaturgie. Comme à son habitude, avec beaucoup d’humilité, Dag Jeanneret signe une mise en scène complétement au service du texte, sans fioriture, aussi efficace et juste que celle d’Occident, une de ses plus grandes réussites. Cécile Marc, pour la scénographique a elle aussi opté pour la simplicité : quatre chaises et des panneaux translucides qui figurent une salle d’attente. Dag Jeanneret communique à ses comédiens son humilité. Christophe Reymond et Sophie Rodrigues jouent magnifiquement les personnages, donnant toutes nuances : tendresse, colère, fragilité. Ils se déchirent, se rapprochent pour mieux s’éloigner apaisés ? Sans doute. Du théâtre nectar. Du théâtre essentiel. Un sans-faute à qui on souhaite une très longue vie. Marie-Christine Harant, L’Art Vues 14 juin 2016 Poison : une mise en scène intimiste pertinente sur la résilience Pays-Bas. Une salle d'attente impersonnelle pour un rendez-vous éprouvant. Un homme, une femme. Un passé. Ils se sont aimés, ont eu un fils, Jacob, fauché par un camion et enseveli non loin de là. Lui est parti un soir de veillée de nouvel an. Un 31 décembre 1999 à 19h10 exactement. Elle ne l'a pas retenu. 30 secondes avant qu'il ne démarre. Une éternité. Six ans plus tard, ils sont là, réunis par un malheureux hasard et la fébrilité les domine. Que se dire après tant d'années ? Comment dépasser l'agressivité et la rancune ? Qu'attend-on de l'autre sinon une délivrance qui est impossible ? Y-a-t-il des recettes-miracle pour se reconstruire ? Peut-on laisser les choses derrière soi ? Est-ce que la souffrance apprend forcément quelque chose ? Est-ce indécent de l'exposer à d'autres ? de tenter de l'exorciser ? Est-ce que le poids d'un drame diminue si l'on continue à vivre ? Est-ce qu'un jour ça peut être comme "avant" ? Autant de questions que soulèvent les deux protagonistes, le cul entre deux chaises - vous nous excuserez l'expression. Dans la feuille de salle, on peut lire cette confidence de l'auteure de la pièce : " Je n'avais pas l'intention de manipuler des archétypes : pour moi, le rôle de l'homme n'est pas un symbole de l'homme en général, de même pour le rôle de la femme.". Reste que le " typiquement masculin" et le "typiquement féminin" se manifestent ici avec acuité... Elle, est tournée vers le passé, lui, vers un futur dont il semble réclamer la validation auprès de son ex-femme. Elle voit en lui "l'imperfection", "une histoire ratée"...Lui retrouve avec émotion la fossette qui l'avait émue lors de leur première rencontre. Il cherche à se libérer des souvenirs trop lourds, elle se fait un point d'honneur à les conserver vivaces. Il se débat, trouve le bonheur dans les situations simples, "sans rien attendre de plus", elle s'est résignée à une vie sans saveur parce qu'elle espère retrouver ce qui n'existe plus, elle aspire à ce que quelqu'un la sauve. L'Idéalisme face au Pragmatisme. Pourtant, ces postures vis à vis de la résilience pourraient être interchangées. C'est en cela que le texte de Lot Vekemans est extrêmement intéressant. Le "typiquement masculin" et le "typiquement féminin" ne sont catégorisés comme tels qu'à cause de nos représentations sociales, nos préjugés et la réalité d'un monde qui épargne moins les femmes et les contraint malgré elles à se cantonner à ce rôle. Un texte troublant et juste, donc, pour celui qui fera l'effort de l'entendre, comprenez, poussera la réflexion plus loin et s'interrogera sur les raisons profondes de nos agissements et comportements. Oui, davantage encore que les retrouvailles d'un couple séparé qui a vécu un drame terrible et n'arrive plus à communiquer, se dessine ici un portrait complexe et juste des relations humaines. Dag Jeanneret a tissé une belle complicité entre ses comédiens. Rien de trop, ils nous apparaissent immédiatement comme des êtres auxquels on peut s'identifier aisément. Pétri de paradoxes, d'incertitudes, de remords, de regrets et de culpabilité. Vivants mais abîmés. D'une fragilité désarmante. Poison est un texte délicat, composé dans une prose fluide et naturelle, qui séduira les amateurs de tranches de vie sans fioriture où l'humanité se dévoile avec pudeur et sincérité. Monter cette pièce est une démarche louable de Dag Jeanneret qui révèle une fois de plus sa capacité à nous parler intimement de ce que nous sommes et à mettre des comédiens à nu, sans artifice autre que leur présence sensible. La Grande Parade, Julie Cadilhac 10 juin 2016 Poison, spectacle galvanisant vu au Printemps de Comédiens à Montpellier Poison salvateur © Marie Clauzade Ils se retrouvent après six ans. « Non, cinq ans », corrige l’homme. Cela fait six ans qu’il est parti, « cinq ans », parti sans même s’en rendre compte. La veille du Jour de l’An, il a pris une valise, il a fermé la porte en se disant qu’il allait revenir, qu’il n’allait pas faire ça, qu’il n’y pensait pas, et il n’est jamais revenu. Aujourd’hui ils se retrouvent, le père et la mère, pour savoir ce qu’il adviendra de la sépulture de leur petit garçon enterré là, dans une terre soupçonnée d’être envahie par un poison indéterminé. Comment sont-ils parvenus à vivre, encore, depuis le drame de la mort de leur enfant ? Lui, donc, est parti. Tenter de trouver un autre souffle. Elle, est là, elle a apporté des bulbes à planter sur la tombe -quand la pluie se sera calmée. Il faut apprendre à se reparler, peut-être à se toucher, à accepter d’entendre souffrir l’autre, admettre qu’on puisse intégrer l’inconcevable pour continuer le chemin parmi les vivants. Une heure dix d’un texte sobre de l’auteure hollandaise Lot Vekemans (créé en 2009) nous emmène dans une parenthèse temporelle -rattraper le temps de ces six (ou cinq) ans- qui emporte par la justesse des mots, des (re)sentiments, et dégage une vitalité qui nous attrape presque par surprise. Les deux acteurs, Sophie Rodrigues et Christophe Reymond inventent un jeu retenu qui laisse toute sa place à la vie qui s’écoule, malgré tout. Dag Jeanneret, metteur en scène et directeur de la compagnie biterroise In Situ, maintient le dialogue dans une quotidienneté qui nous permet de nous approcher au plus près de ce couple qui, bien plus que de régler des comptes, semble être venu se retrouver là pour prouver qu’ils sont toujours vivants. « Qu’est-ce que tu vois quand tu me regardes ? » Réponse sans détours assurée. On ressort étrangement galvanisés de ce spectacle, où les choses sont tout simplement dites, comme d’un moment de vérité rare. Zibeline, Anna Zisman