e n t o m o l o g i e Découverte de Perithemis tenera (Say, 1839) (Odonata : Libellulidae), une nouvelle libellule pour le Québec Roxanne Sarah Bernard Description de l’espèce Perithemis tenera (Say) est une petite espèce de Libellulidae de couleur or (Walker et Corbet, 1975). Cette espèce possède un dimorphisme sexuel apparent, soit des ailes nettement ambrées pour le mâle tandis que la femelle a des ailes claires et tachetées de brun. Le front est de couleur jaune, quelquefois verdâtre ; le labium et le labre sont plus pâles que l’antéclypéus et le postclypéus qui sont souvent foncés. La tête brune est garnie de quelques petits poils noirs et l’occiput est marron. Le thorax est brun doré avec de petites lignes jaunâtres qui ne sont pas très bien définies. Ces lignes s’élargissent et sont plus claires près de l’épimère. Les pattes sont brunâtres presque ambrées et sont garnies de petits poils noirs. Le ptérostigma est rouge chez les deux sexes. L’abdomen est brun et rayé latéralement et ventralement de jaune ou jaune orangé. L’espèce a un abdomen court, large et compressé à sa base. Il s’élargit dans le haut pour se rétrécir vers les derniers segments. La femelle a une coloration semblable à celle du mâle à l’exception des ailes. P. tenera est présent sur toute la côte est. Sa présence s’étend du Kansas au Texas jusqu’au Mexique. Au Canada, cette libellule a été observée dans le sud de l’Ontario (Ministry of Natural Resources, 2002). La découverte Le premier spécimen a été capturé le 15 août 2007, à 13 h 25, au Centre d’interprétation de la nature du lac Boivin, près de l’ancienne entrée principale du stationnement, maintenant fermée au public (45° 29' 41,9" N, 72° 41' 19,3" O) (figure 1). Lors de la découverte, il faisait environ 23 °C et le temps était partiellement nuageux et peu venteux (1 ou 2 sur l’échelle de Beaufort). Le spécimen récolté était une femelle de 23,7 mm de longueur totale et de 18,5 mm d’envergure. Cette petite libellule est facilement identifiable grâce à sa taille ainsi qu’aux taches brunes sur les ailes antérieures et postérieures (pour la femelle). En 2008, un groupe d’une dizaine de femelles a été observé le 10 juillet à 11 h 30, à 26 °C roxanne sarah bernard Résumé Une femelle de Perithemis tenera (Say, 1839) a été observée dans un parc urbain de Granby, en Montérégie, en 2007. Il s’agit de la première mention de cette espèce au Québec. En 2008, des individus des deux sexes ont été observés à plusieurs endroits au Centre d’interprétation de la nature du lac Boivin. Durant l’été, la population a été évaluée à plus d’une centaine d’individus. En 2009, P. tenera est arrivé en début d’août dans les mêmes sites qu’en 2008. Les informations sur la biologie de l’espèce et des détails sur la découverte sont présentés dans cet article. Figure 1. Premier spécimen de Perithemis tenera trouvé au Centre d’interprétation de la nature du lac Boivin, à Granby, le 15 août 2007. et par temps ensoleillé. Quatre jours plus tard, des individus mâles ont rejoint le groupe de femelles, ce qui a porté à une trentaine le nombre d’individus observés à ce site. En date du premier août, on notait P. tenera près du lac Boivin (45° 24' 44,0" N, 72° 41' 10,0" O), où les mâles patrouillaient les airs et se pourchassaient. J’estime avoir observé au moins 100 individus de cette espèce durant l’été 2008 dans l’aire d’étude. À la mi-septembre, il n’y avait plus aucune trace de cette espèce. Le premier site où P. tenera a été découvert était un habitat ouvert à proximité d’une plantation d’épinette (45° 29' 41,9" N, 72° 41' 19,3" O). Le drainage y était relativement mauvais (figure 2). On y trouvait majoritairement la quenouille à larges feuilles (Typha latifolia), le phragmite commun (Phragmites communis), du carex (Carex sp.) et du saule (Salix sp.). Le deuxième site était localisé dans le sentier du marais (45° 24' 44,0" N, 72° 41' 10,0" O) (figure 3). Les mâles volaient autour d’un groupe de pontédéries cordées (Pontederia cordata). En bordure du marais, croissait de l’aulne rugueux (Aulnus incana ssp.). Les principales plantes herbacées étaient : le calla des marais (Calla pallustris) et Roxanne Sarah Bernard est naturaliste et entomologiste amateur. [email protected] Le naturaliste canadien, 134 no 1 hiver 2010 23 Figure 2. Site de la découverte de Perithemis tenera au Centre d’interprétation de la nature du lac Boivin. surtout des quenouilles à larges feuilles. À cet endroit, on observait une grande concentration de poissons, d’oiseaux insectivores et d’autres espèces de libellules (de la famille des Aeshnidae, genre Aeshna et de la famille des Libellulidae) qui peuvent être d’éventuels prédateurs de P. tenera. Conclusion La découverte de cette libellule à Granby représente un agrandissement de son aire connue de répartition. Il semble que le sud du Québec réponde aux besoins de cette espèce durant les mois chauds de l’été. Il serait intéressant de connaître l’évolution future de sa répartition ainsi que d’observer les mœurs de l’espèce, chez nous, à la limite nordique de son aire connue de répartition. 24 LA SOCIÉTÉ PROVANCHER D’HISTOIRE NATURELLE DU CANADA roxanne sarah bernard roxanne sarah bernard e n t o m o l o g i e Figure 3. Deuxième site d’observation de Perithemis tenera sur les berges du marais du Centre d’interprétation de la nature du lac Boivin. Remerciements Un merci spécial à Jean-François Desroches pour la révision de la version préliminaire de ce texte et à Christian Houle pour la vérification de l’identification de P. tenera. Références Ministry of Natural Resources, 2002. Disponible en ligne à : nhix.mnr.gov. on.ca/odonates/Libellulidae.html. [Visité 08-10-10]. Walker, E.M. et P.S. Corbet, 1975. The Odonata of Canada and Alaska. Volume III. University of Toronto Press, Toronto, 307 p.