Abstracts A bstracts Le Doppler tissulaire en mode couleur sous-estime les vélocités myocardiques comparativement au mode pulsé : conséquences sur le rapport E/Ea ■ Point du sujet. Le Doppler tissulaire en mode pulsé spectral mesure la vitesse myocardique maximale, alors que le Doppler tissulaire en mode couleur mesure une vitesse correspondant à la moyenne de toutes les vélocités présentes dans le volume d’échantillonnage. La plupart des études cliniques ont utilisé le Doppler tissulaire en mode pulsé spectral, et certains travaux ont suggéré que les vitesses myocardiques mesurées en mode couleur étaient plus basses que celles obtenues en mode pulsé spectral. But de l’étude. Il a été de préciser les conséquences du mode de mesure des vitesses myocardiques en Doppler tissulaire sur le calcul du rapport E/Ea, correspondant au rapport entre la vitesse maximale de l’onde E du flux transmitral et la vitesse de déplacement protodiastolique de l’anneau mitral en Doppler tissulaire, et qui est actuellement utilisé en routine pour l’estimation des pressions de remplissage ventriculaires gauches. Patients et méthodes. L’étude a porté sur 31 patients. Les vitesses myocardiques ont été mesurées en Doppler tissulaire pulsé spectral et couleur, en systole et en diastole, au niveau de 4 sites (septal, latéral, antérieur, inférieur), à l’anneau mitral, d’une part, et en zone médioventriculaire, d’autre part. Résultats. Quel que soit le site de mesure considéré, les vitesses myocardiques étaient plus basses en Doppler tissulaire couleur qu’en Doppler tissulaire pulsé spectral (p < 0,001), en systole comme en diastole, probablement parce que le mode couleur mesure une vitesse myocardique moyenne alors que le mode pulsé spectral mesure une vitesse myocardique maximale. Le tableau montre à titre d’exemple les vitesses mesurées au niveau du septum basal. En conséquence, le rapport E/Ea était plus élevé lorsque l’onde Ea était mesurée en mode tissulaire couleur que lorsqu’elle l’était en mode tissulaire pulsé spectral (22,3 ± 15,3 versus 13,6 ± 7,8 ; p < 0,001) >>> Conclusion. Le rapport E/Ea est surestimé lorsque la vitesse de l’onde Ea est mesurée en utilisant le mode couleur plutôt que le mode pulsé spectral du Doppler tissulaire. Les valeurs seuils publiées dans la littérature ayant été établies en utilisant le mode pulsé spectral, c’est cette technique qui doit être adoptée pour estimer les pressions de remplissage à partir du rapport E/Ea. B. Gallet, service de cardiologie, CH Argenteuil >>> McCulloch M, Zoghbi WA, Davis R, Thomas C, Dokainish H. Color tissue Doppler myocardial velocities consistently underestimate spectral tissue Doppler velocities: impact on calculation peak transmitral pulsed Doppler velocity/early diastolic tissue Doppler velocity (E/Ea). J Am Soc Echocardiogr 2006;19:744-8. Conséquences cliniques d’une hypertrophie majeure en échocardiographie en cas de cardiomyopathie hypertrophique ■ Point du sujet. Le rôle d’une hypertrophie myocardique majeure dans le risque de mort subite en cas de cardiomyopathie hypertrophique (CMH) reste controversé, notamment lorsqu’il n’existe pas d’autre facteur de risque associé. But de l’étude. Il a été de préciser la valeur pronostique d’une hypertrophie myocardique majeure en cas de CMH. Patients et méthodes. L’étude a inclus 107 patients, évalués à la Mayo Clinic entre 1975 et 2000, et ayant une hypertrophie myocardique majeure en échocardiographie, définie par une épaisseur pariétale diastolique du ventricule gauche ≥ 30 mm. Les critères de jugement étaient la mortalité totale, la mortalité cardiaque (décès par insuffisance cardiaque ou accident vasculaire cérébral [AVC], trans- Tableau. Valeurs des vélocités myocardiques mesurées en Doppler tissulaire au niveau du septum basal selon le mode utilisé. Vitesse systolique (Sa) Vitesse protodiastolique Vitesse télédiastolique (Aa) Mode couleur 3,0 ± 1,4 cm/s 3,0 ± 2,0 cm/s 2,8 ± 2,1 cm/s Mode pulsé spectral 5,9 ± 1,7 cm/s 5,6 ± 2,5 cm/s 5,9 ± 2,6 cm/s p < 0,001 < 0,001 < 0,001 plantation cardiaque) et la mortalité subite (incluant la délivrance d’un choc électrique approprié par un défibrillateur interne pour une arythmie létale). La survie observée a été comparée à celle attendue pour une population appariée selon l’âge et le sexe. La valeur pronostique de l’âge a été appréciée en répartissant les patients en trois sous-groupes : < 30 ans, 30-59 ans et ≥ 60 ans. Résultats. Le suivi moyen a été de 8,2 ± 6,2 ans. Il y a eu 28 décès (26 %) ; une mort subite est survenue chez 14 patients (12 %). La survie à 10 ans était inférieure à la survie attendue (77 % versus 95 % ; p < 0,001). Le risque de décès était plus élevé chez les patients les plus jeunes (survie à 10 ans de 80 % pour les patients de moins de 30 ans) et chez les plus âgés (survie à 10 ans de 31 % pour les patients âgés d’au moins 60 ans), alors que les patients d’âge intermédiaire avaient une espérance de vie analogue à celle attendue (survie à 10 ans de 97 % pour les patients âgés de 30 à 59 ans). La cause la plus fréquente de décès chez les sujets de moins de 30 ans était la mort subite, alors que les causes principales de décès chez les patients de 60 ans et plus étaient l’insuffisance cardiaque et les AVC. Quel que soit le groupe d’âge considéré, la survie était équivalente que les patients aient eu ou non une myectomie (réalisée chez 47 % d’entre eux). Parmi les 58 patients âgés de moins de 30 ans, 36 étaient asymptomatiques et 9 (25 %) ont eu une mort subite. >>> Conclusion. Les patients ayant une hypertrophie myocardique majeure (≥ 30 mm) ont un risque accru de décès. Chez les sujets jeunes, la cause principale de décès est la mort subite, ce qui pourrait faire discuter l’éventuelle implantation prophylactique d’un défibrillateur dans cette situation. Les limites de cette étude, outre son caractère rétrospectif, sont l’absence de prise en compte des autres facteurs de risque de mort subite et le fait que près de la moitié des patients avaient eu une myectomie (qui pourrait diminuer le risque de mort subite selon certaines études, alors qu’elle ne l’influençait pas dans le présent travail). B. Gallet, service de cardiologie, CH Argenteuil >>> Sorajja P, Nishimura RA, Ommen SR et al. Use of echocardiography in patients with hypertrophic cardiomyopathy: clinical implications of massive hypertrophy. J Am Soc Echocardiogr 2006;19:788-95. >>> La Lettre du Cardiologue - n° 398 - octobre 2006 A bstracts Abstracts >>> Embolie pulmonaire massive : conduite à tenir après échec de thrombolyse ■ Quelle attitude thérapeutique adopter en cas d’échec de thrombolyse au décours d’une embolie pulmonaire (EP) massive ? Ce registre monocentrique prospectif (Besançon) a inclus sur 10 années (janvier 1995 à janvier 2005) 488 patients thrombolysés pour EP massive. Quarante d’entre eux (8,2 %) n’ont pas répondu favorablement à la thrombolyse : il persistait une instabilité hémodynamique clinique et une dysfonction ventriculaire droite en échocardiographie lors des 36 premières heures post-traitement. Selon la décision de leur médecin, ils ont eu soit une embolectomie chirurgicale réalisée lors des 72 heures post-thrombolyse (14 patients), soit une deuxième thrombolyse (26 patients). Les critères de jugement de l’étude comportaient, lors de la phase hospitalière, les récidives d’EP, les complications hémorragiques et les décès en relation avec l’EP (dus à une récidive d’EP ou à un choc cardiogénique). À long terme, ont été répertoriés les décès, les événements thromboemboliques récidivants, les épisodes d’insuffisance cardiaque congestive. L’évolution hospitalière (en moyenne, 12 ± 5 jours) a été indemne de complications pour 11 patients opérés (79 %) contre 8 patients à nouveau thrombolysés (31 %) [p = 0,004]. Il existe une tendance non significative pour une augmentation de la mortalité pour le groupe à nouveau thrombolysé (10 décès contre 1 décès ; p = 0,07). On observe davantage de récidives d’EP fatales ou non en cas de nouvelle thrombolyse (35 % contre 0 % ; p = 0,015). S’il n’y a pas de différence significative concernant le nombre d’hémorragies sévères pour les deux groupes, celles-ci furent toutes fatales pour les 4 patients concernés traités par une nouvelle thrombolyse. Pour les survivants, l’évolution indemne de complications à long terme (5,7 ± 2,7 ans) est comparable dans les deux groupes (62 % et 69 % ; p = NS). >> Conclusion. Lors de la prise en charge d’une EP massive, ce registre prospectif monocentrique évalue le taux d’échec de la thrombolyse à 8 %. Dans cette situation (relativement rare : pour l’étude, 40 patients en 10 ans), les résultats sont en faveur d’un transfert en chirurgie pour effectuer une embolectomie chirurgicale plutôt que de renouveler une thrombolyse. En particulier, après chirurgie, on observe moins de récidives d’EP, fatales ou non. Cela est d’autant plus démonstratif que le traitement n’était pas randomisé et que les patients les plus sévèrement atteints ont été dirigés préférentiellement vers la chirurgie (un choc était présent chez 36 % des patients adressés pour embolectomie contre 15 % de ceux à nouveau thrombolysés). La réduction des récidives d’EP pour le groupe chirurgical peut être expliquée par la pose peropératoire systématique d’un filtre cave. À l’inverse, une nouvelle thrombolyse n’est couronnée de succès et indemne de complications lors du suivi que pour 31 % des patients, et les hémorragies sévères associées sont ici toutes fatales. Pour les auteurs, l’absence d’amélioration clinique et échocardiographique après une thrombolyse pour EP massive incite à envisager rapidement une embolectomie chirurgicale plutôt qu’une nouvelle thrombolyse. C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil >> Meneveau N, Séronde MF, Blonde MC, et al. Management of unsuccessful thrombolysis in acute massive pulmonary embolism. CHEST 2006;129:1043-50. Rétrécissement aortique en bas débit opéré et mismatch ■ Le but de cette étude canadienne est de définir l’impact d’un mismatch pour le devenir des patients opérés d’un rétrécissement aortique (RA) en bas débit. Une cohorte de 664 patients ayant eu un remplacement valvulaire aortique pour RA depuis 1990 a été suivie prospectivement avec une évaluation clinique et échocardiographique annuelle. Parmi ces patients, 79 répondaient aux critères préopératoires définissant un RA en bas débit : surface aortique < 1,2 cm2, gradient moyen transaortique < 40 mmHg, et fraction d’éjection ventriculaire gauche < 50 %. Ces patients ont eu plus fréquemment que les autres membres de la cohorte une intervention de pontage aorto-coronaire associée au remplacement valvulaire aortique (62 % des cas contre 34 % pour les autres patients ; p < 0,05). Leur mortalité périopératoire a été plus élevée (7,5 % contre 3,5 % pour l’ensemble des patients ; p = 0,02). La survie postopératoire à 10 ans (excluant la mortalité opératoire) a été de 72,7 % pour les RA en bas débit (contre 89,6 % pour les autres patients opérés de RA), la survie indemne d’insuffisance cardiaque de 68,2 % (contre 84,1 %), différences significatives confirmant un pronostic plus péjoratif lorsque le RA est opéré à un stade de bas débit. Considérant les RA en bas débit, un mismatch postopératoire défini par une surface de prothèse valvulaire aortique ≤ 0,85 cm2/m2 est indépendamment associé à la persistance ou à la récurrence d’insuffisance cardiaque congestive (p = 0,039 et hazard-ratio [HR] = 3,6), à une moindre régression de la masse ventriculaire gauche (p = 0,037), et s’accompagne d’une tendance à une plus forte mortalité tardive (p = 0,084 et HR = 3). >> Conclusion. Lors de cette étude canadienne, les RA en bas débit représentent 12 % de la population totale des RA opérés. Ils ont plus fréquemment une intervention de pontage aorto-coronaire sur coronaropathie associée, dont on connaît le rôle pronostique péjoratif sur le devenir postopératoire. Par rapport aux autres patients opérés, les patients ayant un RA en bas débit ont une évolution postopératoire moins favorable : mortalité péri-opératoire et tardive plus importante, davantage d’épisodes d’insuffisance cardiaque congestive lors du suivi à long terme. Cela ne saurait remettre en cause l’indication chirurgicale, car une survie à 10 ans proche de 73 % est largement supérieure à la survie escomptée sous traitement médical pour ces sujets à haut risque. Si l’on tient compte des seuls patients opérés pour un RA en bas débit, un mismatch lié au petit calibre de la prothèse aortique par rapport à la corpulence du patient (surface indexée ≤ 0,85 cm2/m2) aggrave le pronostic en s’associant à une majoration des épisodes d’insuffisance cardiaque et à une tendance à une plus forte mortalité à long terme. Il faut donc éviter un mismatch postopératoire pour ces sujets à haut risque en tenant compte du gabarit du patient et de la taille de l’anneau aortique, sans pour autant alourdir le risque opératoire, challenge difficile pour le chirurgien... C. Adams, service de cardiologie, CH Argenteuil >> Kulik A, Burwash IG, Kapila V, Mesana TG, Ruel M. Longterm outcomes after valve replacement for low-gradient aortic stenosis. Impact of prosthesis-patient mismatch. Circulation 2006;114(Suppl. I):I-553-I-558. La Lettre du Cardiologue - n° 398 - octobre 2006