THS Intérêts et controverses Traitement hormonal substitutif de la ménopause et risque thrombotique veineux Venous thromboembolism and hormone substitution in menopausal women H. Lévesque* points FORTS ▲ Le traitement hormonal substitutif de la ménopause augmente modérément, mais de manière significative, le risque de maladie thromboembolique. ▲ Le traitement hormonal substitutif de la ménopause peut induire un état d’hypercoagulabilité biologique : élévation des D-dimères et des fragments 1 + 2 de la prothrombine. ▲ Il n’est pas démontré que le traitement hormonal substitutif de la ménopause utilisé par voie transdermique s’accompagne d’un risque accru de maladie thromboembolique. ▲ Les SERMs en général, et le raloxifène en particulier, augmentent le risque de maladie thromboembolique dans une proportion similaire à celle du traitement hormonal substitutif. ▲ Le risque thromboembolique potentiel des phytoestrogènes ou de la tibolone n’est pas connu. Ce type de produit doit être utilisé avec prudence sur un terrain à risque de maladie thromboembolique veineuse. ▲ Un antécédent de thrombose veineuse profonde ou d’embolie pulmonaire, a fortiori idiopathique, est une contre-indication au traitement hormonal substitutif. ▲ Dans une situation à risque thrombotique prévisible (chirurgie programmée), le traitement hormonal substitutif de la ménopause doit être interrompu. ▲ L’insuffisance veineuse superficielle (varicosités, maladie variqueuse, thrombose veineuse superficielle) ne doit pas être considérée comme une contre-indication au traitement hormonal substitutif. Mots-clés : Phlébite – Thromboembolisme – Traitement hormonal substitutif. A vec raison, l’utilisation d’estrogènes est considérée depuis de nombreuses années comme susceptible de favoriser la survenue de complications thrombotiques. Utilisés en contraception orale, les estrogènes augmentent le risque de * Département de médecine interne, CHU de Rouen. 68 survenue d’une thrombose veineuse profonde. Cet effet dose-dépendant est presque immédiat et persiste 3 à 4 semaines après l’interruption du traitement (1). Il a été démontré récemment que le type de progestatif associé intervenait sur le risque thrombotique veineux, expliquant l’augmentation modérée mais significative de ce risque lors de l’utili- Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (IX), n° 3, mai/juin 2005 sation d’un contraceptif oral contenant un progestatif dit de troisième génération : désogestrel, gestodène ou norgestimate (2). Il reste cependant très modéré, puisque le nombre de cas, exprimé de façon absolue en annéesfemmes, passe de 3,8 en l’absence de contraception estroprogestative à 16 pour 100 000 années-femmes avec les pilules dites de seconde génération et à 29 pour 100 000 annéesfemmes avec les contraceptifs oraux les plus récents (3). À l’inverse, l’association des estrogènes à des composés utilisés à des posologies bien différentes au cours d’une hormonothérapie substitutive de la ménopause ne semble pas augmenter le risque de maladie thromboembolique (4), et diminuerait même le risque de coronaropathie (5). Cependant, la publication récente d’études prospectives (6, 7) incite à une extrême prudence, car le dogme de la protection cardiovasculaire du traitement hormonal substitutif (THS) de la ménopause s’est effondré, alors que le risque accru de thrombose veineuse profonde s’est vu, quant à lui, confirmé. Des données épidémiologiques aux études prospectives La naissance de la médecine a été clinique. Sa période de gloire est technologique et scientifique, son futur sera social, humain et préventif. Mais la médecine ne réussira ce grand tournant que si elle reste fidèle à sa grandeur, à savoir la rigueur méthodologique, l’esprit critique, le refus des dogmes et des idées préconçues, la considération des démentis des études prospectives méthodologiquement parfaites, limitant tout biais. L’exemple du traitement hormonal substitutif de la ménopause illustre parfaitement ce fait. On a longtemps pensé qu’après l’âge de la ménopause, l’augmentation de la mortalité était en partie due à la carence en estrogènes, avec consécutivement une perte de leur éventuel effet de cardioprotection, contrastant avec une baisse relative de la mortalité par cancer du sein. Cette hypothèse a été étayée par plusieurs études épidémiologiques qui ont montré une réduction de l’incidence des maladies cardiovasculaires, en particulier coronariennes, chez les femmes substituées par THS (8). Elles ont été corroborées par les nombreuses publications concernant les effets du THS sur le bilan lipidique qui ont montré une réduction du LDL-cholestérol, une augmentation du HDL, avec, en corollaire, l’élévation marquée des triglycérides (9). Les études d’observation avaient prédit une réduction significative du risque coronarien chez les femmes bénéficiant d’un THS. Le dogme de l’effet bénéfique du THS sur le plan cardiovasculaire avait même résisté aux résultats négatifs, en termes de bénéfice artériel, de l’étude HERS, réalisée chez des femmes coronariennes, tout en signalant déjà le risque thrombotique veineux (6). Les résultats de la Women’s Health Initiative (WHI), étude de prévention primaire, constituent une avancée majeure sur les effets du THS sur la santé des femmes (10). Cet essai réalisé aux États-Unis avec des estrogènes conjugués équins (0,625 mg d’estrogènes conjugués équins + 2,5 mg d’acétate de médroxyprogestérone) a été arrêté prématurément en raison d’un excès de fréquence du cancer du sein et d’un rapport bénéfice/risque défavorable au THS. La réduction du nombre de cancers colorectaux et de fractures de hanche ne permettait pas de compenser l’excès de risque observé pour l’infarctus du myocarde, les accidents vasculaires cérébraux, le cancer du sein et la maladie thromboembolique. Le résultat de cette étude a fait couler beaucoup d’encre, car il a eu tendance à diaboliser le THS, alors que l’amélioration de la qualité de vie des femmes reste un atout majeur du traitement hormonal substitutif. L’effet cardiovasculaire bénéfique initialement rapporté est surtout lié à un biais méthodologique majeur : le statut socio-économique n’a pas été pris en compte dans les études aux résultats positifs (11). De fait, ce n’était pas le THS qui maintenait les femmes en bonne santé, mais les femmes en bonne santé qui prenaient le THS (7). L’impact de cette publication a été récemment renforcé par la démonstration d’un accroissement du risque d’accidents vasculaires cérébraux, par rapport au placebo, chez les femmes du bras estrogène seul de l’étude WHI (le bras estrogène et progestérone ayant été arrêté précédemment) (12). Cet ensemble de données a incité l’AFSSAPS à éditer des recommandations de prescription sur le THS (Rapport d’orientation du 11 mai 2004). Traitement hormonal substitutif et risque thrombotique veineux : les faits Bien qu’utilisant l’association d’un progestatif et d’un estrogène, les composés, et surtout les posologies, employés pour le THS sont bien distincts de ceux utilisés lors d’une contraception. Si, dès les premières études, une légère augmentation du risque thrombotique veineux a été signalée (13), elle n’a pas été confirmée par les études, d’observation ultérieures, ce qui a même incité à considérer le risque thrombotique veineux du THS comme une superstition médicale (2). Une étude castémoins chez des femmes non sélectionnées tendait à prouver que le THS ne s’accompagnait pas d’un accroissement du risque thrombotique (5). Dans cette étude castémoins, incluant des femmes âgées de plus 45 ans hospitalisées pour une thrombose veineuse, la prise d’un traitement estrogénique éventuel à l’admission fut appréciée de manière rétrospective. L’analyse statistique n’a pas retrouvé de différence significative par rapport au groupe témoin apparié : 5,1 % des patientes avec thrombose veineuse profonde prenaient un THS contre 6,3 % dans le groupe témoin. Le risque relatif est de 0,79 (0,3-2,1, p = 0,64). Cette étude présente cependant plusieurs biais méthodologiques : population relativement âgée (65 ans en moyenne, alors que le risque thrombotique veineux augmente avec l’âge), absence de sélection pour les autres facteurs de risque de maladie thromboembolique, diagnostic positif établi de manière non standardisée et, enfin, nombre relativement faible de patientes sous estrogènes (14). En fait, plusieurs études récentes démontrent que le THS s’accompagne d’un risque, certes modéré, mais indiscutablement accru de maladie thromboembolique (6, 15, 16). La méta-analyse récente de Miller (17), qui regroupe trois études randomisées contrôlées (6, 15, 16), 8 études cas-contrôles (4, 13, 18-23) et une étude de cohorte (24), permet de mieux quantifier cette augmentation du risque thrombotique veineux (tableau). L’étude HERS réalisée chez 2 763 femmes porteuses d’une pathologie cardiovasculaire connue, randomisées entre placebo et THS (0,625 mg d’estrogènes conjugués équins + 2,5 mg d’acétate de médroxy-progestérone) sur une durée moyenne de quatre ans, a évalué le risque relatif de maladie thromboembolique veineuse à 2,08. La méta-analyse de Miller, dont les principales caractéristiques sont résumées sur le tableau, a estimé ce Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (IX), n° 3, mai/juin 2005 Intérêts et controverses THS 69 THS Intérêts et controverses Tableau. Risque relatif de maladie thromboembolique au cours du traitement hormonal substitutif (d’après 16). Études (réf.) Essais randomisés PEPI (15) HERS (6) ERA (15) Études cas-témoins Devor (4) Daly (18) Daly (19) Jick (20) Pérez-Gutthann (21) Varas-Lorenzo (22) Hoibraaten (23) Boston coll. (13) Étude de cohorte Grodstein (24) Nombre d’événements/ sujets avec THS n/n Nombre d’événements/ sujets sans THS n/n RR (IC 95 %) Nombre d’événements chez les patientes avec THS n/10 000 femmes 10/682 34/1 380 7/204 0/165 12/1 383 1/105 5,1 (0,3-86) 2,9 (1,5-5,5) 3,7 (0,4-30) 47,6 12,2 114,4 6/20 44/88 4/18 21/63 37/1 116 6/238 50/143 3/63 112/334 59/193 14/143 21/105 243/8 689 164/9 765 126/385 15/774 0,79 (0,3-2) 3,5 (1,8-7) 2,3 (0,6-8) 3,6 (1,6-7,8) 2,1 (1,4-3,2) 2,3 (1-5,3) 1,2 (0,7-2) 2,2 (0,6-8,4) 2,7 3,2 2,7 2,9 - 22/155 669 27/320 339 2,1 (1,2-3,8) 2 RR : risque relatif, IC : intervalle de confiance, THS : traitement hormonal substitutif. risque à 2,14 (IC 1,64-2,18), ce qui correspond, en termes d’excès de risque en valeur absolue, à 1,5 événement par an pour 1 000 femmes par rapport au risque de base observé chez la femme, qui est de 1,3 événement pour 10 000 années-femmes, avec un risque qui serait maximal durant la première année de traitement. Dans les études de la WHI (Women’s Health Initiative) (10), le risque relatif de maladie thromboembolique a été évalué à 2,11, soit un excès de 18 événements pour 10 000 années-femmes dans le bras estrogène + progestatif contre 1,33 dans le bras estrogène seul. Le risque relatif d’embolie pulmonaire a été estimé à 2,13, soit un excès de 8 événements pour 10 000 annéesfemmes dans le bras estrogène + progestatif versus 1,34 dans le bras estrogène seul. La question difficile est de déterminer si ces données convaincantes obtenues aux États-Unis sont applicables en France, dans la mesure où les produits utilisés ne sont pas les mêmes et où la voie d’administration peut être différente : transcuta- 70 née. P.Y. Scarabin a coordonné une étude cas-témoins réalisée en grande partie en France, dont le but était de quantifier le risque thrombotique veineux en fonction du mode d’administration du 17- estradiol (oral ou transdermique) (25). Cette étude dénommée “ESTHER” (EStrogen and THromboEmbolism Risk) porte sur 155 femmes atteintes d’un premier épisode de maladie thromboembolique veineuse (92 embolies pulmonaires, 63 thromboses veineuses profondes) appariées à 381 témoins identiques en termes d’âge, de période et de centre de recrutement. Les voies d’administration de l’estrogène ont été variées : 21 % des cas et 7 % des témoins l’utilisaient par voie orale, et 19 % des cas et 24 % des témoins par voie transdermique. Un risque relatif de 3,5 était noté chez les utilisatrices de la forme orale, contre 0,9 pour celles qui ont eu recours à un mode d’administration transdermique, suggérant que cette dernière voie n’ait que peu ou pas d’influence sur le risque thrombotique (25). Il reste cependant à démontrer que ce type de THS est meilleur ou moins Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (IX), n° 3, mai/juin 2005 néfaste sur le plan cardiovasculaire que le “cocktail” américain. Les raisons de l’accroissement de ce risque thrombotique ne sont que partiellement élucidées, bien qu’il apparaisse similaire à celles rapportées avec les estroprogestatifs utilisés pour la contraception orale. Les modifications des facteurs de la coagulation sont minimes, mais cohérentes. Elles incluent une élévation des facteurs procoagulants (facteurs VII, X, XII et XIII) et une réduction de certains facteurs anticoagulants telles l’antithrombine ou la protéine S. Ces modifications modérées influencent la balance physiologique du système pro- et anticoagulant vers un état d’hypercoagulabilité, non compensé par une augmentation de l’activité de la fibrinolyse. C’est en effet ce que montrent les tests de coagulation l’évaluant de façon plus globale tels l’étude de la résistance à la protéine C activée ou le test de génération de thrombine (2). Cette hypercoagulabilité induite par le THS, variable selon les estrogènes ou les associations utilisées, survient entre 2 et 6 mois après l’introduction du produit et se normalise quelques semaines après son arrêt. Elle est parfaitement corrélée aux marqueurs d’activation de la coagulation que sont les D-dimères et les fragments 1 + 2 de la prothrombine, confirmant ainsi que le THS induit une inhibition du système anticoagulant physiologique, indépendamment du produit utilisé, mais, en partie, selon le type du schéma etrogénique employé (26). Alternatives hormonales au THS et risque thromboembolique Si le THS ne peut plus et ne doit plus être indiqué en prévention primaire ou secondaire des pathologies cardiovasculaires, ni en prévention primaire de l’ostéoporose, il reste souvent indiqué pour lutter contre les conséquences de l’hypoestrogénie et les symptômes climatériques (bouffées de chaleur, sueurs nocturnes, sécheresse vulvo-vaginale et cutanée, baisse de la libido, troubles du sommeil ou de l’humeur). Cela ne se conçoit qu’en harmonie avec les recommandations très précises de l’AFSSAPS sur ses modalités de prescription : information objective sur les bénéfices et risques relatifs du traitement et son acceptation par la patiente. Les contre-indications éventuelles, l’évolution des connaissances, les recommandations de certaines sociétés, d’auteurs, et même… d’assureurs, conseillant de recueillir un consentement éclairé des patientes, incitent souvent les gynécologues à se tourner vers des alternatives hormonales (phytoestrogènes, tibolone, SERM [Selective Estrogen-Receptor Modulators]) pour lesquelles, malheureusement, peu de données sont disponibles pour quantifier leur influence sur un éventuel risque thromboembolique. Les phytoestrogènes sont des composés non stéroïdiens naturels présents dans certaines plantes. Ils ont une homologie de structure avec le 17- estradiol. Les trois principaux groupes de phytoestrogènes sont les isoflavones (fèves de soja), les lignanes (aliments à grains entiers : lin +++) et les coumestans. Leur action est probablement différente selon le composé utilisé et le tissu cible considéré, dont la sensibilité est elle-même fonction de l’expression tissulaire des récepteurs aux estrogènes. Par ailleurs, leur affinité semble plus importante pour les récepteurs ß de l’estradiol, dont la liaison aux phytoestrogènes est susceptible d’être responsable d’une conformation tridimensionnelle du récepteur différente de celle induite par le 17- estradiol (27). Une alimentation riche en phytoestrogènes (comme c’est le cas chez les Asiatiques) pourrait expliquer la très faible prévalence des bouffées de chaleur ménopausiques dans cette population. Cependant, ces produits, considérés comme des compléments nutritionnels et non comme des médicaments, ne bénéficient d’aucun critère de qualité de fabrication et surtout d’aucune étude scientifique fiable permettant d’apprécier leur efficacité sur les manifestations climatériques, leur effet antiostéoporotique éventuel et leur action bénéfique ou, au contraire, délétère sur le système cardiovasculaire (28). Les SERMs s’incluent dans un ensemble de composés stéroïdiens synthétiques se liant au récepteur des estrogènes, mais dont l’activité estrogénique est fonction du type de récepteur majoritaire (α ou ) au sein du tissu considéré. Il existe donc des agonistes purs (SERMs estrogéniques purs), des antagonistes purs (SERMs antiestrogéniques purs) et plusieurs composés intermédiaires à action mixte agoniste ou antagoniste selon le tissu considéré (29). Le raloxifène (Evista®, Optruma®) utilisé comme THS fait partie des SERMs, mais est considéré comme un estrogène au niveau de l’os (30). En corollaire, il possède une action similaire à celle des estrogènes sur le profil lipidique et sur le risque thrombotique veineux. Il exerce, en revanche, une activité antiestrogénique sur le cancer du sein. L’étude MORE (Multiple Outcomes of Raloxifene Evaluation), qui a travaillé sur l’effet du raloxifène chez 7 705 femmes ménopausées souffrant d’ostéoporose, a permis de montrer une efficacité du produit, utilisé à la posologie de 60 mg/jour, sur le risque fracturaire, sans modification significative des constantes glycémiques mais avec baisse du cholestérol total et du LDL-cholestérol (31). S’il n’y a pas eu d’augmentation du risque artériel (infarctus, accident vasculaire cérébral), il importe d’insister sur l’augmentation significative du risque de survenue de thromboses veineuses profondes (risque relatif à 3), du même ordre que celle observée avec le THS. La tibolone, commercialisée sous le nom de Livial® pour la correction des symptômes liés à la ménopause, est considérée comme un THS de type particulier du fait de l’absence de nécessité d’une adjonction de progestatif. Il s’agit d’un stéroïde de synthèse, proche des dérivés de la noréthistérone, administré par voie orale en une prise quotidienne. Il est rapidement métabolisé en trois stéroïdes dérivés : le ∆4 isomère, qui se lie aux récepteurs de la progestérone et des androgènes, et les dérivés 3α et 3ß hydroxylés, qui, eux, se lient aux récepteurs des estrogènes. Si certaines études ont montré un effet favorable sur le profil lipidique et un effet protecteur osseux, elles ne sont pas informatives sur les pathologies cardiovasculaires et sur le risque (ou l’absence de risque) thrombotique veineux (32). Intérêts et controverses THS Conclusion Il paraît indiscutable que le traitement hormonal substitutif de la ménopause augmente de manière modérée, mais significative, le risque de survenue d’une maladie Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (IX), n° 3, mai/juin 2005 71 THS Intérêts et controverses thromboembolique veineuse. Cependant, la grande majorité des études ont été réalisées avec des estrogènes équins, “cocktail américain”, non utilisés en France. Il existe, en effet, une seule étude cas-témoins évaluant le risque thrombotique veineux éventuel du THS par voie transdermique. Elle tend à démontrer l’absence de majoration du risque de maladie thromboembolique. L’opprobre jeté aujourd’hui sur le THS est peut-être en partie lié à un effet “produit”. Il faut formuler le souhait que les équipes médicales européennes puissent monter une grande étude prospective, méthodologiquement parfaite, n’utilisant pas les estrogènes équins, mais bien du 17- estradiol transdermique, avec ou sans progestérone, seule façon d’apporter une réponse claire à cette question. Aujourd’hui, les recommandations de prudence nécessaires pour prévenir ou limiter le risque thromboembolique du THS sont les suivantes : – préférer la voie transdermique ; – contre-indiquer sa prescription en cas de thrombophilie constitutionnelle (déficit en antithrombine, protéine C, protéine S, mutation Leiden, mutation du gène de la prothrombine) ou acquise (anticorps antiphospholipides, avec ou sans syndrome des antiphospholipides) documentée ; – ne pas l’utiliser en cas d’antécédents de maladie thromboembolique personnelle documentée, a fortiori si elle s’avère idiopathique, ou de survenue sous estroprogestatif ou au cours d’une grossesse antérieure ; – l’utiliser avec précaution chez les femmes à risque thrombotique veineux (obésité) ou ayant des antécédents de thrombophilie familiale ; – l’arrêter 3 à 4 semaines avant une chirurgie, a fortiori si celle-ci est à risque thrombotique. Références 1. Lévesque H, Courtois H. Estrogénothérapie et maladie thromboembolique veineuse. 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Le risque thromboembolique lié au THS est inférieur à celui lié aux estroprogestatifs à visée contraceptive. 2. Le risque thrombogène du THS est variable d’une femme à l’autre. 3. Le risque thromboembolique du raloxifène est nettement inférieur à celui du THS classique. 4. Il est démontré que les phytoestrogènes induisent un moindre de risque de maladie thromboembolique que leTHS. 5. L’utilisation du THS par voie transdermique doit être préférée en cas d’antécédent personnel de maladie thromboembolique. 6. Le THS induit un tableau biologique de résistance à la protéine C activée. 7. La tibolone (Livial®) ne s’accompagne pas d’un risque accru de maladie thromboembolique. 8. L’effet thrombogène du THS disparaît 3 à 4 semaines après l’arrêt du produit. 1. Faux. 2. Vrai. 3. Faux. 4. Faux. 5. Faux. 6. Vrai. 7. Faux. 8. Vrai. 72 Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (IX), n° 3, mai/juin 2005 18. Daly E, Vessey MP, Hawkins MM et al. 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