ASV Les urgences : sauver plus de vies Introduction 4 Comment gérer les appels d’urgence 6 Comment optimiser l’organisation des urgences 8 Comment favoriser le bien-être des animaux 10 Comment contribuer à l’hygiène des soins 12 Qu’est-ce que le triage des urgences ? 14 Comment oxygéner un animal en dyspnée 16 Quelle assistance pour un patient dyspnéique 18 Qu’est-ce qu’un état de choc ? 20 Comment aider à gérer la fluidothérapie du choc 22 Comment alimenter l'animal en soins intensifs 24 Comment utiliser une sonde d’alimentation 26 Exemple de fiche d'hospitalisation - Conclusion Coordination éditoriale : Laurent Cathalan et Alexia Kappelmann Gestion technique : Buena Média Plus © 2016 Royal Canin BP 4 – 650, avenue de la Petite-Camargue 30470 Aimargues, France Tél. : +33 (0)4 66 73 03 00 – Fax : +33 (0)4 66 73 07 00 www.royalcanin.com SHUTTERSTOCK – JESS WEALLEANS 3 S auver un animal admis en urgence représente un double enjeu pour la structure vétérinaire, avant tout parce que la reconnaissance durable du propriétaire contribuera à la bonne réputation de la clinique, mais aussi parce que chaque réussite renforcera la confiance et la cohésion de l’équipe soignante. Toutes les structures vétérinaires doivent être capables, quelle que soit leur taille, de recevoir une urgence, de la stabiliser et d’évaluer si elle doit être référée à une unité de soins intensifs. Le meilleur moyen d’être efficace face à l’urgence est de s’y préparer à la fois techniquement, en disposant d’un matériel opérationnel, et humainement, en optimisant ses compétences. Ce 14e Focus ASV* consacré aux urgences a pour objectif de vous aider à comprendre, anticiper et mettre en œuvre en équipe les soins de première urgence. Parce qu’aider à sauver des vies est votre vocation, découvrez la satisfaction de maximiser les chances de l’animal… tout en diminuant votre stress ! Bruno Jahier Dr vétérinaire, Service Technique Vétérinaire France, (*) Elaboré à partir du Focus Hors-série vétérinaire « Urgences : comment sauver plus de vies au quotiden », écrit par quatre vétérinaires spécialistes européens en Urgences et Soins Intensifs : Amanda Boag, René Dörfelt, Isabelle Goy-Thollot et Chiara Valtolina. 4 l FOCUS ASV – Les urgences : sauver plus de vies Comment gérer les appels d’urgence L’urgence vétérinaire se définit comme « toute dégradation brutale de l’état de santé d’un animal rapportée par son propriétaire ». Dans ce large éventail, qui s’étend du problème mineur à l’état critique, le secrétariat ou l’ASV doit très vite détecter les urgences vitales. Le protocole téléphonique est une aide précieuse La personne qui reçoit un appel d’urgence doit en premier lieu détecter les situations prioritaires. Face à un propriétaire souvent très inquiet, deux méthodes aident à diminuer la charge émotionnelle : ɆɆ maîtriser sa voix : parler d’une voix posée, avec un débit normal, aide à rassurer le client qui perçoit votre maîtrise ; ɆɆ utiliser un protocole de questionnement : la collecte d’informations précises et complètes peut s’avérer difficile si Urgences nécessitant une prise en charge immédiate. ɆɆ Détresse respiratoire ɆɆ Hémorragie sévère ɆɆ Collapsus/perte de conscience ɆɆ Distension abdominale rapide et progressive ɆɆ Incapacité à uriner ɆɆ Apparition brutale de troubles neurologiques sévères ɆɆ Vomissements prolongés ɆɆ Diarrhée sévère ɆɆ Observation de l’ingestion d’un produit toxique ɆɆ Faiblesse sévère ou incapacité à se lever ɆɆ Douleur sévère le propriétaire stressé raconte son vécu sans ordre logique. D’où l’intérêt d’un protocole téléphonique d’accueil de l’urgence sous forme de questions rapides, ciblées et faciles à poser. Les conseils en cas d’urgence vitale Si la situation présente un risque vital, il est rarement utile de perdre du temps à collecter l’historique ou à préconiser des soins, mieux vaut se concentrer sur trois objectifs : ɆɆ noter sans erreur le nom et le téléphone portable du client ; ɆɆ déconseiller les gestes pouvant aggraver l’état de l’animal ; Les urgences : sauver plus de vies – FOCUS ASV l 5 QUESTIONS-RÉPONSES Comment mieux supporter le stress de l’urgence ? L’urgence et les soins intensifs génèrent un stress émotionnel auquel il faut se préparer, notamment en se formant pour développer ses compétences, gagner en confiance, maîtriser la gestion du stress et mieux communiquer. La répartition claire des tâches, l’utilisation de protocoles et la cohésion d’équipe sont aussi des facteurs positifs, tout comme le feed-back, qui consiste à s’informer des suites de chaque situation que l’on a gérée. Pourquoi la communication avec le propriétaire est-elle fondamentale ? Le propriétaire est souvent bouleversé et très soucieux pour son animal admis en urgence. Il va devoir prendre des décisions difficiles, parfois dans un contexte inconnu s’il s’agit de sa première visite. Pour créer une relation de confiance, il est essentiel de gérer son propre stress, de rester à l’écoute et de communiquer de manière professionnelle. Qu’est-ce que le consentement éclairé ? Toute intervention sur l’animal nécessite au préalable le consentement éclairé de son propriétaire, à savoir sa compréhension et son acceptation du rapport bénéfice/risque des soins proposés et de leur coût. Cette communication avec le propriétaire est en général conduite par le vétérinaire et matérialisée par la signature d’un contrat de soins. ɆɆ s’assurer des indications pour un trajet rapide (mode de transport ? adresse de la clinique communiquée ? GPS ou itinéraire ?). Le reste des informations sera collecté à l’arrivée du client. Anticiper l’arrivée de l’urgence Dès qu’une urgence est attendue, il est primordial : ɆɆ que tous les membres de l’équipe soient informés du moment estimé de son arrivée et de la nature du problème ; ɆɆ que les autres rendezvous soient prévenus si la gestion de l’urgence risque d’entraîner un retard dans les consultations. 6 l FOCUS ASV – Les urgences : sauver plus de vies Comment optimiser l’organisation La gestion de l’urgence demande une réaction rapide et efficace. Pour éviter de perdre du temps à rechercher un matériel ou une information, et minimiser le risque d’erreur ou d’oubli, une organisation rigoureuse est nécessaire, soutenue par des documents écrits. Tenir à jour le stock des différents solutés. Un matériel fonctionnel et bien rangé est un gage d’efficacité Tout le matériel doit être immédiatement disponible pour l’urgence et son utilisation sécurisée. Cela implique : ɆɆ la formation permanente à l’utilisation du matériel ; Contrôler le fonctionnement des appareils. ɆɆ un rangement rationnel : choisir un conditionnement par produit pour éviter toute confusion, identifier un emplacement fixe pour chaque produit et matériel et leurs notices d’utilisation, placer de façon accessible le matériel le plus utilisé, éviter les empilages et les recoins inaccessibles à la désinfection ; ɆɆ des mesures de sécurité : afficher un tableau de posologie pour limiter les risques d’erreur, vérifier régulièrement le stock et les dates de péremption, Les urgences : sauver plus de vies – FOCUS ASV l 7 des urgences et le fonctionnement des appareils (utiliser des check-lists pour ne rien oublier !), afficher et tenir à jour le tableau d’entretien du matériel. NB : La gestion du matériel d’urgences est optimisée si un(e) ASV en prend la responsabilité. Seul un document écrit garantit la traçabilité des soins Seul un document de suivi soigneusement complété, comme la fiche de réanimation ou d’hospitalisation, permet : ɆɆ de garantir le respect du traitement et de l’aliment prescrits, en évitant un surdosage ou un oubli de soin ; ɆɆ de rationaliser l’organisation, grâce aux indications de fréquence et d’horaires pour les soins et les contrôles ; ɆɆ d’obtenir une « photographie » en temps réel du relevé des paramètres de l’animal afin de détecter tout changement de son évolution et réagir avant que son état ne se dégrade. NB : Quand un animal est suivi par une même équipe, la détection des changements cliniques est améliorée. Voir un exemple de fiche d’hospitalisation page 26. QUESTIONS-RÉPONSES Comment faire si « je n’ai pas le temps » de compléter les documents ? « Je n’ai pas le temps » signifie dans ce cas « je ne prends pas ce temps parce que j’ai beaucoup d’autres choses à faire ». Après avoir apporté des soins, effectué des contrôles (sur l’animal, le matériel), réalisé un protocole d’hygiène, la priorité est de compléter le document associé. Sinon, le risque est de perdre encore plus de temps par la suite à rectifier une erreur ou un oubli, rechercher un résultat, refaire inutilement, renseigner un collègue (= son temps + le vôtre)… sans compter la perte de chances pour l’animal ! A quoi sert un protocole de soins ? Un protocole de soins décrit l’ensemble des étapes à respecter pour réaliser un soin ou un examen prescrit, de la préparation du matériel au contrôle du résultat obtenu. Par exemple : « oxygéner au masque » ou « administrer la fluidothérapie du choc ». Préparer des protocoles écrits présente de nombreux avantages : identifier qui fait quoi, gagner en efficacité, se sécuriser en suivant des guides validés par tous, et faciliter la formation des nouveaux entrants. 8 l FOCUS ASV – Les urgences : sauver plus de vies Comment favoriser le des animaux Il a été démontré que le bien-être de l’animal en soins intensifs limite les complications et accélère sa guérison. Le personnel soignant doit donc veiller à installer les animaux le plus confortablement possible, en limitant les facteurs de stress et en gérant la douleur. Installer l’animal le plus confortablement possible. Le confort dépend de l’aménagement de la cage Idéalement, le sol de la cage est pourvu d’un tapis isolant hydrophobe (ex : Vetbed®), recouvert d’une alèze jetable changée tous les jours ou dès qu’elle est souillée. Pour les animaux alités, on utilisera un matelas lavable et des coussins pour éviter les escarres. Les cages des chats seront L’ASV contrôle régulièrement le bien-être et l’absence de douleur. le plus possible éloignées de celles des chiens, en occultant si besoin le contact visuel et en diffusant des phéromones apaisantes. Chaque jour, la cage doit être nettoyée et désinfectée, et disposer d’eau propre. Les animaux fragiles ou en hypothermie doivent être réchauffés. NB : Les propriétaires qui rendent visite à leur animal sont très sensibles à la propreté et aux éléments de confort. Le nursing réduit le stress de l’animal Le rôle de l’ASV est essentiel pour : ɆɆ rassurer les animaux (voix, caresses) durant les soins ; ɆɆ sortir autant que possible les animaux mobiles ; Les urgences : sauver plus de vies – FOCUS ASV l 9 bien-être ɆɆ veiller à l’hygiène des yeux et du pelage, surtout chez le chat que l’absence de toilettage peut rendre anxieux ; ɆɆ mobiliser chaque jour les animaux couchés, en les changeant de côté au moins toutes les quatre heures, et en effectuant des manipulations douces de physiothérapie pour prévenir les douleurs liées à l’immobilisation. Si l’animal souffre, un traitement antalgique doit être immédiatement mis en place. D’où l’importance de détecter et signaler précocement tout signe de douleur. QUESTIONS-RÉPONSES Pourquoi lutter contre la douleur ? Quand elle est physiologique, la douleur est protectrice : si une action est dangereuse (ex : toucher une surface brûlante), la douleur permet de l’interrompre immédiatement (on retire la main). En revanche, la douleur d’origine pathologique peut tuer car elle libère des neuromédiateurs aux effets néfastes pour l’animal : baisse des défenses contre l’infection, anorexie, ralentissement de la cicatrisation, activation des réactions inflammatoires… Plus la douleur dure, plus l’animal y devient sensible, d’où l’importance d’agir au plus tôt. Comment détecter qu’un animal souffre ? La douleur peut entraîner des signes audibles ou visibles : l’animal se plaint, se défend quand on veut toucher la zone douloureuse, cherche à retirer le pansement, les points ou le dispositif en place, jusqu’à parfois s’automutiler. Mais elle n’est pas toujours évidente à détecter et s’exprime différemment chez le chien et chez le chat, d’où l’intérêt de s’aider de grilles de score. Exemple : Scores de douleur de Glasgow http://www.newmetrica.com/cmps/index.html http://www.newmetrica.com/cmps/eng/download/CMPS_Eng.pdf (accès direct au pdf version anglaise chien) 10 l FOCUS ASV – Les urgences : sauver plus de vies Comment contribuer à l’hygiène des soins Quel pire scénario que de transmettre une infection à un animal en lui prodiguant des soins pour lui sauver la vie ? En soins intensifs, les mesures d’hygiène doivent être d’autant plus rigoureuses que les patients y sont particulièrement fragiles. QUAND pratiquer l’hygiène des mains en milieu médical (d’après l’OMS) 3 APRÈS UN RISQUE D’EXPOSITION À UN LIQUIDE ORGANIQUE QUAND ? Lavez-vous les mains immédiatement après un risque d’exposition à un liquide organique (et après le retrait des gants). POURQUOI ? Pour vous protéger et protéger l’environnement de soins des germes nuisibles dont le patient est porteur. 4 APRÈS AVOIR TOUCHÉ L’ANIMAL QUAND ? Lavez-vous les mains après avoir touché l’animal ainsi que son environnement immédiat au moment où vous partez. POURQUOI ? Pour vous protéger et protéger l’environnement de soins des germes nuisibles du patient. 1 AVANT DE TOUCHER L’ANIMAL QUAND ? Lavez-vous les mains avant de vous approcher d’un animal pour le toucher. POURQUOI ? Pour protéger le patient des germes présents sur vos mains. 2 AVANT TOUT GESTE ASEPTIQUE QUAND ? Lavez-vous les mains immédiatement avant de réaliser un geste aseptique. POURQUOI ? Pour protéger le patient de la pénétration de germes nuisibles dans son organisme, y compris ceux dont il est porteur. 5 APRÈS AVOIR TOUCHÉ L’ENVIRONNEMENT DE L’ANIMAL QUAND ? Lavez-vous les mains après avoir touché un objet ou le mobilier se trouvant dans l’environnement immédiat de l’animal au moment où vous partez, même si vous n’avez pas touché l’animal. POURQUOI ? Pour vous protéger et protéger l’environnement de soins des germes nuisibles du patient. Les urgences : sauver plus de vies – FOCUS ASV l 11 Les soins intensifs exposent aux infections nosocomiales Les patients en soins intensifs ont un risque majoré de contracter une infection en milieu médical (dite infection nosocomiale), car : ɆɆ leurs défenses sont affaiblies ; ɆɆ l’inoculation de germes est favorisée par des dispositifs invasifs permanents (cathéters, sondes…) ; ɆɆ les entrées et sorties permanentes augmentent la charge microbienne. L’hygiène concerne tous les supports de contamination Un agent infectieux peut être véhiculé par le matériel de soins et par les mains des soignants. Chaque jour, l’équipe doit donc veiller : ɆɆ au nettoyage et à la désinfection des cages, des surfaces et appareils, et à la stérilisation du matériel ; ɆɆ à la préparation aseptique et à l’hygiène des dispositifs médicaux en place : cathéters, drains, sondes urinaires, sondes de nutrition… ; ɆɆ à l’enregistrement des mesures d’hygiène (qui, quand, quoi, sur quoi) ; ɆɆ à l’hygiène rigoureuse des mains avant et après chaque soin. QUESTIONS-RÉPONSES Comment assurer l’hygiène des mains en milieu médical ? Avant tout, il faut éviter les « nids à microbes » sur les mains : pas de bijoux, ongles courts, propres et non vernis, blouse à manches courtes. La friction au gel hydro-alcoolique est la méthode la plus efficace et la plus rapide. Elle consiste à répartir le gel sur la surface des mains et entre les doigts pendant 20-30 secondes, jusqu’à évaporation complète. http://www.who.int/gpsc/5may/tools/affiche_friction_hydroalcoolique_comment.pdf?ua=1 Dans quelles situations la friction hydro-alcoolique n’est-elle pas suffisante ? Le lavage à l’eau et au savon antiseptique – en distributeur – est nécessaire quand les mains ont été souillées (car les matières organiques empêchent la désinfection) et après chaque passage aux toilettes, les mains étant rincées puis séchées avec un essuie-tout à usage unique. Le port de gants est indiqué avant tout contact avec des liquides biologiques, il n’exonère pas de la friction hydro-alcoolique avant de mettre les gants et après leur retrait. http://www.who.int/gpsc/5may/tools/Affiche_lavage_des_mains_comment.pdf?ua=1 12 l FOCUS ASV – Les urgences : sauver plus de vies Qu’est-ce que le triage des urgences ? Le triage permet de classer rapidement les patients selon leur état clinique afin de traiter en priorité ceux dont la situation est critique. Un protocole de triage standardisé aide l’équipe soignante à ne rien oublier et facilite la gestion du stress. Le triage permet de prioriser les urgences vitales De nombreuses affections mineures (diarrhée, blessure superficielle, vomissement léger, polydipsie, lésion cutanée…) peuvent être présentées comme urgentes par le propriétaire. Le triage permet de vérifier si l’animal est stable afin de se consacrer aux urgences majeures. Le protocole de triage doit être mis en œuvre dans les 5-10 minutes qui suivent l’arrivée de l’urgence. Il comporte : ɆɆ l’évaluation rapide des principales fonctions vitales ; ɆɆ la synthèse de l’historique du patient et du contexte. Le triage évalue en priorité trois fonctions majeures Quand elle survient, la mort est toujours causée par la défaillance d’une des trois Les paramètres du triage Fonctions cardiaque et respiratoire ɆɆ Fréquence cardiaque ɆɆ Couleur des muqueuses ɆɆ Temps de recoloration capillaire TRC ɆɆ Qualité du pouls ɆɆ Fréquence respiratoire ɆɆ Efforts respiratoires ɆɆ Auscultation thoracique (cardiaque et pulmonaire) ɆɆ Fonction neurologique ɆɆ Etat de conscience ɆɆ Mobilité L’échographie d’urgence recherche en priorité la présence de liquide dans les cavités. Les urgences : sauver plus de vies – FOCUS ASV l 13 fonctions : cardiovasculaire, respiratoire, neurologique. C’est pourquoi elles sont évaluées en priorité par les paramètres du triage, chacun devant être inscrit de façon méthodique dans la fiche du patient. Toute anomalie nécessite des mesures immédiates : oxygénation et pose d’une voie veineuse. Des examens rapides viennent compléter le triage L’ASV contribue à la réalisation des examens d’urgence : ɆɆ le bilan biologique minimal : hématocrite, protéines plasmatiques, glycémie, urée ; ɆɆ le ionogramme (sodium, potassium, chlorure, calcium, lactate), les gaz et le pH du sang ; ɆɆ la préparation de l’échographe et de la sonde pour l’échographie d’urgence des cavités abdominale et thoracique. QUESTIONS-RÉPONSES Pourquoi le triage n’évalue-t-il que trois fonctions majeures ? D’autres lésions pourraient sembler tout aussi dangereuses, en réalité elles ne peuvent tuer l’animal que si elles ont un impact sur l’une de ces fonctions vitales. Ainsi, une fracture ouverte du fémur n’entraînera pas la mort, sauf en cas d’hémorragie : dans ce cas, le risque devient lié à l’état de choc détecté par les paramètres de la fonction cardiovasculaire. Comment réaliser le bilan biologique rapide lors du triage ? Le bilan d’urgence nécessite juste 2 tubes hématocrites de sang ; le premier est centrifugé pour mesurer l’hématocrite, puis la concentration des protéines plasmatiques est lue au réfractomètre, ces valeurs renseignant sur la capacité d’oxygénation et le volume vasculaire. Sur l’autre tube, le sang total est testé sur bandelettes (glycémie et urée) pour rechercher une hypoglycémie ou une défaillance rénale. Qu’est-ce qu’une échographie FAST (Focus Assessment Sonography for Trauma)? Il s’agit d’une échographie rapide ciblée en urgence, qui a pour but de repérer la présence de liquides dans les cavités. Même si elle est moins précise que la radiographie, cette échographie est beaucoup moins traumatisante pour un animal instable, surtout en cas d’atteinte thoracique. 14 l FOCUS ASV – Les urgences : sauver plus de vies Comment oxygéner un animal en dyspnée La dyspnée traduit une difficulté respiratoire. Une dyspnée sévère est toujours un état critique, car les tissus sont privés d’oxygène et le moindre effort peut entraîner l’arrêt cardio-respiratoire. Collier à oxygène fait main. La dyspnée se traduit par des anomalies respiratoires Chez l’animal mal oxygéné (en hypoxie), les muqueuses deviennent bleutées (cyanosées) et la fréquence respiratoire augmente. D’autres signes peuvent être observés, comme une respiration sifflante (stridor), un effort à l’inspiration et/ ou à l’expiration, une dissociation entre les Masque à oxygène. mouvements du thorax et de l’abdomen (discordance), une posture anormale (ex : tête en extension). L’hypoxie entraîne toujours à terme l’arrêt cardiaque : oxygéner l’animal est donc la priorité absolue. Plusieurs techniques d’oxygénation sont possibles ɆɆ Le flow-by consiste à poser le tube diffuseur d’oxygène devant le nez de l’animal pour porter à 2540 % la fraction d’oxygène inspiré. Toutefois, certains animaux (chats) peuvent être gênés par le flux gazeux et détourner la tête. Les urgences : sauver plus de vies – FOCUS ASV l 15 ɆɆ Le masque à oxygène transparent : il est plus efficace que le flow-by (jusqu’à 55 % d’oxygène), mais souvent mal toléré. ɆɆ Le « collier à oxygène », moins stressant, consiste à obturer une collerette avec du film transparent alimentaire ; attention à laisser le quart du collier ouvert pour éviter la chaleur et l’humidité, surtout chez les grands chiens. ɆɆ La cage à oxygène permet d’apporter sans stress, à un chat ou un petit chien, 40 % à 60 % d’oxygène, mais l’oxygène s’échappe à chaque ouverture de la cage. ɆɆ La sonde nasale : c’est la méthode la plus sûre pour atteindre 60 % d’oxygène inspiré, mais elle est plus invasive et peut causer un stress important (surtout chez le chat). ɆɆ L’intubation et le ventilateur manuel (ex : Ambu Bag®) peuvent être nécessaires dans les cas les plus sévères. QUESTIONS-RÉPONSES Pourquoi ne faut-il jamais manipuler un chat dyspnéique non stabilisé ? Le stress entraîne une accélération du cœur et des mouvements de défense, qui consomment de l’oxygène et aggravent l’hypoxie. D’où l’importance d’éviter de stresser un animal en dyspnée, surtout le chat qui peut mourir brutalement si on essaie de le toucher, même pour un acte simple (examen, prise de sang ou radio). La seule option est donc de l’installer dans la cage à oxygène, sans aucune autre manipulation jusqu’à ce qu’il respire mieux. Ce temps sera mis à profit pour collecter l’historique auprès du propriétaire. L’utilisation d’un morphinique peut aider à diminuer le stress de l’animal. Comment régler le débit d’oxygène ? Quel que soit le dispositif choisi, le débit est réglé entre 100 et 400 mL/kg/min pour obtenir une augmentation significative de la concentration d’oxygène inspiré. Si l’animal bouge, il est essentiel de s’assurer que le circuit d’oxygénation reste opérationnel. Quelles sont les informations à collecter en cas de dyspnée ? Certaines informations peuvent orienter le praticien : l’animal sort-il ? Vit-il avec d’autres animaux et si oui, sont-ils malades ? Quand les signes sont-ils apparus ? L’animal tousse-t-il ? (contrairement au chien, un chat ne tousse qu’en cas d’affection bronchique). Attention : les propriétaires peuvent confondre la toux et les efforts de vomissement. 16 l FOCUS ASV – Les urgences : sauver plus de vies Quelle assistance pour un patient Certaines situations de dyspnée nécessitent des gestes techniques complémentaires, avec l’assistance de l’ASV, pour permettre d’oxygéner efficacement l’animal. Sonde nasale. La pose d’une sonde nasale sécurise l’apport d’oxygène La pose d’une sonde nasale est un acte simple pour oxygéner l’animal dont les voies respiratoires supérieures sont libres (en cas d’obstruction, une trachéotomie devra être pratiquée). Préparer le matériel : ɆɆ cathéter urinaire ou sonde alimentaire souple de format adapté ; Thoracocentèse. ɆɆ feutre marqueur, lubrifiant/anesthésiant local, ciseaux, clamp ; ɆɆ matériel de suture et porte-aiguille, ou colle chirurgicale. Positionner l’animal en décubitus sternal, tête immobilisée : ɆɆ de l’extérieur, la distance de la narine à l’angle externe de l’œil est repérée sur la sonde par un trait de marqueur ; ɆɆ le lubrifiant-anesthésiant est appliqué à l’entrée de la narine et au bout de la sonde, puis la sonde est introduite par la narine jusqu’au repère. Elle est suturée ou collée au bord de la truffe et sous l’arcade zygomatique. Les urgences : sauver plus de vies – FOCUS ASV l 17 dyspnéique La thoracocentèse nécessite une asepsie chirurgicale La thoracocentèse consiste à ponctionner le thorax pour aspirer le liquide ou l’air accumulé dans l’espace pleural. Préparer le matériel : ɆɆ tondeuse, désinfectant, anesthésique local, gants stériles ; ɆɆ aiguille à ailettes (chat), cathéter IV (chien) ou cathéter thoracique, robinet 3 voies, tubulure, seringues de 20 mL à 50 mL ; ɆɆ haricot + aspirateur en cas de liquide abondant. Réaliser l’antisepsie chirurgicale (7e-10e espaces intercostaux) : ɆɆ positionner l’animal en décubitus sternal ou latéral ; ɆɆ après anesthésie locale, la peau, puis la plèvre sont ponctionnées de manière aseptique en deux points décalés ; ɆɆ le robinet 3 voies est placé entre l’aiguille et la seringue afin de pouvoir obturer l’entrée d’air pour vider la seringue. QUESTIONS-RÉPONSES Pourquoi ponctionner un épanchement, même s’il ne s’agit que d’air ? Habituellement l’espace pleural, situé entre la paroi thoracique et le poumon, est « sous vide ». L’entrée d’air dans cet espace est une anomalie (pneumothorax) : comme dans le cas d’un liquide, l’air exerce une pression qui empêche le poumon de se déployer et d’oxygéner l’animal. Aspirer l’air ou le liquide permet de recréer le vide pleural et aide l’animal à respirer. Le liquide collecté est ensuite analysé pour déterminer l’origine de l’épanchement. Comment savoir si un patient est suffisamment oxygéné ? Les paramètres respiratoires doivent s’améliorer : les muqueuses redeviennent rosées, la fréquence respiratoire diminue, les efforts respiratoires s’atténuent. Il est difficile d’utiliser un oxymètre sur un animal en dyspnée, sauf si le modèle peut être fixé à la base de la queue : la saturation en oxygène à atteindre est d’au moins 95 %. Une fois l’animal stabilisé, la mesure des gaz du sang artériel est réalisée : la PaO2* doit être au moins de 80 mmHg. * Pression artérielle partielle en Oxygène Quels sont les examens d’imagerie à préparer ? La radiographie du thorax face/profil sera nécessaire, mais elle ne pourra être prise que sur un animal stable. Tant que l’animal est en dyspnée, l’échographie est mieux tolérée car elle ne nécessite pas de le déplacer ni de pratiquer une contention contraignante. 18 l FOCUS ASV – Les urgences : sauver plus de vies Qu’est-ce qu’un état de choc ? L’état de choc se caractérise par une insuffisance circulatoire qui entraîne une diminution de l’oxygénation et de l’alimentation des tissus. Si le choc n’est pas traité rapidement, il peut entraîner à très court terme la défaillance des organes et la mort. Il existe différents états de choc selon leur cause : ɆɆ le choc hypovolémique, le plus fréquent, est dû à une perte de liquide (ex : hémorragie, vomissement, diarrhée) ; ɆɆ le choc distributif est causé par une dilatation brutale des vaisseaux Pâleur des muqueuses – choc hypovolémique. périphériques (ex : choc allergique, septicémie) ; ɆɆ le choc cardiogénique est dû à la défaillance de la pompe cardiaque (ex : cardiopathie, arythmie sévère, valvulopathie) ; ɆɆ le choc obstructif est dû à un obstacle à la circulation du sang (ex : épanchement péricardique, embolie pulmonaire). Dans tous les cas, le défaut d’irrigation (hypoperfusion) prive les organes d’oxygène et entraîne à terme l’arrêt cardiaque. Les paramètres cliniques à suivre dans l’état de choc sont la couleur des muqueuses, le pouls et le temps de recoloration capillaire (TRC). Lors d’un choc hypovolémique, par exemple, les vaisseaux périphériques se contractent, diminuant le flux capillaire, ce qui explique : les muqueuses pâles, le pouls faible et l’allongement du TRC. Les urgences : sauver plus de vies – FOCUS ASV l 19 Pas de perfusion sans thermorégulation ! La fluidothérapie (perfusion d’un soluté) consiste, en cas de choc, à injecter rapidement dans la circulation un volume suffisant de liquide pour corriger l’hypoperfusion. Elle doit être toujours administrée par voie intraveineuse, en notant systématiquement la date de pose du (ou des) cathéter(s). Attention : Il est démontré qu’une hypothermie sévère (< 35 °C) réduit significativement l’effet de la perfusion, en particulier chez le chat. Il est donc très important de réchauffer l’animal, en utilisant de préférence des couvertures à air chaud. Il est également possible de tiédir le soluté à injecter. QUESTIONS-RÉPONSES Comment réchauffer un animal en hypothermie ? L’animal choqué doit être réchauffé très progressivement, car une élévation trop rapide de sa température peut entraîner une dilatation des vaisseaux qui ferait baisser sa pression artérielle, aggravant ainsi son état de choc. Les dispositifs à air chaud sont à privilégier (ex : Bair Hugger®) car ils diffusent une chaleur plus douce que les lampes et tapis chauffants. Faut-il toujours préparer une perfusion pour un animal en état de choc ? Préparer une perfusion est effectivement la règle en cas de choc hypovolémique ou distributif, les plus fréquents. Il y a cependant des exceptions : lors d’un choc de décompensation cardiaque, par exemple, la fluidothérapie est absolument contre-indiquée car elle aggraverait l’œdème pulmonaire, traité par injection de diurétique. Pourquoi un animal choqué n’est-il pas perfusé par voie sous-cutanée ? En cas de choc, la voie sous-cutanée est contre-indiquée pour plusieurs raisons : ɆɆ la vaso-constriction périphérique empêcherait une bonne absorption du soluté ; ɆɆ seule une petite quantité pourrait être perfusée, qui serait insuffisante ; ɆɆ le soluté mettrait trop longtemps à remplir le compartiment vasculaire. Seule la voie intraveineuse (ou à défaut intra-osseuse) est efficace. 20 l FOCUS ASV – Les urgences : sauver plus de vies Comment aider à gérer la fluidothérapie La fluidothérapie est le principal traitement en soins intensifs. Elle a pour objectif de stabiliser le volume circulatoire, la pression artérielle et la perfusion des organes et tissus. Comme tout traitement, elle doit être adaptée à l’état du patient et ajustée en fonction de son évolution. Quand préparer un soluté isotonique ? Les cristalloïdes isotoniques (NaCl à 0,9 %, Ringer Lactate, solution de Hartmann, Glucose 5 %) sont toujours les premiers utilisés car de même tonicité que les liquides extracellulaires. De plus, ils sont intéressants chez les patients déshydratés car ils diffusent largement dans les tissus (seulement 20 à 40 % du volume perfusé restera dans le sang). La fluidothérapie du choc ne se gère pas en volume/24 h, mais en bolus à perfusion rapide (15-30 min), renouvelables. Chez le chien, le volume du bolus dépend de l’état clinique : ɆɆ 10-20 mL/kg en cas de choc compensé ; ɆɆ 20-40 mL/kg en cas de choc modéré ; ɆɆ 40-60 mL/kg en cas de choc aigu et décompensé (la perfusion peut être accélérée avec un manchon à pression). Chez le chat : le volume d’un bolus sera au maximum 10-20 mL/kg, quel que soit l’état de l’animal. Quand préparer un soluté hypertonique ? Les solutés hypertoniques (ex : NaCl 4,5 % à 10 %) attirent l’eau des tissus vers la circulation grâce à leur tonicité élevée. Le praticien peut les choisir en cas d’œdème cérébral ou pour restaurer plus vite le volume circulant chez les grands animaux. Manchon à pression gonflable. Chez les chiens de taille moyenne ou de grande taille, il est possible d’utiliser un manchon à pression gonflable pour administrer rapidement les solutés. Les urgences : sauver plus de vies – FOCUS ASV l 21 du choc QUESTIONS-RÉPONSES Tous les solutés sont-ils équivalents pour un animal en état de choc ? Quand préparer un soluté colloïdal ? Les solutions colloïdales (HES, Dextran) sont constituées de macromolécules qui retiennent l’eau dans la circulation. Elles sont employées lorsque les cristalloïdes isotoniques sont insuffisants ou pour limiter le volume de perfusion. Leur utilisation se fait par petit bolus (5-10 mL/kg en 15-30 min). Non, une erreur de soluté peut avoir de lourdes conséquences (par exemple, un soluté hypertonique va aggraver l’état d’un animal déshydraté). Les solutés isotoniques, en revanche, sont équivalents pour traiter un état de choc, c’est surtout leur volume qui importe. Comment contrôler la fluidothérapie ? L’absence d’œdème, de rougeur ou de douleur au site d’insertion du cathéter est à surveiller, ainsi que les paramètres cardiovasculaires et respiratoires. Le chat, notamment, présente un risque élevé d’œdème pulmonaire, d’où l’importance de le perfuser par petit bolus, si nécessaire à la seringue. Si une perfusion est interrompue, le cathéter doit être rincé (flushé) toutes les quatre heures avec du soluté isotonique ou une solution d’héparine. Quelle différence entre la fluidothérapie du choc et la réhydratation ? L’animal choqué est perfusé par des bolus à débit rapide (deux à six gouttes/s), car la priorité est le remplissage vasculaire. Une fois le choc compensé, l’animal déshydraté est perfusé plus lentement, en 12-48 h, pour compenser sa déshydratation, son besoin d’entretien et ses éventuels déséquilibres. Tout ajout au soluté (ex : potassium) doit être inscrit au marqueur sur la poche. Le débit de perfusion en mL/min est calculé ainsi : (Volume total en mL/durée de perfusion en heures) divisé par 60. Puis il est réglé sur la pompe ou à la main : multiplier par 20 pour passer des mL/min en gouttes/ min, puis diviser par 60 pour obtenir des gouttes/seconde. 22 l FOCUS ASV – Les urgences : sauver plus de vies Comment alimenter un patient en soins Contrairement aux idées reçues, le traitement médical ou chirurgical n’est pas la seule priorité des soins intensifs. L’alimentation doit être mise en place dans les premières 24 h car elle est un facteur essentiel de l’intégrité digestive et de la guérison de l’animal. Sonde naso-oesophagienne : choisir le plus gros diamètre possible selon l’animal. L’animal doit être alimenté par voie entérale La nutrition entérale, qui consiste à nourrir l’animal par son tube digestif, est le mode d’alimentation le plus simple et le plus sûr. Elle débute dès que l’animal est stable, et ce même s’il a été admis pour des vomissements ou de la diarrhée. ɆɆ S’il est capable de manger, l’animal sera encouragé par des caresses, dans un environnement calme, et en lui administrant un stimulant de l’appétit si nécessaire (ex : mirtazapine). ɆɆ Si l’animal est anorexique, une sonde alimentaire est posée sans délai, soit par voie physiologique (ex : sonde nasooesophagienne), soit par une ouverture chirurgicale ou « stomie » (ex : sonde d’oesophagostomie, insérée dans l’oesophage). L’aide à la pose d’une sonde nasooesophagienne est simple, analogue à celle d’une sonde nasale à oxygène, si ce n’est que le repère sera tracé entre la narine et le 7e-8e espace intercostal, et que le patient déglutira au passage du pharynx. La sonde sera suturée Les urgences : sauver plus de vies – FOCUS ASV l 23 intensifs au bord de la truffe et au-dessus du crâne, et généralement protégée par la pose d’une collerette. L’aliment est essentiel pour éviter la fonte musculaire Un animal sain qui ne reçoit pas assez d’énergie consomme ses réserves de glucides, puis ses graisses. L’animal en état critique, quant à lui, détruit d’emblée ses protéines, avec des conséquences néfastes : fonte musculaire, diminution de la cicatrisation, de l’élimination des médicaments et des défenses contre les infections. Pour cette raison, l’aliment de soins intensifs sera en général : très énergétique, riche en protéines très digestibles, très appétant et assez liquide pour être administré par une sonde d’alimentation. QUESTIONS-RÉPONSES Pourquoi ne pas laisser l’animal en soins intensifs à la diète ? La muqueuse intestinale qui ne reçoit plus de nutriments s’atrophie et devient perméable au passage des bactéries intestinales dans le sang, avec un risque de foyers infectieux ou de septicémie. C’est pourquoi l’alimentation par voie digestive est essentielle pour maintenir l’intégrité et la fonctionnalité des cellules intestinales. Si une diète est nécessaire pour une anesthésie, une chirurgie ou un examen, sa durée sera limitée autant que possible. Pourquoi ne pas gaver l’animal ou attendre qu’il mange de lui-même ? Seulement 20 % des animaux malades mangent seuls la quantité suffisante. Attendre plusieurs jours qu’un animal anorexique remange est une perte de chance, car la malnutrition aggrave son état. Le gavage (ex : à la seringue) est lui aussi déconseillé car il augmente le stress de l’animal et entraîne un risque élevé de nausée, de vomissement et de fausse route. Pourquoi ne pas alimenter l’animal par une perfusion de glucose ? Une perfusion de soluté glucosé n’apporte que de l’énergie ; de plus, elle nécessiterait un tel volume pour couvrir les besoins caloriques (1,5 L pour un chien de 7 kg !) qu’elle n’est pas utilisable en pratique : par conséquent, dans deux cas sur trois, l’animal hospitalisé ne reçoit pas un apport nutritionnel suffisant tant qu’une sonde d’alimentation n’est pas mise en place. 24 l FOCUS ASV – Les urgences : sauver plus de vies Comment utiliser une sonde L’ASV joue un rôle essentiel pour nourrir l’animal en soins intensifs selon un protocole précis, maintenir la sonde d’alimentation opérationnelle et prévenir les complications. La réalimentation à la sonde doit être progressive Les repas seront fractionnés pour administrer de petites quantités à la fois. Le volume cible d’aliment permettant de couvrir les besoins de l’animal doit être atteint en trois jours : ɆɆ jour 1 : 1/3 du volume cible en cinq à six repas ; ɆɆ jour 2 : 2/3 du volume cible en cinq à six repas ; ɆɆ jour 3 : 100 % du volume en deux à quatre repas. Au-delà de trois jours d’anorexie, la transition se fera sur cinq jours. Chaque jour, l’animal est pesé avec la même balance. Son score corporel est aussi relevé, car le poids peut varier selon l’hydratation. L’objectif n’est pas que l’animal retrouve son poids normal, mais que sa masse musculaire reste stable. L’alimentation à la sonde nécessite des précautions ɆɆ Avant la première utilisation, prendre une radiographie pour vérifier le positionnement de la sonde dans l’œsophage. ɆɆ Avant et après chaque utilisation, effectuer une aspiration pour vérifier que la sonde est bien vide, puis instiller 5 à 10 mL d’eau tiède pour éviter qu’elle ne se bouche. ɆɆ Ne pas utiliser la sonde pour administrer des comprimés ! L’alimentation par sonde s’administre en petites quantités. Les urgences : sauver plus de vies – FOCUS ASV l 25 d’alimentation ɆɆ Par repas, administrer lentement un volume maximal de 10 mL d’aliment/kg, en 15-20 min. Réalimenter toutes les quatre à six heures. ɆɆ Pendant le repas et les deux heures qui suivent, pour éviter le risque de fausse route et favoriser la vidange de l’estomac, placer l’animal en décubitus sternal, l’avant du corps surélevé à 30°. ɆɆ Surveiller tout particulièrement les animaux grabataires, ceux qui sortent d’anesthésie ou qui reçoivent des morphiniques. QUESTIONS-RÉPONSES Pourquoi ne pas réalimenter l’animal anorexique de manière intensive ? Administrer d’emblée la totalité de son besoin énergétique à un animal en soins en état de dénutrition peut induire de graves perturbations métaboliques, pouvant entraîner une destruction des globules rouges et des troubles cardiaques. Pour la nutrition par sonde, quels aliments peut-on utiliser ? L’alimentation par sonde nécessite un aliment dont la concentration en énergie et en protéines a été optimisée pour sa texture liquide, et dont la formulation est adaptée au métabolisme perturbé de l’animal malade (par exemple : une teneur en lipides réduite en cas de pancréatite chez le chien). Pour ces raisons, il est important de disposer d’un stock d’aliments de soins intensifs. Quelles sont les complications possibles d’une sonde entérale ? Le principal risque est le retrait de la sonde, dont l’aspect est vérifié chaque jour. L’irritation digestive peut parfois entraîner une régurgitation, voire une fausse route : les signes digestifs et respiratoires sont donc à surveiller. En cas de stomie chirurgicale, la plaie est contrôlée et désinfectée quotidiennement. Une sonde qui ne s’est pas vidée doit alerter sur un défaut de vidange gastrique. Enfin, si la sonde se bouche, on procède par injection/aspiration d’eau chaude (37 °C). – Astuce : certains praticiens utilisent avec succès le Coca-Cola® (non light). EXEMPLE DE FICHE JOURNALIÈRE D’HOSPITALISATION* LUCY - Jack Russell Terrier Date d’admission : 16 /01/……. à 20 h Propriétaire : M. Dupont / Tel xxxxxxxx Prévision visites du propriétaire Femelle stérilisée : 3 ans Motif : Accident de la circulation Référée par : Dr Vét / TEL xxxxxxxx Lun Mar Mer Jeu Ven Sam Dim 17-19 - 17-19 - 17-19 17-19 17-19 Diagnostic Recommandations Polytraumatisé PARAMETRES Poids : SC* : Suivi par : Date : Heure : Muqueuses : TRC* : FC*: Pouls : Conscience : Mobilité : FR* : Anomalies : Température : Déshydratation : Urines : Selles : CATHETER(S) : Posé le : Par : Flush 1 Flush 2 Flush 3 Quantité Débit Début Fin Remarques Dose Voie H EXAMENS H Résultat H Commentaires Volume Heure Remarques : Retrait 1. 2. 3. Autre dispositif FLUIDOTHERAPIE 1. 2. 3. TRAITEMENTS 1. 1 2. 2 3. 3 … … NURSING 1. 2. NUTRITION Volume Heure Pesée EAU Aliment : Volume mL/repas : Sonde posée le : 1 repas /…h : DOULEUR Matin Légère Modérée EXAMEN CLINIQUE Matin SC = Score corporel TRC = Temps de recoloration capillaire DOULEUR Après-midi Sévère Légère Modérée DOULEUR Soir Sévère EXAMEN CLINIQUE Après-midi FC = Fréquence cardiaque FR = Fréquence respiratoire Légère Modérée Sévère EXAMEN CLINIQUE Soir *Adaptée d’une fiche SIAMU Les urgences : sauver plus de vies – FOCUS ASV l 27 E SHUTTERSTOCK – PHOTO-SD n situation d’urgence, l’équipe soignante est plus efficace quand ses rôles sont bien définis et complémentaires. Ainsi, le vétérinaire gagnera un temps précieux pour le diagnostic, la prescription et les actes, s’il peut déléguer en toute sécurité à l’ASV l’accueil des urgences, la gestion et l’hygiène du matériel, mais aussi la mise en œuvre et la surveillance de certains soins tels que l’oxygénation, la fluidothérapie et l’alimentation entérale. Nous espérons que ce Focus ASV aura su vous motiver pour la qualité des soins d’urgences, que ce soit par la formation permanente ou par la mise en place et l’amélioration de protocoles de soins.