dossier thématique d ossier thématique Réseaux de soins en cancérologie Network of care in cancerology ● ● E. Levy* ▶ RésuMé Le but des réseaux de soins en cancérologie est d’améliorer la prise en charge des patients en homogénéisant les pratiques, en coordonnant le mieux possible les professionnels de santé autour de ces patients. Au-delà des simples amitiés entre filières de soins, la mise en place d’un réseau nécessite une coordination et une redistribution des rôles des intervenants. L’exemple du réseau du sud et de l’ouest parisiens est présenté. Mots-clés : Réseau de soins – Cancer. ▶ SUMMARY Coordination between health actors is necessary to enhance patient care. Communication and organisation of the professional is the first target for the institution. The organisation of south and west of Paris is presented in 75-3 network. Keywords: Network of care – Cancer. L a mise en place de réseaux en cancérologie est en cours depuis une dizaine d’années. Le but de ces réseaux est d’améliorer la prise en charge des patients en homogénéisant les pratiques et en coordonnant le mieux possible les professionnels de santé autour de ces patients. Avant tout, il importe de dissocier la notion de réseaux de soins de celle de “filières de soins”, constituées de façon informelle entre des professionnels de santé sur la base du contact direct entre ceuxci et de leur appréciation mutuelle. L’importance du cancer en termes de santé publique et son incidence croissante rendent nécessaires une coordination entre les acteurs, une homogénéisation des pratiques et une redistribution des rôles des intervenants, afin d’optimiser la prise en charge individuelle des patients. Les disparités de prise en charge entre les différentes filières de soins ont en effet été clairement mises au jour. L’information et la communication entre les spécialistes et les généralistes sont insuffisantes. * Service d’oncologie médicale, hôpital européen Georges-Pompidou, Paris. 398 Au centre de la structuration en réseaux s’inscrivent le patient et le médecin traitant, qui doit pouvoir intervenir à toutes les phases de la maladie pour le bien-être physique et moral du patient. L’Agence régionale de l’hospitalisation (ARH) a suscité la structuration de trois réseaux à Paris. Nous prendrons pour exemple la constitution en cours du réseau du sud et de l’ouest parisiens ; “pour exemple”, parce qu’à chaque secteur géographique correspondent des particularités qui imposent d’“imaginer” une organisation, les tutelles ayant le bon sens de ne pas imposer un schéma type voué aux tiroirs administratifs. Les premières difficultés à Paris sont les suivantes : ▶ le nombre important de centres traitant des patients atteints de cancer ; ▶ la mobilité des patients entre les secteurs géographiques ; ▶ les filières de soins empruntées par les médecins traitants dans tout Paris et même la région parisienne. Mise en évidence des besoins Au cours des réunions préparatoires, un état des problèmes rencontrés par les acteurs professionnels autour du patient a été établi. Du côté des institutions Il existe trois types de structures prenant en charge les patients : les centres hospitaliers, les cliniques, les centres anticancer. Leurs pratiques diffèrent notablement, de même que leurs possibilités, en particulier pour les problèmes relatifs aux conséquences des traitements, pour les soins de support, ou en ce qui concerne les soins palliatifs. Tous ont en commun de devoir faire face à une population croissante de patients, et donc de redéfinir les limites de leur action auprès d’un patient par rapport au médecin traitant. Du côté de “la ville” L’un des problèmes majeurs pour les médecins traitants est l’absence d’information adéquate dès la prise en charge du patient en milieu cancérologique, qui l’exclut souvent des soins non seulement pendant, mais également après les traitements (parfois même longtemps après). Les variations dans les attitudes des différents centres concernent la stratégie de prise en charge, mais également les détails de celle-ci. Ainsi, les traitements associés, le rythme de la surveillance entre les traitements et les attitudes adoptées en fonction des événements sont autant de variables qui ont de quoi rendre perplexes les médecins traitants, dont les patients suivent différentes filières. Ce ne La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 9 - novembre 2007 sont pas seulement des problèmes de répartition des tâches ; le traitement des données (résultats biologiques, complications intercurrentes) n’est souvent pas clairement attribué, ce qui peut être source de danger pour le patient. Que dire des intervenants paramédicaux, qui se trouvent souvent face à un patient et à une ordonnance, sans autre information ? Du côté social Il y a tout à créer entre les services sociaux des institutions et ceux de la ville. Le fossé est grand entre ceux intervenant dans le contexte de vie du patient, et dont l’information est quasi nulle, et les services sociaux hospitaliers, qui doivent faire face à l’urgence, en mettant en place une enquête parfois difficile, sans lien avec l’assistance sociale de la ville. À l’interface, ces dysfonctionnements sont dommageables pour le patient et pour les professionnels de tous les bords, aboutissant à des séjours hospitaliers vains ou inutilement prolongés et à des complications qui auraient pu être évitées. Ce ne sont là que quelques aspects de l’importance des problèmes à résoudre pour constituer un réseau ; face à un emmêlement de fils, l’important paraît être de ne pas risquer de bloquer la situation en tirant dans tous les sens. Le réseau de cancérologie du sud et de l’ouest parisiens se constitue donc volontairement sur une base pratique, essayant de se fixer au départ des objectifs simples. acteuRs du Réseau L’ARH a défini trois zones géographiques à Paris, trois réseaux. Le réseau du sud-ouest parisien regroupe les arrondissements 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 14 et 16. Les acteurs sont représentés en collèges : acteurs de ville, établissements de santé, acteurs médico-sociaux. L’Assistance publique – Hôpitaux de Paris n’est pas représentée en tant que telle, couvrant par ses établissements l’ensemble des réseaux et au-delà, mais des représentants de services des hôpitaux concernés peuvent y participer. objectifs du Réseau Les aspects discutés plus haut ont été évoqués lors des réunions préparatoires à la constitution d’un dossier promoteur en vue d’une structuration formelle et d’un financement nécessaire au fonctionnement. Clairement, les deux axes de travail permettant de mettre en place des actions et des améliorations rapides et concrètes sont l’information et la communication. Encore faut-il les circonscrire dans une action concrète. Information : la connaissance et l’accessibilité des acteurs Qui fait quoi et où ? Résoudre ces questions au sein du réseau géographique requiert un outil de type annuaire, permettant La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 9 - novembre 2007 de répertorier les acteurs du réseau. Une tâche qui paraît simple quoique fastidieuse, mais dont la réalisation pratique est plus complexe : faut-il y insérer tous les organismes, toutes les sociétés, toutes les sources d’information ? Quelles formes doit prendre cet outil ? Cet objectif a été choisi prioritairement dans la constitution du réseau. Il concerne les médecins, les infirmières, les pharmaciens, les institutions, les assistantes sociales, non exhaustivement. Communication : le dialogue Encore une évidence, dont la réalité est nuancée par les échanges entre les acteurs de ville et les institutions. Dans ce domaine, c’est le souci d’améliorer la prise en charge au quotidien qui domine la stratégie du réseau de Paris Sud et Ouest. Ainsi des mesures pourront être appliquées, des “détails”, mais d’une importance, en réalité, considérable : communication au médecin traitant des éléments nécessaires à la prise en charge en relais d’hospitalisation, différenciés des aspects techniques spécialisés ; répartition explicite des tâches – qui voit les résultats ? qui équilibre les traitements associés ?, etc. Simple, non ? Et pourtant, sa mise en œuvre demande un examen de chaque situation en fonction des types de centres, d’une homogénéisation des pratiques au moins dans ce domaine et dans un premier temps. Les moyens de communication des informations sont donc le deuxième axe essentiel dans la mise en œuvre de ce réseau. dossier thématique d ossier thématique avancée du pRojet Le dossier promoteur du réseau, définissant les modalités de son fonctionnement ainsi que ses objectifs, a été déposé aux tutelles chargées de juger de sa cohérence, et donc d’autoriser un financement. Le but étant de progresser sûrement, les actions seront mises en place graduellement, afin d’éviter les pièges d’une construction démesurée en abordant l’ensemble des problèmes. La philosophie qui émane de ces réseaux pourrait être : “Apprenons à nous connaître pour travailler ensemble.” conclusion Les réseaux de soins en cancérologie sont “obligatoires”. La forme d’un réseau dépend de son environnement, de la démographie médicale, de l’épidémiologie locale des cancers. La difficulté de sa mise en place tient au fait qu’il ne doit pas constituer une limite dans la liberté du lieu de prise en charge. Son but est d’améliorer la permanence de la qualité des soins, leur homogénéité quel que soit leur lieu d’administration, et finalement de permettre le traitement des patients dans tous ses aspects, avec une sérénité optimale tant des patients que des professionnels de santé de ville ou institutionnels. ■ 399