Accent aigu justice flagrante. Et malgré la supériorité militaire des agresseurs, le conflit a trouvé finalement une résolution politique; en effet, c’est suite à une trahison d’un groupe philo-athénien au sein des Méliens que les Athéniens ont pu prendre la ville. Tous les hommes en état de combattre ont été massacrés, les femmes et les enfants ont été réduits en esclavage. Ceci s’est passé en 416 av. JC quand la ligue de Délos était à l’apogée de son pouvoir. Cependant, en 404 av. JC, c’est Sparte qui finit par remporter la guerre dite du Péloponnèse et c’est Athènes qui a dû se soumettre. Ce récit, imaginé par Thucydide, car il n’y a pas assisté, a été utilisé comme ligne de conduite dans l’histoire plus récente, par exemple quand l’Angleterre a décidé de bombarder la capitale du Danemark, Copenhague, en 1807, malgré sa neutralité stricte dans le conflit entre la France et l’Angleterre. Sa neutralité était, de fait, favorable à une des parties, ce qui a amené le chargé d’affaires anglais, Jackson, de mettre en garde le prince du Danemark comme suit: „La guerre est la guerre, …il faut se résigner à ces nécessités et céder au plus fort quand on est le plus faible.“ Il semble pourtant que, lors des nombreuses guerres de nos jours, les forts n’ont plus l’audace ou l’outrecuidance de justifier les agressions de façon aussi simple que ne l’ont fait les Athéniens. Il faut, pour faire joli, des raisons qui justifient l’entrée en guerre, que ce soit l’attaque de l’émetteur de radio à Gleiwitz par les Polonais en 1939 ou les attaques contre différents navires étatsuniens, le Maine en 1898 dans la baie de La Havane, le Lusitania en 1915, l’USS Maddox en 1964 dans le Golf de Tonkin, le USS Liberty en 1967, la liste est longue. Plus récemment, ce sont la présence d’armes de destruction massive, d’armes nucléaires ou les attaques aux armes chimiques qui sont mobilisées pour servir de justificatifs. Sous l’influence du droit international peut-être? S’inspirer des classiques. Ainsi, la connaissance de nos classiques peut nous instruire pour la vie de tous les jours de façon bien utile. Dans ce cas-ci, que le droit international est un instrument indispensable, mais que son utilité est limitée, tel que démontré par Thucydide il y a de cela presque 2500 ans. Un autre épisode qui me tient à cœur, depuis mon adolescence, est celui de la lutte entre les Horaces et les Curiaces. Tout en étant du domaine des légendes, rapporté par Tite-Live, cet épisode décrit la façon la plus extraordinaire de résoudre des conflits, à peu de frais. En effet, vers 650 av. JC les villes de Rome et d’AlbaLonga sont en compétition pour la suprématie dans la région. Afin de déterminer le vainqueur, les habitants désignent de chaque côté trois champions qui doivent s’affronter, sous les yeux des spectateurs des deux camps. Les circonstances veulent que de chaque côté, trois frères sont désignés, d’un côté les frères Horace, de l’autre les frères Curiace. Le résultat du combat est accepté par tout le monde et les frais en restent là. On imagine avec un plaisir indéniable la dernière guerre d’Irak, menée de cette façon, entre les frères Bush et les frères Hussein. Ah, la sagesse de l’antiquité! Si elle pouvait peser un peu plus sur nos vies modernes. Au lieu de remplacer son enseignement dans nos écoles par des acquisitions de „compétences“, parmi lesquelles sûrement comment faire démarrer un ordinateur de la dernière mouture? Photo: Wikipedia étant juste, les dieux allait les soutenir. Celui de l’assistance des alliés: en fin de compte, les Spartiates, en guerre avec Athènes, n’allaient pas accepter un tel comportement de leur ennemi. La ligne de conduite des Athéniens fût annoncée comme suit: „Il faut se tenir dans les limites du possible et partir d’un principe universellement admis: c’est que dans les affaires humaines, on se règle sur la justice quand de part et d’autre on en sent la nécessité, mais que les forts exercent leur puissance et que les faibles la subissent.“ Les Méliens: „Vous érigez en principe l’utile plutôt que le juste!“ L’approche fondamentale des Athéniens est exprimée par cette partie du dialogue: „Si notre domination doit avoir un terme, nous sommes loin de nous en alarmer. Ce ne sont pas les peuples possesseurs d’un empire, tels que les Lacédémoniens; ce sont les sujets, lorsqu’il leur arrive d’attaquer et de vaincre leurs anciens maîtres. Ce que nous tenons à établir, c’est que nous sommes ici pour le bien de notre empire et que nous parlons en vue de votre salut, notre désir étant de vous commander sans obstacle et vous voir sauvés dans l’intérêt des deux parties.“ Et la fameuse réponse des Méliens: „Et comment peut-il être aussi avantageux pour nous d‘être esclaves que pour vous de dominer?“ Argument des Athéniens: „C’est qu’en vous soumettant, vous éviteriez les derniers malheurs et que nous trouverions notre compte à vous les épargner.“ En fin de négociation, les petits Méliens ne se sont pas soumis et ont soutenu une longue période de siège de la part des Athéniens, grâce aussi aux forces morales que leur a conféré leur position de refus de l’in- S. 9 L‘île de Mélos et sa capitale, 2500 ans après la destruction par les Athéniens