août 2007

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David ABOAB - août 2007
L’improvisation libre dans la formation du musicien
« L’improvisation, c’est n’importe quoi ! » (un élève)
Introduction
L'étude proposée ici répond au désir grandissant chez bon nombre d'élèves, enseignants
et directeurs de Conservatoires, d’associer la formation musicale avec la pratique de
l’instrument. Il s’appuie aussi sur le constat suivant : arrivés à un certain âge, très peu de
nos étudiants parviennent à s'approprier l'art musical. Pour tout dire, comment expliquer
que tant d’élèves adolescents décident d’arrêter l’apprentissage de la musique alors
même qu’ils commencent à acquérir un niveau de connaissances et de technique
instrumentale intéressants ?
Le besoin d’expression prend le dessus, ce qui est normal. L’élève a besoin d’exister par
lui-même. Parvenir à l’expression de soi par le biais de l’interprétation d’une œuvre
classique demandera encore des années de pratique. Avant cela, l’élève se retrouve plus
en situation de ressentir des impressions, celles que lui transmet le compositeur de
l’œuvre qu’il déchiffre.
L’expression se nourrit d’impressions. Et justement, il y a là, trop souvent, un déséquilibre
intérieur qui se crée.
Après sept ou huit années d’apprentissage, notre jeune musicien a déjà emmagasiné une
quantité non négligeable de partitions. Pour chaque nouvelle page, un même processus
constitué de lecture, de déchiffrage, de recherche des nuances et des plans sonores, de
sensations tactiles, d’exercices techniques, de mémorisation, d'interprétation,…pour
finalement tout oublier par la suite. Ceci est évidemment faux, mais c’est précisément ce
que ressent à très court terme la majorité des élèves qui se croient incapables (sauf cas
d’un examen ou d’une audition imminente) de s’exprimer spontanément sur leur
instrument malgré tout le travail fourni des mois, des années durant.
Devenus plus grands, les plus motivés des musiciens parviennent à discerner qu’en fin de
compte, les années passées sur l’instrument leur ont permis non pas uniquement de se
constituer un répertoire, mais aussi de développer des réflexes de lecture et une
musicalité plus grande, d’élargir leur palette sonore, d’améliorer leur technique,…Mais
combien d’élèves sont concernés ? Une minorité. Ceux qui passeront leur troisième cycle
et iront jusqu’au prix.
Tant d’élèves musiciens ne parviennent pas à ce niveau, qui « flanchent » à partir du milieu
du deuxième cycle, qui perdent la motivation alors même qu’ils pourraient commencer à
s’exprimer et accéder à leur propre langage musical.
Plusieurs facteurs sont bien sur à considérer : un contexte familial et socio-culturel plus ou
moins favorisé (parents musiciens, sorties au concert, ouverture sur les arts,…), un projet
musical en cours (groupe jazz, rock, musique de chambre,…).
Dans ce cadre, le rôle du professeur de musique, s’il ne peut agir sur l’extérieur de l’école
et la vie familiale, est bien de motiver l’élève, de le pousser à devenir le musicien qu’il veut
être, de l’aider à trouver son mode d'expression.
L’improvisation est un outil précieux pour cela.
Soyons honnêtes, l’improvisation s’adresse à tout le monde, y compris aux grands élèves
du classique. Elle permet d’aborder le langage musical autrement, en faisant appel à
l’intuition. Elle demande une autre forme d’écoute de soi et des autres, développe des
réflexes, fait travailler la mémoire, libère le geste…Et surtout, elle est la porte qui permet
d’accéder à notre monde musical personnel ; elle est une porte ouverte sur l’expression
et la création.
L’improvisation complète l’interprétation, elle construit un pont entre la musique de
l’autre (compositeur, partenaire,…) et la sienne propre. On constate trop souvent, dans
la mise en place et la réalisation d’œuvres musicales que le phénomène de l’écoute n’est
abordé que tardivement, lorsque la pièce est mémorisée, que les gestes ont été
« imprimés » dans le corps.
Dans le cas d’une session d’improvisation libre et non idiomatique, aucun des
participants ne sait à l’avance ce qui va naître de la combinaison et de la conjonction des
musiciens en présence. Chacun possède sa culture, son histoire, sa sensibilité, sa
technique propre mais la rencontre de ces différences oblige justement à considérer que
la seule manière de parvenir à une sonorité d’ensemble cohérente provient de la qualité
de l’attention portée à ce qui va être joué.
Les trois oreilles
Posons l’hypothèse d’une oreille à trois focales :
1- L’écoute microphonique . L’oreille fonctionne comme un micro relié à un
magnétophone qui enregistre les sons perçus. On l’associe généralement à la
reconnaissance des intervalles et des harmonies, à l’identification d’un caractère musical,
à la reproduction de figures rythmiques…C’est une oreille analytique, proche du son (pris
en tant qu’objet sonore), directement connectée à une mémoire dite de reconnaissance
ou mémoire positive : « j’ai déjà entendu ça, je peux donc l’identifier et le reproduire ».
Généralement, les programmes classiques de formation musicale, à ce niveau,
remplissent assez bien leur rôle.
2- L’écoute mésophonique. C’est une écoute ou l’autre entre en jeu. A ce niveau, il est
davantage question de parvenir à échanger des fragments musicaux avec un ou des
partenaires extérieurs. C’est un peu l’équivalent d’une conversation en petit groupe.
« Quel est le thème de la discussion ? », « Que dit-il ? », « Que puis-je répondre ? », « Quel
est le sens général de sa phrase ? », « Comment réagir ? ». Ce travail est plus abordé au
sein d’ateliers de pratiques collectives (orchestre, musique de chambre, jazz,…).
3- L’écoute macrophonique. L’oreille parvient à une écoute globale de la musique
produite, tout en s’attachant aux différents échanges qui la composent. Elle suit les
mouvements, entend les questions, les réponses, identifie le rôle de chaque pupitre,
anticipe les directions, prévoit les changements. C’est – lorsqu’elle est associée aux deux
autres types d’écoute - l’oreille du chef d’orchestre ou du compositeur. Elle inclut aussi
« tout ce qui est de l’ordre de la référence, tout ce qui est immédiatement identifiable par
chacun…que cela vienne de sa culture ordinaire ou de sa culture cultivée » (Alain
SAVOURET).
--On peut maintenant aborder le sujet de l’improvisation générative (issue du son, une
improvisation qui nait de la matière sonore) par cette question fondamentale : quels sont
les liens – et de quelles natures sont-ils - entre les développements respectifs de l’oreille
et le travail de l’improvisation libre et non idiomatique ?
Cette question en amène d’autres : Qu’est-ce qu’écouter dans un contexte
d’improvisation ? Comment appréhender une musique dont je sais que je ne l’entendrai
jamais plus ? Quelle oreille vais je travailler et comment la travailler ? Puis-je développer
mon oreille analytique sans support écrit ou enregistré ? Où se rencontrent création
instantanée et musique construite ? Y a-t-il un rapport quelconque entre créativité et
développement de l’oreille ? Comment improviser sans faire n’importe quoi (qui n'a aucun
sens) ?
Puis, dans un autre registre : Qu’est-ce qu’un son ? Qu’est-ce qu’un bruit ? Qu’entend-on
par matière sonore ? Le son est-il palpable ?
Ces questions sont rarement posées en cours de formation musicale.
Par la pratique de l’improvisation libre, l’instrumentiste va se retrouver confronté à ces
types de problématiques. Le support écrit traditionnel disparaît - et avec lui, tous les
entendements tacites qui rattachaient chaque individu au reste du groupe – et la
question se pose alors: « comment nous entendre, nous autres musiciens, maintenant
que nous ne voyons plus ? »
L’improvisation, c’est n’importe quoi
Didier PETIT (violoncelliste): « …essayer de faire n’importe quoi – mais pas n’importe
comment - même si cela est impossible, est extrêmement important en musique. C’est un
déclencheur, un outil, un processus de découverte de soi et des autres, un désinhibant ; cela
permet une évolution du discours musical et révèle des capacités à répondre à des situations
musicales diverses. »
Rainer BOESCH (pianiste et compositeur) : « On peut se demander s’il est possible à l’homo
sapiens de faire n’importe quoi. […]. Nous oublions que nous sommes lourdement
programmés, et devrions acquérir cette modestie qui nous enseignerait que notre liberté de
faire ou même d’imaginer « n’importe quoi » est extrêmement limitée ».
Ne fait pas « n'importe quoi qui veut ». Quand bien même, produire n’importe quoi – dans
le sens de quelque chose qui n’a jamais encore été fait – est ardu. Y parvenir, c’est
retrouver l’état - propre à la petite enfance - de découvreur, d’explorateur, d’inventeur.
On invente vraiment que ce qui n’a jamais été fait.
Il y a du « n’importe quoi » enfoui en nous ; l’un des intérêts de la création instantanée
que représente l’improvisation libre est justement de creuser des chemins pour y accéder.
C’est la recherche d’un état de transe, l’installation en profondeur dans le son qui, peutêtre, permettront un instant à mon être d’échapper à sa propre conscience et de rentrer
en phase avec la part d’inconnu et d’inexploré qui est en lui.
Sur l’oreille
Si nous reprenons notre postulat de départ, à savoir que l’oreille possède trois focales
pour l’écoute, la question que nous formulions en tout premier lieu était de savoir
comment travailler l’oreille dans le cadre d’une improvisation libre. A vrai dire, il semble
que la mémoire soit intimement liée à cette question. Dans un contexte de musique
classique écrite, l’oreille un peu préparée dispose de repères forts (cadences,
ponctuations diverses, lignes mélodiques et harmoniques prononcées et plus ou moins
facilement mémorisables). Les programmes de formation musicale travaillent beaucoup
sur la mémoire auditive tout au long d’années par le biais de ces outils. Et c’est, entre
autres, grâce au développement de cette mémoire que l’oreille s’affine.
Maintenant, nous pouvons nous demander : « Y a-t-il une mémoire à l’œuvre dans le
travail de l’improvisation libre et de quelle manière s’exprime-t-elle ? Le travail de l’oreille
est-il forcément lié à celui de la mémoire ? Les réponses varient-elles en fonction du
contexte musical ? ».
Le travail de l’improvisation part de l’hypothèse d’un développement de l’oreille par la
créativité et la recherche du son.
Prenons une musique et décidons de lui ôter mélodie, harmonie et rythme. Il reste le son.
C’est l’une des grandes idées de l’improvisation générative – c’est aussi celle de quelques
compositeurs contemporains, notamment John CAGE pour ne citer que lui – de
considérer le son en soi. Le son comme matière brute.
En reprenant notre idée d’une écoute microphonique, nous évoquerons une oreille qui ira
chercher au plus près de la matière sonore « pour en saisir un instant, un bref fragment
qui a été prélevé (Alain SAVOURET) ».
Quant à l’écoute mésophonique, elle est forcément sollicitée puisqu’elle est au centre des
échanges musicaux en temps réel, échanges qui constituent le socle de l’improvisation
générative. Le son, la matière sonore se créé bien à partir de là.
Enfin, chaque musicien peut effectuer, à un niveau d’écoute macrophonique, des
aller/retours entre l’intérieur du son et ses contours, afin de le parfaire, de l’affiner selon
ses propres références. D’ailleurs, c’est peut-être à ce niveau de finition du travail que les
choses sont les plus délicates, les référents de chacun ne coïncidant pas forcément. Se
pose alors le choix du compromis possible ou du refus pur et simple (je ne désire pas
m’intégrer à la formation du son en-cours, car je ne m’y reconnais pas).
Sur la créativité, qu’elle soit instantanée ou écrite, elle est intimement liée au travail de
l’oreille. Se mettre dans une situation d’invention, c’est se mettre à l’écoute de soi-même
et cela implique d’engager tout son être, pas seulement une partie de son corps- c’est
d’ailleurs l’un des grands principes de la méthode Dalcroze. Concernant l’improvisation,
l’oreille travaillera d’autant plus que la création sera approfondie… ce qui nous ramène à
la question de la construction et de la mémoire.
Le travail de l’oreille dans un contexte d’improvisation libre et non idiomatique est donc
très dense. « L’oreille n’entend que ce qu’elle a appris à entendre et surtout que ce qu’elle a
envie d’entendre », dit Rainer BOESCH. Ouvrir l’oreille, affiner la perception, c’est élargir le
champ musical, c’est apprendre à écouter tous les aspects du sonore.
Ecriture et mémoire
La partition écrite, inscrite dans l’histoire et dans la société de son temps rassemble des
musiciens d’une même sensibilité et chacun sait, au bout du compte, quel son conviendra
le mieux pour telle ou telle œuvre de telle période. Une partition écrite est un bout
d’histoire de la musique, un échantillon de la mémoire musicale collective.
C’est la mémoire qui constitue en grande partie la qualité du son recherché.
Pour les élèves en instrument, souvent, cette mémoire qui est en train de se construire
n’est pas un support suffisant pour appuyer un déchiffrage et une bonne interprétation. Il
faut re-découvrir la musique à jouer, se réinstaller progressivement dans le son par un
travail quotidien d’écoute et de pratique d’ensemble.
Pour les musiciens plus avancés ou professionnels, d’une certaine façon, par le biais de la
mémoire, le son est déjà installé avant de commencer le travail, avant même de jouer la
première note. Je dois jouer un quatuor de Mozart ; j’ai déjà joué une partition de ce
compositeur maintes fois, de le connais fort bien, j’ai les disques de toute ses œuvres,
etc…Je me rappelle du son à produire ; au pire, j’en ai déjà une idée.
Il y a une mémoire du son spécifique à la musique écrite.
Improvisation et mémoire
L’improvisation met le musicien en relation directe avec le son. Celui-ci ne s’établit pas à
l’avance puisqu’il n’y a pas de référent sonore, pas de partition.
Pourtant, la création d’un son dans l’instant fait bien appel à la mémoire. Le son est une
mémoire en soi. Ce qui sort de mon instrument est déjà sorti dans un autre contexte.
L’impression de faire du neuf étant une illusion - sauf cas vraiment exceptionnel (voir cidessus le chapitre traitant du « n’importe quoi »), il me faut bien accepter l’évidence : ce
que je crois jouer « spontanément » provient d’une partie de moi-même, un fragment
musical mémorisé et stocké.
Travailler le son en improvisation revient donc à fouiller sa mémoire, à y mettre de l’ordre,
à sélectionner les éléments sonores que l’on va privilégier. Ce travail se fait par l’oreille et
pour l’oreille. Une mémoire épurée permet une meilleure écoute de soi-même et, à
fortiori, des autres.
Si le travail de la mémoire en musique écrite est un travail de stockage de sonorités,
celui à l’œuvre en improvisation est un travail de tri, d’ordonnancement, de
hiérarchisation. Il tient compte de ma personne et des choix que je décide d’opérer. En
ce sens, l’improvisation aboutit à une personnalisation du son.
Sur le cadre, le geste créateur et l’intention musicale
Ces questions sont primordiales tant dans un contexte de musique écrite que de musique
improvisée.
L’un des apports fondamentaux de l’improvisation libre est de permettre de lâcher prise.
Non qu’il s’agisse de se laisser aller à faire « n’importe quoi » de manière systématique, il y
a certaines situations qui permettent et encouragent l’oubli de soi. Par exemple,
l’expression de sentiments humains s’accompagnera d’une mise en situation de tout le
corps. On ne va pas exprimer la joie en faisant la moue ou l’amour en restant figé sur
place ; il faut accompagner le jeu, engager son être en totalité, théâtraliser, danser,
mimer le sentiment joué.
En élargissant le cadre de l’improvisation et en proposant une session « sans consignes
particulières », on met l’élève en face d’une infinité de possibles ; on constate alors
plusieurs réactions, suivant le tempérament de chacun : celui qui n’ose pas jouer de peur
de faire « n’importe quoi » justement ou celui qui se libèrera complètement. Il faut alors
accompagner l’élève dans sa recherche, l’orienter vers ce qui lui fait défaut : libérer
l’expression et le lâcher prise chez le timide et inviter à la construction lorsque
l’improvisation s’éparpille dans tous les sens. Mais, dans tous les cas, il faut donner une
intention à ce que l’on joue, un sens. Et c’est le cadre qui définira la nature de cette
intention.Yehudi MENUHIN disait que « la musique aussi abstraite et improvisée soit-elle
aura toujours l’homme comme objet car elle se rattache, qu’on le veuille ou non, à des
choses humaines, conscientes et enfouies. »
Petite parenthèse sur la peinture. Il faut avoir vu les œuvres des peintres de la période de
l’abstraction lyrique (l’immédiat après guerre, les années 1945-1955), et tenter de cerner le
sens profond de cette libération du geste (Georges Mathieu, Hans Hartung, Gérard
Schneider,…) ; on peut le voir comme un affranchissement d’une vision de la réalité
devenue obsolète à force d’avoir été reproduite maintes fois ; on peut le voir aussi comme
une re-définition du cadre ou un nouveau rapport de force toile/cadre, qui sous-entend un
éclatement de ce dernier.
En musique comme en peinture, la libération du geste, en fin de compte, est toujours
soumise à la contrainte et à la tension du cadre ; l’intensité musicale et le sens musical
seront d’autant plus forts que la prise de conscience du cadre et de sa volonté de brisure
(car le désir profond de tout cadre est d’être brisé) seront présents à l’esprit de
l’improvisateur.
Sur la créativité comme outil de lecture et d’écoute
(susciter la faim chez l’élève)
On s’attache toujours plus à ce qui vient de soi.
Les problèmes de lecture de notes chez certains élèves m’ont toujours semblé le résultat
d’un désengagement vis à vis de celle-ci et vis à vis de l’écriture en général. Prenons un
enfant qui n’aime pas lire de livres. On peut le forcer à lire et à lire encore, tant qu’il n’aura
pas compris en quoi lui-même est concerné, cela ne servira à rien. Maintenant, décidons
de demander à ce même enfant d’écrire quelque chose : une petite aventure, une petite
histoire de son cru, une rencontre…et demandons lui de la lire à haute voix. Evidemment,
l’implication n’est pas la même et le résultat non plus.
Le monde des générations à venir s’annonce très différent du nôtre ou de celui de nos
parents. Les frontières entre l’illusion et le réel sont en train de disparaître - Baudrillard
nomme ça l’Hyperréalité. Qu’il s ‘agisse de la Haute-Fidélité pour le son (nous parlons
actuellement de prise de son pentaphonique, qui permet une transcription intégrale du
contexte sonore d’un lieu vers un autre), de la Haute-Définition pour l’image (sans parler
d’Internet), l’illusion disparaît, le réel sort de l’écran ou des haut-parleurs et prend toute
la place. Voilà le monde qui se profile pour les générations futures. On comprend alors
qu’il soit difficile de demander aux jeunes élèves de lire quelque chose qui ne les concerne
pas à une époque où ils s’identifient à tout, où tout vient à eux.
C’est pourquoi il semble important d’encourager l’élève à créer, à être acteur, à participer
à cette grande réalité qui l’envahit. Il faut lui donner envie de lire, écouter et jouer de la
musique. En parvenant à établir des liens entre sa propre musique et celle qu’on lui
demande d’apprendre, on peut espérer faciliter considérablement le processus
d’assimilation.
L’improvisation est une création, une composition instantanée de l’instant. Comme tous
les autres arts, elle se nourrit pour exister. De même que l’élève écrivain ne lit plus mais se
nourrit de livres d’auteurs, l’élève compositeur ou improvisateur (le processus est le
même) éprouvera le besoin et l’envie de se nourrir de musique. Un élève qui a faim de
musique se motivera de lui-même pour la lecture et l’écoute.
Sur une autre vision de la partition, de soi-même et de la
notation écrite
En faisant le grand saut dans l’improvisation et en dé-couvrant sa propre musique,
l’instrumentiste change en substance son rapport à la partition écrite. Elle était jusque là
son principal accès à une production musicale, d’où, souvent, sacralisation, mystification,
inhibition, blocage....
Pouvoir se passer de l’écriture, c’est d’abord entretenir un rapport autrement plus sain,
pouvoir se mettre sur un pied d’égalité avec elle.
Le musicien : « Je me trouve face à une partition à déchiffrer et j’ai appris que je suis moimême une partition en puissance et en devenir. J’ouvre mes oreilles plus volontiers et
j’avance curieux car j’ai la volonté de comprendre cet autre (la partition écrite) qui est en
face de moi et qui va enrichir mon être musical.
Quant aux signes, j’apprends à les reconsidérer non plus en tant que simples notes mais
comme de véritables objets sonores. Chaque note est un petit objet porteur de son qu’il
convient de libérer. Et la partition étant elle-même un objet sonore, je deviens par
conséquent
objet sonore à mon tour. Je vais pouvoir puiser dans ma partition
intérieure les outils musicaux nécessaires qui faciliteront mon travail technique et
d’interprétation de la partition écrite. Par l’improvisation, je peux améliorer mon rapport
à l’écrit ».
Le pianiste Horowitz adorait improviser. Outre le fait que cela lui permettait d’ajouter
une part géniale de création personnelle à toutes ses interprétations, il considérait que
c’était là un merveilleux outil de travail. Quand un trait lui posait problème, il le
transformait, se l’appropriait, le faisait sien. Puis, une fois le travail terminé, il le
réintégrait à son contexte musical. Belle leçon de musique où interprète et compositeur
se fondent en un seul et même créateur.
Sur l’Autre
Quand j’évoque l’Autre, je pense Alternance, Alternative, Altérité.
1Découvrir l’Autre, dans l’improvisation, c’est d’abord découvrir les échanges que je
peux avoir avec lui, c’est le laisser parler, savoir me taire en même temps que savoir
imposer ma propre parole. C’est finalement accepter l’idée d’un renouvellement de mon
propre langage par l’interaction de celui-ci avec le langage du partenaire. L’Alternance en
improvisation, c’est la subtile recherche d’un équilibre dans l’installation d’un courant,
d’un flux qui peut circuler librement d’une borne à une autre, sans se heurter.
2Découvrir l’Autre, c’est savoir reconnaître qu’une autre issue que la mienne est
possible. C’est ne pas me bloquer la voie, savoir admettre la fin ou l’inutilité de mon
discours dans le moment présent. C’est accepter qu’une autre musique qui ne vienne pas
directement de moi puisse m’ouvrir de nouvelles portes. L’Alternative en improvisation,
c’est laisser l’Autre venir à mon secours en cas de noyade, c’est accepter de recevoir une
aide que je n’ai pas forcément demandée.
3- Découvrir l’Autre, c’est enfin pouvoir rentrer en lui, trouver les clefs qui me
permettront d’accéder à sa musique intérieure ; savoir être bienveillant dans le propos
et, quand il le faut, ne pas hésiter à stimuler son être musical ; anticiper, analyser ses
réactions, repérer ses réflexes, ses points forts, ses failles. Jouer avec. Le laisser jouer
avec moi.
Conclusion
Les vingt cinq exercices présentés en annexes s’adressent aux classes de Formation
Musicale. Ils se proposent de venir compléter et enrichir les cours traditionnels par un
autre travail de l’oreille. Cela sous-entend, du point de vue logistique, que les élèves
puissent venir occasionnellement en cours avec leur instrument. Ce n’est pas toujours
facile, car encore non inscrit dans les habitudes (l’instrument, c’est pour le cours
d’instrument).
Pourtant, il semble aujourd’hui important de faire entendre à tous l’importance de cesser
d’isoler et de cloisonner les cours. C’est l’instrument, finalement, qui, en plus du dialogue
et de la concertation entre professeurs, peut aider à cela.
Malgré tout, il arrive que des élèves soient empêchés, pour une raison ou une autre,
d’amener leur outil de travail. Dans ce cas, le travail avec la voix leur sera tout autant
bénéfique. C’est aussi l’occasion de leur faire découvrir les percussions (pour ceux dont
ce n’est pas l’instrument principal). Précisons bien que la technique instrumentale n’est
pas directement traitée dans ces exercices. C’est le travail autour du son qui nous
importe.
Ici, il faut entendre qu’il n’est évidemment pas du ressort du professeur de FM d’aborder
les domaines techniques de l’instrument (doigtés, positions, respirations,…). En
revanche, les différents points traités par l’improvisation (perception du son, lâcher prise
sur l’instrument, créativité dans l’instant, travail de l’imagination, de la construction, de la
mémoire, du geste musical, du rythme,…) seront des compléments précieux au
développement de l’élève musicien. Il n’y a pas qu’une technique, il n’y a pas qu’une
virtuosité en musique. Savoir écouter et adapter son oreille à un environnement sonore
demande de la technique, élaborer sa musique dans l’instant – en tenant compte d’un
contexte et d’un projet musical donnés - est une virtuosité en soi. Parvenir à visiter et à
exprimer clairement des émotions n’est pas une mince affaire.
Un autre objectif de ce travail est d’inviter l’élève à reconsidérer la musique en lien avec
d’autres arts. C’est pourquoi, bon nombre d’exercices s’ouvrent sur des domaines tels
que la peinture, la littérature, la poésie, le théâtre,…
Pour ce qui est du domaine musical à proprement parler, il me semble que pratiquer une
ouverture sur d’autres métiers de la musique permet un élargissement de la conscience
de l’élève. Qu’est-ce que diriger un orchestre ? Qu’est-ce que créer de la musique ? Toutes
ces questions ne doivent pas être traitées en dehors de la formation de l’élève. Au
contraire, elles doivent être abordées le plus tôt possible, dès l’enfance.
L’improvisation, à ce niveau là, a son mot à dire. Elle permet, de par sa grande flexibilité et
son aspect ludique, de simuler aisément des situations musicales différentes et donne
l’occasion aux élèves de se créer des personnages, de jouer à…C’est aussi cela, former un
musicien.
Je m’arrête un instant sur la notion d’improvisation libre et non idiomatique ; elle signifie
une improvisation qui ne fait usage d’aucun code prédéterminé, si ce n’est celui qui est
défini tacitement entre tous les musiciens au moment de jouer. C’est ce qui la distingue
d’une improvisation dans un cadre jazz, par exemple, où les codes sont donnés à l’avance
et dont le langage procède d’une grammaire, d’une syntaxe et d’un vocabulaire propres
au jazz.
Les exercices qui suivent se rattachent, pour la majeure partie, à un cadre d’improvisation
non idiomatique. Quelques uns se rattachent à des règles d’harmonie mais ils constituent
une minorité.
Il existe un manuel que j’aime beaucoup, de Claude Henry-Joubert, intitulé « 100 recettes
d’improvisation et de composition, à destinations des élèves gourmands et des
professeurs curieux ». L’écriture est souvent sollicitée dans ses recettes, à la différence de
celles présentées ici. C’est, par ailleurs, une question intéressante qui se pose à nous ;
celle de l’écriture. John CAGE disait qu’il écrivait sur l’eau et cependant faisait peu cas de
l’improvisation. Peut-on alors poser l’hypothèse qu’improviser, c’est écrire quelque chose
dans l’air ?
Jean-Yves BOSSEUR est fermement attaché à l’idée qu’improvisation et composition sont
liées en profondeur, ce qui lui permet de réaliser des œuvres extrêmement ouvertes où
lui-même, compositeur, reste maître de ses signes tout en permettant à l’instrumentiste
de créer sa musique.
La question de l’écriture dans l’improvisation reste ouverte. J’ai fait le choix ici de lui
accorder une place minime, le but pédagogique de ce projet étant essentiellement de
pouvoir créer une musique sans support ou quasiment, de faire un apprentissage de l'ici
et du maintenant ; à l’opposé du musicien s’appuyant sur une partition qui, par nature,
s’inscrit dans le temps et l’histoire, quel que soit le langage qu’elle adopte.
Enfin – est-il besoin de le préciser – le travail de l’improvisation prend tout son sens
lorsqu’il est accompagné d’écoutes. On ne se privera donc pas de puiser dans le
répertoire de la musique classique, contemporaine, jazz ou traditionnelle lorsque le
besoin s’en fait sentir. J’ai accompagné nombre d'exercices d’une oeuvre qui me
semblait adaptée aux paramètres musicaux à l’œuvre. Le choix reste libre. Une
préférence pour des sonorités contemporaines ne me semblait pas contre-indiquée ici, de
par les liens étroits entretenus avec la musique improvisée d’aujourd’hui (finalement, on
improvise souvent plus facilement la musique de son temps). En outre, cela permet de
sensibiliser les élèves à la création contemporaine et d’intégrer la musique « savante » à
leur époque.
SOMMAIRE
1-
Improvisation sur sentiments/émotions
2-
Transformation d’un motif
3-
La machine
4-
Improvisation sur plans rythmiques
5-
Improvisation préparée, pour soliste
6-
Improvisation sur partitions à notation graphiques
7-
De la dissonance vers la consonance
8-
Improvisation en forme de points
9-
La télévision et le zappeur
10-
La paraphrase, dans le style romantique
11-
Improvisation vocale collective
12-
Improvisation sur enchaînements d’accords
13-
Improvisation sur harmonie dissonante et mouvante
14-
Improvisation dans le cadre d’une forme musicale
15-
Improvisation instrumentale collective
16-
Du bruit vers le son
17-
Sonorisation de contes et fables
18-
Tuilage
19-
Le Maître du temps
20-
Improvisation sur pantomimes
21-
Jeu sur notes à nombre limité
22-
Improviser en dirigeant
23-
Improvisation sur textes
24-
Improvisation et imitation dans un mode donné
25-
Improvisation type free jazz
1-
Improvisation sur des sentiments ou émotions.
En individuel, dialogue ou trio. Toutes classes.
Cet exercice, inspiré de la musique indienne, a pour but de mettre en relief les nuances de
caractères. En effet, dans la musique classique de l’Inde, le terme de Râga (composition) signifie
attirance, couleur, passion. Chaque Râga est lié à un sentiment, un moment du jour.
Afin d’établir un lien avec le cours, les sentiments exprimés lors de l’exercice doivent être associés
aux notations de nuance habituellement écrites sur les partitions (exemple : le forte peut être
associé à une colère expressive, le piano dans les graves à une colère sourde et contenue, le
crescendo à un sentiment d’exaltation ou de trouble tels l’amour ou l’inquiétude…).
Etablir et écrire au tableau, avec l’aide des élèves, une liste aussi longue et précise que possible
de tous les sentiments et humeurs qui animent l’être humain.
Pour les petites classes, il est préférable d’assurer un accompagnement (pianistique ou autre)
afin de guider le ou les élèves.
Dans le cas d’un jeu à plusieurs, chaque enfant choisit un sentiment et le dialogue peut s’amorcer
(l’amour avec la haine, l’espoir avec le désespoir, etc…).
Pour ne pas mettre de confusion dans l’improvisation, on évitera d’aller au-delà de trois
musiciens, accompagnateur compris. Celui-ci soutiendra chaque intervention.
Pour les classes plus avancées, on peut rajouter des contraintes de modes ou de gammes, mais
pas obligatoirement. Dans tous les cas, le choix d’une pulsation reste libre.
Cet exercice est très apprécié, surtout des petits ; il fait appel à leur théâtre intérieur, et libère
l’expression et le geste. L’implication est totale, l’écoute est privilégiée, la prise de « parole », les
notions de discours et de phrases musicales prennent sens.
2-
Transformation d’un motif. A plusieurs, en conversation.
Fin du premier cycle.
- Un élève crée un motif musical dans une gamme ou un mode donnés; chacun l’intègre sur son
instrumen
t pour ensuite l’explorer et le transformer en agissant sur les paramètres typiques du son : durée,
intensité, timbre, hauteur, répétitions de notes, jouer en miroir (à l’envers), …
- Celui qui propose écrit lui-même son fragment. Il se met ainsi en situation d’autodictée musicale
(la classe l’aidera certainement). Une fois le motif écrit, tout le monde joue.
- Chaque musicien réfléchit à sa version personnelle du fragment écrit. Il sera plus pertinent de
choisir son paramètre de transformation au départ et de s’y tenir. Mélanger deux paramètres est
plus périlleux et demande une certaine habitude de jeu. Un élève choisira par exemple de rallonger
ou raccourcir les durées, un autre préfèrera intervenir en répétant chaque note aléatoirement ou
selon un système de code prédéterminé par lui…
- Puis, on constitue plusieurs petits groupes de trois ou quatre musiciens (faire entrer chaque
intervenant progressivement plutôt que tous ensemble permet d’éviter le chaos. De même, en
sortie).
Il est important que la musique se prolonge un certain temps afin que chacun se familiarise
d’abord avec son mode de jeu pour ensuite être à l’écoute de ceux qui l’entourent. Une
conversation peut alors s’engager. Echanges deux à deux, deux à un pendant que le quatrième
s’arrête momentanément…(il est toujours « permis » de ne pas jouer si la musicalité y gagne).
Outre ses qualités musicales, cet exercice permet de bien assimiler ce que peut être une
improvisation à partir d’un motif donné. Les élèves retrouveront ces principes lorsqu’ils aborderont
les « thèmes et variations » ou les grilles jazz.
Pour les élèves plus avancés, on pourra aussi décliner l’exercice dans un contexte atonal.
3-
La machine.
milieu du second cycle
- Constituer trois ou quatre groupes de trois musiciens chacun. Objectif : construire une
« machine » par le biais de la création d’objets sonores (attaque, corps et chute). Un musicien
pour l’attaque, un autre pour le corps, un troisième pour la chute…
La notion d’objet sonore a été inventée par Pierre Schaeffer, dans les années 50. C’est
l’apparition des premiers microphones et haut-parleurs. La musique et le solfège s’étendent audelà des signes jusque là utilisés en musique classique. Les frontières entre bruit et son
s’estompent. Tout ce qui est sonore est porteur de musique.
Un objet sonore, quel qu’il soit, est constitué d’une attaque, d’un corps et d’une chute (il en va
de même pour n’importe quelle note).
Dans chaque groupe de trois, un musicien prend en charge l’attaque, un second le corps et un
troisième s’occupe de la chute. Tout est permis mais le résultat doit sonner comme un seul son,
c'est-à-dire que l’enchaînement attaque-corps-chute doit être aussi fluide que possible (durée
totale de l’objet : pas plus de 5 secondes).
Il faut répéter ce travail en boucle jusqu’à ce que l’objet « sonne » comme si un seul musicien le
jouait.
On fait le même travail avec un second groupe, un troisième, un quatrième.
Quand les objets sonores sont bien définis, on « met en route » les groupes, soit simultanément,
soit avec un léger décalage. Au bout d’un moment, on doit sentir comme une sorte de mécanique
bien huilée qui tourne, une sorte de machine industrielle. Il est intéressant de constater que
chaque groupe, spontanément, cherchera le meilleur placement possible par rapport aux deux
autres de manière à ce que les imbrications sonores soient optimales.
Faire tourner la machine quelques minutes.
Par le biais de ce jeu, on est amené à rentrer en profondeur dans le son, à le scruter, un peu comme si
on s’était muni d’une grosse loupe auditive. L’intérêt pédagogique, ici, constitue à bien faire
comprendre aux élèves la richesse d’un son. De retour à un contexte plus classique, avec partition
écrite, il est certain qu’ils seront plus attentifs à la note jouée dès lors qu’elle ne leur apparaîtra plus
comme un signe abstrait mais comme un objet sonore en soi.
4-
Improvisation sur plans rythmiques écrits. Individuel ou collectif.
toutes classes.
Ecoutes : Mosaïques pour quatuor à cordes n°1 et 6 de Henry COWELL, Per Bastiani Tai-YangCheng de L.NONO
A- En individuel : écrire un motif rythmique au tableau (par exemple, si la leçon du jour porte sur
« noire pointée-croche ») et demander aux élèves, l’un après l’autre, d’improviser sur leur
instrument des courtes phrases mélodiques en n’utilisant que cette figure rythmique. Etre
toujours attentif à la clarté du discours, aux respirations, à la logique de la progression. On
prendra soin également de bien préciser le cadre métrique propre à la figure en question (binaire
2/4, pour l’exemple)
Un accompagnement pianistique improvisé sera toujours le bienvenu pour encourager la
recherche de lignes aussi mélodieuses et conduites que possible.
B- En collectif : le motif est toujours écrit au tableau et les élèves entrent sur signe du professeur.
On peut alors faire coïncider ce jeu avec des consignes de modification des paramètres sonores
(solo, tutti, plus fort, moins fort, legato, staccato, dans les aigüs, dans les graves, etc…Attention !
Les consignes de tempo devront être adressées à tout l’orchestre. Le but pédagogique étant
l’intégration du rythme écrit, il faut absolument éviter les entremêlements métriques) On prendra
bien soin de définir un code gestuel précis au préalable.
Variante 1, pour le jeu collectif : Il est intéressant aussi de faire intervenir, dans le jeu à plusieurs, une
bande sonore pré-enregistrée qui guide l’improvisation dans le choix des nuances et du discours.
Pour conseil, on choisira des musiques sans carrure marquée, à fortes nuances et à caractère
dissonant qui permettront un travail plus ouvert et plus libre. Le chef d’orchestre demeure mais
adapte sa direction en fonction de la musique. C’est la bande sonore qui devient le véritable
conducteur.
Variante 2, pour le jeu individuel et collectif : Lorsque la figure est pleinement intégrée, on peut
décider d’enrichir l’improvisation en la combinant avec d’autres figures simples (noires, blanches,
croches, etc…), le changement se faisant sur signe du conducteur (ou de l’accompagnateur) ou au
choix de l’élève (règle à définir au préalable, après avoir écrit les rythmes à utiliser au tableau).
Il y a une multitude de variantes possibles à ce jeu. Aux professeurs d’expérimenter d’autres
combinaisons. Ne jamais perdre de vue que cet exercice a pour but l’intégration, dans un
contexte sonore et musical et par l’expérimentation sur l’instrument, de figures rythmiques que
l’élève retrouvera par la suite lors d’un déchiffrage ou d’une lecture sur partition écrite.
5-
Improvisation préparée. Pour soliste.
à partir de la fin du cycle 1
L’élève doit improviser ici en soliste devant la classe un parcours musical qu’il aura pris soin de
méditer et d’exposer publiquement. Il s’agit pour lui de construire une musique en prenant un
point de départ et un point d’arrivée (ce dernier correspondant à l’objectif à atteindre) et de se
« promener » entre les deux. Dans l’idée de la promenade, il y a surtout l’idée de prendre son
temps, de savourer chaque pas, chaque note, de goûter ce qui est joué et simultanément
d’anticiper la direction à prendre pour atteindre son point d’arrivée.
Le parcours ne doit pas être trop long au début (trois minutes, c’est déjà beaucoup) et pourra se
rallonger par la suite.
Plusieurs options sont possibles. Par exemple, l’élève choisira de jouer sur les registres (partir de
l’aigü pour aller vers le grave), sur les nuances d’intensité (commencer pp et finir ff), sur les
nuances de phrasé (du legato vers le staccato). Il pourra aussi partir d’un univers bruitiste ou
atonal pour arriver vers une tonalité et une harmonie de l’accord parfait (ou inversement). Au
final, la classe commente ce qui a été réalisé.
Une variante intéressante de cet exercice est de partir d’un morceau écrit et travaillé avec le
professeur d’instrument et, progressivement, soit de le transformer, soit de le quitter en
improvisant dans le style de la pièce autant que faire se peut. Cette option rassure souvent l’élève
qui débute l’improvisation car elle lui permet de se rattacher à quelque chose de connu.
A noter dans ce cas que lorsque l’élève aura à jouer ladite pièce écrite dans un contexte
d’audition ou d’examen (souvent créateur de tensions), l’expérience de l’improvisation l’aidera à
conserver le flux musical.
En outre, cet exercice développe l’expérience de jeu en public, le sens critique, l’idée de direction
musicale et l’anticipation.
6-
Travail sur la base de partitions à notation graphique.
à partir de la dernière année de premier cycle.
Ecoutes : Manifesto per Kalinowski de S.BUSSOTTI, December 1952 de E.BROWNE, Palindrome de
T.PHILIPS,…)
Depuis le milieu des années 50, de nombreux compositeurs ont utilisé à la notation graphique. Il
suffit de consulter certaines oeuvres de KAGEL, CAGE (entre autres) pour s’en convaincre.
Cette configuration, dans certains cas, permet de réduire la frontière entre le compositeur et les
interprètes du fait de la mise à disposition d’un espace sonore plus ouvert. De fait, le lecteur
musicien se trouve en présence de suggestions musicales qu’il va lui même traduire et
concrétiser. Il prend part à la réalisation de l’œuvre.
L’improvisation et le libre arbitre – dans une certaine mesure, car les questions d’esthétique et de
cohérence stylistique se posent ici comme ailleurs - sont sollicités dans ce contexte de jeu ouvert
puisqu’il s’agit plus de définir un parcours, de suivre des courbes ou des formes que d’interpréter
strictement (ce mot, d’ailleurs, n’a pas de sens ici) les signes usuels.
Le travail débute en classe par une lecture collective de la partition et une écoute attentive
d’œuvres du compositeur, ceci afin de bien s’imprégner de son univers sonore.
Le mode de lecture et le décryptage des signes donnent alors lieu à de multiples suggestions des
élèves que l’on prendra soin de noter. Puis, on choisit un chemin parmi toutes les propositions
évoquées (sens de la lecture, type de parcours, orchestration, faut-il tout jouer, quel code de
déchiffrage, etc…). C’est un travail passionnant qui touche au cœur du solfège puisque
précisément, à ce moment, les élèves et le professeur, tout en participant à l’élaboration et à la
création de l’œuvre, créent leur propre solfège : ils donnent un nom, une signification, une
hauteur, une durée, une intensité et un timbre (en fin de compte, ils forment un son) à un objet
qui, jusque là n’était pas encore sonore.
En introduction à ce travail, il peut être intéressant de sensibiliser les élèves au « dessin musical ».
Par exemple, en partant d’une partition simple, classique (une partition travaillée par un élève
avec son professeur), le professeur s’attache à faire ressortir sur un tableau sans portées le
graphisme d’une ligne mélodique, sous forme de signes placés en fonction de leur hauteur (c’est
l’occasion, en plus, de faire un peu d’histoire de la musique, de parler de l’écriture neumatique et
de faire remarquer que ce qui nous semble nouveau n’est souvent qu’une trace d’un événement
qui a déjà eu lieu).
Les élèves improvisent individuellement sur ces points en respectant les hauteurs – il sera
d’ailleurs amusant de constater celui qui se rapprochera le plus de la mélodie originale.
Conseil : commencer avec des rythmes simples (noires, blanches) et progresser lentement vers des
partitions monophoniques à rythmes plus complexes. A terme, pour des classes avancées, on peut
aborder le travail polyphonique.
Dans la lignée des partitions à notations graphiques, il est tout à fait envisageable d’intégrer ici
l’improvisation sur schémas directeurs pour orchestre.
Les schémas directeurs sont abordés par le compositeur Jean-Yves BOSSEUR dans son ouvrage
« Le temps de le prendre » et sont constitués d’une suite de parcours continus au cours desquels
certains paramètres du son vont être amenés à être progressivement modifiés.
J.Y.BOSSEUR a choisi le signe « infini » - un grand huit couché – pour symboliser ce parcours. Les
improvisateurs partent d’un point et suivent les indications.
Exemple 1 : Son continu, accélérer/rallentir, périodique, densité minimale, discontinu, densité
maximale, périodique, pulsations individuelles, son continu, …
Ici, le groupe décide de partir d’un son d’ensemble continu. La deuxième consigne
accélérer/rallentir suppose qu’au départ il y a une pulsation de groupe. Puis, progressivement, il
faut parvenir à une périodicité dans le son, c’est-à-dire que chacun doit sculpter peu à peu un
motif qu’il va répéter. Ensuite, le son doit se dissoudre et devenir le moins dense possible pour
alors accéder à une discontinuité complète et repartir en sens inverse vers une densité maximale.
Puis, retour à une périodicité de groupe d’où vont émerger progressivement des pulsations
individuelles. Enfin, retour à la continuité. Et ainsi de suite…
Exemple 2 : Points, battements, lignes, glissements, blocs, sons complexes ou petit groupes de
sons, lignes, accents, points, etc…
Exemple 3 : Son dispersé, en cercle, groupé, par couples, aligné, en plusieurs sous-groupes, groupé,
aux quatre coins, son dispersé, etc…
L’idée de progression et de lenteur dans le processus de transformation du son est fondamentale. On
se rappelle la « promenade » du soliste (exercice 5) qui doit savourer chaque son qu’il produit tout en
se projetant mentalement vers son point d’arrivée.
Tout le secret d’une bonne improvisation réside ici, dans cette faculté à être ici et maintenant et
simultanément un peu en dehors ; avoir une vue (une oreille ?) de détail et simultanément
d’ensemble du son produit.
Variante : Le professeur invite les élève à créer des graphismes/dessins qui seront expérimentés par
la classe. Il est aussi possible de se limiter à des improvisations sur formes seules (c'est-à-dire sans
consignes verbales).
7-
De la dissonance vers la consonance.
pour orchestre, à partir de la fin du premier cycle.
Ecoute : Troisième des dix pièces pour quintette à vent de G.LIGETI
La classe de Formation Musicale se transforme en orchestre. Chacun prend son instrument et
choisit dans sa tête et/ou dans ses doigts une note au hasard qu’il va faire sonner. Sur signe du
professeur, chacun joue sa note et la tient. On obtiendra à coup sûr une magnifique dissonance de
groupe.
La consigne est d’aboutir lentement, à tâtons, à une harmonie de l’accord parfait majeur ou
mineur (on aura pris soin, préalablement, de faire sonner par l’orchestre un ou deux accords
parfaits afin de préparer les oreilles).
Généralement, après plusieurs longues minutes de recherche, les élèves, une fois arrivés à la
consonance cessent immédiatement de jouer. Il est important alors de les faire recommencer en
attirant leur attention sur les changements successifs de couleur de la matière sonore. Les
oreilles doivent être sensibilisées tout le long de la recherche et entendre – quitte à s’arrêter de
jouer un moment pour écouter – les diverses trajectoires prises par le son avant de parvenir à son
point final.
L’accord parfait obtenu doit résonner quelques secondes, pour que chaque élève soit conscient
de son rôle au sein de l’harmonie (qui tient la fondamentale, la tierce la quinte ?). Une option
possible est de repartir progressivement vers la dissonance et de finir comme on a commencé.
On peut décider aussi de finir simplement sur l’accord consonant.
Cet exercice, généralement très apprécié, est un formidable outil pour le développement de
l’oreille harmonique (excellent aussi pour le travail de tenue de notes). Pour des classes plus
avancées, il est recommandé d’élargir la palette des accords (7 ème de dominante, diminués,…).
Pour les élèves de troisième cycle, on pourra demander à un soliste d’improviser sur l’accord
parfait dans la/les gammes qui lui semble(nt) le(s) plus appropriée(s).
8-
Improvisation en forme de points. Occupation d’un espace sonore.
pour toutes classes.
Ecoute : Domaines de P. BOULEZ
Cet exercice est très simple dans sa conception. L’idée est de demander aux élèves de jouer sur
leur instrument une seule note répétée à intervalles irréguliers avec une attaque aussi sèche et un
corps/chute aussi courts que possible. Le but est de créer un ensemble de points de rencontres
aléatoires qui rappelle le scintillement des étoiles (l’image des étoiles étincelantes dans le ciel est
souvent très évocatrice). L’association du son au visuel est fondamentale ; l’oreille voit et l’œil
entend.
Ainsi, on demandera de fermer les yeux pour mieux voir ; ceci pour aider à obtenir l’univers
sonore désiré.
Un autre exercice, en préambule à celui-ci, peut aider les élèves à comprendre le but à atteindre
de même que le but pour eux : le professeur demande à la classe de compter jusqu’à 20 tout en se
promenant dans la salle, sachant qu’un chiffre ne peut être énoncé que par un seul élève à la
fois. Si deux élèves disent, par exemple « trois » en même temps, on recommence à zéro. Les
premiers essais ne dépassent pas « 4 » ou « 5 ». Mais après quelques tentatives, le compteur se
déroule et on atteint à coup sûr les « 20 ».
L’idée du mouvement simultané dans la salle est destinée à ouvrir les oreilles des élèves sur la
notion d’espace et d’occupation de celui-ci par la matière sonore dont ils font partie. Peu à peu, ils
se l’approprient, se fondent en lui et se crée alors une unité entre l’espace et les enfants puis
entre les enfants eux-mêmes ; chacun sent d’instinct la place qu’il a à tenir et le son circule
librement.
La règle, dans le jeu des chiffres, est de ne pas créer de rencontres, pour mieux aider à cerner la
notion de circulation du son. Dans celui des étoiles, on souhaitera au contraire que des points se
croisent, s’entrechoquent, se percutent, ce qui signifie aussi des moments forts de silence. La
règle change, mais le but est le même : comment occuper un espace au mieux compte tenu du
projet sonore que je me suis fixé ?
Cet exercice aussi peut donner lieu à de multiples variantes (qui dépendront de la nature du projet
sonore du professeur). Il sera intéressant, à terme, de noter les changements d’attitude des élèves
par rapport à l’espace au sein d’une formation de jazz, de musique de chambre ou orchestrale.
9-
La télévision et le zappeur.
jeu de réflexes, en individuel. pour toutes classes.
Cet exercice, souvent très apprécié des élèves de par son côté ludique, est destiné à développer
les réflexes, les modes de jeu et l’anticipation chez le musicien.
Un élève, qui jouera le rôle du poste de télévision, décide de s’installer face à la classe avec son
instrument. Un autre élève du groupe est désigné ; il jouera le rôle du zappeur.
La règle est la suivante : le musicien joue en improvisant, selon un certain mode de jeu (par
exemple, un guitariste décide de jouer en picking sur deux cordes). A chaque claquement de main
du zappeur (on peut choisir éventuellement un autre stimulus), l’instrumentiste change
instantanément son mode de jeu (jouer sur le haut du manche, taper en percus sur la caisse…)
sans interrompre le flux musical. La difficulté consiste à ne pas répéter deux fois le même mode
de jeu. Quant au zappeur, il prendra soin de bien varier les espaces entre deux stimuli, afin de ne
pas permettre au musicien de s’installer dans une sorte de pulsation qui le conforterait dans le
processus d’anticipation. Ainsi, une plage pourra durer 3 secondes et la suivante 15 secondes.
C’est un exercice très éprouvant pour l’instrumentiste qui l’oblige dès le départ à se projeter en
avant en imaginant 3 ou 4 modes de jeu à l’avance.
Conseil : le professeur, dans le rôle de la télévision, présente l’exercice à la classe. Des modes de
jeu tels que « Ne pas jouer », « Produire un bruit qui n’a rien à voir avec l’instrument »,
« Déambuler dans la salle» sont à inclure dans la démonstration, l’un des buts pédagogiques étant
de faire comprendre que le jeu l’instrumental s’étend au delà de l’instrument, ne s’arrête pas
avec lui.
Après quelques minutes, le musicien « télévision » va devoir puiser dans son imaginaire des
réactions qui vont forcément déborder du cadre de l’instrument. Tout est bon - rires, pleurs,
onomatopées, mîmes, déclamation,… -. L’instrument, à partir de là, n’est plus qu’un prétexte, le
jeu consistant pour l’essentiel à réagir de manière originale et de n’importe quelle façon au
stimulus.
Application en quatuor : il n’y a plus de zappeur. Trois musiciens démarrent sur un mode de jeu
choisi. Lorsque le quatrième rentre, chacun des trois autres décide soit de s’arrêter soit de changer
son mode de jeu sachant qu’il doit toujours y avoir un musicien qui ne joue pas afin que la séquence
ne soit pas bloquée.
10-
La paraphrase dans le style romantique.
classes à partir du 2ème cycle.
Ecoute : Tristan et Iseult de WAGNER suivi de sa transcription pour piano de LISZT
A l’époque romantique, le principe de la paraphrase était très répandu chez les compositeurs.
C’était finalement l’idée de la variation baroque et classique reprise à d’autres fins.
L’art baroque surtout était davantage un art du mouvement, de l’ornement et de la décoration,
un art très maniéré et très précieux, un art de la dissimulation et du déguisement. Les variations
visaient à embellir un thème, à le décorer, presque à le surcharger jusqu’à le rendre
méconnaissable.
Dans la tradition romantique, la paraphrase permettait au compositeur de développer son style
sur la base de thèmes déjà composés. C’est, en effet, une forme de variation. Cela nous évoque
l’hommage rendu aux anciens mais surtout l’idée que la musique romantique n’avait vraiment
qu’une seule raison d’être: l’expression des émotions dans toute leur profondeur. Paraphraser
revenait donc à s’approprier la douloureuse mission de redire encore et toujours la souffrance de
l’âme humaine avec son propre langage.
Pour improviser dans le style de la paraphrase, l’élève choisit un thème simple qu’il connaît bien
et qu’il peut jouer sans difficulté sur l’instrument. Ce thème, au départ, va être déguisé par ses
soins, l’objectif étant de le faire reconnaître à la classe.
Quelques options possibles :
Dévoiler le thème par fragments en opérant des allers/retours entre celui-ci et des passages
improvisés.
Dévoiler le thème très progressivement un peu plus à chaque fois, en alternant aussi avec des
passages improvisés mais en revenant chaque fois au début du thème et en le prolongeant
chaque fois un peu plus loin.
Opérer des transformations (cf exercice d’impro n°2) en jouant sur les durées, les répétitions de
notes, les nuances.
Masquer au départ en introduisant le thème par un passage entièrement improvisé.
…...
Dans tous les cas, il faut partir du complexe pour arriver au simple. Partir du déguisement pour
arriver au thème.
L’élève se trouve ici dans un authentique contexte de jeu avec la musique.
11-
Improvisation vocale collective sans consignes particulières.
toutes classes.
Ecoutes : Requiem de G.LIGETI, Sequenza III pour voix de femme de L.BERIO, Solo for voice 22 de
J.CAGE, Stimmung de K.STOCKHAUSEN
Ce jeu trouvera sa place à la fin d’un cours de Formation Musicale un peu chargé. Il permettra aux
élèves de se libérer et de partir de bonne humeur.
Réunir un groupe de cinq ou six élèves maximum en les disposant sur des chaises placées en
cercle, dossier contre dossier, de façon à ce qu’ils se tournent le dos une fois assis. Les yeux
doivent être fermés, les oreilles grandes ouvertes, le silence total.
Les autres élèves et le professeur seront auditeurs et commentateurs.
« Sans consignes » signifie que tous les sons, les bruits, onomatopées, etc…en provenance de la
bouche sont autorisés.
Durée : cinq minutes maximum par groupe
Faire un début, un milieu, une fin.
Variante pour les classes plus avancées : improviser un chœur à quatre élèves (tonal ou atonal);
un élève par pupitre.
Les commentaires porteront sur la musicalité de l’improvisation, sa construction, sa cohérence,
les échanges à l’intérieur du groupe, la qualité des silences, la pertinence des interventions,
l’écoute.
Le but est d’ouvrir les oreilles encore et encore, d’élargir la palette sonore. La voix est le premier
instrument qui nous est donné. En explorant par la voix, nous ouvrons des portes cachées sur
l’exploration instrumentale.
12- Improviser sur des enchaînements d’accords : type chaconne,
passacaille, accords jazz, blues…
classes à partir de la fin du premier cycle.
C’est l’occasion de se faire plaisir en improvisant soutenu par un orchestre.
1-
On forme un orchestre avec tout ou partie de la classe de FM.
2On écrit au tableau une suite d’accords à trois sons unigammes, c’est-à-dire qui
peuvent être traversés par une seule gamme.
- type anatole (en Do Majeur : Do M – La m – Ré m – Sol M)
- type blues (en Fa Majeur : FA M – Sib M – Fa M – Do M - Sib M – Fa M).
- type passacaille (en La mineur : La m – Sol M – Fa M – Mi M – Do M – Ré m
Mi7 – La
m)
On demande alors à chaque élève de choisir une des trois voix. (au moins deux élèves par voix).
On pourra à ce titre choisir d’écrire chaque voix sur une portée différente sous formes de
rondes.
3On écrit la gamme d’improvisation correspondante à l’enchaînement choisi (ex : la
gamme de Fa blues) et on demande à un soliste de se préparer à improviser en s’appuyant sur les
accords joués par l’orchestre
4Le professeur lance l’harmonie. Chaque élève joue sa note et la tient. Chaque
changement d’accord se fait sur signe (là aussi, excellent travail de tenue de notes). On fait
tourner une fois l’enchaînement sans improvisation, « à vide », afin que chacun ait bien compris le
fonctionnement général de l’exercice. On veillera à ce que chaque accord ait une durée égale du
précédent en imposant une pulsation.
5Ensuite, sur chaque accord joué, le soliste construit une phrase avec les notes de la
gamme écrite.
6Au changement d’accord, le soliste improvise alors une nouvelle phrase, etc…jusqu’à
la fin de la « grille ».
Conseil : on peut encourager l’improvisation dans le sens de la composition ; c’est-à-dire expliquer à
l’élève qu’il peut dans l’instant composer une mélodie simple avec peu de notes parmi celles de la
gamme.
Pour les élèves qui se sentent à l’aise, ne pas hésiter à élargir la palette des accords (7 ème, diminués,
majeur 7,…)
13- Improvisation sur une harmonie dissonante et mouvante. Pour
orchestre.
toutes classes à partir de la troisième année du premier cycle.
Ecoute : Ouverture du Concerto pour violon de E.RAUTAVAARA
Cet exercice est très proche du précédent dans sa conception : un orchestre pour l’harmonie, un
soliste pour l’improvisation.
Mais, le contexte ici est volontairement dissonant. (D’ailleurs, il sera intéressant de comparer les
deux univers sonores en les enchaînant dans une même session).
- Chaque élève de l’orchestre joue une note de son choix et la tient ; création d’une dissonance.
- Un soliste improvise une phrase sans aucun support écrit.
- Le professeur fait signe, les élèves changent leur note : autre type de dissonance, le même
soliste improvise mais en changeant son mode de jeu.
Il est important, ici comme dans l’exercice précédent, que le soliste ait marqué la fin de sa
phrase improvisée avant que le changement de couleur n’intervienne, afin qu’il puisse
s’imprégner du son. Le choix de son mode d’improvisation en sera obligatoirement influencé.
On peut varier le jeu en demandant aux élèves de l’orchestre de choisir des séquences de deux
notes au lieu d’une et d’alterner chacune selon une pulsation donnée (exemple : sur du 4/4,
chaque note compte pour une blanche).
On pourra aussi ne pas établir de pulsation marquée et à alterner des plages longues et des plages
courtes. On ménagera aussi de grands espaces sans soliste
Enfin, cet exercice peut intégrer quelques consignes de direction d’orchestre (moins de son, ne pas
jouer, que les cordes, que les cuivres,…) ; l’important étant de passer d’une couleur à une autre et de
le faire sentir au soliste.
4
14 -
Improvisation dans le cadre d’une forme musicale. En individuel.
toutes classes à partir du début du deuxième cycle.
Nous l’avons dit, la question de la mémoire en improvisation est importante (cf introduction) et
complexe. Elle renvoie en outre à la réflexion du début, sur le « n’importe quoi ». Tout ce qui n’est
pas « n’importe quoi » - d’après la définition qu’on en a donné - est le fruit de notre mémoire, cela
semble logique.
Peut-on avancer une définition de « n’importe quoi » qui serait : détaché de toute forme de
mémoire ?
Pour travailler la mémoire en improvisant, il est intéressant de faire appel aux formes musicales.
Cela permet d’assimiler, en outre, des connaissances théoriques et une grammaire musicale par
l’expérimentation directe sur l’instrument. Enfin, nous allons le voir, cela participe au
développement du vocabulaire de l’improvisateur.
Quelques formes simples comme base de travail :
-
Forme binaire : A - B
Binaire avec reprise : AA-BB
Strophique : A - A’- A’’- A’’’….
Forme A – B – A
Forme ternaire A – B – A’
Forme rondeau A – B – A – C – A – D -……..
Forme A – B – C - A
Et caetera……….
Pour notre exemple, supposons qu’un élève un peu expérimenté improvise sur la forme ABCA.
1-
L’exercice consiste tout d’abord à créer un court fragment (A) entre 20 et 40 secondes.
2-
Ensuite, on demande au même élève d’improviser un second fragment (B) aussi différent
que possible du premier. A ce niveau, l’improvisateur va faire travailler sa mémoire
« négative » pour « ne pas jouer quelque chose qui ressemble trop à A ».
3-
De même, on lui demande de créer un troisième fragment (C) aussi différent que possible
des deux premiers. C’est à ce niveau là que l’improvisateur va devoir trouver des solutions
non envisagées encore dans son travail d’improvisateur. Pour cette raison, on évitera de
faire un A et un B trop simplistes. Surtout, on évitera d’anticiper C pour créer B et A,
l’objectif étant de pousser la recherche au delà du savoir-faire actuel. C’est au moment de
réaliser C que l’on devient davantage conscient des
critères qui ont permis d’élaborer les A et B et c’est cette prise de conscience qui est un
bénéfice important de l’exercice.
4-
Refaire enfin A tel quel, en reproduction fidèle, tel un enregistrement du premier. Travail
de la mémoire « positive », de reconnaissance.
Conseil : avant d’aborder la forme ABCA ou la forme rondo ABACAD…, il est fortement conseillé de
démarrer sur des formes plus simples (AB, ABA,…). Pédagogiquement, il sera bon d’accompagner
ces exercices d’écoutes d’œuvres classiques comme illustration des formes employées et assimiléess.
15-
Improvisation instrumentale collective (sans consignes particulières).
toutes classes.
Ecoutes : Œuvres contemporaines à formes ouvertes (STOCKHAUSEN, BOUCOURECHLIEV,…)
Cet exercice sera précédé de quelques minutes de débat avec les élèves. Il sera intéressant
d’échanger les opinions quant à savoir le sens à donner à une telle configuration. Les termes
« n’importe quoi », « faire ce qu’on veut », inévitablement feront surface. Ce sera l’occasion
d’aborder le son un peu différemment. Comme pour l’improvisation vocale sans consignes (cf
exercice n°11), les deux seules contraintes dictées par le professeur seront, d’abord temporelles
(improvisation d’une minute d’abord, puis de cinq minutes, puis de dix minutes, pas de limites de
temps), puis formelles (faire un début, un développement, une fin).
Il sera utile de partager la classe en deux, une partie exécutante et une autre auditrice et
commentatrice. On veillera à constituer les orchestres selon la variété des instruments et le
timbre désiré.
A la fin de l’improvisation, les commentaires porteront sur la structure générale : Que s’est-il
passé ? Comment les choses se sont-elles déroulées ? Y a-t-il eu plusieurs phases ? Quel chemin a
suivi le son ? Qu’est-ce que cela nous évoque en terme de couleurs, de matière ?
Ces commentaires à postériori visent à créer une mémoire de l’improvisation, à en garder une
trace. Ce sera aussi le moment de revenir et d’approfondir la notion de matière, de pâte sonore.
L’analogie avec la sculpture sera la bienvenue. Qu’avez-vous sculpté, qu’avez-vous construit ?
*
16-
Du bruit vers le son - exploration de l’instrument. Collectif.
toutes classes.
Ecoute : Trio pour violon, violoncelle et piano (1999) de F.KAERN – 1er mouvement.
Ce travail avait été déjà été évoqué dans l’exercice n°5 lors de la création d’un parcours
d’improvisation individuel. Il trouve ici son écho sous forme de travail collectif.
Dans l’inconscient collectif, la notion de bruit a toujours une connotation péjorative, brute,
désagréable en comparaison au son qui est censé être le résultat d’un travail élaboré de toucher,
l’expression d’une sensibilité.
« Cesse de faire du bruit » entendra-t-on dans la bouche d’une maman excédée par son petit
garçon qui ne cesse de taper sur une casserole.
« Oh ! Tu as un beau son !», dira-t-on à l’interprète de CHOPIN.
Curieusement, si nous faisons l’analogie avec les arts graphiques, nous ne retrouvons pas cet état
de choses.
« Tu as fait un beau dessin ! » dira-t-on à l’enfant qui a élaboré quelques traits spontanément sur
une feuille de papier.
Les expositions de peintures contemporaines fleurissent chaque année et on accepte davantage
une remise en question des paramètres de l’image que de ceux du son. Et pour cause, l’image ne
fait pas de bruit et, finalement, semble ne déranger personne.
Il y a un retard de la musique sur la peinture. On peut se demander si l’éducation de l’oreille passe
avant tout par celle de l’œil.
Aller du bruit vers le son ne veut pas forcément dire aller du désagréable vers l’agréable, aller du
brut vers l’élaboré. Etrangement, nous avons, de fait, une vision incomplète de l’histoire de la
musique qui nous enseignerait que le son est l’aboutissement du bruit, qu’il est le fruit d’une
civilisation, par opposition au bruit qui est celui de primitifs. On pourra à ce titre faire intervenir
des variantes dans l’exercice : « Partez de bruits agréables et finissez sur des sons
désagréables ! » ou bien « Partez du son et finissez par un univers bruitiste. ».
Idem avec les instruments. L’idée « l’instrument est l’aboutissement dans le temps d’objets sonores
moins évolués » peut-être remise en question. Ce qui compte, c’est l’exploration de l’objet. On
pourra faire plus de musique, dans certains cas, avec un radiateur qu’avec un piano. On peut donc
choisir de partir de l’instrument pour finir sur un objet sonore quelconque de la classe.
Pour rappel, il est toujours bon d’ouvrir les débats par une écoute préalable de certains
compositeurs bruitistes (SCHAEFFER, CAGE, RUSSOLO,..). Une sensibilisation par la peinture peut
aussi aider à appréhender différemment cette notion de bruit.
17-
Sonorisation de petits contes ou fables, découpés en séquences
(tableaux).
toutes classes.
Ecoutes : L’enfant et les Sortilèges, Ma Mère l’Oye de M. RAVEL
La sonorisation de petites histoires est toujours une expérience magnifique pour les élèves et une
grande joie pour le professeur.
Le point de départ est une petite histoire que l’on va découper en séquences ou tableaux après
en avoir fait une lecture. On prendra soin d’en limiter le nombre sous peine d’inachèvement.
Chaque tableau sera titré et donnera lieu à une sonorisation. Il ne s’agit donc pas d’improvisation
au sens usuel, mais de composition de motifs non écrits (qui seront donc susceptibles de subir des
modifications). Le fait que rien ne soit écrit correspond à la volonté de se construire une mémoire
et simultanément d’accepter le principe d’une œuvre semi-ouverte, sans cesse en mouvement.
Tout de même, le professeur veillera à ne pas trop espacer les séances dans le temps. Il faut en
compter environ huit pour un conte (à peu près une par tableau plus répétition générale). Une
session toute les deux semaines semble convenable.
Prenons pour exemple cette fable d’Esope « Le Lion et le Renard » :
« Le lion affaibli par la vieillesse, ne pouvait plus prendre les autres animaux à la course. Il résolut
de se servir d’artifice pour les surprendre et pour en faire curée. Il se retira dans le fond de sa
caverne pour mieux exécuter ce dessein, et fit savoir partout qu’il était malade. Les autres
animaux accoururent pour le visiter, mais il les etranglait et les dévorait à mesure qu’ils entraient
dans sa caverne. Le Renard se douta de la ruse du Lion et du mauvais tour qu’il avait joué à ceux
qui étaient venus le visiter. Il se contenta donc de demander de loin au Lion, et sans entrer dans sa
caverne, comment il se portait. « Je me porte fort mal, dit le Lion ; pourquoi n’entrez vous pas,
ajouta-t-il ? C’est, lui dit le Renard, que je vois fort bien les vestiges de ceux qui sont entrés dans
cette caverne, mais je n’aperçois point les traces de ceux qui en sont sortis. »
Procédons maintenant à la réalisation des séquences :
123456-
Tableau sonore du décor (forêt, oiseaux, ruisseau, vent,…) et portraits du Lion
(vieux, fatigué, machiavélique) et de Renard (malin, agile,..)
Le stratagème imaginé par le Lion.
L’installation dans la caverne.
Les animaux se font dévorer.
Dialogue entre le Lion et le Renard.
La déception du Lion, la victoire de Renard.
C’est une découpe possible, mais ce n’est pas la seule. Pour la suite, place à l’imagination et aux
propositions avec les instruments.
Il s’agit donc de tableaux sonores à réaliser.
L’utilisation d’un vocabulaire propre à l’image sera le bienvenu (séquences, tableaux, zoom avant,
zoom arrière, gros plan, vue générale, paysage, création de reliefs,…) et aidera les enfants à
visualiser et à jouer leurs idées.
Les Fables d’Esope présentent l’avantage du petit format et mettent en scène des animaux
uniquement (pour la petite histoire, Esope né au VIème siècle av. J.C. fut l’inspirateur de Jean de
la Fontaine pour ses Fables), idéal pour forcer les traits de caractère.
Encore une fois, huit séances sont un minimum (pour des cours d’une heure). Donc, bien planifier
son programme. Dans le cas d’un manque d’hétérogénéité dans les instruments (trop de
pianistes, pas de vents,…), il ne faut pas hésiter à utiliser les voix (bruits de bouche, sifflements,
…) ou à se lancer sur un instrument qui n’est pas le sien. Ce n’est pas la technique qui est
travaillée, mais l’exploration du son et des instruments. Des percussions seront toujours les
bienvenues.
Enfin, la présentation du conte sonorisé dans son intégralité lors d’un spectacle de fin d’année
constituera une source de motivation supplémentaire pour les élèves et leurs parents.
Nota Bene : On peut aussi choisir de sonoriser des tableaux isolés. Les possibilités sont illimitées (un
cours d’eau, une soirée de Noël, une fusée qui décolle,…).
18-
Tuilage.
pour toutes classes.
Ecoutes : Yliam de G.SCELSI, Lux Aeterna de G.LIGETI
Ce petit jeu, très simple à mettre en place, sensibilise les élèves à la notion de tuilage et de
circulation du son. Un élève A joue une petite phrase en soliste en essayant de s’en tenir à un
motif simple qu’il répète, avec éventuellement de petites variations (pour les tous petits, une ou
deux notes suffiront).
Après quelques secondes de jeu, un deuxième élève B rejoint A en essayant, autant que possible,
d’imbriquer son motif dans le sien. Pendant quelques temps, A et B jouent ensemble puis A se
retire progressivement pour laisser B continuer seul. B joue en solo quelques secondes avant
qu’un élève C ne le rejoigne, etc……Ainsi, on fait le tour de la classe ; chacun se passe le son. On
peut varier à loisir le temps où deux élèves jouent ensemble, selon l’objectif qu’on se fixe..
Pour les petits, en préambule à ce jeu, j’aime procéder de la façon suivante :
Dans un premier temps, je mets les élèves debout, en cercle. Je retire mes lunettes (je suis
très myope) que je fais passer entre leurs mains en leur demandant de bien les observer,
de prendre leur temps avant de les faire circuler. Evidemment, elles ne doivent pas
tomber. Ainsi, elles me reviennent après avoir fait le tour.
Dans un deuxième temps (les élèves restent en cercle), je prends une balle en mousse et,
cette fois, je leur demande, de se la passer le plus vite possible. Mais là aussi, interdiction
de toucher le sol.
Les lunettes, la balle sont, bien sûr, des matérialisations du son. L’idée d’un son qui circule sans
s’arrêter, quelle que soit sa nature et la vitesse à laquelle il est exécuté, est une acquisition
fondamentale pour un jeune musicien. L’apprentissage des notions de fluidité et de liquidité lui
permettra d’avancer dans sa lecture et dans son jeu, de ne pas bloquer sa musique.
Variante dans un style plus traditionnel : en lecture de notes
19-
Le maître du temps. Pour horloge(s) et orchestre(s).
toutes classes.
Ecoute : Concerto pour piano et orchestre de J. CAGE
L’idée de cet exercice (de même que celle qui a présidé à l’élaboration de l’œuvre Cagienne) est
celle de l’écoulement d’un temps non linéaire. Dans le Concerto de John Cage (écrit en 1957/1958),
les musiciens se repèrent aux positions des bras du chef d’orchestre pour déterminer la durée de
leurs séquences. Les durées, préalablement choisies, vont être elles-mêmes modulées en fonction
des mouvements d’accélération et de ralentissement de ses gestes.
1Le professeur se désigne pour être le chef d’orchestre. Il jouera le rôle d’une grande
horloge humaine. Il fait face à la classe
2Chacun des élèves anticipe et prépare sur son instrument un motif qu’il va devoir
répéter. Prendre un motif très simple.
3-
Le maître du temps lance son horloge à l’aide de son bras qui va décrire, très
lentement, le mouvement circulaire de l’aiguille. Partir de la position « midi » ou « zéro » et
effectuer plusieurs tours dans le sens « normal » de l ‘écoulement du temps (donc dans le sens
des aiguilles d’une montre pour les élèves)
4A ce moment, chaque élève est invité à placer son motif « à l’intérieur de ce cercle
temporel » ; par exemple, décider de jouer à la position « 3 heures » ou « 11 heures ». Il y a
nécessairement une période de recherche collective où les imbrications des motifs de chaque
élève se font. Lorsque chacun a trouvé sa place, il doit s’en tenir à la position qu’il a choisie sur
l’horloge.
5Quand les motifs sont bien calés, le maître du temps décide d’accélérer le temps, de
le maintenir, de le suspendre, de le faire osciller, de le remonter à loisir.
Chaque musicien doit, quoiqu’il arrive respecter sa position sur l’horloge. On peut ensuite
agrémenter le jeu de plusieurs manières. Par exemple, le chef d’orchestre peut démarrer deux
horloges, chacune avec un bras. Dans ce cas de figure, le musicien doit donc anticiper et placer deux
motifs et deux positionnements, un pour chaque horloge.
Autre possibilité : deux maîtres du temps, deux orchestres en simultané.
Enfin, quand le jeu est bien assimilé, le professeur propose la direction à un ou plusieurs élèves.
20- Improvisation sur pantomimes.
toutes classes.
Petite histoire
On appelait pantomime, chez les Romains, des acteurs qui, par des mouvements, des signes, des
gestes, et sans s’aider de discours, exprimaient des passions, des caractères et des évènements.
Le nom de pantomime, qui signifie « imitateur de toutes choses », fut donné à ces comédiens qui
jouaient toutes sortes de pièces de théâtre sans rien prononcer.
Ceux qui n’étaient pas initiés aux mystères de ces spectacles avaient besoin d’un maître qui leur
en donnât l’explication ; l’usage apprenait aux autres à deviner ce langage muet. Ainsi, les
pantomimes parvenaient à donner à entendre par le geste des poèmes entiers.
A la différence du mime qui ne s’était jamais fait accompagner que d’une flûte, les pantomimes
s’entouraient de plusieurs instruments, des voix, des chants. Au bruit d’un chœur, composé de
musique vocale et instrumentale, ils exprimaient avec vérité le sens de toutes sortes de poèmes.
_____________________________________
Dans le cadre d’une session d’improvisation sur mime, le professeur prendra soin de bien
expliquer l’idée d’exagération du geste, ceci afin de signifier une chose à propos de laquelle on ne
peut rien énoncer. Une petite démonstration sera la bienvenue. La référence au clown du cirque
appuiera l’explication.
1- On peut choisir le cas où un seul élève mime une situation (qui peut-être aussi une émotion, un
sentiment) accompagné d’un élève à l’instrument. Toujours bien insister sur la notion de
construction (silence, début, milieu, fin, silence). L’idée est de suivre le mouvement du mime,
d’accompagner ses expressions en direct. L’élève qui mime peut réfléchir quelques minutes à son
parcours avant de commencer mais il n’y a pas de concertation avec l’élève qui improvise.
La classe observe, écoute, devine et commente la prestation.
2- On peut choisir aussi d’organiser une session de mime à plusieurs sur un thème (des
retrouvailles, une dispute,…). On procède alors à une découpe en petits tableaux à sonoriser.
Dans ce cas, le musicien peut participer à la phase de réflexion préalable avec les comédiens afin
de prévoir l’architecture générale de son improvisation. Toute la classe est invitée à participer.
L’improvisation sur pantomime est une ouverture à la danse. Pour un(e) élève qui, parallèlement,
prend des cours de danse et qui ne se sent pas très à l’aise dans le mime, il sera bon de le rappeler. Ce
sera l’occasion d’utiliser les percussions pour les élèves qui le désirent.
21-
Jeu sur un nombre limité de notes. Individuel et collectif.
toutes classes.
Ecoute : Musica Ricercata de G. LIGETI
Cet exercice est utilisé en jazz dans le travail de l’improvisation. Souvent, les improvisateurs
débutants s’éparpillent sur un trop grand nombre de notes. C’est tout à fait normal mais il est plus
intéressant de travailler des figures rythmiques et des phrases sur très peu de notes au début et
d’enrichir au fur et à mesure.
Ce travail se fait d’abord en individuel. On demande à un élève de ne jouer que sur une seule note
et de faire de la musique avec. Les octaves sont permises. Puis, un autre élève joue sur deux
notes,etc…
Conseil : Il est bon de varier avec pulsation et sans pulsation.
On passe ensuite à une formation de deux ou trois élèves et il est décidé de jouer sur une note,
puis deux, puis trois,…. On suivra les mêmes consignes que lors d’une cession d’improvisation
courante (écoute, cohérence, qualité des entrées,…). Enfin, toute la classe joue.
Compte tenu de notre objectif de départ, il semble inopportun de surcharger. Au dessus de trois
notes, le jeu perd de son intérêt.
Sur un plan pédagogique, c’est le moment d’évoquer les intervalles et leur couleur.
- Travailler sur une note fait entendre l’unisson et l’octave, soit deux intervalles (on intègre les
redoublements).
- Travailler sur deux notes fait entendre deux ou trois intervalles.
- Travailler sur trois notes fait entendre six ou sept intervalles.
On veillera, avant que l’élève ne commence à jouer, à écrire les notes qu’il a choisies au tableau, à
nommer et qualifier les intervalles ainsi créés et à attirer l’attention de la classe sur leurs couleurs
respectives.
Une variante possible pour musiciens plus confirmés : improviser sur des intervalles fixés au départ
sans contraintes de notes (ex : improviser uniquement sur des quartes justes et septièmes
mineures). Excellent travail pour exercer l’oreille intervallique.
22-
Improviser en dirigeant.
pour orchestre. Toutes classes.
Ecoute : PEXO, a sounpainting symphony de W.THOMPSON
L’exercice qui suit, très apprécié des élèves, est une introduction au soundpainting, inventé par
Walter Thompson dans les années 1980 et dont le principe consiste à faire improviser un
orchestre (qui peut être constitué de musiciens, danseurs, acteurs, bref d’artistes dont l’art peut
être improvisé) par le biais d’un code gestuel extrêmement élaboré. Chaque signe correspond à
une action, à un mode de jeu. C’est donc le chef d’orchestre/peintre qui devient compositeur.
Actuellement, la palette est constituée de 800 signes environ.
1-
Créer un orchestre avec la classe de FM
2- Désigner un chef d’orchestre parmi les élèves.
3- Demander à chaque élève musicien de préparer un petit motif très simple sur son instrument
ou à la voix. Chaque motif est joué une fois.
4- Transmission par le professeur du code signalétique. On s’en tiendra ici à une petite dizaine de
signes :
Règle générale : quand le chef utilise ses deux mains, cela désigne « tout le
Quand il n’utilise qu’une main, c’est à l’endroit d’un musicien en particulier.
monde ».
A- Main(s) ouverte(s) vers l’avant : « Jouez » ou « Joue » - le ou les élèves jou(en)t son (leur) motif.
B- Poing(s) fermé(s) : « Arrêtez de jouer » ou « Arrête de jouer »
C- Main(s) vers le haut : « Plus fort » et vers le bas : « Moins fort »
D- Main(s) qui poussent : « Plus vite » et qui tirent : « Moins vite ».
E- Deux doigts pointés vers le haut : « Riez » et vers le bas « Pleurez »
F- Les dix doigts qui s’agitent : « Improvisez » (« Improvise » s’il n’y a que cinq doigts)
G- L’index de chaque main vers le haut : tenir une note
5- On rejoue chaque motif séparément pour bien se l’approprier.
6- Lancer la musique.
Cet exercice est extrêmement ludique, ce qui ne doit pas faire perdre de vue ses intérêts
pédagogiques multiples:
Du point de vue du chef compositeur ; celui-ci doit apprendre à manier le code, il doit écouter ce qu’il
fait, porter un jugement de valeur, être capable par la suite de dire ce qu’il a voulu faire. Le résultat
est-il conforme à ce qu’il avait imaginé ? A ce propos, on évoquera le jeu des nuances et des couleurs,
les silences, la pertinence du choix de l’orchestration,…
Du point de vue des musiciens, le travail se situe sur l’attention portée au chef, la réactivité aux
signes et l’écoute qu’ils ont d’eux-mêmes et des autres. On pourra ainsi demander l’avis de chacun
sur la musique qui a été réalisée.
De même que pour le soundpainting, on peut rajouter des signes à volonté (pour les nuances de
phrasé par exemple). Il est conseillé de ne pas surcharger au départ.
Variantes possibles
-
Subdiviser la classe avec deux orchestres et deux chefs/compositeurs.
-
Superposer des percussions à l’orchestre selon un principe d’imitation : le
professeur de FM joue et les élèves reproduisent. Le professeur dirige les
percussions selon ce qu’il entend du jeu déployé par l’orchestre. Il est donc
indépendant des volontés du chef d’orchestre. En revanche, il peut, il doit
y avoir complicité de jeu entre les deux meneurs.
23 – Improviser sur des lectures de textes ou des consignes verbales.
toutes classes.
Ecoute : Fais voile vers le soleil (Aus den sieben Tagen) de K.STOCKAUSEN
Il est proposé, ici, une ouverture sur la littérature et le verbe.
Depuis le milieu des années 60, est apparu le principe de la partition verbale (Karlheinz
Stockhausen, Jean-Yves Bosseur, Christian Wolff, Pierre Mariétan…) où le compositeur, plutôt
que de fonctionner sur la base de la notation symbolique traditionnelle – portées, notes, silences,
nuances, etc…- choisit de s’adresser aux musiciens par le biais de phrases dictées. Il peut s’agir de
consignes en rapport avec un mode de jeu, de consignes d’attitude ou de gestes, d’occupation de
l’espace,…Chaque instrumentiste, ainsi « stimulé » par le verbe réagit musicalement et produit un
son dans l’instant. Les résultats varient selon le lieu, la personne, le moment, le contexte. Il s’agit
donc d’une expérience d’improvisation dirigée tout à fait particulière (cf de Jean-Yves BOSSEUR :
« Le temps de le prendre », recueil de textes partitions).
Avant d’aborder la partition verbale, il est nécessaire pédagogiquement parlant de passer par
des textes plus classiques ; ainsi, en improvisant sur des poèmes, des petites fables, ou des
passages de pièces de théâtre.
Le répertoire est infini et reste au choix du professeur.
___________________________________________________________________________
Avec les petites classes, on favorisera la lecture de poèmes (ceux appris en classe, par exemple ou –
mieux encore – des poèmes composés par les élèves eux-mêmes), celle de fables ou de petits
contes enfantins.
Avec les classes plus avancées, en plus des poèmes, on s’essaiera à la lecture de pièces de théâtre
(Molière, Ibsen,…).
Les partitions verbales contemporaines arriveront en bout de chaîne et trouveront ainsi leur
justification dans l’esprit des élèves.
__________________________________________________________________________
- L’improvisation sur poème et fables est réalisée par un ou deux musiciens. Le texte est donné
au préalable à tous les élèves - y compris l’improvisateur - qui le lisent en silence et sans musique.
Puis, un élève le lit à haute voix, accompagné par le(s) musicien(s) volontaire(s). On peut choisir
de découper le poème s’il est long et de placer la musique entre chaque strophe. Il est aussi
possible de décider de faire une session où plusieurs poèmes s’enchaînent, chaque fois séparés
par une « parenthèse » musicale. De toute façon, la règle est de s’imprégner du texte avant toute
chose.
- Pour ce qui concerne la lecture de pièces de théâtre, idem. Chacun prend connaissance de la
scène et de la situation, on éclaircit les passages obscurs, on décide où placer la musique. Enfin,
les groupes de comédiens et de musiciens sont constitués…L’organisation est plus délicate dans
ce cas de figure et nécessite plus de temps. L’improvisateur va-t-il jouer en communion avec les
comédiens et les accompagner dans le geste ? Est-il plus opportun qu’il se tienne à distance en
observateur et se contente d’illustrer, de commenter la scène ?
Conseil : dans ces deux cas, il sera recommandé de demander aux élèves un travail préalable à la
maison qui consistera à lire le poème ou la scène choisie, à réfléchir aux découpages et à imaginer
une couleur musicale adaptée.
Un exemple de texte/partition - Play de Christian Wolff (1969)
___________________________________________________________________________
« Jouez, faites des sons. En courts éclats, aux contours clairs la plupart du temps ; tranquilles ;
deux ou trois fois, déplacez-vous vers les autres et jouez aussi fort que possible ; mais, dès que
vous n’entendez plus ce que vous jouez vous-même ou ce qu’un autre joue, arrêtez-vous
immédiatement. Laissez des intervalles variés entre les interventions (deux, cinq secondes,
indéfinis) ; parfois, faites chevaucher les évènements. Une, deux, trois, quatre ou cinq fois, jouez
un son long, un complexe ou une séquence de sons. Jouez parfois indépendamment, parfois en
coordination : avec les autres (lorsqu’ils commencent ou s’arrêtent ou pendant qu’ils jouent ou
lorsqu’ils se déplacent) ; ou bien un instrumentiste doit jouer (commencer ou, avec des sons
longs, commencer et s’arrêter ou juste s’arrêter) à un signal (ou pendant les deux à cinq secondes
d’un signal) qu’il ne peut contrôler lui-même (il ne sait pas quand le signal va se produire). En
certains points, ou d’un bout à l’autre, utiliser l’électricité. »
___________________________________________________________________________
Imitation et improvisation dans un mode (avec tenue de
fondamentale). Ouverture sur les musiques traditionnelles.
24-
Classes à partir de la fin du premier cycle.
Ecoutes : Chants liturgiques du Moyen-âge, toutes musiques traditionnelles, The Wonderful
Widow of Eighteen Springs de J.CAGE …
Nous sortons ici du cadre de l’improvisation libre pour aborder la musique modale.
Par opposition, la découverte des modes va permettre aux élèves de consolider leurs acquis sur
la musique tonale. Une démonstration au piano du fonctionnement des modes est souhaitable ;
on en profitera pour faire un rappel sur le rôle des degrés forts de la musique tonale et faire
ressortir la note sensible comme élément clef.
Outre les sept modes grecs connus, il sera intéressant de s’ouvrir les oreilles et d’expliquer les
principes fondamentaux du fonctionnement d’autres musiques que celles de répertoire classique.
Les ragas indiens et les maqam arabes sont un exemple.
A- Improvisation
1-
Le professeur écrit un mode de son choix au tableau.
2-
Sur une pulsation donnée, toute la classe joue lentement chaque note en montant et
descendant la gamme harmonisée (modes occidentaux) au piano. Pour les modes
orientaux, on se contentera d’une tenue de fondamentale.
3-
Un élève improvise sur les notes du mode. On délimite une carrure (ex : 16 mesures à deux
temps). Pendant ce temps, les non-solistes font sonner la fondamentale (avec
éventuellement la quinte) en continu, pour soutenir l’élève soliste.
4-
Quand le solo se termine, tout le monde rejoue collectivement la gamme harmonisée
en montant et descendant. Un autre élève prend le relais, etc…
NB : Cet exercice peut être réalisé à la voix. Le bourdon est tenu par la classe pendant qu’un soliste
improvise en chantant sur le mode
B- Imitation
L’imitation est l’un des piliers de l’enseignement de la musique à tradition orale (aurale). Le maître
joue, le disciple reproduit dans les moindres détails – attaques, phrasé, nuances, sonorité,…- ce que
le maître lui a fait entendre.
En outre, il est bon de savoir qu’avec l’improvisation, l’imitation constitue la première approche de la
musique par l’enfant (Revue Marsyas n°22 sur la psychologie de l’enfant et de l’adolescent).
1, 2-
Idem improvisation.
3-
Chaque élève, à son tour, va reproduire une petite phrase simple jouée par le
professeur au piano. La fondamentale est tenue pendant toute la durée de l’exercice.
Après quelques séances d’entraînement sur des motifs simples, on élèvera le niveau d’exigence
quant à la qualité de la reproduction (nuances, phrasé,…). Puis, on rallongera les motifs peu à
peu. Ce travail est excellent pour la construction de la mémoire positive et de l’oreille.
Sur la musique indienne
Les swaras
L'octave occidentale (do ré mi fa sol la si do) est appelée ashtak dans la musique indienne. Mais ce
terme est peu employé car les musiciens indiens parlent plutôt des sept notes non répétées (do ré
mi fa sol la si) soit saptak.
Les sept notes de la saptak sont les suivantes : SA RE GA MA PA DHA NI
Elles correspondent à peu près aux sept degrés de l'échelle occidentale. Leur noms viennent des
mots Shadjam (Sa), Rishabam (Ri ou Re), Gandharam (Ga), Madhyamam (Ma), Panchamam (Pa),
Dhaivatham (Dha) et Nishadam (Ni).
Comme dans l'échelle occidentale, des subdivisions entraînent l'apparition de notes
supplémentaires utilisables par le musicien (ce sont les touches noires du piano par exemple).
L'ensemble des notes jouables par le musicien (touches noires et blanches du piano) sont les
swaras. Il s'agit de : SA RE RE GA GA MA MA' PA DHA DHA NI NI SA
Les notes soulignées indiquent un bémol (diminution d'un demi-ton environ) et le MA' indique
un dièse (élévation d'un demi-ton).
___________________________________________________________________________
Les thaats
Les musiciens utilisent, comme dans la musique occidentale, différents modes (thaat).
Dans la musique d'Inde du Nord il y a dix thaat ( modes ) qui sont nommés ainsi :
Bhairava : SA RE GA MA PA DHA NI SA
Asavari : SA RE GA MA PA DHA NI SA
Khammaj : SA RE GA MA PA DHA NI SA
Todi : SA RE GA MA' PA DHA NI SA
Kafi : SA RE GA MA PA DHA NI SA
Bilaval : SA RE GA MA PA DHA NI SA
Kalyan : SA RE GA MA' PA DHA NI SA
Pooravi : SA RE GA MA' PA DHA NI SA
Marava : SA RE GA MA' PA DHA NI SA
Bhairavi : SA RE GA MA PA DHA NI SA
Pour établir un bref parallèle avec la musique occidentale, on pourrait dire qu'un raga composé sur
le
thaat
Bilaval
correspond
à
un
thème
joué
en
mode
majeur.
Remarquons au passage que la musique indienne connaît dix modes alors que la musique classique
occidentale n'a principalement utilisé que les modes majeur et mineur. Le jazz et la musique
contemporaine ont redécouvert l'emploi des autres modes.
25-
Improvisation type free jazz. Pour 2 orchestres.
classes de second cycle.
Ecoute : Free Jazz d’Ornette COLEMAN (1960)
Le free jazz est l’un des mouvements pionniers qui ont donné naissance à l’improvisation libre.
S’émancipant de la structure harmonique de la grille jazz traditionnelle, le free jazz en a
néanmoins conservé le thème. Une grande place est laissée à l’improvisation qui est censée
explorer et approfondir le thème dans son esprit plutôt que dans son harmonie.
La naissance, aux Etats-Unis, de ce mouvement musical a coïncidé avec la sortie du disque du
saxophoniste Ornette Coleman. Le disque, intitulé « Free Jazz », fait se rencontrer deux quartets
qui improvisent librement.
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1-
Créer deux quartets au sein de la classe. Ceux qui ne jouent pas sont auditeurs.
2La consigne est simple : chaque quartet improvise librement en concentrant l’écoute
ainsi : 90% de l’oreille de chaque instrumentiste doit être orientée au centre du quartet dans
lequel il joue et les10% restants doivent être attentif au jeu développé par l’autre quartet.
Durée : environ 5 minutes
La consigne est simple mais l’exécution est plus ardue. Il faut assurer la cohérence sonore au sein de
son propre quartet, et le résultat pour l’auditeur doit être une fusion des deux ensembles. Pour cette
raison, il doit y avoir des oreilles extérieures au cours de l’exécution.
Les musiciens pourront s’aventurer immédiatement dans une improvisation complètement libre en
suivant leurs inspirations et leurs oreilles. Ou alors, ils décideront de sécuriser la mise en route en
commençant par des répétitions de motifs qui s’imbriquent les uns dans les autres pour ensuite
s’échapper.
Il est important de penser à ne pas jouer (ne serait-ce que pour mieux entendre ce qui se passe). Le
son se nourrit de ces mouvements, de ces allées et venues, de ces silences. Le jeu musical se nourrit
aussi du non-jeu.
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