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É
D I T O R I A L
Le point de vue du lipidologue
L’athérosclérose : de mieux en mieux prise en charge
● Pr J.C. Fruchart*
L
a 72e édition du congrès de l’American Heart Association a été extrêmement riche en informations et a
consacré le rapprochement entre le chercheur et le clinicien. L’athérosclérose, à l’origine des maladies cardiovasculaires, est une maladie que l’on comprend et qui sera de mieux
en mieux prise en charge. Le congrès de l’American Heart Association a mis en évidence l’interaction étroite qui existe entre les
anomalies des lipides, la paroi artérielle et l’inflammation vasculaire. L’analyse statistique détaillée des grandes études cliniques (CARE, AFCAPS/TexCAPS, VA-HIT) a démontré que les
LDL ne sont pas les seules lipoprotéines en rapport avec les événements cliniques. Les lipoprotéines riches en triglycérides (en
particulier celles contenant l’Apo B et l’Apo CIII) sont également très athérogènes et le paramètre triglycérides sera sans
aucun doute introduit dans les nouvelles recommandations américaines (NCEP Guidelines). L’importance des HDL et du transport inverse du cholestérol dans la protection vis-à-vis de l’athérosclérose a été particulièrement soulignée. Les connaissances
sur le transport inverse du cholestérol ont progressé grâce à
l’identification des protéines de transport, comme la CETP et la
PLTP.
La découverte de deux récepteurs, le SR-B1 (CLAI) et l’ABC1,
qui contrôlent l’efflux de cholestérol des cellules et son transport
au foie, où il est catabolisé et excrété, est d’une importance capitale pour l’élaboration de nouveaux normolipémiants. Le HDLcholestérol est un prédicteur indépendant de survie dans de nombreuses études prospectives et d’intervention clinique présentées
à Atlanta. Néanmoins, la composition des HDL et leur capacité
à induire l’efflux de cholestérol sont à considérer lorsqu’on instaure un traitement visant à augmenter leur concentration.
De très nombreuses présentations ont été consacrées aux facteurs de transcription qui régulent le métabolisme des lipoprotéines, l’inflammation vasculaire et agissent sur l’athérosclérose
au niveau de la paroi artérielle. Les peroxysom proliferator activated receptor α (PPARα), lorsqu’ils sont activés, diminuent le
taux de lipoprotéines riches en triglycérides athérogènes et augmentent le transport inverse du cholestérol. Présents dans les cellules de la paroi artérielle, les PPARα activés interagissent avec
l’athérogenèse. Ils agissent sur l’inflammation vasculaire, l’adhésion des monocytes, la dysfonction endothéliale et la thrombogenèse. Au niveau des macrophages, les PPARα activés augmentent l’efflux du cholestérol et favorisent l’apoptose. Nul doute
* Département d’athérosclérose, INSERM U325, Institut Pasteur, Lille.
La Lettre du Cardiologue - n° 323 - janvier 2000
que la classe médicamenteuse des PPARα agonistes, qui a déjà
démontré son efficacité dans l’étude VA-HIT, est très prometteuse.
Le congrès a souligné l’importance d’un autre facteur de transcription, la SREBP, qui contrôle le mécanisme d’action moléculaire des statines. C’est la diminution de cholestérol intracellulaire provoquée par les inhibiteurs de l’HMG CoA réductase, ou
statines, qui active moléculairement la SREBP. La SREBP activée est alors susceptible d’augmenter l’expression du gène du
LDL-récepteur, entraînant ainsi la diminution du LDL-circulant.
Le congrès d’Atlanta a démontré une nouvelle fois qu’il existe
un effet de classe pour les statines qui ont toutes le même mode
d’action moléculaire. Les effets sur la paroi et sur l’inflammation vasculaire des statines sont expliqués moléculairement et
sont reliés à ce mécanisme commun d’action.
De nombreuses sessions ont été consacrées aux thérapeutiques
normolipémiantes, dont on connaît l’efficacité clinique. Les effets
pléiotropes des statines et des PPARα agonistes sont de mieux en
mieux documentés.
De larges études cliniques en cours permettront prochainement
de savoir si la diminution des événements cliniques sous statine
est d’autant plus importante que le LDL-cholestérol est abaissé.
La recherche de nouvelles thérapeutiques normolipémiantes est
très active. Si l’introduction en clinique des inhibiteurs de la
microsomal transfert protein (MTP) semble compromise du fait
d’effets secondaires indésirables, le développement d’inhibiteurs
spécifiques de l’absorption du cholestérol et des acides biliaires
est prometteur. L’association de ces nouvelles thérapeutiques aux
statines et aux fibrates devrait permettre de mieux atteindre les
cibles chez des patients très dyslipémiques. Les huiles de poisson ont également fait l’objet de nombreux travaux. Leur activité
hypotriglycéridémiante n’est pas dépendante du PPARα et est
largement utilisée pour traiter les grandes hypertriglycéridémies
qui apparaissent lors du traitement par les antiprotéases des
patients atteints du sida. Après la démonstration, dans l’étude
GISSI, de l’efficacité des huiles de poisson en prévention secondaire, le mécanisme moléculaire de leurs effets antiarythmiques
a été élucidé.
Des recherches en cours visent également à développer des médicaments antiathéroscléreux agissant directement au niveau de
la paroi. Les inhibiteurs de l’acyl CoA cholesterol acyltransferase (ACAT) actuellement en évaluation sont très prometteurs.
La qualité et la quantité des travaux présentés lors de ce congrès
d’Atlanta et analysés dans ce numéro spécial suscitent de grands
espoirs pour le traitement préventif et curatif des maladies liées
■
à l’athérosclérose.
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