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Editorial - M. Komajda
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Les bêtabloquants dans l’insuffisance cardiaque :
après l’étude CIBIS...
● M. Komajda*
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n des résultats les plus marquants présentés lors du
récent Congrès de la Société Européenne de Cardiologie à Vienne a été celui de l’étude CIBIS. Nous
savions que cette étude avait été interrompue prématurément en
raison de l’effet bénéfique du bisoprolol sur des patients en insuffisance cardiaque, mais nous ignorions le détail des résultats.
LES RÉSULTATS
Le principe qui a conduit à réaliser la deuxième étude CIBIS était
d’étudier l’influence sur la mortalité toutes causes et sur un certain nombre de variables secondaires de l’administration de bisoprolol à la dose maximale de 10 mg/j chez des patients de classes
III et IV recevant en outre un inhibiteur de l’enzyme de conversion et un diurétique. Deux mille six cent quarante-sept patients
ont été inclus. La dose de départ était de 1,25 mg ; elle était augmentée progressivement jusqu’à un maximum de 10 mg/j au
cours d’une période d’adaptation de 6 mois. Cette population
d’insuffisants cardiaques comportait 80 % de sujets de sexe masculin ; 83 % des patients étaient en classe III et 59 % des patients
avaient une cardiopathie ischémique. La durée moyenne du suivi
n’a été que de 1,4 an en raison de l’arrêt prématuré de l’étude.
En effet, la réduction de la mortalité (de 17,3 % à 11,8 %) dans
le groupe bisoprolol a conduit le Comité de Surveillance à juger
qu’il n’était plus éthique de poursuivre l’essai. La réduction du
risque de mortalité, toutes causes confondues, s’avère ainsi être
de 32 %. L’analyse des décès par cause spécifique montre que la
mortalité régresse surtout pour ce qui concerne les décès par mort
subite, tandis que les décès par insuffisance cardiaque ne sont pas
diminués significativement.
Une autre leçon de l’étude CIBIS est de montrer une réduction
significative de la morbidité cardiovasculaire (hospitalisations
toutes causes, hospitalisations pour insuffisance cardiaque, hospitalisations pour trouble du rythme ventriculaire). Les analyses
en sous-groupes ont montré que la réduction de mortalité n’était
pas significativement différente selon les tranches d’âge (> 65 ou
< 65 ans), selon qu’il s’agissait d’une cardiopathie ischémique
* Service cardiologie, CHU Pitié-Salpêtrière, 47-83, bd de l’Hôpital,
75013 Paris.
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ou non ischémique, à la différence de ce que suggérait l’étude
CIBIS I, ou selon qu’il s’agissait de patients de classe III ou IV.
Ces effets bénéfiques se sont accompagnés d’un plus grand
nombre de bradycardies ayant nécessité une hospitalisation, mais
le pourcentage de retraits permanents de traitement a été similaire (15 %) dans les deux bras de l’étude.
Le mérite de l’étude CIBIS II est d’apporter la démonstration irréfutable que l’adjonction d’un traitement bêtabloquant à un traitement de base par inhibiteur de l’enzyme de conversion et par
diurétique, chez des patients ayant une altération importante de
la fonction systolique du ventricule gauche, entraîne une réduction de mortalité totale de plus de 30 %. Ce résultat est d’autant
plus remarquable que les inhibiteurs de l’enzyme de conversion
entraînent, pour leur part, une réduction de mortalité par rapport
au traitement conventionnel de 25 %. Il s’agit donc d’un gain
majeur en termes de pronostic dans cette maladie grevée d’une
lourde mortalité. Le deuxième enseignement apporté par l’étude
CIBIS est que la morbidité cardiovasculaire, évaluée notamment
par le nombre d’hospitalisations, est réduite significativement de
15 % pour les hospitalisations toutes causes et de 30 % pour les
hospitalisations pour insuffisance cardiaque.
QUELLES INDICATIONS ?
Le retentissement de ces résultats sur notre conception de la stratégie du traitement de l’insuffisance cardiaque va être considérable et devrait conduire la communauté cardiologique à envisager une utilisation du traitement bêtabloquant beaucoup plus large
qu’à l’heure actuelle. Il paraîtrait en effet difficilement acceptable, au plan éthique, de refuser à nos patients l’apport d’un traitement qui peut réduire la mortalité de l’ordre de 30 %, ce chiffre
étant d’ailleurs remarquablement similaire à la réduction de mortalité observée dans les essais menés avec le carvédilol. Si nous
ne devons pas perdre de vue qu’un certain nombre de patients ne
tolèrent pas la mise en route ou l’augmentation des doses de bêtabloquant, il faudra néanmoins que nous fassions un effort pour
instaurer cette mesure thérapeutique plus précocement chez les
patients de gravité moyenne, en leur expliquant qu’après une
période parfois délicate d’adaptation, le confort de vie et la longévité se trouvent améliorés.
Un autre résultat intéressant de l’étude CIBIS est qu’elle a inclus
des patients gravement atteints, certains étant en classe IV. En
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La Lettre du Cardiologue - n° 300 - octobre 1998
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(carvédilol) ne joue pas un rôle majeur dans le gain sur la mortalité ou la morbidité dans la mesure où un produit de chacune
de ces sous-classes a démontré son efficacité, la question n’a pourtant pas été abordée directement au plan scientifique. Il faudra
donc attendre les résultats d’autres essais thérapeutiques en cours
(COMET, BEST, MERIT) pour disposer de cette information.
De même, nous ne savons pas à l’heure actuelle si d’autres propriétés ancillaires des bêtabloquants peuvent jouer un rôle bénéfique (effets antioxydant et alphabloquant du carvédilol...).
Quelles que soient ces incertitudes, le résultat majeur à retenir à
l’issue de la présentation de l’étude CIBIS II et à appliquer dans
notre pratique quotidienne est que la coprescription d’un bêtabloquant et d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion réduit sensiblement la mortalité et la morbidité cardiovasculaire chez l’insuffisant cardiaque : il a été calculé que le traitement de
25 patients pendant une année permet d’épargner une vie.
■
France, à l’heure actuelle, cette catégorie de patients en insuffisance
cardiaque sévère ne relève pas, selon les données de l’autorisation
de mise sur le marché, d’un traitement bêtabloquant. S’il convient
de relever que seulement 17 % des malades étaient en classe IV
dans l’étude CIBIS, il est également intéressant de constater qu’aucune différence de bénéfice ni d’effet secondaire n’a été rapportée
entre les patients de classe III et de classe IV (la publication devra
en apporter la preuve chiffrée). Cette observation conduira-t-elle à
élargir les indications des bêtabloquants aux patients de classe IV ?
Ce sera bien entendu à l’Agence du Médicament d’en juger.
DES QUESTIONS DEMEURENT
Un certain nombre de questions demeurent non résolues après la
publication de l’étude CIBIS : s’il est raisonnable de penser que
le caractère cardio-sélectif (bisoprolol) ou non cardio-sélectif
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À découper ou à photocopier
A
A
BB
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N
N
N
N
Merci d’écrire nom et adresse en lettres majuscules
Dr, M., Mme, Mlle ...........................................................................
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Pratique : ❏ hospitalière
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