Rétinopathie diabétique floride : une forme de rétinopathie diabétique

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Cas clinique
Rétine
Rétinopathie diabétique floride :
une forme de rétinopathie diabétique
particulièrement grave et évolutive
chez une jeune femme
Florid diabetic retinopathy: a particularly severe
and evolutive type of diabetic retinopathy
Rétinopathie diabétique
floride • Photocoagulation
panrétinienne • Injection
intravitréenne d’anti-VEGF.
Florid diabetic retinopathy •
Panretinal photocoagulation •
Intravitreal anti-VEGF therapy.
A. Lecleire-Collet
(Clinique Mathilde, Rouen ; service d’ophtalmologie, hôpital Lariboisière, Paris)
U
ne jeune femme de 18 ans, diabétique depuis l’âge de 4 ans et présentant
un diabète très mal équilibré (hémoglobine glyquée [HbA1c] : 15 %), en
cours de rééquilibration, consulte pour une baisse d’acuité visuelle bilatérale.
Elle a bénéficié d’un fond d’œil, 2 ans auparavant, qui était normal.
Examen
L’examen ophtalmologique retrouve une acuité visuelle de 9/10 P2 à droite et 7/10
P3 à gauche. Au fond d’œil, il existe, de manière bilatérale, une rétinopathie proliférante avec des néovaisseaux prépapillaires, de très nombreuses anomalies microvasculaires intrarétiniennes (AMIR), des dilatations veineuses très importantes et
des nodules cotonneux (figure 1). On note un œdème maculaire diffus bilatéral, peu
important. Le tableau est encore plus sévère à gauche. On est donc en présence d’une
rétinopathie diabétique proliférante modérée à droite, et proliférante sévère à gauche.
Compte tenu du contexte (patiente jeune, diabète de type I ancien, très déséquilibré,
rééquilibration en cours), du tableau clinique et de l’évolutivité, il s’agit d’une rétinopathie diabétique floride. Une photocoagulation panrétinienne (PPR) bilatérale est
commencée en urgence.
Discussion et évolution
Malgré la réalisation de la PPR (2 séances par semaine), la rétinopathie floride évolue
très vite, surtout sur l’œil gauche (figure 2). L’observance de la patiente aux séances
de laser est médiocre. Une injection intravitréenne d’anti-VEGF (Vascular Endothelial
Growth Factor) est proposée, mais refusée par la patiente. Elle est alors prévenue de
l’éventualité d’une intervention chirurgicale.
En effet, les proliférations fibrovasculaires s’étendent très rapidement sur l’œil
gauche, et des hémorragies rétrohyaloïdienne et intravitréenne apparaissent
(figure 3). À droite, la gravité de la rétinopathie floride est moindre, et l’évolution
semble se ralentir (figures 2 et 3, p. 54). Une intervention de vitrectomie-dissection
sur l’œil gauche est réalisée (précédée d’une injection intravitréenne d’anti-VEGF),
avec un assez bon résultat anatomique et fonctionnel. L’acuité visuelle, quelques mois
après l’intervention, est de 8/10 P2 faible à droite et 5/10 P3 faible à gauche.
La rétinopathie diabétique floride constitue une urgence thérapeutique de par son
évolutivité vers des complications rétiniennes gravissimes (1, 2). Le traitement
consiste en une PPR urgente, rapide et confluente (1, 2). Une injection d’anti-VEGF
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Images en Ophtalmologie • Vol. VI • no 2 • avril-mai-juin 2012
Légendes
Figure 1. Aspect initial du fond d’œil chez
cette jeune femme diabétique de type I, avec
un diabète très mal équilibré. Découverte
d’une rétinopathie diabétique floride.
a. Panoramique photographies couleur
de l’œil droit : néovaisseaux prépapillaires
débutants, nodules cotonneux, nombreuses
anomalies microvasculaires intrarétiniennes,
dilatations veineuses en chapelet, ou veines
“moniliformes”, témoignant de la présence
d’une ischémie rétinienne importante.
b. Photographie couleur du pôle postérieur
de l’œil droit (détail).
c. Panoramique photographies couleur de
l’œil gauche montrant que l’atteinte est plus
grave qu’à droite. Efflorescence de néovais­
seaux prépapillaires, nodules cotonneux,
nombreuses anomalies microvasculaires
intrarétiniennes, dilatations veineuses en
chapelet très importantes, témoignant de
la présence dune ischémie rétinienne très
étendue.
d. Photographie couleur du pôle postérieur
de l’œil gauche (détail).
Figure 2. Aspect évolutif du fond d’œil
pendant le traitement par photocoagula­
tion panrétinienne.
a. Panoramique photographies couleur de
l’œil droit : les néovaisseaux prépapillaires
ont légèrement progressé, petite hémorragie
rétrohyaloïdienne juxtapapillaire. La photo­
coagulation panrétinienne doit être densifiée
et complétée.
b. Panoramique photographies couleur de
l’œil gauche. Les néovaisseaux prépapillaires
se sont étendus et leur calibre a augmenté.
La photocoagulation panrétinienne doit être
densifiée et complétée.
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sera proposée en cas de baisse d’acuité visuelle avec un double effet ­thérapeutique,
sur l’œdème maculaire et les proliférations vasculaires (3). Toutefois, en cas
­d’aggravation des proliférations fibreuses, une intervention chirurgicale rapide sera
nécessaire (2).
La différence d’évolutivité et de pronostic entre les 2 yeux chez cette jeune patiente
s’explique par le décalage initial de l’atteinte entre les 2 yeux et illustre la nécessité
de diagnostiquer la rétinopathie diabétique au plus tard à un stade de rétinopathie
diabétique non proliférante sévère ou proliférante débutante, et de débuter le traitement par laser le plus précocement possible. Un examen du fond d’œil fréquent est
nécessaire chez les sujets à risque de rétinopathie diabétique floride.
II
Références bibliographiques
1. Lattanzio R, Brancato R, Bandello FM et al. Florid diabetic retinopathy (FDR): a long-term follow-up
study. Graefes Arch Clin Exp Ophthalmol 2001;239(3):182-7.
2. Favard C, Guyot-Argenton C, Assouline M, Marie-Lescure C, Pouliquen YJ. Full panretinal photocoagulation and early vitrectomy improve prognosis of florid diabetic retinopathy. Ophthalmology
1996;103(4):561-74.
3. Gaucher D, Fortunato P, Lecleire-Collet A et al. Spontaneous resolution of macular edema after
panretinal photocoagulation in florid proliferative diabetic retinopathy. Retina 2009;29(9):1282-8.
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Légendes
Figure 3.
a. Photographie couleur du pôle postérieur
de l’œil droit (détail). La photocoagulation
panrétinienne est complète. La croissance
des néovaisseaux prépapillaires s’est ralentie,
l’hémorragie rétrohyaloïdienne juxtapapil­
laire s’est résorbée. Évolution favorable sur
cet œil.
b. Panoramique photographies couleur
de l’œil gauche. La photocoagulation
pan­rétinienne est complète. Les néo­vaisseaux
prépapillaires se sont encore étendus et sont
associés à un support fibreux dense, notam­
ment en supérieur de la papille. En nasal de la
papille, ils se sont compliqués d’une hémor­
ragie rétrohyaloïdienne. Une hémorragie
intravitréenne non visible sur ce cliché s’y
associe également. Évolution défavorable
sur cet œil. La rétinopathie diabétique floride
continue d’évoluer très vite malgré la réalisa­
tion de la photo­coagulation panrétinienne.
Une intervention de vitrectomie-dissection
sur l’œil gauche est indiquée, précédée d’une
injection intra­vitréenne d’anti-VEGF.
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