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À propos de “La fonction respiratoire des plongeurs”
*
J’ai lu avec beaucoup d’intérêt l’article d’Y. Jammes
concernant la fonction respiratoire des plongeurs.
C’est un sujet qui me tient à cœur d’une part en tant
que pneumologue et d’autre part en tant que plongeur
(niveau 4 initiateur de la FFESSM) et médecin fédéral.
Je suis interpellé par une phrase d’Y. Jammes
dans le chapitre intitulé : “Le pneumologue devant
une décision d’aptitude à la plongée”. Il est écrit que,
chez l’asthmatique, l’incidence des accidents de plongée
souvent létaux est très élevée.
La question de la contre-indication de la plongée
sous-marine de loisir pour les personnes asthmatiques
est évidente pour moi, mais cette question est débattue
régulièrement dans la littérature médicale de la plongée
sous-marine et en particulier diverses conférences
d’experts, dont une très récente (Scuba Subcomittee,
publiée dans J Allergy Clin Immunol 1995 ; 96 : 871-3),
reposant sur l’absence de données épidémiologiques
très claires concernant la majoration du risque
de barotraumatique chez l’asthmatique,
indique qu’il est possible de ne pas contre-indiquer
la plongée sous-marine chez les patients asthmatiques
dont l’asthme est ancien et dont la fonction pulmonaire
est redevenue normale.
Dans un numéro très récent de la Revue des maladies
respiratoires (2001, tome 18, no 4), mon ami Daniel
Coëtmeur, pneumologue et plongeur sous-marin,
suggère qu’il est peut-être possible de déroger
à l’interdiction de la plongée chez certains asthmatiques.
Je serai par conséquent très intéressé de connaître,
d’une part, le point de vue d’Y. Jammes concernant
ce problème et, d’autre part, quelles références
bibliographiques il apporte pour étayer la phrase
qu’il a écrite et que j’ai citée précédemment.
Il va de soi, et je le redis encore une fois, que je suis
parfaitement convaincu que la plongée sous-marine
est totalement contre-indiquée chez le patient asthmatique
et ce quelles que soient l’ancienneté et la présentation
clinique de l’asthme.
Notre collègue, le Dr Piquet, s’interroge sur l’aspect législatif des contre-indications de la plongée chez les patients
asthmatiques. Cette question est d’actualité puisqu’un
numéro de la Revue des maladies respiratoires (2001,
tome 18, no 4) y a été largement consacré. Mon groupe n’a
pas participé à des études rétrospectives permettant de
chiffrer l’incidence de l’asthme dans les accidents de
plongée autonome ou même de plongée en apnée. Il ne me
semble donc pas raisonnable d’entrer dans cette querelle
réactivée par la revue générale de D. Coëtmeur et al.
(Revue des maladies respiratoires 2001 ; 18 [4] : 381-6).
Dans leur éditorial publié dans ce même numéro,
J. Regnard et J.L. Méliet ont répondu dans un esprit de
bon sens clinique, et surtout physiopathologique, qui
incite à refuser un “permis de plonger” à un asthmatique
avéré. Mon expérience de la plongée profonde m’autorise
à affirmer la survenue de troubles fonctionnels obstructifs,
associant bronchospasme et hypersécrétion trachéobronchique, lors de l’absence de réchauffement suffisant des
gaz inspirés (Jammes et al., Undersea Biomed Res 1988 ;
15 : 179-92 ; Burnet et al., Respir Physiol 1990 ; 81 :
413-24). Ce réchauffement est inexistant au cours des
plongées ludiques. De plus, le choix d’utiliser des gaz
diluants autres que l’azote, tel l’hélium, au cours de ces
mêmes plongées ludiques ne peut qu’accentuer les
réponses réflexes au refroidissement des voies aériennes
de par les capacités thermoconductrices élevées des gaz
légers. Tout semble donc concourir à favoriser un bronchospasme en plongée, événement qui pourrait être grave
chez un sujet particulièrement réactif comme l’asthmatique. Il me faut rappeler le fait déjà signalé dans une mise
au point antérieure de La Lettre du Pneumologue (“Les
réflexes nasopulmonaires chez l’homme normal ou asthmatique”, mars-avril 2001, volume IV, no 2, pp. 56-58) que
ces réponses réflexes bronchoconstrictrices à l’air froid
existent toujours chez le sujet sain et qu’elles sont doublées chez l’asthmatique, voire triplées chez les sujets
présentant une rhinite spasmodique. L’obstruction des
voies aériennes induite par un air insuffisamment réchauffé
n’est donc pas une simple vision de physiologiste.
Dr J. Piquet
Pr Y. Jammes
Service de pneumologie
Centre hospitalier intercommunal, Le Raincy-Montfermeil
Laboratoire de physiologie respiratoire (EA 2201)
Faculté de médecine, université de la Méditerranée, Marseille
* Article publié dans La Lettre du Pneumologue, numéro 5, septembreoctobre 2001, pp. 197-201.
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La Lettre du Pneumologue - Volume V - no 1 - janv.-févr. 2002
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