La Lettre du Gynécologue Directeur de la publication : Claudie Damour-Terrasson Rédacteur en chef : Pr P. Madelenat (Paris) Rédacteurs en chef adjoints : Pr F. Lécuru (Paris) Dr J.M. Mayenga (Sèvres) Comité de rédaction F.X. Aubriot - A. Bongain - F. Bretelle - S. Camatte L. Cravello - Ph. Descamps - F. Golfier - P. Panel L. de Poncheville - B. Wainer Conseillers scientifiques J. Belaïsch-Allart - C. Bricaire - M. Cosson J. Dauplat - Y. Dumez - C. Jamin G. Le Bouëdec - D. Querleu Comité scientifique P. Bouchard - G. Bréart - D. Dargent † R. Frydman - R. Henrion - C. Jasmin J. Lansac - G. Levy - P. Mauvais-Jarvis - E. Papiernik Comité scientifique international P. Audet-Lapointe (Montréal) J. Donnez (Bruxelles) - R. Lambotte (Liège) P. de Grandi (Lausanne) Comité de lecture B. Blanc - G. Boog - C. Chapron J.B. Dubuisson - D. Dumonceau - J.Y. Gillet B. de Lignières † - P. Lopès - G. Mellier G. Plu-Bureau - J.C. Pons - G. Pontonier Société éditrice : EDIMARK SAS Fondateur : Alexandre Blondeau Président-directeur général : Claudie Damour-Terrasson Tél. : 01 46 67 62 00 – Fax : 01 46 67 63 10 Rédaction Directeur délégué de la rédaction : Béatrice Hacquard-Siourd Secrétaire générale de la rédaction : Magali Pelleau Secrétaire de rédaction : Brigitte Hulin Rédactrices-réviseuses : Cécile Clerc, Sylvie Duverger, Muriel Lejeune, Catherine Mathis, Odile Prébin Infographie Premier rédacteur graphiste : Didier Arnoult Rédactrices graphistes : Mathilde Aimée, Christine Brianchon, Cécile Chassériau, Catherine Rousset Dessinateurs d’exécution : Stéphanie Dairain, Antoine Palacio Responsable technique : Virginie Malicot Commercial Directeur du développement commercial : Sophia Huleux-Netchevitch Directeur des ventes : Chantal Géribi Directeur d’unité : Béatrice Tisserand Régie publicitaire et annonces professionnelles : Valérie Glatin Tél. : 01 46 67 62 77 – Fax : 01 46 67 63 10 : Abonnements : Lorraine Figuière (01 46 67 62 74) 2, rue Sainte-Marie - 92418 Courbevoie Cedex Tél. : 01 46 67 63 00 – Fax : 01 46 67 63 10 E-mail : [email protected] Site Internet : http://www.edimark.fr Adhérent au SNPM Revue indexée dans la base PASCAL (INIST-CNRS) É ditorial Consultation d’oncogénétique : les limites du raisonnable L' F. Cornélis* hypothèse d’une anomalie des gènes BRCA1 ou BRCA2 (Breast Cancer 1 ou Breast Cancer 2) est de plus en plus souvent soulevée en consultation gynécologique, si bien que la question se pose de la limite des indications des consultations d’oncogénétique. Autant le gynécologue a un “devoir d’information” quand la situation est évocatrice devant un cancer du sein précoce ou familial, autant il a un “devoir de rassurer” quand l’inquiétude de sa patiente est sans fondement. Après un bref rappel, la méthode de sélection des indications des consultations d’oncogénétique proposées par la mission ministérielle sera détaillée, les conséquences pratiques exposées et le déroulement de la démarche génétique précisé. Éditorial Nous faisons de vos spécialités Nous faisons de vos spécialités notrespécialité spécialité notre Rappel En préambule, il est important de souligner que chaque personne possède dans son patrimoine génétique plusieurs anomalies. L’anomalie des gènes BRCA1 ou BRCA2 est présente chez environ une personne sur 500 dans la population générale, homme ou femme. Les femmes porteuses de l’anomalie ont un risque majeur de cancer du sein, débutant vers 30 ans et atteignant environ 80 % à 70 ans, ainsi qu’un risque élevé de cancer de l’ovaire, débutant vers 35 ans et atteignant environ 40 % à 70 ans. Les hommes porteurs de l’anomalie ont un faible risque de cancer du sein (environ 4 %), mais le même risque de transmission de l’anomalie génétique à leur descendance que les femmes, de 50 % pour chaque enfant. Cependant, la majorité des formes familiales de cancer du sein survient en dehors du contexte de ces anomalies génétiques, par le simple jeu du hasard, 10 % des femmes étant atteintes d’un cancer du sein au cours de leur vie : les formes familiales par coïncidence fortuite sont les plus fréquentes. Ce n’est, en effet, que 5 % des cancers du sein et de l’ovaire qui font intervenir une anomalie génétique héréditaire. Il est donc particulièrement important de sélectionner les indications de la consultation d’oncogénétique. Indication des tests génétiques L’identification des familles à risque potentiel, selon la méthode proposée par la mission ministérielle coordonnée par le Pr François Eisinger, repose sur le score décrit dans l’encadré (page 4). En pratique, devant un cancer du sein précoce avant 40 ans ou avec notion familiale de cancer du sein ou de l’ovaire, le gynécologue a un devoir d’information : l’hypothèse génétique est évoquée, justifiant une consultation spécialisée d’oncogénétique (score ≥ 3). Au sein d’une famille à risque potentiel, la personne à laquelle proposer la consultation en vue d’un éventuel test génétique est a priori celle ayant eu le cancer à l’âge le plus jeune. Il arrive cependant que toutes les femmes atteintes de la famille soient décédées. La question se pose alors d’un éventuel test génétique chez une femme indemne. Très globalement, le test génétique peut être envisagé, * Unité de génétique clinique-oncogénétique, hôpital Lariboisière, 75010 Paris. Consultations avancées à l’hôpital Bichat, 75018 Paris, au Centre de Charlebourg, 92250 La Garenne-Colombes, à l’hôpital Avicenne, 93000 Bobigny, au centre hospitalier Sud Francilien, 91106 Corbeil-Essonnes. La Lettre du Gynécologue - n° 321 - avril 2007 Éditorial É ditorial quand la situation est particulièrement évocatrice d’une anomalie génétique (score ≥ 5), pour une femme apparentée au premier degré à une femme décédée d’un cancer du sein ou de l’ovaire. Dans tous les cas, le gynécologue adresse sa patiente en consultation d’oncogénétique pour avis. C’est le généticien qui proposera éventuellement le test. Conséquences pratiques du test génétique Quand l’indication du test génétique est retenue et la proposition de test acceptée par la patiente, deux cas de figure sont à considérer : – Le résultat du test génétique montre une anomalie sur le gène BRCA1 ou BRCA2, expliquant la survenue du cancer chez la personne et permettant de préciser pour chaque membre de sa famille s’il est porteur du risque de cancer. La famille est informée par la personne testée. – Le résultat montre l’absence d’anomalie détectée, sans pouvoir offrir une garantie absolue, le test pouvant être pris en défaut pour environ 5 % des anomalies. La surveillance recommandée au strict minimum chez une femme potentiellement porteuse d’une anomalie de BRCA1 ou de BRCA2, mise en place dès la première consultation, afin de dépister précocement un éventuel cancer du sein ou de l’ovaire est : – un examen gynécologique tous les six mois à partir de 20 ans ; – une mammographie annuelle à partir de 30 ans, couplée en cas de certitude de l’existence d’une anomalie génétique avec une IRM annuelle ; – une échographie ovarienne annuelle à partir de 35 ans. Une prévention chirurgicale est envisageable chez les femmes pour lesquelles l’anomalie génétique a été identifiée, réduisant le risque de cancer d’environ 90 %. La décision revient à la personne porteuse de l’anomalie génétique, après concertation avec les membres de l’équipe médicale. Cette prévention chirurgicale est recommandée pour les ovaires après 40 ans chez les femmes porteuses de l’anomalie génétique. Démarche du test génétique Voici les étapes de la démarche recommandée par la mission ministérielle pour bénéficier du test génétique : – consultation d’information auprès d’un oncogénéticien déclaré au ministère ; – proposition d’un délai de réflexion avec entretien auprès d’une psychologue clinicienne ; – décision en consultation individuelle avec l’oncogénéticien et, en cas de confirmation du désir d’être testé, signature du consentement puis prélèvement ; – délai d’obtention du résultat se réduisant actuellement à environ 9 mois par exemple pour la série de génétique du Dr Stoppa-Lyonnet à l’Institut Curie ; Test génétique de recherche de mutation pour les gènes BRCA1 et BRCA2 Identification des familles à risque potentiel Additionner les poids respectifs dans une seule branche familiale (paternelle ou maternelle : comptabiliser uniquement des personnes ayant des gènes en commun ; on ne peut comptabiliser dans un seul “score” une tante paternelle et une tante maternelle). Une personne atteinte de plusieurs cancers indépendants est comptabilisée en ajoutant les “poids” de chaque cancer. En cas d’atteinte des deux branches, le score retenu est celui le plus élevé. Interprétation : – scores 5 et plus : excellente indication ; – scores 3 et 4 : indication possible ; – scores 2 et moins : utilité médicale faible. Situation Poids Mutation de BRCA1 ou 2 identifiée dans la famille 5 Cancer du sein chez une femme avant 30 ans 4 Cancer du sein chez une femme entre 30 et 40 ans 3 Cancer du sein chez une femme entre 40 et 50 ans 2 Cancer du sein chez une femme entre 50 et 70 ans 1 Cancer du sein chez un homme 4 Cancer de l’ovaire 3 Identification, dans une famille à risque potentiel, de la personne à laquelle proposer la consultation en vue d’un test génétique La personne à adresser en priorité est celle ayant eu un cancer du sein ou de l’ovaire à l’âge le plus jeune. En cas de réticence, une autre personne de la famille peut consulter pour préciser le risque familial, amenant éventuellement à une proposition de test génétique. Adapté de Eisinger F et al. Bull Cancer 2004;91(3):219-37. – consultation individuelle avec l’oncogénéticien pour communiquer le résultat. Le coût du test est pris en charge directement par le ministère. Grâce à une application particulièrement efficace du Plan Cancer, toutes les grandes villes universitaires disposent de ces consultations d’oncogénétique. Beaucoup d’oncogénéticiens proposent en outre des consultations avancées pour assurer une meilleure couverture du territoire. La plupart des consultations sont référencées dans l’annuaire du Groupe génétique et cancer, accessible sur le site web de la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer à l’adresse : http://www.fnclcc.fr/, en allant à “Groupe génétique et cancer”, “consultation de l’annuaire”. Conclusion Pour rester dans les limites du raisonnable, le gynécologue se doit d’évoquer l’hypothèse génétique devant les cancers du sein précoces avant 40 ans ou avec antécédents familiaux de cancers du sein ou de l’ovaire, justifiant une consultation d’oncogénétique. Il rassure sa patiente quand il n’existe qu’un seul antécédent de cancer du sein à un âge tardif dans la n famille. La Lettre du Gynécologue - n° 321 - avril 2007