DOSSIER THÉMATIQUE Oncodermatologie Mélanome et immunothérapies : des avancées importantes Melanoma and immunotherapy: huge advances A.C. Knol 1, N. Labarrière 1, A. Khammari 1, 2, B. Dréno 1, 2, 3 B ien que le mélanome soit le moins fréquent des cancers de la peau, il en constitue la forme la plus sévère, notamment en raison de sa capacité à métastaser. Le mélanome provoque environ 75 % des décès par cancer cutané (1, 2). Au cours du xxe siècle, l’incidence du mélanome dans les populations d’origine européenne a augmenté plus vite que celle de n’importe quelle autre tumeur solide, à l’exception du cancer du poumon (3). La survie varie largement en fonction du stade, depuis une pathologie hautement curable lorsque le mélanome est détecté précocement jusqu’à une pathologie au pronostic sombre aux stades avancés et inopérables (4). Le mélanome est une des tumeurs malignes pour lesquelles le système immunitaire paraît jouer un rôle crucial dans le contrôle de l’évolution de la maladie. Des cas de régression spontanée ont ainsi été rapportés, suggérant un rôle du système immunitaire, indirectement conforté par la preuve de la présence d’infiltrats lymphocytaires dans la tumeur primitive, associée à une régression tumorale. Au stade de tumeur primitive et d’envahissement ganglionnaire, le traitement classique du mélanome repose principalement sur la chirurgie. Au stade métastatique, le pronostic devient sombre, les chimiothérapies classiques n’ayant encore à ce jour que des taux de réponse de l’ordre de 10 à 15 %, avec une survie globale (SG) de moins de 8 mois, faisant ainsi rechercher d’autres voies thérapeutiques. Le mélanome est en effet une tumeur fréquemment étudiée en raison de l’identification d’antigènes du mélanome, mais aussi grâce à la disponibilité de lignées tumorales et de clones cellulaires T qu’il est possible d’obtenir à partir des cellules sanguines ou des lymphocytes ganglionnaires, utilisables pour les études immunologiques in vitro (5). De nombreux antigènes de tumeur, reconnus par des lymphocytes T, ont ainsi pu être identifiés et caractérisés au cours de ces 15 dernières années (6, 7), rendant possible le développement de protocoles d’immunothérapie antitumorale (tableau I). Les cytokines Interleukine 2 L’interleukine 2 (IL-2) est une des cytokines les plus utilisées dans le domaine de l’oncologie. Il s’agit d’une glycoprotéine qui se lie au récepteur à l’IL-2 présent sur les lymphocytes T helper, effecteurs et régulateurs, induisant la prolifération et la survie des lymphocytes T. Son utilisation a été approuvée en 1998 dans le mélanome, par la FDA (Food and Drug Administration), sur la base de l’étude de phase II (8) rapportant un taux de réponse de 16 % et une survie 1 Inserm U892, Centre régional de recherche en cancérologie NantesAngers, Nantes. 2 Unité de cancéro-dermatologie, Centre d’investigation clinique biothérapie, Inserm 0503, CHU HôtelDieu, Nantes. 3 Unité de thérapie cellulaire et génique, CHU Hôtel-Dieu, Nantes. Tableau I. Classification des antigènes de tumeurs dans le mélanome. Antigènes de la famille cancer testis Antigènes de différenciation Protéines structurellement anormales Antigènes ubiquitaires surexprimés Famille BAGE Melan-A/MART-1 CDK4 HER-2/neu Famille LAGE gp100 β-caténine MUC-1 Famille MAGE Tyrosinase Caspase 8 P53 Famille GAGE gp75/TRP-1 Famille Ras Télomérase Famille RAGE TRP-2 PRAME NY-ESO-1 Na88-A La Lettre du Cancérologue ̐ Vol. XX - n° 9 - novembre 2011 | 575 Résumé Mots-clés Mélanome malin Immunothérapie Thérapie adoptive Vaccins Cytokines Immunomodulation Summary Protocols of tumor immunotherapy have been largely developed over the past years, thus enabling various treatment options to melanoma patients. Although optimal methods for this promising mode of therapy are not well known, the precise immunological follow-up of these patients constitutes a potent major breakthrough in this field for the future. Development of novel therapeutic approaches, along with optimization of existing therapies, continues to hold a great promise in the field of melanoma therapy research. This review reports recent advances in the immune anti-melanoma therapy, including cytokines, adoptive immunotherapy with TIL, vaccines using dendritic cells, tumor lysates, peptides or recombinant proteins and immunomodulatory strategies such as monoclonal antibodies (anti-CTLA-4, anti-PD-1, antiCD40) and innate immunity molecules (TLR). Keywords Malignant melanoma Immunotherapy Adoptive therapy Vaccines Cytokines Immunomodulation Les protocoles d’immunothérapie antitumorale se sont largement développés au cours des dernières années, permettant ainsi de proposer plusieurs options aux patients atteints de mélanome. Bien que les modalités optimales d’utilisation de ce mode de thérapie aux résultats encourageants ne soient pas encore toutes identifiées, le suivi immunologique précis des patients ainsi traités constitue une possibilité d’avancée majeure dans ce domaine pour le futur. Cette revue présente une analyse des avancées dans le domaine de l’immunothérapie du mélanome, incluant l’immunothérapie non spécifique avec les cytokines, l’immunothérapie adoptive par TIL (Tumor Infiltrating Lymphocyte), la vaccination par lysat tumoral et l’immunothérapie ciblée avec les clones, la vaccination par cellules dendritiques chargées, la vaccination par peptides ou protéine recombinante et les stratégies d’immunomodulation telles que l’utilisation d’anticorps monoclonaux (anti-CTLA-4, anti-PD-1, anti-CD40) et d’agonistes de molécules impliquées dans l’immunité innée (TLR [Toll-Like Receptor]). prolongée pour les 6 % de patients présentant une réponse complète. Dix ans après la fin du traitement, les deux tiers des patients ayant présenté une réponse complète étaient toujours en rémission, au point que, avec l’IL-2, on parle de véritables guérisons (8). Avec l’introduction de nouveaux inhibiteurs de tyrosine kinase, molécules immunomodulatrices, cytokines, vaccins, on note un intérêt croissant à combiner ces stratégies thérapeutiques avec l’IL-2. Cependant, malgré sa capacité à prolonger la survie de certains patients, la toxicité de l’IL-2 peut être sévère (hypotension, hypoxie, défaillance rénale, arythmie cardiaque). Il faut également savoir que cette cytokine a une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans le mélanome aux États-Unis, mais que ce n’est pas le cas en France. Enfin, une étude récente a rapporté une augmentation de la SG chez des patients HLA-A2 traités par l’association IL-2 à forte dose et vaccin gp100 comparativement à l’IL-2 seule, avec un gain de 8 mois, mais avec des effets secondaires importants liés à l’IL-2 (9). L’interféron L’interféron α (IFNα) a été la première cytokine recombinante utilisée dans le traitement du mélanome métastatique. Les études originales de phase I-II ont rapporté des taux de réponse globale d’environ 16 %. L’utilisation de l’IFNα en traitement adjuvant chez les patients porteurs de mélanomes est basée sur l’hypothèse que la présence de micrométastases peut être la cause d’une future rechute. La dernière métaanalyse a été publiée en 2010 : elle a examiné l’effet de l’IFNα sur la survie sans rechute (SSR) et la SG de patients atteints de mélanomes de stades II et III selon l’AJCC 6e et 7e éditions (Americain Join Committee on Cancer) et s’est intéressée à 14 essais randomisés et contrôlés conduits entre 1990 et 2008 (10). Chez ces patients, le traitement adjuvant par IFNα montre une amélioration significative de la SSR, mais aussi de la SG. L’hypothèse aujourd’hui est que l’IFNα a un effet dans une sous-population de patients probablement très restreinte, ce qui explique la difficulté à mettre en évidence le bénéfice et la nécessité de l’identifier par des biomarqueurs manquant encore à ce jour. Sur la base de travaux récents utilisant l’IFN pégylé α2b, 576 | La Lettre du Cancérologue ̐ Vol. XX - n° 9 - novembre 2011 forme retard d’IFNα, et rapportant une médiane de SSR de 34,8 mois dans le groupe de patients traités par IFN pégylé α2b versus 25,5 mois dans le groupe non traité, cette molécule vient d’obtenir une AMM aux États-Unis en situation adjuvante dans les mélanomes avec envahissement ganglionnaire microscopique ou macroscopique (stade III a, b, c) [11]. Autres interleukines et cytokines (IL-12, IL-21, GM-CSF) L’IL-12 est une cytokine multifonctionnelle qui a été utilisée au cours d’essais de phase I dans le mélanome, avec des réponses relativement limitées (12, 13). L’IL-21 est une cytokine activatrice qui a été utilisée dans un essai de phase II chez 40 patients porteurs d’un mélanome de stade IV : 9 patients ont présenté une réponse clinique et 16 patients une stabilisation de la maladie, accompagnée d’effets secondaires modestes (myalgie, diarrhée, fatigue) [14]. Ce résultat encourageant devrait être suivi d’autres essais de phase II. Le GM-CSF (Granulocyte Macrophage Colony Stimulating Factor) a été utilisé en traitement adjuvant au cours d’un essai randomisé de phase III chez 815 patients. Bien que statistiquement non significative, la SG médiane des patients ayant reçu du GM-CSF était plus élevée que celle des patients n’en ayant pas reçu (72 versus 59,8 mois) [15]. Il serait donc intéressant d’évaluer l’efficacité du GM-CSF en traitement adjuvant à des stades moins avancés de la maladie. Immunothérapie cellulaire adoptive (ACT [adoptive T-cell therapy]) Par injection de lymphocytes infiltrant la tumeur Développée en cancérologie au début des années 1980 sur la base des travaux de S. Rosenberg, l’immuno thérapie cellulaire passive consiste à DOSSIER THÉMATIQUE générer et à amplifier ex vivo des populations lymphocytaires infiltrant la tumeur, ou TIL (Tumor Infiltrating Lymphocytes). Ces lymphocytes, isolés à partir des fragments de la tumeur du patient, sont amplifiés en grandes quantités par culture ex vivo puis réinjectés au patient, en combinaison avec des injections d’IL-2, destinées à favoriser la survie et la multiplication des TIL in vivo (figure 1) [16, 17]. Le groupe de S. Rosenberg a ainsi montré que 34 % des patients atteints de mélanome métastatique et traités par TIL et IL-2 présentaient une réponse clinique partielle ou complète, alors que 17 % des patients recevant de l’IL-2 seule répondaient au traitement (18). Cependant, en raison des rechutes rapides, les essais se sont tournés vers les patients présentant une charge tumorale moins élevée, avec une utilisation en situation adjuvante (19). L’étude de notre groupe a ainsi été mise en place afin d’évaluer l’efficacité clinique de ce traitement après un curage ganglionnaire locorégional chez des patients atteints de mélanome de stade III (AJCC 2007) : cette étude a montré une corrélation entre le nombre de ganglions envahis et l’efficacité des TIL, avec une augmentation significative de la SG et de la SSR dans la sous-population de patients recevant des TIL et n’ayant qu’un seul ganglion envahi (19). Avec un suivi de 7 ans, nous avons observé que, chez les patients Prélèvement ganglionnaire Processus TIL Préparation de l’injection (AH 4 %) n’ayant qu’un seul ganglion envahi, la SSR et la SG sont significativement plus longues (pour la SSR, p ajusté = 0,0219 ; pour la SG, p ajusté = 0,0125) dans le bras TIL + IL-2 que dans le bras IL-2 seule (20). Cependant, la pertinence de ces essais n’a longtemps reposé que sur l’évaluation clinique, car il est demeuré longtemps impossible de savoir si les TIL migraient bien vers le site de la tumeur et s’ils contenaient réellement des lymphocytes spécifiques d’antigènes de tumeur pour tous les patients, et en quelle proportion. Le développement de nouvelles techniques a permis de quantifier les lymphocytes T spécifiques d’antigènes de mélanome injectés à des patients atteints de ce cancer. Deux études ont en effet montré que ces lymphocytes pouvaient survivre plusieurs semaines à plusieurs mois chez les patients et coloniser la tumeur (21, 22). Par ailleurs, notre groupe s’est intéressé à la spécificité des TIL injectés : nous avons ainsi observé que 19 des 27 patients recevant des TIL et de l’IL-2, pour lesquels la lignée tumorale a pu être établie, avaient reçu des lymphocytes T spécifiques d’antigènes tumoraux, et que la SSR était significativement corrélée à l’injection de TIL spécifiques, mais que ce bénéfice concernait principalement la sous-population de patients recevant des TIL et n’ayant qu’un seul ganglion envahi (23). Ces résultats suggèrent donc que le transfert de Labo d’anatomopathologie Injection intraveineuse Découpe du ganglion Congélation Culture des fragments AMPLIFICATION Congélation pour injection 2 Multiplateaux 60 plaques de 96 puits LAZ Irr + CMN Irr AH : albumine humaine ; CMN Irr : cellules mononucléées irradiées ; LAZ Irr : cellules LAZ irradiées (lignée de lymphocytes B transformée par le virus d’Epstein-Barr). Figure 1. Processus de production des TIL à usage thérapeutique. La Lettre du Cancérologue ̐ Vol. XX - n° 9 - novembre 2011 | 577 DOSSIER THÉMATIQUE Oncodermatologie Mélanome et immunothérapies : des avancées importantes TIL induit un bénéfice thérapeutique qui dépend du stade de l’envahissement ganglionnaire mais aussi de la présence de lymphocytes T spécifiques de la tumeur au sein des TIL injectés. Plusieurs modèles animaux ayant montré que la thérapie adoptive des tumeurs est plus efficace après un traitement immunosuppresseur, le groupe de S. Rosenberg a étudié l’effet d’une lymphodéplétion sévère sur l’efficacité clinique de TIL injectés en combinaison avec de fortes doses d’IL-2 (24). Sur le plan clinique, des réponses objectives, complètes, partielles ou mixtes ont été observées, parfois associées à des réponses auto-immunes de type vitiligo ou uvéite. Une autre approche de la thérapie adoptive consiste à utiliser des lymphocytes T autologues modifiés pour exprimer des TCR (T-Cell Receptor) spécifiques de différents antigènes de tumeur ou pour sécréter des cytokines. Cependant, les taux de réponse clinique n’étaient pas supérieurs aux taux de réponse observés lors de l’injection de lymphocytes T non modifiés (25, 26). Les nouvelles pistes de recherche s’orientent donc vers l’optimisation des méthodes d’expansion des TIL, ou les combinaisons avec antiCTLA-4 (anti-Cytotoxic T-Lymphocyte Antigen 4), inhibiteur de BRAF ou d’autres thérapies. Par injection de clones lymphocytaires T Dans le mélanome malin, de nombreux antigènes tumoraux sont désormais connus et peuvent être utilisés comme cibles pour l’immunothérapie. L’antigène Melan-A, qui appartient à la famille des antigènes de différenciation mélanocytaire, constitue une cible antigénique idéale, en raison de sa forte Biopsie tumorale pour contrôler l’expression de l’antigène Melan-A Injection Lymphocytes T Prélèvement sanguin Expansion des clones lymphocytaires T réactifs Clonage des lymphocytes T spécifiques de l’antigène Cellule tumorale + peptide Stimulation des lymphocytes spécifiques Figure 2. Processus de production des clones T à usage thérapeutique. 578 | La Lettre du Cancérologue ̐ Vol. XX - n° 9 - novembre 2011 immunogénicité et de son haut niveau d’expression par de nombreuses tumeurs (7). Plusieurs études ont montré l’intérêt du transfert adoptif de lymphocytes spécifiques du mélanome (figure 2) : au cours d’un essai de phase II, sur 14 patients au stade métastatique ayant reçu des clones T autologues spécifiques de Melan-A, notre groupe a observé 6 réponses cliniques objectives, dont 2 rémissions complètes de longue durée (5 ans et 28 mois), toutes les réponses cliniques étant associées à une expansion in vivo du répertoire T spécifique de Melan-A (27). Le groupe de N.N. Hunder a également utilisé cette approche pour traiter un patient qui a reçu des injections de clones T autologues CD4+ spécifiques de NY-ESO-1, et a rapporté une rémission clinique durable associée à la présence d’une réponse endogène dirigée contre d’autres antigènes de mélanome que NY-ESO-1 (28). Vaccination Cellules tumorales et lysats tumoraux La vaccinothérapie cellulaire est une forme d’immunothérapie cellulaire qui bénéficie d’acquis scientifiques récents. À l’origine, ce traitement était fondé sur l’utilisation de cellules tumorales autologues ou allogéniques inactivées par irradiation. Cependant, les essais réalisés sur un nombre limité de patients ont démontré un taux de réponse clinique faible (29). Peptides Depuis le clonage de MAGE-1 (Melanoma-Associated Antigen-1) en 1991 – premier antigène de tumeur identifié comme pouvant être reconnu par les lymphocytes T –, de nombreux autres antigènes ont été caractérisés. Des peptides provenant de ces antigènes peuvent être présentés par les molécules du CMH et induire une réponse immunitaire. Les peptides utilisés actuellement proviennent essentiellement de protéines mutées ou surexprimées ou de protéines de différenciation et se lient essentiellement à la molécule HLA-A*0201, présente chez 50 % des patients caucasiens. Depuis l’un des premiers essais conduits en 1998 par le groupe de S. Rosenberg, rapportant un taux de réponse objective de 42 % chez les patients vaccinés par peptides dérivés de l’antigène gp100 en combinaison avec des injections d’IL-2 (30), les essais cliniques utilisant des peptides seuls ou en association avec DOSSIER THÉMATIQUE des cytokines ou des adjuvants pour augmenter leur immunogénicité ont permis d’observer des réponses chez certains patients. Les inconvénients de la vaccination peptidique reposent en effet sur l’instabilité des peptides, la nécessité de réaliser le typage HLA du patient et celle de connaître le profil antigénique de la tumeur. Dans un essai récent “multi-épitope” (Melan-A, gp100 et tyrosinase), les peptides utilisés en association avec GM-CSF et/ou IFNα-2b ont permis d’observer une survie médiane prolongée chez les patients présentant une réponse immune dirigée contre au moins 1 des antigènes par rapport aux patients ne présentant pas de réponse immune (21,3 versus 13,4 mois ; p = 0,046). Aucune différence n’était observée entre les patients ayant reçu le vaccin seul et ceux ayant reçu le vaccin en combinaison avec les cytokines (31). À ce jour, aucune étude clinique randomisée n’a démontré l’efficacité d’un vaccin par peptide, ganglioside ou lysat tumoral. Cellules dendritiques De nouveaux outils ont permis l’élaboration de stratégies plus complexes, telles que la vaccination par cellules dendritiques (DC) autologues chargées d’antigène tumoral sous la forme de peptides ou de préparations cellulaires globales (lysats tumoraux ou corps apoptotiques). Les DC appartiennent à la famille des cellules présentatrices d’antigène (CPA). De nombreux essais thérapeutiques de phases I et II ainsi qu’un essai de phase III ont utilisé la vaccination par DC dans le mélanome (32, 33). Toutes ces études ont permis de montrer que la vaccination par DC était non toxique à court et moyen terme et qu’elle permettait d’induire une réponse immunologique, mais seulement parfois une réponse clinique, le plus souvent sous la forme d’une stabilisation de la masse tumorale. Dendritomes Une autre approche est représentée par les cellules hybrides, fusion d’une cellule tumorale et d’une cellule présentatrice d’antigènes. À ce jour, les essais cliniques utilisant la vaccination par dendritomes dans le mélanome sont peu nombreux (34-36) et rapportent qu’ils peuvent être administrés aux patients atteints de mélanome métastatique en toute sécurité tout en semblant induire une réponse immunologique et une réponse clinique. Utilisation d’anticorps monoclonaux Anti-CTLA-4 Le CTLA-4 joue un rôle important dans la régulation du système immunitaire comme régulateur négatif de l’activation des cellules T. La molécule de costimulation CTLA-4, exprimée à la surface des cellules T, entre en compétition avec la molécule CD28 pour la liaison à la molécule B7 exprimée à la surface des cellules présentatrices d’antigène, constituant un signal inhibiteur. Plusieurs études ont démontré que des anticorps anti-CTLA-4 induisaient une régression des tumeurs dans divers modèles murins. L’utilisation d’anticorps humanisés antagonistes de CTLA-4 a été étudiée de manière plus approfondie chez des patients atteints de mélanome métastatique. Une étude récente comparant l’anti-CTLA-4 avec le vaccin gp100 et l’association des 2 démontre un gain sur la SG de 3,6 mois chez les patients traités par anti-CTLA-4 seul (37). Une deuxième étude récente comparant l’anti-CTLA-4 associé au DTIC (dacarbazine) avec le DTIC seul rapporte une augmentation de 2,1 mois de la SG (38). Sur la base de ces observations, l’ipilimumab (anti-CTLA-4) vient d’obtenir une AMM aux États-Unis dans le mélanome à un stade avancé et en deuxième ligne de traitement. Anti-PD-1 PD-1 (Programmed-Death 1) est une autre molécule inhibitrice exprimée à la surface des cellules T et qui a pour ligands PD-L1 et PD-L2. Des études précliniques ont montré que l’utilisation d’anticorps dirigés contre PD-1 augmentait les fonctions immunitaires des cellules T spécifiques de la tumeur en induisant la production de cytokines et la cytolyse de la tumeur (39). Des essais cliniques de phase I sont actuellement en cours. Des études combinant antiCTLA-4 et anti-PD-1 sont également programmées, sur la base d’expériences menées chez la souris (40). Anticorps monoclonal agoniste de CD40 La molécule CD40 est un membre de la superfamille des récepteurs au TNF exprimé par les DC, les lymphocytes B, les monocytes et de nombreuses cellules tumorales. La liaison de CD40 à son ligand naturel, CD40-L exprimé à la surface des lympho- Annoncez vous ! Contactez Valérie Glatin au 01 46 67 62 77 ou faites parvenir votre annonce par mail à [email protected] La Lettre du Cancérologue ̐ Vol. XX - n° 9 - novembre 2011 | 579 DOSSIER THÉMATIQUE Oncodermatologie Mélanome et immunothérapies : des avancées importantes Références bibliographiques (suite de la p. 580) 15. Lawson DH, Lee SJ, Tarhini AA et al. E4697: Phase III cooperative group study of yeast-derived granulocyte macrophage colony-stimulating factor (GM-CSF) versus placebo as adjuvant treatment of patients with completely resected stage III-IV melanoma. ASCO® 2010: abstr. 8504. 16. Tessier MH, Pandolfino MC, Jotereau F, Boudart D, Litoux P, Dréno B. Home therapy with autologous tumourinfiltrating lymphocytes and subcutaneous interleukin-2 in metastatic melanoma. Eur J Cancer 1996;32A(4):735-6. 17. Rosenberg SA, Packard BS, Aebersold PM et al. 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L’utilisation d’anticorps agonistes de CD40 a été rapportée dans des modèles murins, induisant une augmentation de l’activation cellulaire T et de l’immunité antitumorale qui conduit à une régression tumorale. Un essai de phase I a montré que les anticorps anti-CD40 sont bien tolérés et biologiquement actifs, car associés à une activité antitumorale (41). Agonistes des TLR Les TLR (Toll-Like Receptors) sont des molécules qui reconnaissent des motifs moléculaires conservés présents sur des pathogènes et sont capables d’influer sur l’activité des DC et d’induire des réponses cellulaires T. Des ligands capables de stimuler les TLR sont actuellement évalués sur leur capacité à stimuler l’activation des DC et les réponses immunes antitumorales. TLR-9 Le premier essai clinique a combiné un oligonucléotide synthétique activant TLR-9 (PF-3512676 ou CpG 7909) à une vaccination par peptide Melan-A/MART-1, et a rapporté une augmentation des cellules T CD8+ circulantes spécifiques de Melan-A chez les patients traités par agoniste de TLR-9 combiné au peptide Melan-A par rapport aux patients traités avec le peptide seul (45). Au cours d’un essai de phase II, les réponses cliniques observées étaient associées à une stimulation de la cytotoxicité par les cellules NK et à une augmentation de l’activation des DC, induisant la production de cytokines pro-inflammatoires et une augmentation de la présentation antigénique (46). Un essai ayant utilisé l’administration locale de PF-3512676 et incluant 24 patients aux stades I à III a rapporté l’induction d’une réponse de type T CD8+ spécifique d’au moins 1 antigène de mélanome chez 50 % des patients traités, versus 0 % des patients du groupe contrôle (produit salin) [47]. Conclusion, perspectives TLR-7/TLR-8 L’imiquimod, agoniste synthétique de TLR-7 et de TLR-8, combiné à une vaccination par peptides Melan-A, tyrosinase et NY-ESO-1, a induit des réponses T CD8+ chez 5 patients sur les 8 évalués, et une réponse clinique partielle a été observée chez 1 patient sur 12 (42). Plusieurs cas de réponse clinique complète de lésions métastatiques locales ont été rapportés après utilisation topique d’imiquimod 5 %, seul (43) ou en combinaison avec du tazarotène en crème (44). L’immunothérapie représente un réel espoir thérapeutique pour le mélanome, avec l’avantage de combiner à l’heure actuelle plusieurs approches, augmentant ainsi les chances de succès de ce mode de traitement. Une meilleure connaissance des mécanismes d’immunotolérance mis en place par la tumeur ainsi que l’identification de marqueurs de la réponse thérapeutique permettant de sélectionner les patients les plus adaptés à ces approches permettront d’espérer le succès des traitements par immunothérapie dans le mélanome. ■ Références bibliographiques 1. Thompson JF, Scolyer RA, Kefford RF. Cutaneous melanoma. Lancet 2005;365(9460):687-701. 2. Tsao H, Atkins MB, Sober AJ. Management of cutaneous melanoma. N Engl J Med 2004;351(10):998-1012. 3. Belot A, Grosclaude P, Bossard N et al. Cancer incidence and mortality in France over the period 1980-2005. Rev Epidemiol Sante Publique 2008;56(3):159-75. 4. Balch CM, Soong SJ, Atkins MB et al. An evidence-based staging system for cutaneous melanoma. CA Cancer J Clin 2004;54(3):131-49. 5. Parmiani G, Anichini A, Fossati G. 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