MATIèRE ET ARTS DU SPECTACLE

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MATIèRE ET ARTS DU SPECTACLE
Núria Alvarez Coll et Miguel García Carabias
Colectivo Terrón
MATIèRE ET ARTS DU SPECTACLE
Núria Alvarez Coll et Miguel García Carabias
Colectivo Terrón
atelier matières à construire
IV
recherche
SOMMAIRE
Introduction
1. Matière à jouer
le jeu théâtral qui met en évidence les propriétés de la matière
2. Matière à s’inspirer
traduire le comportement de la matière à d’autres disciplines
3. Art et science
quel rapport ?
3. Références
la mise en scène de la matière
Conclusion et perspectives
Bibliographie
V
INTRODUCTION
Dans un monde chargé de technologie, où tous les produits subissent
une longue chaîne de production, l’homme perd de plus en plus la
relation avec la matière première. Comment faire un éloge de la
simplicité ? Comment retrouver cette émotion face à la contemplation
de la matière dans sa forme la plus simple ?
L’objectif de ce travail est de référencer des spectacles qui mettent
en scène la matière. Nous recherchons des artistes qui veulent nous
faire rêver à travers une matière en la transformant, l’imitant, en
jouant avec elle, en exploitant sa sonorité, son goût…
Dans ce document vous trouverez le résultat d’une recherche à l’Institut
International de la Marionnette en mai 2013. On pourrait se poser la
question : pourquoi choisir le contexte de la marionnette ? Dans le
domaine du théâtre de marionnettes l’annulation des lois internes
et externes de la réalité naturelle est possible. Dans ce domaine, le
marionnettiste a le pouvoir de transformer ce qui est inamovible,
inerte, c’est à dire, la marionnette et par extension l’objet et la matière.
VII
1
matière à jouer
le jeu théâtral qui met en évidence les propriétés de la matière
«Le papier est fragile, il se déchire, brûle, se froisse, se jette… La glaise
est lourde, elle colle, croûte, se modèle, suinte d’eau, s’érige, s’étale…
Le latex enrobe, il résiste, se plie, permet la flexion, l’ouverture… La
terre boueuse inspire-t-elle les mêmes fables que les résines de
synthèse, les calebasses, le sable, l’eau ou les éléments végétaux ? Le
carton et le papier journal au service de la fabrication d’un personnage
aboutissent-ils à la même personnification, aux mêmes caractères ?
Parlent-ils de la même façon de l’humain ?
Comment la matière dont est constituée le personnage marionnette
influe-t-elle sur l’interprétation ? Comment interfère-t-elle avec
l’écriture, voire la transforme-t-elle ? Jouer, re-jouer le monde… la
matière inspire toute une geste de l’humain, dans le corps à corps
qu’elle impose. Jusqu’où peut-elle devenir la matière même de la
représentation ?» 1
IX
À gauche : l’ombre de l’eau. Image du spectacle
“le roi des sables” du Colectivo Terrón.
Sur ces lignes, “Tragédie de papier”. © Yves Joly
1 Texte de présentation de la 3ème scène des chercheurs « Matières à jouer, matières à penser »
dans la revue MANIP.
atelier matières à construire
X
recherche
Yves Joly : l’effet d’opalisation
En France, Yves Joly est celui qui transgresse le plus la poétique du
théâtre de marionnettes classique. Face au public, il crée sur scène
des personnages, des êtres artificiels qu’il dote de traits humains, les
entraîne dans l’action pour finir par les détruire et leur rendre leur
statut initial, celui de la matière. Ce jeu avec des matériaux fut sa
première et nouvelle préoccupation.
En 1957, il inventait avec « Tragédie de papier » un nouvel avenir
à l’écriture dramatique. Dans cette création, des figures plates
étaient découpées dans du papier bristol. On retrouvait des histoires
classiques du cabaret mais traduites par une matière. Au moment le
plus dramatique, un personnage de papier était coupé en morceaux
par des vrais ciseaux et un autre était brûlé, entièrement : non
son costume mais son corps, son être, son existence même. La
comparaison du destin du carton avec celui de l’homme fait naître
un frisson tragique. Ainsi le destin du matériau devenait-il à lui seul
source d’émotion théâtrale.
Il s’agit d’une métaphore, d’un oxymoron, d’un effet d’opalisation
dû à la présence alternative d’un personnage fictif sur deux plans
existentiels (l’univers de l’homme, l’anecdote, et l’univers de la
matière, les opérations sur le carton). L’artiste rejette la mimésis
et introduit son univers (les figures de papier confrontées aux vrais
Tragédie de papier. © Yves Joly
outils destructeurs) mais aussi sa poétique avec un effet d’opalisation
(alternance entre le caractère et la matérialité de la figure).
Cette étude du langage dramatique caractérisant l’art poétique de Joly,
l’étonnerait beaucoup lui même. La création a souvent un caractère
spontané et l’artiste n’est pas toujours conscient de la signification de
ses nouvelles inspirations. Lorsqu’on l’interroge sur son expérience,
dans les années 60, il se dérobe en avouant sa spontanéité :
« Je dois m’incliner devant des faits évidents : je n’ai rien à dire, je n’ai
aucune opinion et, dans mon expérience il n’y a rien eu de laborieux…
Si mes mains réussissent quelque chose, ce n’est pas parce que j’ai
décidé de faire telle ou telle chose, en suivant tel ou tel principe, ou tel
ou tel savoir, pour parvenir à tel ou tel résultat, je fais ce qui me procure
directement du plaisir, parce qu’une force en moi me pousse à tel geste
ou à telle découverte, comme peut être la force du printemps contraint
les plantes à sortir de terre vers la lumière, vers la joie d’exister. (…) »
Cette vision de l’artiste emporté par l’inspiration et concrétisant son
bonheur sans se donner aucun mal est très plaisante. Mais d’un autre
côté, elle reflète l’immense rôle du hasard dans le développement de
l’art et peut être –chose surprenante- de la métamorphose du théâtre
de marionnettes d’après guerre.
XI
atelier matières à construire
recherche
Philippe Genty
XII
Après son succès avec des marionnettes classiques, Genty se lance
dans des expériences qui le poussent vers le théâtre de la matière.
Dans « Rond comme un cube », il utilise du tissu, que des comédiens
dissimulés derrière ou dedans composent à leur gré. Ce tissu se
métamorphose en personnage à une ou deux têtes, prenant des
dimensions et des formes les plus variées, occupant même parfois
toute la scène. L’éclairage du tissu offre des ressources nouvelles ; il
représente un étang où s’ébattent flore et faune, dans ou hors de l’eau.
La vie de la matière devient alors le thème des spectacles de Genty.
Son théâtre prend ainsi une nouvelle orientation artistique qui excelle
dans l’utilisation de matières, de comédiens et de danseurs au service
d’un message visuel cohérent. Il est convaincu que le monde matériel
est pour l’artiste une source d’inspiration aussi riche que la nature :
sa rencontre avec l’océan et le choc provoqué par sa découverte du
désert ont façonné son imagination et lui soufflèrent qu’un objet, un
matériau, un tissu, bien utilisés, pouvaient également devenir une
source de fascination et guider ses recherches artistiques :
« Notre travail à partir du matériau (le terme matériau étant à prendre
dans son sens large : formes réalistes, abstraites ou matières brutes) est
une source constante de découvertes et de renouvellement, mais aussi
de frustrations car la matière a son mot à dire, parfois en contradiction
avec la progression du scénario. Tout volume porte en soi une dynamique
qui lui est propre et qui diffère selon la nature du matériau. Il faut alors
être totalement disponible à son écoute, mais quelle frustration pour
l’auteur. Pourtant, sachant cela, à chaque création je me fais piéger, je
me retrouve fasciné par la forme qui se dégage de la matière, impose
son caractère, se développe, s’épanouit, évolue, puis s’essouffle, s’épuise
pour atteindre son déclin. Entre temps elle a produit d’autres formes qui,
à leur tour, proposent d’autres directions de recherche ».
La matière est donc un « texte du possible et de la limite », qui recèle
de nouvelles possibilités. Certains artistes paraissent prêts à se rendre
esclaves de l’objet pour éviter de l’être du mot. Ils en sont d’ailleurs
conscients. Genty pense à gagner ainsi sa liberté puisque l’objet et
la matière sont plus aptes que le mot à transmettre des symboles
susceptibles de toutes les interprétations possibles.
1. Boliloc. ©Pascal François
2. La fin des terres, de la Cie. Philippe Genty. ©Pascal François
3. Dérives, de la Cie. Philippe Genty. ©Philippe Genty
XIII
atelier matières à construire
recherche
Jan Svankmajer : le tactivisme
Cinéaste tchèque mais d’abord artiste surréaliste, Jan Svankmajer a
beaucoup travaillé sur ce qu’il appelle le tactivisme, l’art du toucher.
Dans un livre sur son travail paru aux éditions L’œil il parle à propos
de l’objet et sa transformation :
XIV
« Un objet est a la fois lui même et aussi toutes les possibilités qu’il
est capable de faire naître dans l’esprit de celui qui l’appréhende. Sa
mutation n’a pas de forme déterminée, il peut devenir ceci ou cela au
gré des associations, des analogies qui l’engendrent et qui le façonnent
tout aussi bien. Le rôle du poète est d’être l’élément catalyseur de cette
transformation en donnant à voir, en révélant par la mise en présence
d’éléments distants mais intimement liés, de nouveaux domaines à
parcourir. L’enjeu est de fixer dans l’image poétique, ne fut-ce que pour
un instant, un nouvel état issu du croisement de différentes réalités,
d’extraire à la quintessence le surplus de réalité qui déborde chacun des
objets que nous percevons et de les faire dialoguer dans un mouvement
continu. Pour moi, dans la matière, on est plus dans ce que l’on pourrait
parler de la matière, les objets et les choses inhumaines et inanimées. »
Dimensions of dialogue, court métrage d’animation tchécoslovaque
réalisé par Jan Švankmajer et sorti en 1982. ©Jan Svankmajer
XV
2
matière à s’inspirer
traduire le comportement de la matière à d’autres disciplines
Dans ce chapitre, la matière n’est pas présente sur le plateau. Elle
joue un rôle très important : inspirer la création.
Les artistes nous parlent de la matière d’une façon indirecte. Ils
l’observent et font une analyse de son comportement. Les uns la
traduisent au travers du corps, d’autres décrivent sa poésie intrinsèque
et les autres tissent des liens entre la matière et la création artistique.
XVII
Au Festival Décadrage, Odile Duboc invitait en mai 2004 le public à tenter l’expérience : prendre place sur un coussin
d’air géant pour pénétrer de plain pied
dans le travail de création du spectacle
“Projet de la matière”. ©Alain Julien
atelier matières à construire
recherche
Jacques Lecocq : analyser les dynamiques de la nature
Un des piliers de la pédagogie de Jacques Lecoq est son analyse du
mouvement, du corps humain et de la nature. Cette analyse est la
base du travail corporel de sa méthode.
XVIII
L’analyse des mouvements de la nature contient les éléments, les
matières et les animaux. Les matières ont comme caractéristique
principale d’être passives et de se manifester seulement à travers
leurs réactions. Ces mouvements sont analysés quand elles sont
manipulées, agressées. Il faut lancer, presser, déchirer, casser une
matière pour pouvoir observer sa réaction.
Afin d’analyser les matières d’une façon technique, Jacques Lecoq les
catalogue selon différents types :
1.- Les matières déformables, d’une fois pour toujours : l’argile pressé,
un fil de fer qui se plie. Une fois qu’elles sont agressées, ces matières
ne se modifient pas.
2.- Dans l’opposé il y a les matières élastiques. Quand elles sont
modifiées, étirées, elles retournent avec nostalgie à leur état initial,
sans arriver à récupérer leur forme originale totalement. Il s’agit de
gommes, du caoutchouc et de quelques types de fibres.
3.- Les traces, les blessures, les rides, les plis que nous pouvons
observer dans les papiers pressés froissés, qui essayent aussi de
revenir à leur état antérieur, mais avec beaucoup plus de difficulté. Il y
a dans leur dynamique une dimension très tragique.
4.- Les ruptures, les lambeaux, les vitres fêlées, les explosions.
Les matières ont la capacité d’être modifiées par le froid et la chaleur.
La fonte, la vaporisation, la solidification, sont très riches en analogies
dramatiques qu’on peut trouver dans le langage quotidien.
L’analyse du comportement (de la dynamique) de la matière va de
l’observation et de la manipulation de la matière à la représentation
de la matière même. Tout est question de rythme et de fluidité.
Le corps de l’autre peut être également utilisé comme si c’était une
matière : le froisser comment si c’était un papier, par exemple.
La dynamique de la matière devient un langage qui va être utilisé
pendant tout le travail artistique des élèves de Jacques Lecoq.
La tragédie de la matière provient de son caractère passif. ¡La matière
souffre!
“Catherine et l’armoire”, spectacle adapté pour le jeune public de la
pièce “Tant que la tête est sur le cou” (1978) ©Théâtre du mouvement
“Les vertus de la marionnette idéale”, conférence - démonstration
autour de la marionnette par Claire Heggen. ©David Schaffer
Théâtre du mouvement : le corps comme matière / la matière corporelle
La recherche du Théâtre du mouvement se situe dans la rencontre
du corps et de la matière.
Cette pédagogie aborde le corps à travers
l’exercice de la matière, la qualité du toucher et les différents rapports
de manipulation.
Ils mettent l’accent sur l’observation de l’incidence
du geste sur l’objet/matériau et inversement, comment la structure de
la matière peut orienter nos mouvements. Papier, cartons, plastiques,
tissus, marionnettes… ces autres corps sont l’objet central de ses
explorations. Ils cherchent ainsi à métamorphoser l’image du corps et
créer d’autres êtres plus hybrides.
XIX
atelier matières à construire
recherche
Odile Duboc : projet de la matière
XX
Créé en 1993, « Projet de la matière » d’Odile Duboc tient une place
spécifique et remarquée dans l’histoire de la danse française.
S’inspirant de la méthode de Jacques Lecoq, la danse d’Odile Duboc se
nourrit de l’imaginaire des quatre éléments : l’eau, l’air, le feu et la terre,
que l’Antiquité considérait comme les constituants fondamentaux de
l’univers. Ces éléments ont avant tout, chez Odile Duboc, une réalité
sensible. Ils renvoient à un imaginaire qui convoque des sensations
conduisant à l’invention du mouvement et d’un état corporel.
Odile Duboc use d‘images, de métaphores. Des lectures viennent
alimenter son imaginaire comme sa pédagogie. Gaston Bachelard,
devient une référence nécessaire : le philosophe de l’imagination et
du rêve trace une poétique des quatre éléments.
« (...) nous avons étudié, sous le nom d’imagination matérielle, cet étonnant
besoin de « pénétration » qui, par delà les séductions de l’imagination
des formes, va penser la matière, rêver la matière, vivre dans la matière
ou bien –ce qui revient au même – matérialiser l’imaginaire. Nous nous
sommes cru fondés à parler d’une loi des quatre imaginations matérielles,
loi qui attribue nécessairement à une imagination créatrice un des quatre
éléments : feu, terre, air et eau. » 1
« D’une substance, l’imagination en fait immédiatement une valeur. Les
images matérielles transcendent donc tout de suite les sensations. Les
images de la forme et de la couleur peuvent bien être des sensations
1 Gaston Bachelard. L’air et les songes. Essai sur l’imagination du mouvement.
transformées. Les images matérielles nous engagent dans une affectivité
plus profonde, c’est pourquoi elles s’enracinent dans les couches les plus
profondes de l’inconscient. Les images matérielles substantialisent un
intérêt. » 2
« Dans la pâte, l’action de l’eau est évidente. Quand le pétrissage continuera,
l’ouvrier pourra passer à la nature spéciale de la terre, de la farine, du
plâtre, mais, au début de son travail, sa première pensée est pour l’eau.
C’est l’eau qui est sa première auxiliaire. C’est par l’activité de l’eau que
commence la première rêverie de l’ouvrier qui pétrit. Aussi ne faut-il pas
s’étonner que l’eau soit alors rêvée dans une ambivalence active. (…) tour
à tour dans son rôle émollient et dans son rôle agglomérant. Elle délie et
elle lie. » 3
Les livres du philosophe ont passé la porte du studio de danse. Odile
Duboc en lit des extraits à voix haute, lors d’improvisations ou pendant
que les danseurs, simplement étendus là, éprouvent le relâchement
profond du corps qui se dépose et laissent résonner en eux les mots.
Pendant plusieurs mois, les danseurs éprouvent la matière de
différents objets créés par la plasticienne Marie-José Pillet : un
matelas d’eau, un coussin d’air, des surfaces élastiques, des volumes
mous, des petits volumes à manipuler, des plaques de tôle ondulé
sur ressorts, des objets sur lesquels tenir en équilibre ou rebondir…
L’exploration se fait les yeux fermés. L’interprète tâtonne, expérimente.
2 Gaston Bachelard, La terre et les rêveries du repos,
3 Gaston Bachelard, l’Eau et les Rêves.
Ces créations tactiles, sont avant tout des matières très concrètes :
souples, dures, élastiques, rebondissantes, coupantes, rêches, molles,
planes,.. Elles provoquent les corps qui s’y posent, les déstabilisent.
Elles modifient leur environnement, leur rapport à la gravité et à la
verticalité.
« Projet de la matière a permis de trouver cette relation à une mémoire
dynamique qui a pu renvoyer les danseurs aux éléments : c’est le travail
sur le coussin d’air qui a permis de comprendre l’air et l’eau, c’est le
travail sur les plaques de tôle qui a permis de comprendre l’élément feu
», explique la chorégraphe.
En proposant ces supports insolites, cette pédagogie exige de revisiter
les habitudes, de réinventer et redécouvrir le rapport du danseur à la
gravité, aux appuis et à la résistance du support.
Après la rencontre des danseurs avec les créations tactiles de MarieJosé Pillet, les danseurs ont développé un langage commun qui les
aidera à apporter une intention à leurs mouvements dans l’espace
scénique. La deuxième phase est donc l’exploration de la mémoire
sensorielle de cette expérience.
“Projet de la matière” d’ Odile Duboc. La chorégraphe a développé
un processus de création original qui laisse une large place à l’expérimentation des interprètes. Images de la reprise de cette pièce en 2003
(conçue en 1993). ©Laszlo Horvath
XXI
Affiche diffusé lors de la participation du Colectivo Terron et amàco au Salon EXPERIMENTA Arts
- Sciences - Technologie 2014 avec le projet “Le
cycle des grains”.
3
ART ET SCIENCE
quel rapport ?
Dans ce chapitre nous proposons quelques pistes, en forme de
citations, sur le rapport entre art et science. C’est un thème que nous
creusons avec le projet amàco1 depuis 2012 et que nous cherchons à
approfondir.
«Cet émerveillement, cette émotion face à la contemplation de la
matière dans sa forme la plus simple, constitue, je pense, l’origine
du savoir scientifique (la suite de la démarche scientifique est de
s’interroger et d’essayer de comprendre pourquoi) ». 2
« L’art illustre fidèlement des théories scientifiques, ou qu’il contribue
à l’avancée des connaissances scientifiques, et où l’artiste est engagé,
parfois malgré lui et sans qu’il en ait conscience, dans un processus de
recherche, auquel il donne une dynamique nouvelle.
Enfin, l’art constitue parfois un moyen de faire l’éloge de la science ou
de scientifiques : l’artiste rend alors délibérément un hommage. » 3
1 « L’atelier matières à construire (amàco) est un centre de ressources pédagogiques qui vise
à rendre visible, de manière sensible et poétique, les comportements physico-chimiques des
matières naturelles les plus communes, telles que le sable, l’eau, la terre, le bois, la paille, etc.
Le projet a comme objectif de faire connaître leurs applications dans la construction afin de
favoriser l’émergence de pratiques éco-responsables. amàco rassemble dans un même lieu
des physiciens, des ingénieurs et des architectes. Magie, émotion et créativité sont les maîtres
mots du projet.
Les interrelations entre Théâtre et Science sont nombreuses.
D’abord, les deux disciplines parlent du Réel, ses points de départ sont
l’observation de la Réalité. La ré élaboration que fait le Théâtre de la
Réalité a beaucoup à voir avec l’image que renvoie la Science d’elle à
chaque moment historique. » 4
«
« L’artiste s’occuperait-il alors de microscopie, d’histoire naturelle, de
paléontologie ? Seulement pour comparer, seulement au sens de la
mobilité. Et non pour contrôler scientifiquement une conformité à la
nature. Seulement au sens de la liberté. Au sens non pas de cette liberté qui mène à des étapes données de l’évolution, telles qu’elles furent
ou seront sur terre, ou qu’elles pourraient (on le vérifiera peut être un
jour) être sur d’autres planètes. Mais au sens d’une liberté qui réclame
uniquement le droit d’être mobile, mobile comme l’est la Grande Nature
elle-même. Remonter du Modèle à la Matrice ! » 5
2 Romain Anger, responsable pédagogique du projet amàco.
3 La science en culture : le détour par l’art. Pratiques de médiation scientifique. Groupe Traces,
Atomes Crochus, 2011.
4 CONTRERAS ELVIRA, Ana: “Ciencia y magia en el teatro español del Siglo XVIII”. ADE Teatro
nº132, Septiembre-Octubre 201, pp. 145-155.
5 Paul Klee, Théorie de l’art moderne, conférence de 1924.
XXIII
4
références
arts du spectacle autour de la matière
Dans les pages suivantes nous présentons un état de l’art de spectacles
Matière en fibres
qui jouent avec la matière d’une façon où d’une autre. Que ce soit la
matière animée, imitée ou bien support d’autres expressions, ils ont été
choisis pour ce rapport avec la matière, même si parfois il s’agit seule-
Matière en grains
ment d’un passage du spectacle.
Les spectacles ont été groupés par thèmes, selon le type de matièremise
en scène ou bien l’utilisation de matériaux comme élément de construc-
Matière eau
tion (voir classification à gauche).
Ce document contient des images qui appartiennent aux artistes référencés dans le document. Par respect pour ceux-ci, il n’a donc pas vocation
Matériaux
à être diffusé.
XXV
atelier matières à construire
recherche
Bolduc
Barbara Melois
www.barbara-melois.fr
XXVI
Ancienne élève de l’Ecole nationale supérieure des arts de la
marionnette (E.S.N.A.M., 1re promotion, 1987-1990), Barbara Mélois
est une exploratrice de la matière. Elle expérimente des matériaux
fragiles issus de la vie quotidienne (papier cellophane, papier
aluminium, papier toilette, ruban adhésif…) à partir desquels elle
crée sous les yeux des spectateurs des univers de contes de fées
en perpétuelle métamorphose. Ses spectacles (Diaphanie ou les
mémoires d’une fée, Petite histoire à l’eau de rose…) sont joués dans
le monde entier.
Sa nouvelle création s’oriente vers la couleur avec le papier cadeau.
Bolduc nous entraîne, au gré des fêtes et des saisons, dans un univers
chamarré où les paquets cadeaux ponctuent les événements comme
autant de chapitres de la vie. On souffle les bougies, on déballe, on
découpe, on plie, on arrache, on froisse, on chiffonne, dans une ronde
frénétique, on rit, on pleure… bref, on vit. Ce spectacle a été créé durant
le Festival mondial des théâtres de marionnettes en septembre 2011.
«J’ai choisi de m’exprimer sans mobilisation de grands moyens, dire
avec rien, jouer du hasard, exploiter la spécificité d’un matériau dont la
destination première est ailleurs, utiliser sa musique, sa forme, le faire
sien jusqu’à persuader qu’il n’était fait que pour ça, suivre ses lois en
donnant l’impression que le matériau se plie aux vôtres.»
©Patrick Argirakis
Krafff
création 2007- recréation 2011
Compagnie Contrepoint
http://www.compagniecontrepoint.fr
XXVII
D’un côté le corps du danseur. De l’autre, un grand corps de papier
froissé, chiffonné, torsadé ou noué, taille humaine, souple sur
ses jambes, curieux comme un humain, expressif comme une
marionnette. Il est manipulé à vue par quatre comédiens, quatre corps
qui dessinent autour de lui des ombres. Face-à-face sur un plateau :
danseur et marionnette se regardent, s’observent, s’approchent. Dès
lors ils deviennent deux danseurs, deux corps qui vont dialoguer par
le mouvement. Commence alors un pas de deux ludique où les deux
personnages se rencontrent et se cherchent des plis : l’apesanteur, le
poids, les possibilités physiques, le mouvement dans l’espace...
©Compagnie Contrepoint
atelier matières à construire
recherche
La timidezza delle ossa
Pathosformel
www.pathosformel.org
Un théâtre qui a exilé le corps de l’acteur. Un corps qu’il faut voiler,
nous disent-ils, dont la présence est donc rendue non immédiatement
visible, mais plutôt médiatisée par quelque chose qui vient s’interposer
dans le regard.
XXVIII
La Timidezza delle ossa (la timidité des os), qui, par son titre déjà,
évoque un écart entre la matière corporelle et la matière dont elle se
révèle. Une constellation mobile de traces qui se rejoignent et glissent
sur la surface d’un écran d’une blancheur laiteuse, petits os humains
en quête d’une reconnaissance provisoire.
Images de “La timidezza delle ossa”.
©Pathosformel
L’enfer
Collectif Label Brut
Dans L’enfer de Marion Aubert, très librement adapté de Dr.Jekyll &
Mr.Hyde, une femme tente de se débarrasser de son double comme
s’il lui était possible de nier la présence de tentations inavouables,
de rendre étrangères ses pulsions, une femme fragilisée qui croit
trouver une solution dans l’illusoire anéantissement de son Autre tout
en souffrant du risque et du danger de sa disparition…
À la frontière entre ces deux matières, le mot et la pâte, la comédienne
fait exister cette femme coincée dans ce drôle de jeu entre le désir de
pouvoir et la perte de contrôle, la combativité et l’abandon, l’admis et
l’interdit, le dérisoire et le pathétique.
Entre trop plein de silences, flux de paroles, et face à face avec la
matière, se joue un étrange combat entre conscience et inconscient.
©Label Brut
XXIX
Sogni di Toro
Solo d’Irene Lentini à l’ESNAM
Sous la neige qui tombe
Solo de Simon Moers à l’ESNAM
www.halle-verriere.fr
Ces deux solo sont le résultat de l’atelier dirigé par François Lazaro
et Philippe Rodriguez-Jorda avec les étudiants de la 5° promotion de
l’ESNAM (Ecole Nationale Supérieure des Arts de la Marionnette).
« Ils ont choisi leurs textes, les ont écrits avec leurs propres mots,
ont joué le jeu du conteur qui s’adresse directement à son auditoire
pour dérouler un récit. Et puis sans renier leurs univers plastiques
personnels, ils se sont lancés dans la composition d’une partition où
manipulation et narration se tissent et racontent ensemble un univers
singulier et sensible. Quinze solos de dix minutes. Cent cinquante
minutes, sur le bout des doigts, sur le bout de la langue. De petites
fenêtres qui s’ouvrent sur des mondes intérieurs foisonnants d’images,
si universels et si particuliers. »
Il s’agit de deux solo «conte-marionnette» inspiré de contes
traditionnels, de mythologies anciennes, contemporaines ou
personnelles.
©Institut International de la Marionnette
Sogni di toro
D’après Le Minotaure d’Ovide entre autres. Un monstre, qu’est-ce que
c’est ? Il est né comment ? L’enfermer, pourquoi? Il a quelle tête ? Tête
de taureau...
Sous la neige qui tombe
D’après le conte traditionnel chinois «La Grande Muraille». Un conte
chinois comme un cirque de puce, pour faire croire au spectateur que
le petit grain qu’il voit est un personnage de l’histoire.
« Sous la neige qui tombe se construit la grande muraille de Chine,
pour le bon plaisir de l’Empereur. Cet homme qui n’est qu’un petit
grain sur terre... Qui n’est elle-même qu’une petite graine par rapport
au soleil, lui-même petit grain dans la galaxie, celle-ci petite graine
perdue dans l’univers. »
©Institut International de la Marionnette
atelier matières à construire
recherche
Le tas
Pierre Meunier
www.labellemeuniere.fr
Depuis 1996, Pierre Meunier construit ses propres spectacles,
inventant une écriture scénique qui met en scène la physique concrète
avec des mécanismes ou de la matière, véritables partenaires des
acteurs en scène.
Il s’agit toujours de susciter chez le spectateur adulte ou enfant, une
rêverie intime active, à même de relier les dimensions oniriques,
sociales, poétiques, métaphysiques de la personne.
XXXII
«Le tas» - création en 2002
Un homme s’acharne à coups de masse sur une pierre qu’il parvient
à peine à entamer. Car il s’agit ici de sonder cette chose à priori si
banale : le tas, d’en pénétrer l’opaque résistance.
Pierre Meunier et Jean-Louis Coulloc’h s’attellent à cette exploration
de la matière, installant progressivement un univers surprenant,
soumis aux lois de la pesanteur mais jamais pesant.
Comme la pierre, le tas résiste. Ce qui ne l’empêche pas également
de tomber quand la membrane transparente où s’amoncellent des
caillasses au dessus des comédiens finit par accoucher de son lot de
pierres.
Ce voyage nous emmène progressivement loin du plateau de théâtre,
en pleine cosmogonie. Assiste-t-on à la naissance ou à la fin d’un
monde ? L’énigme reste entière. Imperceptiblement, un vent de sable
recouvre tout …
Spectcle “Le tas”. © LaBelleMeunière
Violin phase
Création en 2002
Anne Teresa De Keersmaeker / Thierry De Mey
XXXIII
«Violin Phase» Spectacle créé en 2002
Le solo d’Anne Teresa De Keersmaeker sur la musique de Steve Reich
(Violin Phase) est l’une des premières pièces de la chorégraphe. Cette
danse hallucinée épouse les volutes et les processus de décalages
infinitésimaux de la musique. Le trajet de la danse, filmé en plongée,
s’inscrit dans du sable blanc sur sol noir : son trajet rendu visible,
dessine comme un mandala en forme de rosace. Pour l’installation
“Top Shot” ces images sont projetées sur le sol de la salle d’exposition
recouvert de sable blanc.
1,2,3,4. Images de “Top Shot”. ©Thierry De Mey
5. Images du spectacle Violin Phase. ©Todd Heislers
atelier matières à construire
recherche
To fall is to understand the universe
Association A.R.N / Mazette !
www.a-r-n.org
XXXIV
Autour d’une substance sans poids et sans forme, «To fall is to
understand the universe» imagine le dialogue entre deux corps et
un amas aux contours indéfinis, une entité constituée d’air comme
l’espace qui la relie ou la sépare des corps. Manipulant les fluides
et apprivoisant la matière suspendue, ils accompagnent la vie qui la
traverse.
Laurent Chanel expose les corps-gravitaires au travers de leurs
propriétés physiques et par le biais de fictions non narratives,
dispositifs cinétiques ou chorégraphiques. Arnaud Louski-Pane,
sculpteur, scénographe et comédien, explore les relations entre les
corps ainsi que leurs propriétés mouvantes. La collaboration sur To
fall is to understand the universe est au point de contact de leurs
recherches respectives.
©Laurent Chanel
Clinc
Pep Bou
www.pepbou.com
XXXV
C’est au milieu des années 1970, parmi les nombreux mimes qui se
lançaient alors sur les planches, que Pep Bou est monté sur scène en
tant que professionnel. Ses études de maîtrise d’œuvre et sa passion
pour les arts plastiques et visuels ont renforcé sa forte sensibilité
pour les espaces éphémères et la ductilité des formes. Au cours de sa
carrière théâtrale, il a participé à la fondation de plusieurs compagnies
(Pa de Ral, La Viu Viu Teatre) avant de se lancer, en 1982, dans son
aventure en solitaire avec le théâtre des bulles de savon. Aventure
qui l’a conduit dans les théâtres et festivals du monde entier, où il a
surpris un public de tous âges et cultures et reçu de nombreux prix.
©Compagnie Pep Bou
atelier matières à construire
recherche
Miroir liquide
Cie. Les remouleurs
www.remouleurs.com
XXXVI
Le film de savon est un objet étrange. Il ponctue le spectacle Boucle
d’or, utilisé tantôt comme un miroir dans lequel se reflètent les
comédiens, et tantôt comme un réflecteur pour des projecteurs
dissimulés dans son socle, générant des images tourbillonnantes
et colorées. Imaginez la surface d’une bulle retenue entre deux fils,
manipulée en direct et alimentée en permanence. C’est un objet qui
n’est jamais immobile, puisque le liquide qui le constitue coule à la
vitesse de deux mètres par seconde, que le moindre courant d’air
ou la plus petite action du manipulateur modifie sa forme, et qu’on
y voit apparaître et disparaître sans cesse des tourbillons irisés. Ces
couleurs, semblables à celles d’un film d’huile à la surface d’une
flaque d’eau, résultent d’interférences optiques. La taille du film est
grande (il mesure trois mètres de haut), mais son épaisseur est de
l’ordre de la longueur d’onde de la lumière.
©Les remouleurs
Impermanence
Théâtre de l’entreouvert
www.elisevigneron.com
XXXVII
Tout être, toute chose, toute matière, et phénomène poursuit son
existence dans un mouvement perpétuel entre apparition, disparition
et transformation. Et si nous appréhendions la réalité dans cet
équilibre instable ?
Cette création, à la croisée de la marionnette, du cirque et de la musique
traite de l’impermanence en explorant des états de matière tels que
l’eau, la glace, la vapeur, et des matériaux friables et éphémères.
Des poèmes de l’auteur Norvégien Tarjei Vesaas se joignent aux
images et aux sons, ponctuant comme en filigrane, ce voyage hors du
temps, « au-delà de ce qui se dit ».
Image poétique basée sur l’état de la matière eau. Des pieds en glace qui fondent, se vaporisent tout le long de cette traversée d’une plaque chauffante.
©Eric Bourret
atelier matières à construire
recherche
Guaduas en vivo
Cie. Tête allant vers
www.teteallantvers.com
XXXVII
La Cie Tête allant vers... centre sa recherche sur la mise en scène de
la matière (particulièrement le bambou) pour permettre la rencontre
entre le corps, la trame narrative, la musique et la construction.
Elle met en scène le rapport de l’homme à la matière, son besoin
incontournable de créer, concevoir, mettre en forme ce que donne
la nature pour aller plus loin, pour se construire soi-même et se
construire avec l’autre.
La Cie Tête allant vers… est née d’une envie de mêler le corps,
le récit et de la construction en bambou. En 2009, Christine Pierre
(conteuse) rencontre Anatole ZEMBOK (constructeur). Ensemble, ils
ont le désir de voyager, rêver, construire, raconter, fabriquer, aimer…
Anatole réalise les structures en bambou des spectacles contés de
petite forme pour la petite-enfance de Christine et débute alors leur
collaboration artistique...
Scénographies éphémères en bambou par
la compagnie Tête allant vers.
©Candice Kurtz
Lang Toi - Mon Village
De Nhat Ly Nguyen, Le Tuan Anh
Lan Maurice Nguyen
Avec un spectacle entièrement conçu à partir de troncs de bambou,
les vingt artistes et musiciens du Nouveau Cirque du Viêtnam
transforment la piste du Cirque-Théâtre en village traditionnel.
La belle idée est d’avoir utilisé le tronc de bambou, matériau essentiel
de la culture locale, comme fil rouge du spectacle. Avec quelques
bouts de ficelle ou quelques lanières de pneus de vélo, acrobates et
funambules composent et recomposent à l’infini des architectures
mouvantes et superbes : maisons sur pilotis, nids, cabanes, radeaux
ou ponts suspendus.
La magie du spectacle est là, dans les évolutions de ces constructeurs
de l’éphémère, en perpétuel (dés)équilibre : sur le sol de terre ocre,
la construction de ces fragiles installations s’opère grâce aux corps
souples, aériens et bondissants de ces jeunes circassiens. Elle permet
toutes les figures acrobatiques possibles, et l’invention d’images
fantastiques, comme celles d’une jeune contorsionniste évoluant
de branche en branche, telle une troublante créature mi-femme mi
reptile.
Un fabuleux voyage, sensible et poétique, dans le Viêtnam d’hier et
d’aujourd’hui.
©www.natgeotv.com
XXXIX
atelier matières à construire
recherche
Johann Le Guillerm
« Une matière a des capacités, elle sais faire des choses. J’essaye
de comprendre qu’est ce qu’elle peut faire et si elle fait des choses
intéressantes ou bien qui me surprennent » Johann Le Guillerm
XL
Johann Le Guillerm est un artiste pluridisciplinaire : équilibriste,
manipulateur et faiseur d’objets. Dans ses créations, l’objet ou la
matière utilisés sont la source même du spectacle, ils sont à l’origine
du processus créatif. Comme il dit, il modélise sa pensée à travers de
la matière.
Il est un artiste de processus : il observe pour penser et vérifie quand
les phénomènes arrivent.
“Il m’importe que ressorte l’essence de l’objet, l’essentiel, l’élémentaire
des lignes de force ainsi dégagées.”
Chacune de ses expérimentations se matérialise dans un “chantier”, à
la fois trajet, évolution et concrétisation de ses observations.
Dans la réalisation de ce qui deviendra son partenaire en scène, l’idée
de départ peut s’infléchir, voire être contrariée par la réalité de ce que
l’objet peut faire ou pas. L’objet contraint le numéro et a le pouvoir d’en
changer la nature même.
Ses projets pluridisciplinaires jonglent avec la poésie et la science.
Johann Le Guillerm il interroge le minimal pour mieux appréhender
le plus complexe.
©Johann Le Guillerm
Coperatzia 2010
G. Bistaki
www.bistaki.com
Le G.Bistaki est un collectif de cinq jongleurs et danseurs dont le
travail se caractérise par l’exploitation infinie d’un objet par un corps
dans l’espace. Le G. Bistaki épouse et transforme le paysage qui lui est
offert posant l’empreinte d’un univers chorégraphique contemporain
et rudimentaire. L’environnement, qu’il soit urbain ou rural, à ciel
ouvert ou fermé, est le théâtre de son action.
Pour cette création, le G.Bistaki choisi de travailler avec la tuile
canal et le sac main… De la relation corps/objet/espace, surgissent
des personnages, des situations, des chorégraphies, des vidéos, des
installations plastiques qui sont agencés à l’envie. Un répertoire
malléable est mis en place permettant des représentations à caractère
in situ.
G. Bistaki a utilisé dans ce spectacle la tuile comme fil rouge de sa création. ©G. Bistaki
XLI
CONCLUSION ET PERSPECTIVES
Colectivo Terrón : le langage de la matière
L’émerveillement face à la matière
Porteur d’histoires, colporteur d’avenir, le Colectivo Terrón étire à son
maximum la puissance expressive de la matière : terre, eau, sable...
Par ses créations, il détourne, retourne et transforme le regard sur ces
matériaux pauvres, ordinaires, banals, oubliés ou le plus souvent ignorés.
L’objectif est d’émerveiller le publique avec la matière la plus simple
et la plus pure, c’est à dire, d’essayer de créer aux autres ce que nous
avons ressenti au moment de la création des différents spectacles.
Pour la création de Tierra Efímera, c’est l’architecture en terre qui
nous a inspiré et ouvert les champs du possible avec la matière terre.
C’est en nettoyant des seaux, en mélangeant du sable a une terre
trop argileuse pour réaliser des enduits, en nous promenant pour
chercher des échantillons de couleurs différentes... Le processus de
transformation de la matière terre nous a émerveillé et convaincu
qu’on devait « en faire quelque chose ».
À gauche, images du spectacle Tierra Efímera.
En bas de ces lignes, Le roi des sables, la deuxième creation du Colectivo Terrón.
XLIII
Le besoin de théoriser
«Pourquoi théoriser?
Les productions artistiques demandent explications, éclaircissements.
Le public, le pouvoir, le critique, l’école sont souvent aveugles,
indifférents, réfractaires, moqueurs à ce modes d’appréhension du
monde qui pourtant sont, la plupart du temps, un moteur culturel à
l’éveil de la curiosité et à l’ouverture vers d’autres cultures.»1
La création naît souvent de façon spontanée, sans trop réfléchir
quelle en est la source d’inspiration. Le spectacle Tierra Efímera est
à l’origine de la compagnie et ce n’est qu’après sa création qu’il a été
objet d’une mémoire d’études2.
À gauche : Marques de ruissellement apparues lors du
versement d’un seau avec de l’eau et de la terre dans un
évier.
1 Blue report n°6 : Théâtre d’objet – Corps et objet, Lambert Blum, Claire Heggen, Frits Vogels,
Jacques Templeraud, Philippe Henry, Jean Paul Céalis, Robert Steijn et Martina Leeker. Editions
du Theater Institut Nederland, 1998.
2 Mémoire du Diplôme de Spécialisation et d’Approffondissement - Architecture de Terre presenté par Nuria Alvarez en septembre 2012, intitulé : « Tierra Efímera, sensibilisation au grand
public ». Ces études de spécialisation ont lieu à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de
Grenoble, au laboratoire CRAterre.
Ce premier travail nous a permis de réfléchir autour du processus de
création et a été une prise de conscience de notre travail artistique.
Selon son poids, sa forme en ses différents états, sa couleur, sa
sonorité, etc., la matière s’exprime et nous inspire d’une certaine
façon. C’est en contact avec la matière dans la pratique, le toucher,
le mouvement, que nous créons les images de nos spectacles. Mais
comment font les autres artistes qui jouent avec la matière ?
Cette recherche à l’Institut International de la Marionnette nous a
permis un autre moment de recul et de prise de conscience des autres
possibilités de création avec la matière.
XLV
atelier matières à construire
recherche
bibliographie
XLVI
Revues :
- PUCK n° 5 : Tendencias actuales, Editions Institut International de la
marionnette, 1993.
- PUCK n° 13 : Langages croisés, Editions Institut International de la
marionnette, 2000.
- PUCK n° 2 : Les plasticiens et les marionnettes, Editions Institut
International de la marionnette, 1989.
- Stradda n°26 les brèves, octobre 2012 – janvier 2013
- Manip, le journal de la marionnette n°24, octobre 2010.
- Blue report n°6 : Théâtre d’objet – Corps et objet, Lambert Blum,
Claire Heggen, Frits Vogels, Jacques Templeraud, Philippe Henry,
Jean Paul Céalis, Robert Steijn et Martina Leeker. Editions du Theater
Institut Nederland, 1998.
Autres documents :
- Chaosmos ou l’harmonie des sphères, un spectacle des remouleurs,
octobre 1989. Dossier de la compagnie.
- Jouer la matière / écrire par la matière, 3e édition des Journées
professionnelles de la marionnette à Clichy, 2011
- Matières à jouer, matières à penser, 3emes rencontres nationales.
- Les cahiers de l’atelier Arts-Sciences n°6,
- CONTRERAS ELVIRA, Ana: “Ciencia y magia en el teatro español del
Siglo XVIII”. ADE Teatro nº132, Septiembre-Octubre 201, pp. 145-155.
Livres :
- Métamorphoses, la marionnette au XXème siècle, Henryk Jurkowsky.
Editions Institut Internationale de la Marionnette, 2000.
- Projet de la matière - Odile Duboc : mémoires d’une oeuvre
chorégraphique, Julie Perin.
- Le théâtre d’objet : à la recherche du théâtre d’objet, Carrignon
Christian, Mattéoli, Jean-Luc. Encyclopédie fragmentée de la
marionnette ; volume 2, Editions THEMAA, 2009.
- Le théâtre d’objet : mode d’emploi, Carrignon Christian, Editions
Théâtre de cuisine, 2000.
- Le grand repertoire – Machines de spectacle, François Delarozière,
Actes sud, 2003.
- Le Corps poétique, Jacques Lecocq, Actes Sud-Papiers, 1999.
- Le lustre de la main – Esprit, matière et techniques de la peinture,
Pincas Abraham et colaborateurs. Ecole nationale supérieure de
Beaux –Arts, Paris / EREC. Puteaux, 1991.
- Petit traité de scénographie, maison de la culture de loire-atlantique,
éditions joca seria, 2007.
- La science en culture : le détour par l’art. Pratiques de médiation
scientifique. Groupe Traces, Atomes Crochus, 2011.
- El teatre impossible, per a una fenomenologia del teatre de figures.
Werner Koedgen, Institut del teatre de la Diputació de Barcelona.
Internet :
http://www.a-r-n.org/Accueil_A.R.N.html
http://www.culture-routes.lu/php/fo_index.php?dest=bd_pa_
det&id=00000020
http://www.contreciel.fr/spectacle/lebloui/
http://www.saisonsdelamarionnette.fr/2010/10/08/matieres-ajouer-matieres-a-penser/
Audiovisuel :
- Présentation de Gilbert Meyer, élève de la 1è promotion de
l’ESNAM.
- Atelier dirigé par François Lazaro et Philippe Rodriguez-Jorda avec
les étudiants de la 5° promotion de l’ESNAM :
- Solos
- Stage : L’ acteur, le danseur et la matière (3) : Atelier Philippe Genty
et Mary Underwood, 1992.
XLVII
atelier matières à construire
XLVIII
recherche
Merci à l’Institut International de la Marionnette à Charleville Mézières qui
nous a accueilli en résidence à la Ville Aubilly et qui nous a facilité tous les
documents pour mener cette recherche.
Merci à l’équipe amàco qui nous a soutenu tout le long de cette
recherche.
XLIX
Núria Alvarez Coll et Miguel García Carabias, responsables artistiques du Colectivo Terrón devant la Ville
Aubilly à Charleville Mezières.
Porteur d’histoires, colporteur d’avenir, le Colectivo Terrón étire à son maximum la puissance expressive de la matière : terre, eau, sable... Par ses créations, il détourne, retourne et transforme le regard sur ces matériaux pauvres, ordinaires, banals, oubliés ou le plus souvent ignorés.
De la fusion entre théâtre d’ombres et choréographie, entre narration et abstraction, sens et
forme, les spectateurs sécouvrent les multiples potentialités expressives de ces éléments par
une approche et une pratique artistiques.
Le Collectif Terrón et amàco travaillent en parternariat avec l’objectif de tisser le lien entre
art, science et spectacle. Depuis 2012 des outils artistiques et pédagogiques pour favoriser
l’utilisation de matériaux naturels et peu transformés dans la construction. Les outils d’amàco
& le Colectivo Terrón peuvent pendre la forme d’ateliers sensoriels, d’ateliers de créativité, de
spectacles ou d’installations ayant en commun la mise en évidence du comportement physico-chimique des matières naturelles et leur beauté multi-sensorielle.
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